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Tommy-kun
#52
J'en profite pour élargir le sujet afin de mieux me recentrer dessus.

Nous vivons dans une société imprégnée par la culture du viol. Cela se voit particulièrement dans les rapports de séduction homme/femme :

Afin de ne pas se galvauder et passer pour des "salopes", la stratégie de séduction féminine se réduit souvent à : 1) être aussi jolies que possible (séduction tous azimuts qui vise à la fois personne et tout le monde) et 2) afficher des marques discrètes de disponibilité à celui qu'elles veulent séduire, en attendant qu'il fasse le job. Ça a énormément d'effets négatifs et je pourrais écrire des pages là dessus, mais notamment, ça met les hommes en situation de devoir interpréter les "signes" (façon "ta bouche dit non mais ton corps dit oui"…), et le consentement se résume à tenter des trucs "tant qu'elle ne dit pas non" (et encore, voir point précédent).

Nous avons érotisé le non-dit. On joue en permanence sur la faille, au bord du viol. Quand ça "tombe bien" ça peut être très grisant, encore faut-il que ça "tombe bien", ce qui est loin d'être toujours le cas.

À l'inverse, il peut y avoir un érotisme parfaitement insoutenable au consentement explicite. À se mouiller, à tous les sens du terme. Et cet abord des choses me semble autrement plus sain et positif que la zone grise. Parce que ça peut mettre tout le monde à égalité sur le rapport de séduction. Parce que ça laisserait le droit de désirer aux femmes, et d'être désirables aux hommes. Parce que ça donnerait une idée aux hommes de ce que c'est d'être du côté receveur de sollicitations non désirées. Parce que ça donnerait une idée aux femmes de ce que c'est que de vraiment risquer son orgueil face au vrai râteau. Parce que ça ferait prendre conscience aux hommes que non, ils ne sont pas les queutards invétérés qu'on les somme d'être. Parce que ça ferait prendre conscience aux femmes que oui, elles ont des désirs et qu'ils n'ont rien de honteux. Et parce qu'elles auraient également bien d'autres moyens de séduire (et d'avoir de la valeur) qu'à travers leur seule plastique (voir https://www.youtube.com/watch?v=xPAat-T1uhE )

Après tout, le consentement explicite, verbaliser les choses, ne fait que mettre en paroles ce qu'on met jusqu'ici en actes. Le basculement peut aussi bien se déporter sur un autre terrain, avec ses propres risques. Il est tout de même curieux et révélateur qu'on préfère encore risquer l'agression (qu'elle vienne d'un malentendu ou non) que risquer l'humiliation d'un refus. Mais verbaliser est plus difficile, parce que le surmoi a plus de prise sur le langage que sur les gestes, et qu'il faut être capable d'assumer ses envies, non seulement de manière consciente, mais même de manière publique. Etonnamment, la parole est plus impliquante que le geste. Justement parce qu'on peut toujours se réfugier derrière le malentendu pour sauver la face avec le geste, beaucoup moins avec la parole ("haha tu m'as pris au sérieux ?" ça marche jusqu'en sixième).

Finalement il y a beaucoup d'orgueil mal placé et d'immaturité dans tout ça. On n'assume ni ses envies, ni le rejet potentiel. C'est moins "magique" ? Mais on n'a plus quatre ans ! Et c'est bien ça qui peut être très sexy dans le consentement explicite, justement : assumer, en adultes. C'est à nous de créer une culture du consentement.

On joue tellement à ne pas se parler sincèrement qu'on en finit par occulter que c'est précisément ça qui fait que les couples marchent ou non. Les couples naissent dans le non-dit, mais ils en meurent aussi. Attendre de l'autre qu'il soit télépathe, et lui en vouloir qu'il ne le soit pas, c'est déloyal par nature.
Dernière modification le 27/02/2015 08:30:51 par Tommy-kun.
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