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marina001
#36
Sadomasochisme, féminisme, et normes opposées
Un document très intéressant qui, en partant d'une analyse du clivage féministe en matière de sadomasochisme (les « radicales » qui sont contre, les « pro-sex » qui ne sont pas contre) pose le problème sous un angle intéressant : l'auteure constate que le consentement éclairé, le désir individuel, sont soit niés par les radicales, soit considérés comme allant de soi par les pro-sex. Pour les unes, la femme qui consent à une relation sadomasochiste est manipulée par un homme, pour les autres, elle a la science infuse et sait à l'avance, avec exactitude, ce qui va se passer lors de cette relation. En définitive, le sadomasochisme serait une pratique sexuelle complètement normée : elle relève soit, première option, d'un viol plus ou moins bien camouflé sous des falbalas intellectuels, soit, seconde option, d'une osmose tellement parfaite qu'elle serait la quintessence du sexe. Ces deux normes possibles sont exclusives l'une de l'autre. Toutes les femmes en enfer, ou toutes au paradis !
https://via.library.depaul.edu/cgi/viewcontent.cgi?referer=&httpsredir=1&article=1018&context=jwgl
Ce que moi je constate, c'est qu'aucune bdsm'er réelle n'accorde la moindre valeur à cette dichotomie. Comme si la pratique permettait de voir qui sont les bdsm'ers - des individus – plutot que de chercher à voir ce qu'ils sont. Il y a juste des gens. Différents les uns des autres. Ayant chacun-e une histoire personnelle, des motivations personnelles, parfois complémentaires, souvent opposées. Des gens biens, des salauds, des ni biens ni salauds, des parfois biens ou parfois salauds… et le BDSM n'a rien à voir là-dedans.
Il serait donc sage, pour les féministes sadomasochistes, de laisser radicales et pro-sex s'écharper sur ce sujet, quand elles ne peuvent exciper d'une quelconque science personnelle du BDSM. Après tout, l'avis des Candides importe peu !
Sauf que… L'auteure le constate avec beaucoup de pertinence : le BDSM n'est plus depuis longtemps une île isolée du monde. Par exemple, il est de plus en plus présent (le nombre de pratiquants ayant explosé aux USA) en tant que tel devant les tribunaux, quand « ça tourne mal », par accident, bêtise, ou volonté criminelle. Or, la norme que suggèrent les radicales s'y affronte directement avec la norme proposée par les pro-sex. Les DA et les avocats se jettent toujours les mêmes thèmes à la figure. Pour les premiers le consentement n'est que le fruit d'une manipulation, tandis que pour les autres le consentement est tellement éclairé qu'avec ça vous pouvez illuminer New York pendant toute l'année. Et – fait constant - leurs argumentaires reposent systématiquement sur des textes féministes pros ou antis. Paar exemple je peux vous citer UN texte, très vieux, écrit par une radicale qui n'a jamais mis les pieds dans un donjon de sa vie, qui est cité dans TOUS les procès dans lesquels un jeu BDSM est à l'origine d'un dol.
En tant que féministes pratiquant le sadomasochisme (il serait à mon avis idiot de se définir en tant que sadomasochistes pratiquant le féminisme) il est de notre devoir de présenter une thèse tirée du vécu, du réel : le BDSM n'est pas, ne doit pas être, un totem symbolisant l'oppression de la femme, ou au contraire la liberté sexuelle de la femme.
Dernière modification le 05/01/2019 06:50:13 par marina001.
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