Scénario versus munch & play
Récemment lors d'un munch & play, je me suis retrouvé au fond d'un garage, au milieu d'une faune disparate, entre autres créatures : deux baleines déguisées en ballon de baudruche dans des combinaisons latex et une lapine avec un martinet en forme de carotte à la ceinture.
Ça rigole, ça discute, ça s'amuse. C'est la fête à Neu-Neu.
Dans les soirées festives commerciales, même si l'organisateur prétexte un thème, en réalité il n'y a pas pas de trame, pas de cohérence.
Les participants paient pour consommer une pâle évocation du BDSM.
Chacun fait ce qui lui plaît. Personnellement, je préfère les scenarii.
Ce texte n'est pas un vade-mecum. Je présente ici mon expérience de la conception d'un scénario.
Vous l'aurez compris, un scénario n'est pas une soirée festive. Le jeu, le divertissement, la fête ne sont pas des objectifs. Un scénario est d'abord une aventure où le lien D/s est essentiel.
Un scénario est bon lorsqu'il parvient à relier les participants dans une toile invisible. Pour tisser cette toile, il faut réunir à minima trois conditions.
La première condition, probablement la plus importante : les participants doivent être compatibles entre eux et compatibles avec le scénario. Ils doivent être fiables dans leur attitude et sincères dans leurs intentions. Ils s'engagent dans l'aventure, en respectent le cadre (le dress code, les horaires, le script, etc...), et partagent cette expérience avec les autres protagonistes : tout le contraire des consommateurs.
Là encore, ce n'est pas une soirée festive : "je paie, je consomme". Le scénario exige de la part des participants, des efforts, du respect, de l'honnêteté.
C'est pourquoi, je prends le temps d'échanger personnellement avant, parfois longtemps avant, avec chaque protagoniste.
Pour l'organisateur, un scénario est un projet qui peut s'avérer complexe. Dans cette complexité, les ressources humaines présentent le plus grand risque d'échec.
La deuxième condition, c'est le lieu. Le lieu doit dégager une atmosphère spécifique qui va peser sur l'expérience des participants. Parfois, le scénario peut changer de lieu en suivant le tempo.
La dernière condition, c'est le tempo. Il y a au moins trois temps dans un scénario : l'entrée en scène, la scène proprement dite, et la sortie de scène.
L'entrée en scène est primordiale. Elle plonge les participants dans l'atmosphère du scénario. Ce tempo, c'est celui du voyage. Un voyage symbolique durant lequel les participants entrent dans le monde des fantasmes. Souvent, j'évite de donner l'adresse de la scène. Je fixe un point de rendez-vous, des instructions précises (bandeau, baillon, vêtements, bracelets et chevillères, etc...) et j'organise un transport vers la scène. L'entrée en scène est un voyage vers un pays fantastique.
Le temps de la scène met l'accent sur l'ambiance. Elle est conçue en partenariat avec les propriétaires des soumises participants. Les pratiques sont accessoires. Encore une fois, ce n'est pas une soirée festive où chacun y va de sa petite démonstration dans son coin. La scène tisse le lien entre le Maître et sa soumise, et la toile avec les autres participants.
La sortie de scène est le temps du bilan et du retour au calme, éventuellement autour d'un apero dînatoire.
En préparant ce texte, j'ai feuilleté mes archives. J'ai de la matière pour rapporter quelques scènes avec les photos et les scripts.