Méridienne d'un soir
par le 24/05/20
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Électre, en grec ancien, ??????? / Êléktra, signifiant "ambrée" est la fille d'Agamemnon
et de Clytemnestre, sœur d'Iphigénie, de Laodicé et d'Oreste. Pendant l'absence de son
père parti au siège de Troie, elle fut maltraitée par sa mère et son amant Egisthe et mariée
malgré elle à un laboureur de Mycènes qui, craignant Oreste, ne consomma jamais cette
union. Lors du meutre d'Agamemnon, elle parvint à sauver son jeune frère Oreste qu'elle
envoya en Phocide, où le roi Strophios l'éleva avec son fils Pylade. Devnu adulte, Oreste,
accompagné de Pylade, revint à Mycènes, se présenta au palais sous un déguisement,
tua Egisthe et Clytemnestre, leur seconde fille Hélène et les fils de Nauplios.
Les diverses versions de ce mythe, exploitées par les auteurs de la période classique, prouvent qu'ils n'étaient
pas prisonniers de leur tradition. Leur version était une nouvelle conception de la légende. Il est peu probable
qu'Oreste tua Clytemnestre. S'il l'avait fait, Homère aurait certainement mentionné le fait et se serait abstenu
de l'appeler "semblable au dieu"; il rapporte seulement qu'Oreste tua Egisthe, dont il célébra la fête funèbre
en même temps que celle de sa détestable mère dans l'Odyssée. Quant au nom d'Électre, ambre, il évoque
le culte du père d'Apollon Hyperboréen qui rappelle que la conception ancienne de la loi matriarcale était
encore en faveur dans la majeure partie de la Grèce.
Fille d'Atlas et de Pléioné, qui aimée de Zeus, tenta de lui résister et se réfugia auprès du Palladion déposé
dans l'Olympe par Athéna. Mais comment échapper à un amant omnipotent ? Zeus s'unit à elle près de la
statue qu'il jeta par terre et qui recueillie par les Troyens, servit de talisman à la ville. De leur union, naquirent
des jumeaux: Dardanos, qui devint le premier roi de Troie, et Iasion qui aima Déméter et fut le père de Ploutos.
Électre a désigné dans la mythologie primitive des Grecs plusieurs personnifications de l'éclat rayonnant du
ciel et des phosphorescences de la mer. Chez Hésiode, elle est une des filles d'Océan et de Téthys, soeur de
Styx; ailleurs, son être est mis en rapport avec Iris, personnification de l'arc-en-ciel; ailleurs encore, elle est
parmi les filles d'Atlas et de Pleioné et désigne l'une des sept Pléiades: elle fut aimée de Zeus, dont elle eut
Jasion et Dardanos; c'est elle qui apporta le Palladium à Troie; elle ne put se consoler de la ruine de cette ville;
les dieux la placèrent parmi les astres, dans la constellation des Pléiades.
Il y a aussi une Electra parmi les cinquante filles de Danaüs. Cependant, ces figures de l'antique naturalisme
des Hellènes se sont effacées devant l'Électre des poètes tragiques, la fille d'Agamemnon et de Clytemnestre,
encore inconnue de l'épopée, mais créée, dans ses traits essentiels, par la poésie lyrique de Stésichore.
Lorsque Agamemnon est assassiné à son retour de Troie par l'épouse adultère et Egisthe, son complice, c'est
Électre qui arrache le jeune Oreste aux mains des meurtriers et l'envoie à l'étranger. Maltraitée par Egisthe et
par la mère, elle mène une existence misérable; toujours fidèle à la mémoire du père, elle aspire au retour
d'Oreste qui sera le vengeur. Elle est membre de la famille des Atrides.
Selon Euripide, qui affectionne les inventions romanesques, elle est mariée de force à un laboureur mycénien,
mais elle obtient qu'il la respecte et la serve avec dévouement. Une fois Oreste de retour, Électre participe au
châtiment. Chez Eschyle, elle est au second plan; mais, chez Sophocle, qui a donné son nom à la tragédie où il
a condensé tous les événements de "L'Orestie" de son prédécesseur, elle a le rôle principal; elle prépare le
meurtre d'Egisthe et de Clytemnestre; elle enflamme Oreste de sa propre ardeur et applaudit à l'exécution.
La reconnaissance du frère et de la soeur est une des plus belles scènes du théâtre grec, et le caractère d'Électre
indomptée, implacable, absorbée dans le souvenir du père, l'amour du frère et la pensée de la vengeance, est ce
que peut-être, l'art dramatique a produit de plus achevé. Une tragédie d'Euripide, portant le nom d'Oreste, prend
le sujet où la tragédie d'Électre, du même poète, l'a laissé; les deux réunies renferment la vie entière de l'héroïne,
mais compliquée d'inventions extraordinaires. Dans l'Oreste, après le meurtre de Clytemnestre, Électre et son frère
n'échappent à la mort décrétée contre eux par le peuple d'Argos que grâce à l'intervention d'Apollon.
Électre comme Oreste participent à un destin qui les dépasse. Derniers maillons de la chaîne de malédictions qui
frappe leur famille depuis Tantale, ils accomplissent un destin familial, celui des Atrides, accumulant faute sur faute
et vengeance sur vengeance. Leur histoire ne se lit donc pas seulement dans une temporalité restreinte car elle
n’est pas uniquement celle d’enfants désireux de venger leur père. Elle est aussi la réalisation d’une malédiction
initiale qui ne peut s’essouffler qu’au terme de cinq générations.
Les poètes s'accordent généralement à marier Électre avec Pylade. Toutes ces péripéties dramatiques ont tenté
plus d'une fois l'imitation des modernes; les tragédies de Longepierre, de Crébillon et, plus près de nous, de
Giraudoux, sont les plus connues. À la fidélité au mythe, Giraudoux a préféré la virtuosité de la transposition,
cherchant à humaniser le mythe par des innovations qui le modernisent à une époque où, précisément, le sacré
est contesté. L’histoire, retracée par l'écrivain, n’oublie pas de s’appuyer sur un jeu de symboles ambivalents.
En dramaturge moderne, Giraudoux, s’il n’a pu éviter la mise en scène de la recherche d’un certain ordre,
inhérente au mythe lui-même, se garde toutefois de promouvoir l’ordre établi. Il oppose au contraire deux ordres:
celui de la collectivité et celui de la conscience individuelle.Il ne propose aucune thèse claire, mais en confronte
plusieurs parmi lesquelles le lecteur doit faire son choix, dans la plus absolue solitude.
Le complexe d’Électre a été proposé par Carl Gustav Jung pour adapter le célèbre complexe d’Œdipe aux femmes.
Tandis que le complexe d’Œdipe fait référence à cet amour, ou peut-être cette obsession, que les garçons ressentent
pour leurs mères, le complexe d’Électre indique ce même amour, mais des filles envers leurs pères. Un complexe
qui se déroule et se manifeste environ entre trois et six ans.
Mais, même si l’on peut penser qu’il dure toute la vie, il est plus habituel qu’il se maintienne pendant deux ou trois
ans pour ensuite disparaître. Le problème apparaîtrait lorsqu’une obsession se maintiendrait, ainsi qu’une recherche
constante du conjoint parfait qui ressemblerait au progéniteur désiré. De cette manière, la femme chercherait à se
sentir protégée, comme avec son père.
Le mythe d'Électre a inspiré de nombreux artistes: des dramaturges, Eschyle, Sophocle, Euripide, Crébillon,
O'Neill, Giraudoux, Yourcenar, Sartre, Cacoyanis, Anouilh, Theodorákis, et récemment Abkarian; des musiciens,
Richard Strauss et des cinéastes, tel Miklós Jancsó.
Bibliographie et références:
- Apollodore, "Épitome"
- Eschyle, "L'Orestie"
- Euripide, "Électre"
- Hésiode, "Théogonie"
- Pausanias, "Description de la Grèce"
- Pindare, "Odes"
- Sophocle, "Électre"
- Stésichore,"Odes"
- O'Neill, "Le deuil sied à Électre"
- Giraudoux, "Électre"
- Broyer, "Le mythe dans le thâtre du XX ème siècle"
- Brunel, "Le mythe d'Électre"
- Yourcenar, "Électre ou la Chute des masques"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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Diab
Des moments troubles de l'histoire Grecque, amour, trahison et malédictions.... Merci et belle journée...
J'aime 24/05/20 Edité
insolence
Encore une fois merci, bises
J'aime 24/05/20