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Elle.a
#19
De marina001
Sadomasochisme, féminismes (au très pluriel) et sexologie.
Lorsque le sadomasochisme US est sorti du placard à la fin des années 1970, à l'initiative de collectifs féministes (lesbiens ou gay males) tels Samois, la LSM, ou la Soma's, on assista immédiatement à une réaction issue à la fois des mouvements conservateurs religieux et des groupes féministes radicaux – sacrée alliance - contre ces freaks ! Cela peut paraître bizarre de nos jours, mais il faut lire des essais comme "Against Sadomasochism, a radical feminist analys" publié en 1982 pour voir à quel point le BDSM était diabolisé, et les féministes « pro-sex » qui ne s'en tenaient pas à l'orthodoxie radicale, vouées aux gémonies. Ce n'était même pas une critique, plutôt un empilage de contre-vérités digne des procès de Moscou en 1937... Mais à tant manier l'insulte et le sophisme les féministes radicales attirèrent trop l'attention.
C. Moser, sexologue, et fille du sexologue du même nom, eut l'idée en 1983 d'exposer le problème dans le "Journal of Sex Research". Prétendre que le sadomasochisme est par essence "patriarcal" revient à faire œuvre de sexologue, le SM n'étant pas une idéologie mais une pratique sexuelle parmi d'autres. Attention, le J.S.R n'est pas d'une lecture facile, loin de là ! C'est de la recherche en sexologie, voyez par vous-mêmes :
https://www.jstor.org/journal/jsexresearch
Moser et d'autres chercheuses-chercheurs mirent en évidence deux points : en sexologie, aucune théorie ne peut être axiomatique : elle doit être démontrée. Or, le fameux essai de 1982 n'était rien de plus qu'un axiome (le BDSM c'est le Diable et le Patriarcat) sans aucun récit vérifiable (pas étonnant, les « récits » étaient tous inventés, Jettner l'avoua par la suite) pour étayer cette démonstration… de toute façon absente ! De plus, Moser se livra à une analyse de texte comparée : le raisonnement des radicales dupliquait exactement celui des conservateurs religieux contre l'homosexualité. Mêmes stances, mêmes insultes catégorielles, même notion d'un bien essentiel opposé à un mal charnel, même absence de démonstration, etc. Pour la petite histoire, on retrouvera d'ailleurs par la suite plusieurs des signataires de l'essai de 1982 parmi les auteures d'ouvrages érigeant la phobie des homos et encore plus des transexuel-l-e-s en véritable dogme.
Cela pourrait paraître un débat académique, mais l'entrée du sadomasochisme comme sujet dans les colonnes du Journal of Sex Research déclencha une vague d'études qui menèrent à une conclusion évidente : le sadomasochisme n'est pas une maladie mentale. Mieux encore, il permit de diffuser largement les idées des féministes pro-sex concernant le sadomasochisme ou le bondage. Cette percée dans la littérature médicale « sérieuse » explique en grande partie le boom du BDSM US à la fin des années 1980,
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