"Je ne me sentais que plus belle, désirable et amoureuse,ces fers ainsi passés à mes poignets, le fouet claquant mes reins"
Histoire d'O. Pauline Réage.
Discrète égérie de la prestigieuse Nouvelle Revue Française,Dominique Aury,alias Pauline Réage,
attendit l'âge de 87 ans pour avouer en 1994,à un journaliste du New-Yorker qu'elle était l'auteur,
sous le nom d'emprunt de Pauline Réage d' "Histoire d'O ",le plus célèbre roman de langue française SM du xxe siècle.
En juin 1954,Histoire d'O parut en toute discrétion.
Son jeune éditeur, Jean-Jacques Pauvert,qui fit connaître le Marquis de Sade,quelques années plus tard était totalement inconnu, tout comme Pauline Réage.
Le succès déferlant de Françoise Sagan avec "Bonjour tristesse" éclipsa en librairie le roman.
En le préfaçant,Jean Paulhan,directeur de la prestigieuse NRF,par sa renommée mit le tout Paris littéraire en émoi.
On s'amusait dans les dîners en ville,à deviner qui se cachait derrière le pseudonyme: Paulhan lui-même (Pauline Réage,à une lettre près,l'anagramme d'Egérie Paulhan),Montherlant,Queneau, Robbe-Grillet,Breton ou même Malraux.
"En tout cas, pas une femme!" s’esclaffait Camus.
Jean Dutourd,ayant déconseillé à Gaston Gallimard d'éditer le sulfureux manuscrit ne pouvait lui être soupçonné.
La remise du prix des Deux-Magots,en 1955, fit éclater le scandale.
Admirateurs (André Pieyre de Mandiargues, Georges Bataille) et détracteurs (François Mauriac, Pierre de Boisdeffre) se déchirèrent.
Information pour outrage aux bonnes mœurs fut même ouverte,mais l'intervention de l'auteur auprès du Ministre de la Justice lui même, calma les esprits.
L'affaire se conclut par une simple triple interdiction de vente aux mineurs, d'affichage et de publicité (levée en 1975).
Mais,en 1975, le réalisateur Just Jaeckin en adaptant le livre,au cinéma, avec Corinne Cléry dans le rôle principal, relança la polémique.
L'Express publiant un cahier photo couleur du long-métrage, ainsi que des extraits du roman accompagnés
d'une longue interview de l'énigmatique Pauline Réage par Régine Deforges.
S'ensuivirent de nombreux désabonnements,une manifestation dans les rues de féministes,ainsi qu'une protestation de l'archevêché de Paris.
Dominique Aury,continuait elle d'arpenter tranquillement la rue Sébastien-Bottin,au numéro cinq de laquelle se trouvait le siège des Editions Gallimard,dans le septième arrondissement.
Car Pauline Réage, de son véritable nom, Anne Cécile Desclos, était la maîtresse semi-clandestine de Jean Paulhan.
"Je n'étais pas jeune, je n'étais pas jolie. Il me fallait trouver d'autres armes!"
Anne Cécile Desclos,dite Dominique Aury alias Pauline Réage, est une femme de lettres française.
Elle est l'auteur d'essais, de préfaces et de poèmes. Un quart de siècle durant, elle a été l'adjointe de la direction de la NRF.
Première femme à occuper ce poste au sein de la prestigieuse maison Gallimard,possédant une réelle influence dans le monde de l'édition française.
Elle fut conseillère en 1974,du Ministre de l’Éducation,en tant que membre du Conseil supérieur de l'enseignement public.
Née en 1907 à Rochefort-sur-Mer,elle fut élevée en Bretagne par sa grand-mère.
Adolescente,elle alimenta une correspondance érotique avec une jeune fille de son âge,tout en tentant de réprimer son ambivalence sexuelle.
Élève au lycée Fénelon à Paris,elle se prit de passion pour la Littérature libertine du XVIII ème siècle.
En particulier pour le personnage de Valmont des "Les liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos.
Elle fut ensuite la première femme admise en khâgne à Condorcet.
Elle poursuivit des études d'anglais en Sorbonne,sympathisant avec les idées du mouvement de la jeune droite maurrassienne.
Elle épousa en 1929, Raymond d'Argila,un jeune aristocrate catalan qui lui donna un fils.
Le mariage se solda par un divorce,son mari la battant,dans des excès de violence.
Elle entretint une relation amoureuse avec l'écrivain engagé,Thierry Maulnier.
Son père, professeur agrégé en anglais,et homme de gauche lui présenta Jean Paulhan,
directeur de la Nouvelle Revue française (NRF).
Employée de Vichy au service de la Résistance,durant la guerre,elle acheva en 1943 une thèse sur "l'Anthologie de la poésie religieuse française".
De l'étroite collaboration avec Paulhan,vingt ans plus âgé qu'elle,naquit une passion amoureuse.
Dominique Aury traduisit divers auteurs anglo-saxons tels Waugh ou Fitzgerald.
Ses traductions contribuèrent à l'introduction d'auteurs anglais modernes dans le monde des lettres françaises. Elle fit également connaître Arthur Koestler.
Atteignant la quarantaine, sentant son amant s'éloigner d'elle,alors qu'il achevait un essai sur Sade,
elle décida d’écrire "Histoired'O" comme une lettre d'amour.
Lui prouvant que les femmes étaient capables d'écrire des romans érotiques.
Ainsi naquît «Histoire d'O,» chef-d'œuvre du classicisme.
Dominique Aury continua sa carrière comme secrétaire générale de la NRF auprès de Paulhan puis de Marcel Arland
et de Georges Lambrichs,enfin avec André Gide dans la revue l'Arche.
Son livre "Lecture pour tous" fut prix de la critique en 1956.
Dominique Aury participa à de nombreux jury littéraires,dont le Femina,et reçut la légion d'honneur des mains du Général de Gaulle.
Elle fut très proche d'Édith Thomas,militante communiste,rebelle au modèle bourgeois,qui succomba à ses avances.
Passée de la mouvance d'extrême droite à la Résistance,soumise avec les hommes mais prédatrice avec les femmes,
elle incarnait une vraie figure de Liberté,dont la devise empruntée à Luther était "Pecca fortiter" (Pèche avec courage).
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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"La maladie a toujours négligé tous les devoirs auxquels est soumise la santé.Nous ne sommes plus nous-mêmes
quand la nature accablée commande à l'âme de souffrir avec le corps".
William Shakespeare. Le Roi Lear II (1606)
Un an après sa sortie de prison,en Avril 1790,Donatien-Alphonse-François,Marquis de Sade,publia une brochure où il proclama:
"Les français veulent être libres et ils le seront."
Aristocrate érudit et révolutionnaire modéré,il connut maintes fois les geôles du royaume pour des actes d'abus
et de sévices sexuels,à l'encontre de femmes parfois aux mœurs légères,et de jeunes filles sans doute trop naïves ou cupides.
L'homme de lettres au libertinage ostensible,fut toujours soutenu jusqu'à sa mort par son épouse,
Renée-Pélagie Cordier de Launay de Montreuil.
"Les cent vingt journées de Sodome,ou l'école du libertinage" fut son premier chef d'œuvre,
rédigé à la prison de la Bastille en 1785.
Dans ce roman inachevé,l'écrivain nous livre le récit paroxystique de l'apprentissage de quarante-deux jeunes gens enlevés
à leurs parents,soumis corps et âme aux fantasmes des maîtres d'un château ancestral,bâti dans la Forêt-Noire allemande.
Pris de compassion pour eux,le lecteur a le choix entre indignation,colère,épouvante ou dégoût.
Inventaire nauséeux de vices,de crimes,d'incestes,de mutilations,de cris et de sang versé.
"Personne,disait Georges Bataille,à moins de rester sourd, n’achève les Cent Vingt Journées que malade."
Prêtant au Duc de Blangis,l'implacable bourreau,maître des femmes détenues et suppliciées,ces propos:
"Examinez votre situation,ce que vous êtes,ce que nous sommes,et que ces réflexions vous fassent frémir,
vous êtes déjà mortes au monde."
Faisant ses universités au fort de Vincennes,Sade décrivit avec une scrupuleuse précision,tel un botaniste et son herbier,
un florilège abominable de perversions sexuelles.
Transféré à la Bastille,il mit au propre ses brouillons sur des trames de papier réunies en rouleau.
À la fin de son travail,Sade annota simplement:
"Cette grande bande a été commencée le 22 Novembre 1785 et finie en trente sept jours."
Le manuscrit autographe écrit au recto,puis au verso se présentait sous la forme d'un rouleau de trente trois feuillets,
collés bout à bout,atteignant une longueur totale de plus de douze mètres.
Entre répulsion instinctive,et respect pour l'oeuvre créatrice,le roman ne laisse pas indemne le lecteur.
Ce texte fleuve de Sade,dans la narration de "passions" sexuelles,d'aberrations repoussantes,de meurtres atroces,
de déviances et de crimes abjects,simples fantasmagories ou réels passages à l’acte,ébranle le lecteur,
autant qu'il le stimule.
De là, débute l'intolérable et diabolique force attractive de l'oeuvre.
Lorsqu'un récit écartèle le désir,plus qu'il ne le satisfait,en dévoilant une affreuseté abyssale, il offre au lecteur abasourdi
deux options.
Soit le rejeter,le recluant dans l'oubli de rayons poussiéreux d'une bibliothèque,soit tenter de le prendre en considération, mais avec circonspection.
Quatre aristocrates,à la fin du règne de Louis XIV "dont la fortune immense est le produit du meurtre et de la concussion",
Le duc de Blangis,un évêque son frère, le président de Curval et un financier Durcet, se cloîtrent dans un domaine,
le château de Silling pour soumettre corps et âme,quarante-deux victimes,de très jeunes filles et garçons.
C'est le récit insoutenable de six cents "perversions" ou "passions" subies par les victimes,dont la plupart périssent dans d’innommables tortures.
L’ouvrage se compose sous la forme d'un journal comportant quatre parties, correspondant chacune à un degré croissant de soumission.
La graduation croissant sur une échelle dans l'atrocité,telle la représentation sismologique de Richter,
du "simple",au "double",puis au "criminel" pour atteindre le stade dévastateur du "meurtrier."
Les six cents cas,à première lecture,semblent sortir tout droit de l'intelligence monstrueuse d’un pervers sexuel.
Entre précision chirurgicale et froideur médico-légale,les mots découpent la chair et l'esprit,tel des scalpels.
Le château de l'horreur devient une morgue pour une jeunesse sacrifiée sur l'autel des "passions".
Les châtelains aristocrates,en mutants sataniques,se métamorphosent en bêtes sauvages.
L'inceste devenant la plus douce des unions de la nature.
Les femmes "bandent", jouissent comme des hommes et livrent du "foutre."
Entre horreur,endurance et sublimation, dans son roman à l'âme noire,inaudible à la morale et à la raison,
Sade livre un chef d'oeuvre.
Grâce à son inimitable talent,il dépeint en réalité l'agonie de la monarchie,l'illusion de la religion,et la relativité des Lois.
En révolutionnaire athée,il participe bien malgré lui, au courant philosophique des Lumières.
L'oeuvre écrite en prison,doit être comprise, comme un acte de libération,une exploration radicale de son inconscient,
freudienne avant l'heure.
Dans son testament, il exprima le vœu:
"… La fosse une fois recouverte, il sera semé dessus des glands, afin que par la suite le terrain de ladite fosse se trouvant regarni, et le taillis se retrouvant fourré comme il l'était auparavant, les traces de ma tombe disparaissent de dessus la surface de la terre, comme je me flatte que ma mémoire s'effacera de l'esprit des hommes."
Dans sa volonté de disparaître de la mémoire des hommes transparaît la logique de défier la mort dans son monde de terreur.
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
N.B: Le cinéaste italien Pasolini,au destin tragique, adapta en 1976 l'oeuvre de Sade
dans un film intitulé "Salò o le centoventi giornate di Sodoma." ("Salò ou les 120 Journées de Sodome.")
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"Il n'y a que deux conduites avec la vie:ou on la rêve ou on l'accomplit ".
René Char.Poésies (1907-1988)
En littérature, il existe des chemins hasardeux,et reconnaissons,qu'il faut une certaine audace, pour tenter d'examiner avec circonspection et objectivité,sans attiser la polémique, l'influence du Marquis de Sade, dans l'univers du BDSM,au début du XXI ème siècle.
En effet,la réflexion ne doit pas se contenter,de légitimer sans recul,les excès cruels de l'homme et la perversité de sa pensée,ou de les rejeter en bloc,mais de les comparer,d'une part à l'idéologie classique fondée sur la liberté et le respect de l'individu,et d'autre part,à la réalité des pratiques contemporaines du BDSM,fondées fondamentalement sur le principe de base du libre consentement.
Ces réserves émises,Il apparaît cependant illusoire d’aborder l'univers du BDSM,en occultant totalement l'oeuvre et la personnalité du Marquis de Sade.
Tant,la mémoire de l'écrivain,libertin,pervers,cruel, amoral mais auteur fécond,libre penseur,précurseur et talentueux,semble dominer de son aura,ce monde étrange et fascinant.
Les adeptes du sadomasochisme,en grande majorité,ont fait de lui,dans leur mode de vie et leurs pratiques,leur figure tutélaire.
Sa création littéraire et de fait,l'homme,représentant pour eux,bon gré mal gré,la quintessence même de leur philosophie et de leurs jeux sexuels.
De même et plus largement,son nom,associé à celui de Léopold Von Sacher-Masoch,écrivain et historien autrichien,est à l'origine du terme sadomasochisme.
Mais si,de son patronyme,fut issu au XIX ème siècle,le néologisme sadisme,considéré en psychiatrie,comme une perversion, gardons en mémoire,cependant,que l'auteur de "La philosophie dans le boudoir" en ignorait l'existence même.
Il n’a jamais connu ce mot, mais a théorisé avec talent, sur les passions,les goûts cruels, les plaisirs de la torture,se contentant d'employer,dans ses récits,le mot "pervers".
Car, c'est le psychiatre allemand,Richard von Krafft-Ebing qui,dans une approche psychanalytique et clinicienne, l'inventa.
Conduisant à entretenir, depuis des controverses passionnelles interminables, incarnant un Sade nouveau,véhiculant tous les fantasmes et légendes,et bien souvent engendrant, un personnage,totalement différent de l'original.
Représenter Sade,positivement ou négativement, par un concept scientifique,de surcroît,à l'acception,
totalement galvaudée de nos jours,conduit fatalement à caricaturer sa pensée en la dénaturant.
La question de l'influence mémorielle de la pensée sadienne sur l'univers du BDSM moderne nécessite de rappeler quelques notions.
Mode de vie,ou philosophie,c'est à la base,une orientation sexuelle, réalisée entre adultes consentants, comportant des pratiques de discipline, de domination et de soumission et/ou de sadomasochisme n'engendrant,en théorie, aucun préjudice physique ou moral pour les pratiquants.
La relation D/S,basée sur la confiance et un respect mutuel,peut se réaliser à long ou à court terme,de façon personnelle ou anonyme,dans lesquels, les partenaires peuvent s'explorer émotionnellement à l'infini.
Une relation D/S peut être sexuelle ou non, intime ou anonyme, contractuelle,par écrit ou non.
Le safeword (mot de passe) permettant de mettre fin à la séance,quand la personne soumise se sent en danger ou souhaite simplement y mettre fin,peut s'avérer utile voire indispensable selon l'intensité de la séance.
Loin d'être exhaustive, la liste des pratiques se résume ainsi: le bondage,l'enfermement,la flagellation,l'utilisation de pinces,de ventouses ou de roulettes,la pose d'aiguilles,de glaçons ou de cire,la dilatation et fisting,l'urtication,l'urolagnie,la scatologie et les lavements.
La D/S peut enfin inclure la servitude domestique qui peut devenir sexuelle,la chasteté forcée,et atteindre le stade de la
déshumanisation,où le ou la soumise est considéré(ée) comme un animal ou objet.
Le fétichisme peut se définir,comme une fixation monopathique,d'adoration et de recherche, d'une satisfaction sexuelle sur une partie définie du corps ou d'un comportement.
Tous les fétichistes ne sont pas soumis et tous les soumis ne sont pas fétichistes.
Peuvent être également cités,le facesitting,le BBW,le dog training,le poney girl et le travestissement (cross-dressing).
Aucune de ces pratiques n'implique obligatoirement en principe, le passage à l'acte sexuel.
Cependant, il arrive très souvent de voir ces activités dénaturées,et représentées, comme de simples composants sexuels à fort caractère érotique.
Conservons surtout à l'esprit que le BDSM est un choix personnel,émanant d'une volonté autonome,et revêtant des formes différentes selon les individus.
L'univers existe pour deux protagonistes,le concepteur,dominant ou dominante et celui ou celle,le soumis ou la soumise qui l'accepte librement.
En résumé, il y a autant de versions de BDSM,que de pratiquants. La diversité fait sa richesse.
La part d'héritage de Sade dans le monde du BDSM contemporain,au delà de tout débat passionnel,de mysticisme ou de denigration,de légende dorée ou noire, pose la question de la possibilité de reproduire ou non,
son univers réel couplé d'une imagination allégorique, sur la pratique moderne du sadomasochisme.
Compte tenu de la cruauté qualifiée de ses actes,historiquement établie,et de l'absence patente de consentement de ses victimes, la réponse est clairement non.
Écrivain libertin talentueux,ou fieffé scélérat débauché,le Marquis de Sade brille,dans sa tentative désespérée,
de mettre à bas,en tant qu'esprit libre et vagabond,un ordre social et religieux,en déclin à la fin du XVIII ème siècle.
Son œuvre, inspirée d'une conscience matérialiste de l'infini,déshumanisant les corps,explore les abîmes sombres de l'âme.
"L’imagination est l’unique berceau des voluptés, elle seule les crée, les dirige;il n’y a plus qu’un physique grossier,imbécile, dans tout ce qu’elle n’inspire ou n’embellit pas".
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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"L'homme est capable de faire ce qu'il est incapable d'imaginer".
René Char, fureur et mystère, Les feuillets d'Hypnos (1948).
Que veut dire aimer Sade ?
Le Marquis de Sade, dans ses récits,met en scène des victimes subissant des souffrances parfois extrêmes,
pouvant conduire à la mort, dans des situations les condamnant à une impuissance totale.
Incestes, sodomies, viols, brûlures, soumission, annihilation des corps, la perversion chez Sade devient heureuse, porteuse de chance et de dons, la vertu elle est malheureuse, cruelle et ingrate.
Dans "La Nouvelle Justine", l’idée de la fuite n’est jamais envisagée par l’héroïne.
Car, chez Sade en particulier, la peur ne fait pas fuir, elle paralyse. Il n’y a rien d’étonnant à ce qu’autant
d’études psychanalytiques, surpassant en nombre les études littéraires, existent sur Sade.
La perversité sadienne, mise en scène dans ses ouvrages libertins, est plus profonde que celle théorisée
par les psychiatres et psychanalystes, qu’elle soit mise en parallèle avec le masochisme ou avec l’innocence.
C’est un jeu complexe entre les personnages, mais surtout entre Sade et le lecteur par le biais de la mise en scène de ses personnages.
Nous pouvons parler de véritable mise en scène,car les textes de Sade sont théâtraux,dans un style emphatique, à mi chemin entre discours et description d'actes sexuels.
Sade établit un réseau de personnages dans un monde d’un matérialisme radical,allant jusqu’à réinventer une "mécanique" sexuelle dans laquelle les femmes "bandent" tout autant que les hommes "foutent".
Son univers est peuplé d’allégories et de concepts dépassant notre appréhension cartésienne des choses.
le mal est partout, et les "honnêtes gens" sont aveugles et en constituent les seules victimes.
Pour Sade, la meilleure façon de prouver matériellement la toute-puissance du mal est de prouver l’absence du bien,
"une erreur et faiblesse humaines dues à la société ".
La toute-puissance du mal existe mais le mal n’existe pas car le bien n’existe pas,
donc la toute-puissance du mal constitue une puissance primitive,à l'état de nature, schéma classique de l'analyse
des philosophes des Lumières au XVIII ème siècle, mais en l'espèce repris de façon radicalement pessimiste.
En effet,selon Rousseau,l'homme naît bon,c'est la Société qui le corrompt.Chez Sade,le bien est une illusion.
Sade ne peut foncièrement pas nier l’existence du mal, mais l’omniscience du mal va l’amener à le légitimer.
"Si, plein d'un respect vain, ridicule et superstitieux pour nos absurdes conventions sociales, il arrive malgré cela que nous n'ayons rencontré que des ronces, où les méchants ne cueillaient que des roses, les gens naturellement vicieux par système, par goût, ou par tempérament, ne calculeront-ils pas, avec assez de vraisemblance, qu'il vaut mieux s'abandonner au vice que d'y résister ?"
(Extrait de "La nouvelle Justine ").
Il ne s’agit donc pas de valoriser le mal, mais de le légitimer pour en faire la seule règle de vie possible.
Le monde réel ne connaît pas de limites dans son discours, servant ainsi l’idéologie sadienne qui prône l’absence
de limites dans les actes.
Le philosophe révèle la cruauté atomique avec une précision chirurgicale, dans une désacralisation des ordres,
plus globalement, dans un cadre de désidéologisation totale du monde,au seul service de l'expression
de la jouissance des âmes,laissant libre cours à sa puissance démoniaque et de son instinct de mort.
Aimer Sade,citant Arthur Rimbaud,c'est le lire "littéralement et dans tous les sens".
Animée d'un esprit pédagogique de clarté ,il nous apparaît nécessaire de ne livrer ici que la liste des œuvres majeures de Sade.
1782 - Dialogue entre un prêtre et un moribond.
1785 - Historiettes, contes et fabliaux.
1785 - Les Cent Vingt Journées de Sodome, ou l’École du libertinage.
1787 - La Vérité.
1787 - Les infortunes de la Vertu.
1791 - Justine ou les Malheurs de la vertu – I.
1791 - Justine ou les Malheurs de la vertu – II.
1795 - Aline et Valcour - Tome I.
1795 - Aline et Valcour - Tome II.
1795 - La Philosophie dans le Boudoir.
1801 - Histoire de Juliette ou les prospérités du vice.
Dans le même esprit,afin de découvrir Sade,nous n'aborderons que les résumés des œuvres suivantes.
"Les infortunés de la Vertu".
"Les Infortunes de la vertu" met en scène les deux chemins possibles que l’on peut prendre dans la vie:
le premier,celui de Juliette, est le choix le plus pur qu’un être puisse faire, celui de se tourner vers ses passions naturelles
et de se laisser aller au crime affreux qui conduit à la fortune.
Le second,celui de Justine (et de Sophie) représente un modèle de vertu, de sentiments d’honnêteté animant les cœurs.
L'auteur met en scène cette dualité constante afin de mieux rendre compte des "bénéfices",
que chaque route procure aux personnages.
Infortunée Justine,infortunée Sophie,si proches et animées des desseins les plus purs, le destin ne leur en offrira aucune récompense.
Sous l'écriture de Sade, ces parangons de vertu vont "goûter" aux pires souffrances et aux tragédies les plus déplorables.
Justine, jeune orpheline élevée au couvent,est parvenue à rester pure et innocente, malgré son dénuement,
et l'abject modèle de sa sœur, devenue courtisane.
Mais une fois prise par plusieurs hommes qui la persécutent, elle se voit contrainte d'être spectatrice des pires perversions.
C'est du fond de sa cellule de la Bastille que Sade écrivit, en 1787, Les Infortunés de la vertu, première version de Justine ou les Malheurs de la vertu.
Dans ce conte philosophique, dont le manuscrit fut exhumé par Apollinaire au début du XXe siècle,
Sade livre, non sans ironie, un récit addictif et enlevé, qu'il double d'un débat philosophique sur le conflit entre classes sociales.
Démontrant que le vice est toujours mieux récompensé que la vertu, libre expression des instincts naturels,fussent-ils mauvais.
"Justine ou les Malheurs de la vertu" - Tome I et II:
Les malheurs de l’infortunée Justine, une orpheline qui, d’abord accusée de vol, enchaîne les mésaventures les plus cruelles.
Tentant de survivre dans ce bas monde, elle ne rencontre que la folie, la traîtrise, la perversité, la couardise et la cruauté.
Malgré tout,Justine demeure attachée à ses valeurs et ne renie ni sa foi ni sa vertu.
L’héroïne est une véritable vierge, violée sur l'autel de la laideur et de la bestialité du monde.
Le lecteur,tout au long du récit,attend une transformation initiatique où l’innocente jeune fille deviendrait à son tour
un bourreau, et abandonnerait sa vertu pour se livrer au vice et à la dépravation, comme sa sœur Juliette.
Mais,ce n‘est pas le cas,car tout au long de son cauchemardesque et immonde parcours, elle conservera sa vertu.
L’originalité de ce livre, tient dans le fait que Justine est le narrateur de l’histoire.
C’est donc elle qui décrit, avec sa vision vertueuse, tous les malheurs qui lui arrivent.
Le récit n'est que poésie et fluidité.
Le style soutenu,rude,addictif mais d'un rare raffinement,sait retranscrire la violence et la perversité avec fascination.
C’est sans nul doute,le chef d’œuvre de la littérature libertine du XVIII ème siècle.
Rejetant la douce nature rousseauiste, Sade dévoile le mal qui est en nous.
La vertueuse Justine fait la confidence de ses malheurs et demeure jusque dans les plus scabreux détails l'incarnation de la vertu.
Apologie du crime, de la liberté des corps comme des esprits, de la cruauté, mais d'une extrême sensibilité
connue seulement par des êtres délicats, l'oeuvre du marquis de Sade étonne ou scandalise.
"Elle paraît bien n'être,qu'un seul cri désespéré, lancé à l'image de la virginité inaccessible, cri enveloppé et comme enchâssé dans un cantique de blasphèmes." écrivit avec finesse,le romancier et essayiste,Pierre Klossowski.
"Allons, la Ro?e, dit Saint-Florent, prends cette gueu?e, & rétrécis-la-moi ; je n’entendais pas cette expre??ion : une cruelle expérience m’en découvrit bientôt le ?ens. La Ro?e me ?ai?it, il me place les reins, ?ur une ?ellette ronde qui n’a pas un pied de diamètre ; là, ?ans autre point d’appui, mes jambes tombent d’un côté, ma tête & mes bras de l’autre ; on fixe mes quatre membres à terre dans le plus grand écart po??ible ; le bourreau qui va rétrécir les voies s’arme d’une longue aiguille au bout de laquelle e?t un fil ciré, & ?ans s’inquiéter ni du ?ang qu’il va répandre, ni des douleurs qu’il va m’occa?ionner, le mon?tre, en face des deux amis que ce ?pectacle amu?e, ferme, au moyen d’une couture, l’entrée du temple de l’Amour ; il me retourne dès qu’il a fini, mon ventre porte ?ur la ?ellette ; mes membres pendent, on les fixe de même, & l’autel indécent de Sodôme ?e barricade de la même maniere ".
Bonne lecture à toutes et à tous,
Méridienne d'un soir,
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Sade appartient à cette pléiade d'hommes de lettres, tel l'aventurier et romancier vénitien, Casanova ou le poète français, Rimbaud à la précocité monstrueuse,dont le mythe et le système de pensée,sont si extravagants, qu'ils dépassent de loin leur production littéraire.
Le Marquis de Sade,à la réputation sulfureuse,longtemps voué à l'anathème,surtout célèbre pour ses ouvrages mêlant érotisme extrême,actes de violence et de cruauté,à des idées philosophiques développées, écrivit des pièces de théâtre,des essais,mais aussi des biographies.
Son nom à lui seul,longtemps inspira rejet et dégoût, son oeuvre fut longtemps interdite et censurée.
Assoiffé de liberté,ne cessant de se révolter contre toute forme d'autorité politique,Sade de façon irréductible,en semant le désordre,s’opposa violemment à la religion, mais également à la peine de mort.
Certaines de ses œuvres, connurent de son vivant («Justine»), un réel succès mais devinrent rapidement censurées,notamment par Napoléon Bonaparte qui considérait ses ouvrages comme «abominables,et infantés par une imagination dépravée».
Sade passant de fait la majeure partie de sa vie en prison,son existence fut vite oubliée.
Seul,Guillaume Apollinaire,publia des extraits de Sade en 1909,dans son son «Introduction à l'oeuvre du Marquis de Sade», pressentant son futur succès, écrivit à propos de lui:
"Cet homme qui parut ne compter pour rien durant tout le XIXe siècle pourrait bien dominer le XX ème siècle".
Clandestine,pendant tout le XIX ème siècle, son œuvre littéraire fut réhabilitée par l'éditeur Jean-Jacques Pauvert,
qui, courageusement,en son nom propre, la publia en 1947,ce qui lui valut des poursuites judiciaires durant plus d'une dizaine d'années.
Elle le fut également, au XIXème siècle,par les surréalistes qui le considèrent,comme un écrivain visionnaire,
oubliant les carcans et l’ordre moral de la société,libérant de façon révolutionnaire l’inspiration créative.
Il existe aujourd'hui un prix littéraire Sade décerné chaque année.
De même,l'oeuvre sadienne publiée dans la Pléiade,consécration littéraire,fait souvent l'objet d'expositions au musée d'Orsay.
Le XX ème siècle,s'est mis enfin, à prendre Le Marquis de Sade au sérieux.
Après l'effroi et l'opprobre,la reconnaissance de sa pensée philosophique et le rôle émancipateur donné au sujet pervers,contribuèrent à faire évoluer le regard porté sur l'homme et son œuvre.
Stendhal lu le premier, avec bienveillance ses récits,dans «Le Rouge et le Noir»,il reprit autour du thème de la mort,le fantasme de la tête tranchée de Mathilde,dans son roman, la reine de France dans «Juliette».
Sainte-Beuve vit en lui un inspirateur clandestin des écrivains modernes.
Sade commença alors à acquérir ses lettres de noblesse,sortant ainsi d'un libertinage de bibliothèque et de salon.
Georges Bataille,écrivain surréaliste, émit seul,des réserves sur le style sadien,critiquant les innombrables répétitions dans les récits de l'auteur, un assommant ressassement qui atteint le paroxysme, dans «Les Cent Vingt Journées de Sodome»,«un blasphème et une maladie au visage».
Paul Eluard se passionna pour Sade, voyant en lui,avec Lautréamont et Breton,l'inspirateur de son œuvre.
Sade revendiqua dans sa création, l'idée d'un esprit enfermé dans un corps rempli de pulsions.
Son oeuvre apparut,dès lors, ne plus résulter d'une folie perverse et immorale, mais bel et bien d'une pensée philosophique sur les profondeurs abyssales du mal.
En projetant les fantasmes de l'Homme, il influença les surréalistes dans leur dénonciation des interdits.
La liberté sadienne sur laquelle repose toute son œuvre les fascina,contribuant ainsi à effacer la réputation sulfureuse et scandaleuse de Sade.
Le courant surréaliste,violemment anticlérical, souhaitant revenir au brut, au sens premier,aux pulsions et aux désirs de l'inconscient, vit en Sade,sa figure tutélaire.
Pour André Breton, Sade fut un "infra-cassable noyau de nuit",un illuminé et révolutionnaire, qui renversa les codes de l'époque.
Les surréalistes incarnèrent dans leurs créations artistiques, le désir, l'inscrivant au plus profond de la chair, jusqu'à l'outrance.
La liberté que Breton, Soupault, Masson, Desnos, Picabia cherchèrent à conquérir à coup de cadavre exquis et d'écriture automatique, Sade l'a mit en pratique un siècle et demi avant eux.
L'auteur de "La Philosophie dans le boudoir » fut en réalité le guide spirituel pour l'esprit libertaire de ce courant culturel.
L'éloge de la perversion se transmettant dans l'art depuis des siècles, Sade engendra les différentes représentations de la décadence chez des sculpteurs,peintres, et dessinateurs.
Sade donna deux bonheurs. Celui d’avoir tout dit et celui d’avoir dit plus que tout.
Nul mieux que lui n’a à la fois rendu compte de la réalité originaire et exprimé les transports de l’imagination.
Obscène dans le sens et dans l’excès de sens, son œuvre a la vertu de poser les choses telles qu’elles sont et le vice de les déborder.
Grâce à lui, l’existence devint pour beaucoup d'intellectuels, plus supportable,en déshumanisant l'esprit par le corps à l’extrême.
L’inversion des valeurs,la saturnale des sexes, le carnaval des excès, dans la négation de l'ordre social devint une fête.
La désacralisation des ordres,et le réinvestissement des idées par les corps,socle bicéphale de la pensée sadienne, apparaissent plus que jamais, modernes aujourd'hui, victoire posthume d'un homme pourtant maudit durant toute sa vie,qui participa sans le savoir,lui même à l'aventure intellectuelle des Lumières du XVIII ème siécle.
« Je ne veux pas faire aimer le vice. Jamais je ne le peindrai que sous les couleurs de l’enfer » Sade.
Bonne Lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
N.B: La liste complète des œuvres de Sade sera l'objet du prochain article.
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"Revenir là où je n’ai jamais été
En rapporter ce que j’ai déjà vu
Aux prises avec l’ignorance ..
Le temps d’arracher les yeux à l’inconnue
Toujours plus fière"
René CHAR, "L’illusion imitée", "Le tombeau des secrets" (1930).
Quand en prison, Sade acheva sa vie,naquit un écrivain,qui en ébranlant un ordre social, sur le déclin,explora
une version répulsive et pervertie, d'une sexualité classique aux rôles amoureux normativement établis.
Son Monde,peuplé d'allégories, et de représentations fantasmées,dépassa notre imagination par une plume superbe,
en surpassant conceptuellement la puissance du mal.
L'analyse de son oeuvre,ne consiste toutefois pas,à valoriser sans recul sa pensée,mais de la comparer,
avec circonscription,dans le contexte libertin de l'époque, à une idéologie en théorie fondée sur la morale,
afin de permettre au lecteur de se forger un jugement objectif.
L'oeuvre sadienne est une mise en scène construite,mentalement et physiquement autour d'une perversion
lascive mais brutale,avec des récits parfois encastrés les uns dans les autres, dans un perpétuel et cadencé balancement,
entre l'imaginaire et le monde réel.
"L’Histoire de Juliette", par exemple, est le récit d’un personnage se situant à la fin de La "Nouvelle Justine",
représentant une histoire plus longue encore que celle dans laquelle elle est incluse.
Pour aborder l'oeuvre de l'écrivain,soulignons en préambule, avec force que la notion de sadisme,néologisme inventé
par le psychiatre allemand,Richard von Krafft-Ebing, à la fin du XIX ème siècle,résulte d'une approche psychanalytique,
s'inscrivant dans une démarche clinicienne,obéissant de façon plus globale,à une idéologie germanique en quête d'ordre.
En effaçant l'homme et l'écrivain par un concept scientifique,on contribue,à dénaturer de façon caricaturale,
la pensée même de Sade,parvenant à une acception du terme totalement galvaudée.
En talentueux psychologue des passions, Sade perça les tréfonds et les élans les plus secrets et inavouables de l'homme
dans ses bassesses et sa perversion, sans épargner le lecteur mais ignora la notion qui n'existait pas.
Le terme pervers apparaît dans les écrits de Sade,le mot sadisme jamais.
Les opinions portées de nos jours, sur Sade, soient-elles laudatives ou réprobatrices sont majoritairement inaptes à fournir
une lecture cohérente, fidèle à l’oeuvre de Sade.
Prétendre que "Sade jouissait sexuellement de la torture et qu'il écrivait la pornographie d’horreur pour justifier
la torture et le meurtre" est une malhonnêteté intellectuelle, doublée d'une contre-vérité.
L'oeuvre sadienne prouve qu’il fut capable de portraiturer littérairement la cruauté, même l’infinitude de la cruauté.
Mais cette capacité, toute seule, ne doit préjuger en rien, de la vie réelle de son auteur pourtant non exempte de déviances.
Personne ne songe jamais, à interpréter la vie de Sade au travers de personnages comme Justine (la vertu torturée)
pleins de bonté ou Zamé, le roi de Tamoë,mais en revanche,on lui accorde volontiers les traits de caractère
des bourreaux des "Cent vingt journées de Sodome".
Sade su décrire, avec autant de talent,la cruauté bestiale et l’obscénité,que les plus hauts degrés de l’amour,
la bonté et la vertu.
La cruauté de ses écrits, se rapportant à la morale et à l’imagination,insista sur l'inadéquation de l'ordre social,
représenté par la frêle,candide,et inadaptée Justine,avec l'univers pervers personnalisé par la cruelle,
impitoyable et cynique Juliette.
Sade n’établit jamais une classification scientifique des dérives sexuelles mais décrivit le dépassement de la nature par une
débordante créativité permissive.
La difficulté morale traditionnelle résulte du non-respect de l’autre.
L’étude du corps dans l'écriture sadienne se fonde,elle sur une jouissance bannissant totalement le respect d’autrui.
La sexualité fantasmée ne connaissant aucun obstacle,ni moral ni corporel,la sexualité dans l'asservissement
de l'auteur de "La Philosophie dans le Boudoir" l'est encore moins.
La plume de Sade,est rapide et haletante,laissant peu de répit au lecteur abasourdi par la succession,en un rythme effréné
d'horreurs,de tortures et de sévices.
Son écriture lui permet tous les excès et tous les écarts. On allonge les supplices,on disloque les corps,
on multiplie les soumissions jusqu'à l'agonie,en surpassant l’endurance des victimes et la performance des bourreaux.
Le style a souvent été boudé, même par ceux qui reconnaissaient son génie et sa valeur transgressive.
On a beaucoup glosé sur les répétitions dans ses écrits.
En réalité,par ce procédé,l'auteur repoussa les limites de la narration,dans son travail de destruction de ses victimes.
Sade décrit l’insupportable pour le louer dans une rhétorique de répulsion et de provocation.
Définissant largement la religion comme une aberration, il lui répond avec la force contenue dans ses récits par des
scènes d'avilissements d'une bestialité blasphématoire et d'un esprit satanique sans borne.
"Il n'y a point de Dieu, il n'y en eut jamais. Cet être chimérique n'exista
que dans la tête des fous ; aucun être raisonnable ne pourra ni le définir, ni
l'admettre ; et il n'y a qu'un sot qui puisse adopter une idée si
prodigieusement contraire à la raison ". (extrait de Justine).
Le libertin détenant un pouvoir inaliénable, physique et mental sur sa victime,le matérialisme philosophique
de l'auteur est dans les écrits,sa meilleure arme,la seule,capable de mettre à bas l'illusion religieuse.
La sodomie (crime passible de la peine de mort à l'époque),est alors omniprésente,tandis que la pratique
du coït conventionnel (seul autorisé à l’époque de Sade), devient iconoclaste et très anecdotique.
L’homosexualité est également très présente, en particulier dans "Juliette".
"Ô mon Dieu,ne suis-je donc née que pour vivre au milieu du crime et de l’infamie,et serait-ce pour exercer ma patience
que votre équité me condamne à de si cruelles épreuves".
On connaît les épreuves que doivent affronter Justine et Juliette, orphelines et ruinées à l'âge de quatorze ans.
Justine, naïve, au caractère sombre et romantique, Juliette, cynique,cruelle et sans pitié.
Repoussée, emprisonnée, calomniée, violée, punie dès qu’elle est vertueuse,c’est l'âme pure,
qu'elle affronte tous les supplices,non résiliente, mais tout au contraire endurante.
Sade,plus soumis que dominateur,au sujet de la sodomie, de la fustigation ou de la coprophilie ?
"Je suis heureux, moi, ma chère depuis que je me livre à tous les crimes de sang-froid ..
Qui sait s’endurcir aux maux d’autrui devient inaccessible aux siens propres ..".
Preuve en est, de la richesse de la personnalité de cet écrivain talentueux,aux multiples facettes,mais tellement attachant.
Dans son essai "Idée sur les romans", Sade écrit "qu'ils servent à peindre les hommes hypocrites et pervers
tels qu’ils sont. Le pinceau du roman saisit l’homme de l’intérieur et la connaissance la plus essentielle qu’il exige
est bien certainement celle de son cœur".
Aimer Sade, c'est le lire "littéralement et dans tous les sens" ,comme l'écrivait Arthur Rimbaud.
prédisant avec Guillaume Apollinaire,que cet homme,tel un phare éclairant la nuit, dominerait le XX ème siècle.
Hommage lui soit rendu,tant encore de nos jours,son talent littéraire et sa radicalité demeurent immense et indépassable.
"On endurcit difficilement un bon cœur, il résiste aux raisonnements d'une mauvaise tête, et ses jouissances le consolent
des faux brillants du bel-esprit". "Justine ou les Malheurs de la vertu" (1791).
Bonne lecture à toutes et à tous,
Méridienne d'un soir.
N.B: la liste complète des œuvres du Marquis de Sade sera incluse dans le prochain article.
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Où trouver la clé du Boudoir de Sade pour tenter d'approcher l'auteur dans sa création littéraire ?
De fait, l'homme ne s'est jamais raconté.
Dans l'ensemble de ses écrits,aucune trace autobiographique, dans l'œuvre libertaire, hostile à toute censure,de réputation fâcheuse, à la plume sauvage,souvent d'une grande beauté,mais en continuel combat, dans la description littérale de scènes bestiales et de tortures d'une rare cruauté.
Sa mémoire est souvent noyée dans un bain de soufre,noircie par les scandales et les clichés associés à son nom.
Né,le 2 Juin 1740, sous le règne de Louis XV,et mort, le 2 Décembre 1814,à quelques mois de l’éphémère avènement de Louis XVIII,juste avant l'épopée des Cents jours napoléoniens,il traversa une période tourmentée de l'Histoire de France,aux régimes politiques multiples,de la Monarchie à la Révolution Française,puis de l'Empire à La Restauration,en passant par la première République.
C'est sur ce décor de profonde mutation sociale,au siècle des Lumières, scène digne du talent de l'écrivain philosophe mais également dramaturge, qu'il planta librement le désordre de son existence, faisant de lui « le plus obscur des hommes célèbres ou le plus célèbre des hommes obscurs ».
Errance d'un homme qui, tout au long de sa vie, rechercha,dans les outrances de ses débauches,au mépris du tumulte provoqué par son écriture,et de sa mise au ban par un ordre social dont il refusait les croyances et les codes,la part sombre de sa vérité.
L'écrivain athée ne voyant dans l'amour que la passion bestiale assouvie dans les plus affreuses tortures infligées à ses victimes,a longtemps été sacrifié par un ordre moral pudibond et bien pensant.
C'est seulement à la fin de sa vie,que pris de mélancolie,il confia un sincère repentir.
En littérature, il existe des liaisons dangereuses,et il faut admettre,qu'il faut une certaine audace, pour approcher avec circonspection,l'oeuvre de Sade,guidée seulement par la seule volonté de la partager sans porter de jugement.
Car de son nom est né le sadisme où se mêlent cruauté et luxure,comme une façon particulière de n'accéder à l'orgasme qu'en infligeant à son partenaire une douleur extrême pour s'octroyer une satisfaction fondée sur la souffrance de l'autre considéré comme un objet.
Consistant à défier la religion et la loi, en tirant plaisir d’une autre forme constitutive de l’accès au plaisir sexuel,en jouissant d'idéaux en négatifs, en allant même parfois jusqu'au meurtre comme crime le plus spectaculaire.
En s'en prenant à des sujets faibles ou fragiles, valorisés dans l'imaginaire collectif, au lieu de leur accorder le respect qui leur est dû, le sadique atteint le summum de sa jouissance;il s’agit là d’un véritable défi en enfreignant la loi morale la plus sacrée,la religion surtout dans le cas de Sade.
À la mort du Régent, les rênes de la France furent confiées au cardinal de Fleury, qui domina la vie politique pendant une quinzaine d’années (1726-1740), en rétablissant une certaine stabilité sociale et économique du pays.
Malgré ses initiatives, la cour de France resta célèbre à l’étranger pour ses pratiques de débauche. Cette attitude libertine fut encouragée par le roi Louis?XV lui-même. Après sa consécration (1723) et son mariage de raison avec la princesse polonaise,Marie Leszczynska (1725), Louis?XV mena une vie particulièrement dissolue dès les premières années de son règne.
Fort du modèle offert par son illustre prédécesseur, Louis?XV parvint à créer un sérail royal,en alternant la fréquentation de ses amantes officielles avec des rendez-vous galants plus occasionnels.
La Marquise de Pompadour, favorite du monarque,secondée par Level, le premier valet de chambre, se chargeait de l'organisation des plaisirs du Roi en gérant la maison du Parc-aux-cerfs où le souverain rencontrait de très jeunes filles, provenant de la bourgeoisie ou du peuple,sélectionnées, par le seul critère de leur exceptionnelle beauté juvénile.
?Il s’agissait d’un véritable harem,où le monarque voluptueux,se livrait à des scènes de débauche et de luxure fort coûteuses,symbole du despotisme monarchiste et de ses dépenses folles.
Il arriva même au Roi,alors âgé de vingt quatre ans,à la stupéfaction de la cour,pourtant dépravée,et malgré l'opposition courroucée du Cardinal de Fleury,son éminence grise, de refuser la confession et la communion.
C'est dire,que Sade,en 1769 quand éclata l'affaire Rose Keller qui fut flagellée,sodomisée,incisée par un couteau,enduite de cire brûlante et forcée à blasphémer, ne faisait que reproduire, certes de façon exacerbée, le comportement de son souverain.
Sade,adepte de la scatologie,et même de pulsions criminelles mais jamais assouvies (fait historiquement prouvé) ne fit qu'irriter davantage, de façon hypocrite,l'ordre social,en descendant de la sphère élevée où sa naissance et son rang,l'avaient placé.
Louis XVI (1774-1792) monarque très pieux et pudibond,qui souhaitait plus de contenance, tenta par son modèle vertueux et irréprochable, de fidélité conjugale,de moraliser la cour au dessus de laquelle, flottait un parfum capiteux de débauche et de subversion.
Mais à cause de sa faible personnalité,celui-ci fut incapable d'imposer la pudicité,ni à ses sujets,nobles et ministres,ni même à sa propre famille.
Les cas les plus frappants sont le Comte d'Artois (futur Charles X),le Prince de Condé et surtout le Duc de Chartres devenu,en 1785, Duc d'Orléans.
Le clivage entre amour conjugal et sexualité alimenta un autre clivage,social et culturel celui-là, entre l’aristocratie et la bourgeoisie, cette dernière ne partageant pas du tout la même vision.
Il se produisit au contraire,un nouvel élan de libertinage parisien, dans les dernières années de l’Ancien Régime.
Dans « Les liaisons dangereuses » (1782), Choderlos de Laclos sublime en Valmont le prototype du libertin, séducteur cynique qui se moque de l’amour-passion et en joue.
En Provence, la noblesse, fragilisée par la récession économique, se voit déclasser au profit d'une bourgeoisie naissante d'armateurs et de négociants.
Sade et Mirabeau en sont les plus criants exemples.
Les terres de La Coste pour le premier,et de Beaumont pour le second voient leurs fermages se dévaluer fortement et pour
conserver leur rang, les deux écrivains libertaires sont contraints de s'endetter lourdement.
Place alors à la contestation.
Les positions de Sade face à la religion,et celles de Mirabeau face à l'arbitraire de la monarchie peuvent se comprendre comme autant
de manifestations visant à transformer leur déchéance en déstabilisation de l'ordre régnant.
De façon consciente ou non, ils élaborent une pensée qui a pour finalité la destruction des principes de l'Ancien Régime.
Pour ces deux nobles,le boudoir est le lieu où les pulsions sexuelles miment les situations résultant d'un état conflictuel avec le pouvoir déclinant.
Les rôles amoureux sont distribués en fonction d'une inégalité politique clairement perceptible: (maître/esclave,oppresseur/opprimé,bourreau/victime)
les comportements exprimés sous la forme du sadisme ou du masochisme ne sont que les reconductions dans le secret de l'alcôve d'une sexualité inquiète.
Ainsi, le sadique peut éprouver le plaisir dans la chute,dans l'humiliation de sa victime ; le masochiste éprouve lui une douleur dans l'acceptation de sa déchéance,et de sa soumission.
Le Directoire,le Consulat puis l'Empire connurent au moins au début un regain d'activité économique dont profita une nouvelle élite, celle de la noblesse d'Empire, et une classe industrielle de riches manufacturiers.
Au sortir de la Terreur,Sade donna à « Justine » une nouvelle édition,encore plus osée et violente,lui faisant connaître des ennuis qui inspira à Restif de La Bretonne une « Anti-Justine » laquelle dépassa Sade dans le genre.
Sade a-t-il écrit « Zoloé et ses deux acolytes », un pamphlet érotique mettant en scène Bonaparte (Orsec) et Joséphine (Zoloé) ?
On le prétendit à l'époque mais en réalité,il convient d'en attribuer la paternité à un dénommé Rosset qui écrivit notamment,
« Les plaisirs de la citoyenne Bonaparte ».
L'Empereur Napoléon Ier éprouva pour le Marquis de Sade jusqu'à la mort de ce dernier à l'asile de Charenton,
le 2 Décembre 1814,une hostilité violente,refusant toutes les demandes de mise en liberté émanant de sa famille.
« La véritable liberté consiste à ne craindre ni les hommes, ni les Dieux » Marquis de Sade
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir
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C'est sous le règne de Louis XV, que naquit à Paris,dans un hôtel particulier, aujourd'hui disparu, le 2 Juin 1740,Donatien, Alphonse, François de Sade,fils de Marie-Éléonore de Maillé et de Jean-Baptiste-Joseph-François, Comte de Sade, seigneur de Saumane,et de La Coste,de vieille noblesse provençale.
Son père fut ambassadeur à Moscou (1730) puis à Londres (1733), avant de devenir aide de camp du Maréchal de Villars,puis en 1739, chargé de mission auprès du Prince-Electeur de Cologne,dans les pays de Gex et de Bresse.
En épousant la nièce du Cardinal de Richelieu,née Maillé de Carman,il sut s'allier flatteusement à la branche cadette de la Maison des Bourbons, assurant ainsi la grandeur du lignage,mais surtout asseoir financièrement son rang.
Mais,c'est en devenant,l'intime confident du Prince de Condé,qui gouverna la France,durant deux ans,après la mort du Régent, qu'il s'éleva dans les salons,à la Cour du Roi.
C'est le petit fils de ce Prince, qui fut fusillé,sur ordre de Napoléon, dans les fossés de Vincennes, après un simulacre de jugement,le 20 Mars 1804.
Le père du Marquis, était un homme élégant qui savait séduire par son érudition,ses traits d'esprit,et sa prodigalité, tout en s'adonnant,de façon libertine, à tous les plaisirs frivoles de la haute noblesse du XVIII ème siècle.
Cause héréditaire des transgressions et du dérèglement pervers, de l'homme de lettres,en ligne directe ?
L'atavisme avunculaire (de l'oncle) se révèle encore plus délicieux à étudier,tant l'oncle de Sade,ami de Voltaire, était un abbé galant,et cultivé,qui après avoir vécu une jeunesse légère et dissolue, revint à la force de l'âge, à des préoccupations plus religieuses,en écrivant en ermite dépouillé,un ouvrage remarquable sur Pétrarque.
C'est sans nul doute lui, qui exerça une influence considérable sur le Marquis de Sade,en lui inculquant une éducation éclectique et non conventionnelle pour l'époque.
Le jeune adolescent, entra ensuite au collège d'Harcourt (actuel lycée Louis le Grand à Paris) où il se passionna pour le théâtre.
Âgé de quatorze ans,et doté d'un titre de noblesse,il entra à l'école préparatoire de cavalerie,en vue d’intégrer le prestigieux régiment des « chevau-légers de la garde ».
Il participa courageusement à la guerre de sept ans,avec le grade de capitaine,tout en commençant à fréquenter à Paris des femmes légères et des actrices.
En vue d'un mariage flatteur, en réalité pour effacer de lourdes dettes, sa famille le força à épouser en 1763,une demoiselle, de petite noblesse, mais dont la famille avait de puissantes relations à la cour de Louis XV.
Elle s'appelait,Renée Pélagie de Montreuil.
Son père était Président de la Cour des Aides.
Marié,le jeune Marquis continua néanmoins, à s'adonner aux plaisirs du libertinage, avec des jeunes filles,qui se soumettaient à lui,lors de séances de flagellation,de sodomie,de brûlures et de blasphème.
Louis XV pardonna la débauche mais non pas les atteintes à la religion.
Quatre mois après son mariage, le 29 octobre, le Marquis de Sade,titre de courtoisie, fut arrêté sur ordre du Roi pour la première fois de sa vie.
Il fut alors incarcéré au donjon de Vincennes pour « débauches outrées en petite maison »,lire maison close.
Sa belle mère,commença à démontrer à son égard,une attitude impitoyable et ne cessa par ses incessantes interventions,de tenter de prolonger son incarcération.
C'est l'intervention de son père qui mit fin,en Novembre,à son emprisonnement.
Libéré, il s'adonna de nouveau au libertinage en fréquentant de séduisantes actrices fort coûteuses,Mademoiselle Colet, Mademoiselle de Beauvoisin,La Dorville,et une danseuse dénommée Leroy.
Toutes les quatre dignes précurseures,des courtisanes de la Belle Epoque.
Au cours de l'année 1767,son premier fils, Louis-Marie, fruit de sa liaison avec la Beauvoisin,vit le jour, et son père décéda,ne lui laissant en réalité que des dettes.
En 1768,il fit la connaissance, à Paris, d'une fileuse de coton, qui faisait l’aumône, dont les charmes allaient le mener sur ordre du Roi,en résidence surveillée au château de Saumur.
Après l'avoir séquestrée,flagellée et sodomisée,moyennant un écu, Rose alors âgée de 36 ans, parvint à s'enfuir,mais finit par se désister contre la somme de 2 400 livres.
La famille de Sade réussit à bloquer la procédure, malgré l'instruction en cours,de la Chambre Criminelle de la Tournelle.
Notons,au passage, que c'est la seule fois dans la vie de Sade, qu'il comparut légalement, en application de la Loi Pénale en vigueur à l'époque,devant un tribunal,en l’occurrence, la Grande Chambre de Paris.
Il fut condamné à une amende de cent livres, et transféré, à la Conciergerie.
Libéré,il demeura jusqu'en 1769 à La Coste, demeure familiale provençale,située aujourd'hui,non loin, de Cavaillon dans le Vaucluse.
Il reprit, les deux années suivantes,sa carrière militaire,alors que naissait sa fille, Madeleine Laure,en 1771,avant d'être emprisonné cette fois, pour dettes non honorées.
En 1772, Sade,fuyant ses créanciers, en compagnie de son valet Latour,se réfugia à Marseille,c'est alors qu'éclata l ' « affaire des quatres filles ».
Outre divers sévices, dont elles se plaignent d'avoir été les victimes, les prostituées accusaient le Marquis d'avoir tenté de les sodomiser (crime passible de la peine de mort à l'époque) et de les empoisonner.
En réalité,elles avaient absorbé de la cantharide officinale,aphrodisiaque, largement répandu et dont Richelieu avait lancé la mode et dont l'effet était de faire grossir les parties génitales.
Plainte ayant été déposée, devant le lieutenant criminel (juge d'instruction de nos jours),un mandat d’arrêt fut lancé contre le Marquis, pour tentative d'empoisonnement et de sodomie.
Le 11 juillet, la police perquisitionna le château de La Coste,déjà en ruine à l'époque.
Le 3 septembre,après instruction,le Marquis et son valet furent condamnés,l'un à avoir la tête tranchée, l'autre à être pendu, leurs corps devant être brûlés et les cendres jetées au vent.
Le 5 Décembre, sur instance du Duc d'Aiguillon,sollicité par son pire ennemie,sa propre belle mère,Madame de Montreuil,Sade fut arrêté pour être conduit au fort de Miolans (situé en Savoie).
En 1773, avec la complicité de sa femme,Renée-Pélagie,qui tenta de casser le jugement à Paris,il parvint à s'évader en compagnie de son valet.
En 1782, il commença la rédaction des « Cent vingt journées de Sodome »,puis l'année suivante, de deux autres comédies,« Le Prédicateur » et « Le Mari crédule », ainsi qu’une tragédie, « Jeanne Laisné ».
En 1785, il acheva l'impression des « Cent vingt journées de Sodome » sous la forme manuscrite d'un rouleau de 12 mètres de long.
En 1787,il écrivit « Les infortunés de la Vertu » en seize jours,puis durant la journée du 2 Juillet 1789,il fut transféré à l'hospice des religieux de Charenton.
Le 14 Juillet 1789, lors de la prise de la Bastille,de nombreux manuscrits lui appartenant furent dispersés.
Le 2 Avril 1790,l'abolition des lettres de cachet par la Convention conduisit à sa libération.
En 1791, il publia « Justine ou les malheurs de la vertu » qui connu un succès retentissant (six éditions en dix ans).
En 1792, malgré son profond dégoût pour les massacres de Septembre,le Marquis de Sade s'engagea en politique, en acceptant d'être nommé commissaire de la section des « Piques »,puis son Vice Président.
Assistant à la Fête de la Fédération,il rédigea de façon talentueuse, un texte favorable au retour du Roi après la fuite à Varennes.
En 1794, la Terreur s'amplifiant,il fut condamné à mort en Juillet,comme aristocrate, mais échappa de peu à la guillotine grâce à une erreur administrative.
En Octobre de la même année, après la chute de Robespierre,le Marquis fut enfin déchargé de tous les chefs d'accusation à son encontre,et rejoint le château de La Coste qui avait été pillé et pratiquement détruit.
En 1795,il regagna Versailles pour y occuper le simple poste de souffleur au Théâtre de la ville et publia « La Philosophie dans le Boudoir »,et ruiné,dû se résigner à vendre la terre de La Coste.
En 1797, Publication de la « Nouvelle Justine ou les Malheurs de la vertu » , suivie de « l'histoire de Juliette, sa sœur ».
En 1800, tous ses biens furent séquestrés sur intervention de Fouché et du Premier Consul, Bonaparte haïssait ce « libertin athée » le considérant comme un monstre, « à enfermer à vie ».
Sade continua cependant à écrire,et publia « Crimes de l'amour » alors dépourvu de toute ressource.
En 1801, tous ses ouvrages furent saisis chez son éditeur Massé.
De Sainte Pélagie,il fut conduit à la maison de Santé de Charenton,où de façon arbitraire,sans aucun jugement,il fut illégalement détenu jusqu'à sa mort.
Le Préfet de Police Dubois estimant « qu'un procès causerait un éclat scandaleux qui ne serait point racheté par une punition exemplaire ».
En 1807, alors qu'il est détenu depuis six ans, sous la surveillance bienveillante du directeur de l'établissement,Monsieur Coulmier,Sade acheva son « Histoire d'Emilie ».
Le nouveau Préfet de Police Pasquier ordonna à son tour, la saisie de son récit « Les journées de Florbelle ».
En 1810, alors que disparaissait la Marquise Renée-Pélagie de Sade, l'homme de lettres, auteur dramatique, organisait grâce à Coulmier,des séances théâtrales,à la Maison de Santé.
De 1812 à 1813, il écrivit « Adélaïde de Brunswick, princesse de Saxe »,puis l'« l'Histoire secrète d'Isabelle de Bavière » et enfin, « La Marquise de Gange ».
En 1814,le Marquis de Sade, alors malade, demanda en vain de nouveau à être libéré, avant de s'éteindre,peu avant midi, le 2 Décembre, en ayant exprimé,dans son testament, la volonté que « sa fosse une fois recouverte soit semée de glands, afin qu'un taillis y pousse et que les traces de sa tombe disparaissent de dessus de la surface de la terre. »
La dernière femme qu'il aima tendrement fut sa Muse, Marie Constance Quesnet, surnommée par lui « Sensible ».
Il entretint avec elle des relations purement platoniques,écrivant lui même, à l'époque « que tout cela le dégouttait à présent autant que cela l'embrasait avant ».
« Dieu merci,penser à autre chose,et je m'en trouve quatre fois plus heureux ».
Bonne lecture à toutes et à tous.
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