Méridienne d'un soir
par le 03/06/20
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Déesse vénérée en Italie centrale, qui présidait à l'épanouissement des fleurs,
elle appartenait au groupe des douze divinités qui exigeaient des sacrifices
expiatoires lors d'évènements extraordinaires. Divinité printanière associée à
l'aubépine, son culte était célébré chaque année, le vingt-huit avril, par des jeux
et des fêtes appelées les "Floralies". Divertissement champêtre à l'origine, elles
prirent rapidement un caractère érotique, avec la poursuite d'animaux symboliques,
boucs, lièvres, et le lancement de graines, symbolisant la fécondité. Dès l'an 173,
du vingt-huit avril au trois mai, on y enjoignit des jeux de cirque, des représentations
théâtrales réputées pour leur extrême licence. Flore fut identifiée à tort avec Chloris,
la nymphe grecque, épouse de Zéphyre, qui offrit à Junon une fleur pouvant la
rendre féconde par simple attouchement. Ainsi naquit Mars; c'est pour cette raison
que le nom du dieu de la guerre fut donné au premier jour du printemps. Une autre
légende fait de Flore une courtisane divinisée par les Romains.
Aujourd’hui, on songe d’abord aux plantes d’agrément. Mais dans l’Antiquité, la floraison des céréales
et des arbres constituait un moment critique en vue des récoltes futures. Le miel était l’un des dons de Flore,
car les abeilles butinent les fleurs pour le produire. Et c’est aussi à elle que l’on devait la fameuse montée de
sève printanière qui parcourt tous les êtres vivants. On pourrait penser que Flore est une allégorie tardive du
foisonnement coloré des jardins et des champs. Il n’en est rien. C’est une déesse dont les origines remontent
au début de l’histoire de Rome et dont on retrouve des traces chez les Sabins comme chez les Samnites.
Malgré l’importance de Flore dans les cultes romains, il existe peu de mythes à son propos. Le principal récit
mettant en scène cette divinité nous est raconté par Ovide, dans les Fastes. Flore serait en fait une nymphe
grecque répondant au nom de Chloris, la "Verte". Sa beauté aurait attiré l’attention de Zéphyr, le vent de l’ouest.
Son frère Borée, le vent du nord, avait commis un rapt à l’encontre de la fille du roi d’Athènes, Orithye. Zéphyr
imite le forfait fraternel et enlève Chloris. Amoureux, il l'épouse et, en guise de cadeau de mariage, il lui offre
des champs dans lesquels se trouve un jardin merveilleux. Il accorde à son son épouse le titre de déesse des
fleurs.
Chloris s’émerveille devant tant de couleurs et de beauté. Bien entendu, les Heures et les Grâces accourent dans
son magnifique jardin pour remplir leurs paniers de fleurs et s’en tresser des couronnes. Ovide nous raconte une
autre histoire, très étrange celle-là, à propos de Flore. Junon était très fâchée parce que son royal époux, Jupiter,
avait mis au monde Minerve sans son aide. La seule manière de laver l’affront était de faire de même. Mais Junon,
en tant que déesse du mariage, ne pouvait décemment pas recourir à la complicité d’un héros complaisant. Elle
décide donc d’aller voir Océan qui, dans sa grande sagesse, pourrait la conseiller.
Flore cueille alors ladite fleur et effleure la déesse de ses pétales. Aussitôt Junon est enceinte de Mars. Pour ceux
qui connaissent les épopées homériques, Héra-Junon est souvent qualifiée de déesse aux yeux de vache (bôpis).
Lactance, un auteur chrétien qui vivait entre 250 et 325 après J.-C., a raconté une histoire sensiblement différente.
Selon lui, Flore était en fait une courtisane qui légua à Rome la fortune gagnée à la sueur de son corps pour instituer
une fête en son honneur, appelée d’après son nom, à savoir les "Floralia". Il en veut pour preuve le spectacle, lors de
ces célébrations, "des courtisanes nues qui, par des postures lascives qu’elles savent diversifier selon l’art des
pantomimes, corrompent les mœurs des spectateurs, et rassasient d’impureté, si l’on ose se servir de ce terme,
les yeux et les oreilles du peuple."
C’est dans la mythologie romaine que le personnage prend de l’importance, Ovide l’ayant associée à Flore, ou Flora,
déesse des Fleurs et du Printemps. Selon le récit qu’il fait dans les Fastes: "Celle que vous appelez Flore était autrefois
Chloris". Comme toutes les divinités associées au renouveau de la nature, Flore est une divinité de la fertilité. Selon
Ovide, c’est elle qui permet à Junon de concevoir Mars sans s’être unie à Jupiter: Flore offrit, à la fin de l'hiver, un lys
enchanté à la déesse Junon. Cette fleur magique permit à la "mère des dieux" de concevoir, par simple contact, le dieu
Mars, seigneur de la guerre et des festivités de Printemps.
Elle préside à l’épanouissement des fleurs sauvages, elle contrôle également les fleurs des champs et, par conséquent,
la vie des campagnes. C’est en effet grâce aux floraisons printanières que naîtront plus tard les récoltes: "Si les blés ont
bien fleuri, les granges seront pleines ; si la vigne a bien fleuri, vous aurez du vin" (les Fastes). Flore fait don du miel
aux hommes: "Le miel est un de mes présents; c’est moi qui appelle, vers la violette et le cytise, et sur les branches
touffues du thym, l’abeille qui d'onnera le miel." Enfin, elle "préside à ces belles années de jeunesse où la vie est
surabondante, où le corps est dans toute sa vigueur."
Flore est célébrée au printemps à Rome: des fêtes sont données en son honneur, les "floralies", pour lesquelles les
participants se ceignent le front de guirlandes de fleurs. Les floralies sont des festivités au caractère licencieux: sous
son apparence de madone, elle demeure la déesse des plaisirs charnels qui ressuscitent au Printemps. Les rencontres
sexuelles étaient nombreuses pendant les jeux qui lui étaient consacrés et les fleurs les plus capiteuses étaient mêlées
au vin en son honneur.
Flore est représentée comme une belle jeune femme portant une couronne de fleurs. À la Renaissance, avec le goût
renouvelé pour les œuvres antiques et les sujets mythologiques, plusieurs peintres s’intéressent aux textes d’Ovide,
et incluent Flore dans leurs peintures. Dans le "Printemps" de Sandro Botticelli, on voit côte à côte, sur la droite de
l’œuvre, Chloris, enlevée par Zéphyr et Flore, qui porte une robe fleurie et une couronne de fleurs. On retrouve Flore
notamment chez Titien et chez Nicolas Poussin, avec le "Triomphe de Flore".
Bibliographie et références:
- Dumézil, "Rituels indo-européens à Rome"
- Lavedan, "Dictionnaire illustré de la mythologie et des antiquités grecques et romaines"
- Lactance, "Proses"
- Le Lydien,"Histoire de Rome"
- Ovide, "Les Fastes"
- Ovide, "Les Floralies"
- Paulius, "Les Floralies"
- Plutarque,"Divinités grecques"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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insolence
joli, bises
J'aime 07/06/20