Coromandel
par le 28/06/22
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Le propre d'un fantasme est-il qu'il nous excite parce qu'il est non réalisé ?
C'est le désirer, l'attendre, parfois le culpabiliser ou le craindre qui fait sa force. C'est quelque chose de très mental, dont on a souvent déjà imaginé les tenants abouttissants de nombreuses fois, un rêve qu'on entretient pour ce qu'il est : quelque chose d'interdit, d'innateignable mais que l'on considère pourtant possible.
Dans tout les cas c'est quelque chose de personnel, d'intime, subjectif.
Pour toutes ces raisons, le réaliser peut être souvent grandement décevant car la réalité ne se produit pas toujours exactement comme on l'aurait désiré.
Parfois on parvient à créer les conditions exactes de notre fantasme et c'est alors des moments d'une rare et puissante jouissance.
La différence avec les désirs, c'est que les désirs s'estompent généralement une fois assouvis.
Mais les fantasmes : même une fois réalisés, ils perdurent. Je dirais même qu'une fois devenus réels, ils grandissent, s'enrichissent, se précisent et se multiplient !
Comme les émotions sont des reflexes, et les sentiments des constructions d'émotions produisant une histoire ( sentiment amoureux = désir, fusion, crainte, jalousie, plaisir etc ) ; les fantasmes sont eux aussi des constructions de désirs qui restent en nous même une fois qu'on les a vécu. Tout comme la succession des émotions du sentiment amoureux ne font pas disparaître le sentiment.
Maintenant la question : doit-on les vivre ?
Ça dépend !
Chercher obsessionnellement à ne réaliser que ses fantasmes a deux inconvénients :
- Le premier étant qu'alors on utilise notre/nos partenaires comme des moyens, des outils nous servant à réaliser notre plaisir unique.
Si le bail est clair et consentis par les deux partis : ok !
Mais attention tout de même à être donc sur la même longueur d'onde.
-Le second écueil est la déception. Car souvent le fond véritable du fantasme nous échappe !
Certains fantasmes simples sont liés à des sollicitations de sensations. C'est assez mécaniquement réalisable et il y a peu de chance de se tromper.
Mais certains fantasmes sont très subtils et profonds ; tant qu'ils touchent en fait quelque chose d'inconscient et d'émminement psychologique. C'est alors que peuvent se produire des obsessions et des frustrations et déceptions destructrices.
Du coup dans tout les cas je concluerais de cette manière :
Ce qui m'importe est moins de réaliser exactement mes fantasmes que de chercher à m'en rapprocher !
Comme la destination terminale d'une longue randonnée, je sais que je souhaite l'atteindre mais je m'amuse à chaque pas et à chaque croisement en me dirigeant vers, en me voyant progresser !
Comme un phare éclairant mes attentes et angoisses, mes fantasmes guident mes pratiques. J'aime emmener mes partenaires et moi même sur le chemin de leurs/mes/nos fantasmes, nous en approcher, même les réaliser ! Car il faut bien atteindre la destination qu'on s'est fixé ! Pourvus qu'en chemin on ait pris du plaisir pour y arriver ! Et ne pas avoir simplement foncer bille en tête pour arriver au plus vite et s'essoufler ...
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Lorsque l'on s'interroge sur nos fantasmes, à mon sens c'est la sexualité dans son ensemble que l'on interroge. Au fond, la sexualité est un exutoire, car elle a pour finalité le plaisir. Si je parle pour moi, elle l'est. Or, tout exutoire n'est pas parfait/safe/sain/... doit-on vivre (tous) ses fantasmes ? Ce qu'il serait bon d'interroger, c'est ce qu'il se passe autour d'eux : le contexte me semble essentiel. Suis-je mes fantasmes ? Peut-être pendant un instant, mais que se passe-t-il en dehors du domaine charnel ? Ma démarche ne s'inscrit-elle pas dans une dualité ? Une femme ayant des penchants pour la soumission est-elle une femme soumise ? Certainement pas. Peut-être est-elle fatiguée de mener ses employés à la baguette 24h/24 et a besoin/envie de lâcher prise, d'être menée à la baguette. Une femme sadique ne peut-elle pas être empathique ? À mon humble sens, une partie de la réponse est question d'équilibre. Yin, Yang, d'où l'exutoire. Aussi, nos fantasmes peuvent être en totale contradiction avec notre personnalité. Ensuite, nos fantasmes nous aident à nous approprier la réalité/ imaginer une réalité, comme un jeu vidéo où l'on est libre de prendre le rôle de notre choix. Je pense que le sexe est un formidable moyen de se connecter avec soi, donc les autres parce qu'il a cette capacité à redéfinir les choses. Prenons une dynamique de type sadique/degradee : le sexe a la capacité de transformer/ou plutôt d'allier souffrance et plaisir/récompense/leçon. Prenons cela (peu importe que nous nous trouvions du côté s ou d), appliquons à notre vie quotidienne, résultat : sérénité, relativisme, intelligence émotionnelle. Je trouve cela absolument magnifique. Le sexe peut nous réconcilier avec la violence, nous permettre de nous affirmer, d'être plus flexible, de savoir donner ou recevoir davantage, ... et je ne sais encore. Voilà pourquoi tant de cultures/gouvernements condamnent les sexualités non-conventionnelles, et voilà pourquoi tant de gens ont peur de leurs fantasmes, parce qu'il s'agit de la liberté suprême : redéfinir les choses en dehors de toute norme établie, progresser en continu intellectuellement et émotionnellement, prendre soin de soi et s'écouter. Trop de liberté, ça fait peur aux fachistes, mais encore plus à soi-même puisqu'il s'agit de sauter à pieds joints dans l'inconnu. Pour en revenir à la réflexion de départ : tout exutoire n'est pas safe, sain(il peut être dangereux, humiliant, offensant, sordide, illégal, ...). Ainsi, le choix du partenaire et des conditions (safe word, ...) est essentiel. Ensuite, le fantasme lui-même n'est pas à prendre au mot, il me semble. Comme vous l'avez si bien dit, le fantasme est un guide. S'il mon fantasme me paraît sordide, je l'interroge cinq minutes et je me rends compte que je peux le rendre plus safe, plus fou, ... et je ne sais encore. Pour conclure, je crois que demeurer à l'écoute de ses fantasmes est essentiel à un bon épanouissement. D'ailleurs, le bdsm exige de nous, je pense, une intelligence émotionnelle certaine. Enfin, interroger ses fantasmes sans être trop téméraire est important, pour ne pas : faire qqc que l'on regretterait ou qui nous ferait du mal, voire nous traumatiserait, ou qui blesserait à l'inverse notre/nos partenaire-s.
J'aime 29/06/22
J'ai l'impression d'en avoir trop dit, et en même temps pas assez. J'aimerais ajouter que redéfinir va plus loin que redéfinir ce que l'on ressent, il s'agit de redéfinir l'ensemble des pratiques sexuelles : en effet, dans une dynamique soumis/dominant, celui qui joue le rôle du soumis décide tout autant que celui qui domine. À méditer, pour les rageux de type "être au-dessus ça veut dire qu'on est le plus fort"... D'ailleurs, nos fantasmes étant des histoires, des mises en scène, nous ne sommes que des personnages. Je pense que nos fantasmes sont à relativiser 1f642.png
J'aime 29/06/22
J'approuve également votre idée, qui veut que le fantasme soit la suite, voire l'évolution du désir brut.
J'aime 29/06/22
Coromandel
Merci Riggerous d'avoir ajouter votre pierre à l'édifice 1f642.png Votre reflexion sur la liberté de fantasmer est intéressante 1f609.png Ravis que ce texte vous ai donné à refléchir et à partager 1f642.png paix et amour
J'aime 30/06/22