Main des Larmes
par le 10/01/24
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Je lis souvent des louanges sur la prise de décision du "savoir tourner la page", force de caractère du lecteur, vision de l'avenir, ne pas s'appesantir sur le passé, avancer....
Et si rarement des vertus de batisseur, affronter les difficultés, accepter l'autre avec ce qui nous plait mais aussi ce qui nous attire moins, construire plutot que détruire, vivre le présent plutot que rechercher sans cesse un futur idéalisé.
Oublie t'on souvent que nous ne sommes pas que lecteur de notre relation, pas seulement profiteurs, jouisseurs, mais écrivains de l'histoire commune?

La page n'est pas à lire mais à écrire, à 4 mains, et ce n'est pas un passé qu'il vaudrait mieux au nom de préceptes égoistes, savoir oublier plutot que peaufiner, améliorer le texte, en vivre le présent avec toutes ses nuances parfois grises et probablement meme, toujours.

Abandonner...
Solution de facilité qu'il parait utile de glorifier au nom de la force de caractère. Savoir dire adieu à coups de mots pompeux sur fond de musique nostalgique et émouvante, cela reste un clap de fin, un adieu, une capitulation, un abandon de l'autre qui pour x raisons n'intéresse plus le lecteur. On a beau laisser un texte mélancolique pour la postérité, et surtout soigner notre respectabilité sociale en vue de la page suivante, en guise de pansement et de reconnaissance affichée de l'autre et de la belle histoire passée, on l'abandonne avec de jolies fleurs qui puent.

Société de zapping...
On aime: on prend. On n'aime plus: on jete et on part chercher ailleurs...
Les motifs de grisaille deviennent de plus en plus ténus, vite, vite, vite, ne nous appesantissons plus à regarder de longues videos, des "shorts" c'est plus sexy.
On consomme notre vie, on ne prend plus le temps de la savourer, de la construire, et joue contre joue de sillonner un chemin parfois scabreux mais vers un objectif commun de le rendre paisible pour l'autre et radieuse à deux.
On consomme des sentiments, parce qu'ils nous réchauffent le coeur, et au moindre frimas on part.

Fainéantise égoiste...


Aucune généralisation dans ces mots mais une tendance. Chaque histoire est particulière, évidemment. 
Aucune moralisation non plus, simple mais cruel constat de valeurs déplacées.

6 personnes aiment ça.
sylvie35
En effet, je suis souvent agacée par les incitations à zapper d'un sujet à l'autre, d'un partenaire à l'autre, la capacité à zapper, à prendre des décisions vite fait, à s'engager à la légère, étant présentée comme une "force de caractère". S'il faut bien sûr parfois savoir faire le deuil d'une relation ou d'un projet visiblement voué à l'échec, vivre sa vie de manière superficielle, en consommateur égoïste à la recherche du plaisir immédiat (et "après moi le déluge"), prendre des décisions sans réfléchir profondément à ce à quoi on s'engage, est tout le contraire de la véritable force de caractère.
J'aime 10/01/24
StellaMaris de Ngu59fr
Bonsoir Main des Larmes, Quand je tourne la page d’une histoire c’est que ça m’est nécessaire pour avancer. Cela ne veut pas dire que j’efface et que je recommence, ça ne veut pas dire que je renie ou que j’oublie et cela peut aussi dire que j’ai fait le deuil ou que j’ai pardonné. Ce n’est pas forcément abandonner et c’est parfois salutaire pour les deux parties. Tout est question de forme et de retenue. Une relation qui se termine, quelle qu’elle soit, est rarement due à un seul bord. Plus j’avance et plus je me centre sur mes essentiels, mes enfants, mon Maître et mes quelques précieux Amis. Je pense être fidèle et malgré mon caractère, je pense être honnête. Si une relation doit se terminer, je préfère parfois le dire clairement, sans détour et en général calmement. Je suis incapable de supporter des faux-semblants et l’hypocrisie du « pour sauvegarder les apparences ». Les personnes qui comptent particulièrement dans ma vie sont rares, j’en ai perdu une aujourd’hui et je mesure chaque jour combien chacune d’entre elles est précieuse.
J'aime 10/01/24
Main des Larmes
Bonjour StellaMaris. Oui et c'est bien pour ca que j'ai terminé ma réflexion par "Aucune généralisation dans ces mots mais une tendance. Chaque histoire est particulière". Ce que je déplore c'est la tendance accélératrice de notre société, et elle se répercute sur ce "tourner de page" que je trouve du coup bien trop "glorifié" au mépris de l'écriture commune, de la patience, de la ténacité et persévérance, de l'écoute de l'autre et de son acceptation dans ce qu'il a d'humanité donc d'imperfections. Aujourd'hui si une anicroche survient c'est souvent se séparer le réflexe, je pense trop souvent...
J'aime 11/01/24
Boutdhomme
Merci pour ce sujet passionnant et les premiers échanges. Peut être que cela me touche particulièrement, ayant subi une rupture très fraîche. On s'en remet...et je comprends même l'autre et pourquoi c'est arrivé. mais tellement d'amertume quand même que nous n'ayons pu tenter quelque chose.
J'aime 11/01/24
Do_ux_minateur
Je pense que plus que jamais, il est urgent de savoir prendre son temps & réinjecter de la lenteur.
J'aime 20/02/24
Marie
A l’époque de nos grands parents, lorsque les choses se cassaient, on les réparait, on ne les jetait pas.
J'aime 21/02/24
StellaMaris de Ngu59fr
Marie, beaucoup de personnes continuent à réparer. Mon père reprisait les chaussettes. Je me souviens du jour où je cherchais juste une prise pour changer celle de mon chargeur d’ordinateur et que le responsable de rayon me disait qu’il fallait racheter un chargeur complet… J’en ai eu pour quelques euros et juste à dévisser et à viser après avoir mois les fils en place. Étant une spécialiste du découpage de fil au taille-haie électrique je savais très bien à quel point faire ce genre de réparation est d’une simplicité enfantine. Ignorance, flemme je ne sais pas mais plus je vieillis et plus je me pose, je regarde, j’écoute les petites choses. La fast fashion fait des ravages dans le commerce, en terme de pollution et en terme d’exploitation de l’être humain. On veut aller trop vite, trop loin sans penser à l’humain, à la planète, aux animaux… L’information est devenue secondaire face à la course aux scoops, qui amène son lot de nouvelles inexactes, tronquées, voire totalement fausses. J’ai toujours préféré le durable dans tous les domaines. Par contre, dans mes relations, si vraiment le point de non retour est atteint, je préfère le faire clairement savoir et passer à autre chose sans animosité ou regrets. C’est rarissime mais cela peut aussi arriver.
J'aime 21/02/24 Edité
Marie
J’ai eu cette même éducation, @StellaMaris. On ne jette pas, on ne gâche pas. Mes parents, très « vieux jeu » et que j’adore, m’ont appris à respecter les choses et les gens. À apprécier la vie dans ces petits bonheurs qui en font tout le sel!!! Je suis une adapte des choses simples. Je refuse la sophistication et le paraître. J’ai certes un iPhone, par exemple, mais il est vieux de 8 ans et fonctionne à merveille! On peut profiter des facilités de notre monde sans abuser, sans consommer à outrance. Pour ce qui est des relations, j’ai cette « chance » d’être devenue un radar à connards et gens fourbes. Ça facilite les relations: je n’ai que peu d’amis…mais ils le sont! Je peux les appeler à 3h du mat pour aller enterrer un cadavre. Leur seule question sera: on fait ça où? 😂😂😂
J'aime 21/02/24
StellaMaris de Ngu59fr
Nous avons les mêmes amis Marie. 😂🤣
J'aime 21/02/24
Main des Larmes
Merci aux "fossoyeuses" nocturnes pour vos contributions! 1f609.png Stella, pourquoi donc en serait il autrement des relations plutôt que des chaussettes? Évidemment quand il y a plus de trous que de tissus il vaut mieux changer... Mais ce "point de non retour" est une notion si subjective, si relative et fluctuante. Pour certains un regard de travers est inacceptable, ou un désaccord quel qu'il soit. Et il n'y a plus que cela en vue sur la personne en face d'où séparations expéditives. Côté matériel la société est en train de changer en douceur, du moins le mouvement est engagé à entretenir plutôt que jeter sans cesse, parce que l'offre se raréfie et on prend conscience que notre planète n'est pas pourvoyeuse de ressources illimitées. Côté affectif avons nous tous conscience que la vie n'est pas infinie, que tout humain est imparfait, et qu'à tolérer les défauts de l'autre on l'encourage aussi à oublier les siens et à construire de belles relations malgré tout?
J'aime 22/02/24
StellaMaris de Ngu59fr
Dans la vie de tous les jours, je préfère être « consommactrice » que consommatrice. Pour moi, le point de nom retour est atteint quand la relation devient malsaine (irrespect, maltraitance…).
J'aime 22/02/24
Main des Larmes
Jolie formule "consommactrice plutôt que consommatrice"! Évidemment si la violence s'en mele la relation ne peut plus être. Je ne pensais pas à de telles extrémités flagrantes...
J'aime 22/02/24