Il n'est pas question d'accords de branches mais bien de domination. Dès qu'on aborde les relations humaines dans des "cercles BDSM", il y a une grande exaltation fantasmatique de la part des aspirants et même des pratiquants. Ces relations sont imaginées, fantasmées, idéalisées ou interprétées selon des critères, des normes et des valeurs spécifiques, si possible très éloignés du vulgaire "vanille"... D'où des questions hallucinantes sur les droits des soumises (au plaisir?), la valeur éducative de la punition, le devoir de respect et de bienveillance du dom... Et en face, des prétendants BDSMeurs ayant appris tous les codes et méticuleusement écarté toute référence vanille, solidement armés de leur fantasme bien ficelé, tout étonnés de ne pas atteindre le Graal d'une relation BDSM avec tout ce bagage et ces dispositions.Peut être qu'en n'inversant pas les normes et les enjeux, il y aurait moins de confusion, de questionnements et de déception.Tout en haut de la pyramide des enjeux et des valeurs, il y a la relation de base. Sans rencontre et désir réciproque de se rapprocher, pas de relation, éventuellement un échange commercial (donc tarifé) permettant de satisfaire un fantasme BDSM. Donc pour démarrer une relation, quelle qu'elle soit, il faut séduire, être une personne désirable, pas un personnage cherchant à faire valider sa liste de courses (quid de la capacité de séduction d'un homme se définissant comme une carpette indigne et impuissante, prête à se faire mépriser et piétiner par n'importe qui et vénérant le caractère intouchable du temple inaccessible qu'est le corps féminin "si tu possèdes un gode ceinture ça m'intéresse aussi").Ensuite la relation est ce qu'elle est, de l'amour éternel au plan cul, ça commence toujours par un désir, qui s'épanouit ou pas, en complicité, bienveillance, envie de plaire et de faire plaisir... et pendant que j'y suis, je vais ajouter le respect. Je le considère plutôt comme un préalable à toute relation, mais au moins, si on le colle ici dans les valeurs de la relation de base, ça évite de le retrouver un peu partout pour déculpabiliser un désir sadique ou légitimer un comportement limite.Tous ces principes sont mutuels et réciproques dans une relation "durable", le moindre décalage devient un gouffre au premier coup de vent. Une relation "saine" est égalitaire, on peut essayer de le nier pour coller à un fantasme de toute puissance, mais le simple fait de pouvoir y entrer et en sortir par choix personnel, redistribue très équitablement le pouvoir. Même quand on se retrouve un peu au delà du choix (on ne maîtrise pas toujours émotions, sentiments, emprise et vulnérabilité) cela reste très personnel et pas du fait de l'autre.Dans cette relation (toujours vanille), il peut y avoir un rapport de domination. La seule différence notable (par rapport au vanille) est qu'ici la domination est acceptée, revendiquée, actée. C'est là, à mon sens, qu'est tout l'enjeu... l'acceptation explicite par les 2 personnes d'un couple, d'un rapport de domination inégalitaire dans une relation de base égalitaire, sans nier cette relation de base, sans jouer un rôle, sans projeter un fantasme. On est toujours dans le choix (ou un peu au delà) selon son orientation ou ce que l'autre inspire, et on est soi même (pas un personnage surréaliste).Il n'est toujours pas question de pratiques BDSM, de Maître, de Dame, de soumis ou d'esclave, ni de limites ou de sécurité. La D/s peut se traduire par du service et/ou du contrôle dans une sexualité "classique" et/ou du BDSM en tant qu'outil de cette domination.Les pratiques BDSM hors de ce rapport de domination dans une relation de base, sont des jeux, des mises en situations, des réalisations de fantasmes. Je ne vois aucun enjeu ni aucune soumission quand un fétichiste est confronté à son fétiche, un masochiste à sa douleur ou son humiliation, une brat à sa punition tant désirée, un gynarchique à sa frustration... juste un jeu kinky offert par le "dom" pour satisfaire le plaisir du "soum"... "soum" qui, tout en s'en défendant, dirige et maîtrise tous les aspects de sa "soumission", ayant cadré le "dom" par ses limites et bénéficiant du pouvoir de la sanction suprême, le safeword, pour ramener le grand Maître à son statut d'exécutant (je caricature un poil).Ces pratiques peuvent donc être utilisées par le dom ou offertes par le dom, en ou hors domination, consenties et cadrées par le soum. Il n'y a aucun autre enjeu que le plaisir mutuel, plaire et faire plaisir, très vanille! Ça renforce essentiellement la relation de base et libère de toute contrainte le temps d'un rôle, Maîtresse, guide suprême, poney, chienne, esclave, carpette.... rôle joué dans l'intimité ou partagé avec d'autres joueurs consentants (pas de quoi en faire un statut social à balancer à la face de tout interlocuteur non concerné).Si on remet les pratiques et les enjeux à leur véritable place dans la relation (base, rapport de domination ou pas, outil, jeu, fantasme ou fétiche), la plupart des questionnements s'éclaircissent.Par exemple, moi qui suis soumis selon les critères BDSM, je peux montrer mon désir à ma partenaire, initier un rapport sexuel et même la pénétrer (blasphème!) sans lui demander la permission, parce que nous sommes dans une relation de couple. Elle peut me laisser faire, pour la même raison (Ok ce n'est arrivé que 2 fois en 6 ans), ou prendre le contrôle de mon plaisir, en me l'interdisant ou en le retardant, ou passer à des pratiques BDSM que nous aimons pour notre plaisir, ou que je n'aime pas juste pour le sien, ou les 2 pour m'embrouiller et me faire hurler de plaisir pendant quelque chose que je n'aime pas, si possible inacceptable, ou me laisser "finir" pour ne commencer ces pratiques qu'après (au moment où j'ai plus envie de dormir que de me faire tourmenter), etc, etc... Et je n'ai pas besoin de la vouvoyer ou de l'appeler Madame pour la trouver crédible, ce serait même contre-productif, nous sommes les mêmes tout le temps. Tout est possible, il faut juste savoir à quel étage de la relation on se trouve.En relisant quelques échanges entre des prétendants soumis se plaignant de la non considération des rares dominas malgré leurs efforts, je me disais que si un hasard malheureux me poussait à chercher de la compagnie, je "chasserais" plutôt dans mon entourage (ratio plus favorable) en offrant à une femme qui me plaît, mon désir, mes attentions, mon désir de lui plaire et lui faire plaisir jusqu'à ce qu'elle accepte de recevoir ce pouvoir... avant de lui offrir mon visage pour s'essuyer les pieds, mon cul à démonter et ma langue en guise de papier toilette. Tout est question de timing, il faut une certaine intimité avant de pouvoir faire accepter ses travers.Si vous êtes arrivés jusque là, bienvenue dans mon insomnie!
Dernière modification le 27/07/2017 11:07:24 par ange de Vesper.
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