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La rubrique "Articles" regroupe vos histoires BDSM, vos confessions érotiques, vos partages d'expériences SM.
Vos publications sur cette sortie de blog collectif peuvent aborder autant les sujets de la soumission, de la domination, du sado-masochisme, de fétichisme, de manière très générale ou en se contentrant très précisément sur certaines des pratiques quu vous connaissez en tant que dominatrice/dominateur ou soumise/soumis. Partager vos récits BDSM, vécus ou fantames est un moyen de partager vos pratiques et envies et à ce titre peut être un excellent moyen de trouver sur le site des partenaires dans vos lecteurs/lectrices.
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"Mes jambes ne sont pas si belles que ça, je sais juste quoi en faire. En devenant l’égale de l’homme, la femme perd beaucoup. Une femme peut faire tout ce que peut faire un homme, et en plus elle peut faire des enfants. En langue, le genre est particulièrement déroutant. Pourquoi, s'il vous plaît, une table devrait-elle être masculine en allemand, féminine en français et castrée en anglais ?". Pour Anita Berber (1899-1928), travailler c'était surtout imaginer. Elle sent pousser des germes en elle. Des mots éclatent comme ça dans ses entrailles et elle les écrit pour les retenir. Oh, ce n'était point-là de la littérature, elle le savait bien. En revanche, ils allaient alors devenir poésie, charmes et envoûtements car son corps allait les exprimer, les cracher en mouvements. Alors, elle serait chacun des éléments: l'air, le feu, l'eau et la terre. Le papier serait sa scène éthérée et enivrante. Née le dix juin 1899 à Dresde en Allemagne, Anita Berber a choqué et diverti le cabaret et la foule bourgeoise de la république de Weimar jusqu'à sa mort prématurée à l'âge de vingt-neuf ans. Star de cinéma, danseuse nue, "princesse de la débauche" et modèle de peinture d'Otto Dix. Elle est jeune, très belle, libre, avant-gardiste, c’est une œuvre d’art à elle toute seule. Muse, danseuse expressionniste et icône d'une génération en plein désastre. Difficile de saisir en si peu de mots la personnalité complexe et multiple d'Anita Berber. En 1925, Otto Dix réalise son portrait alors qu'elle est totalement dépassée par sa célébrité. Elle n'est plus qu'une artiste perdue parmi ses démons. Droguée, prostituée occasionnelle, bisexuelle, paranoïaque, elle nourrit les scandales et fait les choux-gras de la presse de la république de Weimar. On la déteste autant qu'on l'adule, plus puissante que l'effet des psychotropes dont elle s'abreuve. Artiste de renom, performeuse avant l'heure, elle dansait pour survivre à une époque où tout restait à faire. Entre Berlin, Wiesbaden et Düsseldorf, Anita est une esquisse, une évocation. Le portrait fulgurant d'une femme qui tente péniblement de dépasser sa légende. Danseuse instinctive, elle incarne la décadence aux yeux de ses contemporains et participe pourtant aux bouleversements artistiques et culturels de son temps. Géniale provocatrice, sa vie fut un météore. Elle meurt à l'âge de vingt-neuf ans, seule, abîmée par les drogues et épuisée par la tuberculose. Anita Berber reste encore aujourd'hui une source d'inspiration pour bon nombre d'artistes tels Ingrid Caven, Michael Michalsky, Karl Lagerfeld, Death in Vegas, Nina Hagen ou encore Rosa von Praunheim.
"Ce qu'un homme remarque d'abord à propos d'une femme, c'est si elle le remarque. En Amérique, le sexe est une obsession. Ailleurs c'est un fait". Anita Berber fascine encore aujourd’hui, plus de cent ans après sa naissance. Née en1899, elle incarne la femme libérée de l’Allemagne d’entre deux guerres. Dès son jeune âge, la jeune femme se produit dans les cabarets de Berlin. Provocante, elle est l’une des premières danseuses à utiliser sa pleine nudité dans ses spectacles. Anita développe une dépendance aux drogues, particulièrement l’opium et la cocaïne. On raconte qu’à Berlin,il n’est pas rare de l’apercevoir le nez recouvert de poudre. Utilisant sans gêne sa sexualité, Anita poursuit une quête absolue de plaisir. Bisexuelle assumée, Anita se prostitue à quelques occasions à ses débuts dans les cabarets. Elle vit sans limites, dans une société pourtant rigide, patriarcale et rongée par la crise économique causée par la première guerre mondiale. La république de Weimar vit ses derniers moments. Ainsi que le raconte André Gide, "Berlin a l'air de se prostituer du haut en bas". Gide en sait quelque chose. L'auteur des "Nourritures terrestres" fait régulièrement des escapades à "Berlin-la-Sodome", attiré par son atmosphère de bacchanale frénétique. Il emmène d'ailleurs volontiers avec lui Malraux qui, en 1934, se retrouve avec lui dans un hôtel dont les grooms sont, à sa plus grande stupéfaction, tous plus jeunes et plus "disponibles" les uns que les autres. À Berlin, les partouzes touchent toutes les catégories de la population. Le fils de Thomas Mann, qui découvre cette ville "corrompue" à dix-sept ans, résume en un hymne ironique ce qu'il pense: "Entrez donc, Mesdames et Messieurs, chez moi, ça va fort, ou plutôt ça s'en va à vau-l'eau. La vie nocturne de Berlin, ah mes enfants, le monde n'a encore rien vu de pareil ! Autrefois, nous avons eu une jolie armée, mais à présent, nous avons de jolies perversions. Du vice, encore du vice, rien que du vice, un choix colossal". Les baigneurs, hommes et femmes, enfants et adultes, sont nus dans la piscine de Gartenstrasse, au centre de la capitale. Les clubs où des hommes peuvent danser ensemble, enlacés, sont nombreux malgré l'interdiction officielle de l'homosexualité. De fait, il existe, dans le Berlin des années folles, des centaines de bars fetish où les filles comme les garçons, parfois âgés d'à peine quatorze ans, attendent en buvant de l'alcool. Certaines prostituées sont nues sous leur manteau de fourrure. Des travestis habillés en femme stationnent dans les toilettes pour dames. Des lesbiennes habillées en hommes campent dans les toilettes hommes. Berlin offre le spectacle d'une ville décadente ou émancipée.
"Sans tendresse, un homme est sans intérêt. Les écrivains, les compositeurs, les peintres, mais aussi les artistes comme les réalisateurs et les acteurs entrent dans la même catégorie. Ils doivent être manipulés avec des gants pour enfants, mentalement et physiquement". Mais derrière ce décor de fêtes et de paillettes, le chômage explose. Alors, la belle Anita décide de devenir danseuse de cabaret. Flamboyante, les cheveux rouges, elle danse en pantalons lorsqu’elle n’est pas nue, ce qui est peu commun à cette époque. En parallèle de ses succès comme danseuse, Anita Berber fait quelques apparitions au cinéma, notamment dans des films du réalisateur Richard Oswald. Trois fois mariée, Anita épouse en 1919 un riche héritier, Eberhard Von Nathusius. Elle le quittera pour vivre alors une histoire passionnelle avec une femme, Susi Wanowsky. En 1923, Anita convole ensuite avec son partenaire de scène, Sebastian Droste. Leur union fera scandale et leur vie de débauche les fera bannir d’une partie de l’Europe et se terminera avec le départ de Sebastien pour New York. Et puis soudain, en 1928, Anita quitte notre monde. Elle laisse en héritage une vie où le désir de liberté est absolu, vital, entrant au panthéon des icônes de son époque. Elle a sciemment brisé toutes les conventions sociales et théâtrales de son temps, proclamant ainsi par la suite une théorie pour justifier son comportement provocateur et transgresseur. Elle hantait le quartier de Friedrichstadt, apparaissant dans les halls d'hôtel, les boîtes de nuit et les casinos, rayonnante et nue, à l'exception d'une élégante banderole de sable qui masquait ses épaules décharnées et une paire de chaussures en cuir verni. Un temps, Anita Berber a fait ses entrées post-minuit vêtue seulement de ses talons, un petit singe effrayé qui pendait à son cou, et une broche en argent ancienne contenant de la cocaïne. Sur les scènes de cabaret de Berlin, elle dansait alors des fantaisies érotiques fantasques, inspirées par des concoctions d'éther et de chloroforme, de cognac, d'injections de morphine, et d'une disposition chic, pansexuelle. Ses danses portaient des noms tels que "Cocaïne" ou "Morphium". Les Berlinois, après quelques saisons tumultueuses au début des années vingt, se lassèrent enfin des scandales de la Berber. La grande prêtresse de la décadence chorégraphique est décédée dans la pauvreté en 1928, résultat d'une tentative désespérée de quitter abruptement sa plus chère addiction, le cognac, lassée du champagne.
"Les devoirs sont ce qui rend la vie la plus digne d'être vécue. Il arrive un moment où tout à coup vous réalisez que le rire est quelque chose dont vous vous souvenez et que vous étiez celui qui riait". Anita Berber est la fille d'une chanteuse de cabaret, Anna Lucie Thiem, dite Lucie, et de Félix Berber, premier violon du Gewandhaus de Leipzig qui se mariera cinq fois dans sa vie. Elle a trois ans et demi le huit novembre 1902 quand ses parents divorcent pour "opposition de caractères irréconciliables". À partir de 19066, elle est élevée à Dresde par sa grand-mère maternelle, Louise, dans un confort bourgeois. Elle a six ans et ne voit plus sa mère partie à Berlin, où Rudolf Nelson a embauchée celle ci dans la"revue du Chat Noir", cabaret de l'avenue Unter den Linden. À dix ans, soit un an avant Mary Wigman qui deviendra la promotrice de la danse expressionniste, elle est inscrite dans ce qui devient en 1912 l'Établissement d'enseignement Jacques Delcroze de Hellerau, où est mise en œuvre une pédagogie nouvelle basée sur la rythmique Jacques Dalcroze. En 1915, après que la guerre a éclaté, Anita Berber suit avec sa grand-mère sa mère à Wilmersdorf, une banlieue de Berlin où s'entassent les immigrés de l'intérieur. L'adolescente vit là, rue Zähringer, entourée de femmes, dont ses deux tantes maternelles, Else et Margarete, toutes deux vieilles filles. Tout en se produisant dans des cabarets, elle suit des cours à l'École de théâtre Maria Moissi de Berlin. Elle apprend la danse moderne et la pantomime en même temps que Dinah Nelken auprès de Rita Sacchetto, une actrice adepte d'Isadora Duncan et amie de Gustave Klimt qui, après avoir donné des spectacles de tableaux vivants à travers le monde, a ouvert dans sa villa une école. Elle monte sur scène pour la première fois en février 19166 à la Salle Blüthner, où elle participe à une chorégraphie au côté d'une autre débutante, Valeska Gert. Le chef de la censure Ernest von Glasenapp, qui est présent, préfère celle ci et déclare à propos de la première, "ça va vraiment trop loin". Elle part toutefois en tournée avec la troupe Sacchetto à travers l'Allemagne, Leipzig, Hambourg et Francfort. Sa rousseur naturelle la distingue parmi les nombreuses autres filles.
"Une fois qu'une femme a pardonné à son homme, elle ne doit pas réchauffer ses péchés pour le petit-déjeuner". Elle se produit dès lors en solo à l'Apollo, puis au Wintergarten, sous la direction d'un certain Pirelli, qui bouleverse le style de danse qu'elle a pratiquée jusqu'alors au sein des sages tableaux vivants de Sacchetto. Elle danse sur des musiques de compositeurs contemporains, tels Claude Debussy, Richard Strauss ou Camille Saint-Saëns, mais aussi Léo Delibes. Elle répète auprès d'Hélène Grimm-Reiter dans l'École pour la danse artistique et la culture physique, Kurfürstendamm, là même où sa jeune cadette Leni Riefenstahl réussit à s'offrir quelques cours à l'insu de ses parents. Richard Oswald l'introduit dans le cinématographe en 1918 et elle devient un mannequin recherché par les magazines féminins, une figure des ateliers photographiques Alex Binder et Eberth. La même année, elle fait sa première tournée à l'étranger, en Suisse, en Hongrie et en Autriche. Elle est à Budapest quand l'armistice est signé. Au cours d'une soirée de retour de scène, dans un hôtel de Vienne, complètement ivre, elle se livre pour la première fois en public à une danse alors entièrement déshabillée. Dans une capitale défaite et traversée par la révolution spartakiste, Anita Berber dépense sans compter en vêtements, chapeaux, chaussures et bijoux. Elle habite une suite de l'hôtel Adlon et entretient son image d'excentrique en se promenant un singe sur l'épaule et en s'habillant en homme. Elle lance la mode à la Berber, smoking et monocle. Anorexique, elle consomme éther, chloroforme, opium, cocaïne et cognac. La consommation de poudre lui vaut le surnom de "Reine des neiges". Elle découvre le sadomasochisme et fréquente alors grands restaurants et palaces. Elle a l'habitude de s'injecter de la morphine devant les autres clients. Elle parait une fois dans la salle à manger de l'Adlon entourée de deux jeunes hommes peints, vêtue d'un seul manteau de fourrure noire, qu'elle laisse tomber en prenant le champagne et qu'aussitôt le maître d'hôtel remet délicatement sur ses épaules. Punk avant l'heure, elle se teint les cheveux rouge sang et peint ses lèvres d'un grand cœur noir. La mode berlinoise est à la vedette sexuellement libérée. La rumeur prêtera à celle qui s'honore alors du titre de "mauvaise fille" de nombreuses liaisons saphiques, dont Marlene Dietrich. Anita Berber se met en ménage avec Susi Wanowsky, une femme divorcée d'un haut fonctionnaire de la police, propriétaire d'un bar pour rencontres lesbiennes, "La Garçonne".
"Le sexe est beaucoup mieux avec une femme, mais on ne peut pas vivre avec une femme". Le couple pratique un triolisme saphique avec Celly de Rheidt. Elle est d'une revue de Rudolf Nelson intitulée "Payez, s'il vous plaît" sur la scène du Théâtre Nelson, où triomphera cinq ans plus tard la Revue nègre de Joséphine Baker. Elle se produit sur la minuscule scène de "La Souris blanche", qui appartient à un puissant industriel, Peter Sachse, où certains spectateurs ne se présentent que le visage masqué. Son interprétation de "Morphine", sur la musique d'une valse lente écrite pour elle par Mischa Spoliansky, est un tube repris jusqu'à Paris. En juin 1922, Anita Berber rencontre au cours d'une soirée privée du Casino son prochain partenaire de scène, le poète homosexuel Sebastian Droste, qui, cocaïne aidant, prend aussitôt la place de Susi Wanowsky au poste de régisseur général. Fils de famille hambourgeois, c'est un danseur qui fut membre de la compagnie de Celly de Rheidt, une des maîtresses d'Anita Berber célèbre pour ses mises en scène subversives, plus blasphématoires qu'obscènes. Le spectacle que le nouveau couple met au point sans attendre se veut transgressif à la scène comme à la ville. La scénographie est confiée au viennois Harry Täuber, élève du peintre Franz Cižek, lui-même promoteur d'une pédagogie nouvelle qui laisse l'enfant s'exprimer. Évocation ambiguë du sadomasochisme comme du tabou sexuel qui pèse alors sur un possible métissage, l'entrée du personnage féminin, armé de fouets, se fait entre deux "nègres". À Vienne, Anita Berber a une brève, et incertaine, aventure avec la baronne Léonie von Puttkamer, cocotte extravagante qui fut cinq ans plus tôt l'obsession de Margarethe Csonka, la jeune homosexuelle suicidaire analysée par Sigmund Freud et plus connue sous le pseudonyme de Sidonie Csillag. Les tournées sont l'occasion de rencontres artistiques, en particulier avec Felix Albrecht Harta, Otto et Martha Dix, admirateurs qui n'hésiteront plus à parcourir de longues distances pour l'admirer sur scène. "Si charmante, si adorable, très spontanée et très séduisante" aux yeux de Martha Dix, qui la voit alors pourtant vider en moins d'une heure unebouteille de cognac tout en se maquillant dans sa loge, Anita Berber est peinte par Otto Dix sous les traits d'une vieillarde moulée dans une robe rouge, portrait totalement différent de la vision idéalisée qu'en a alors son épouse.
"Nous dansons la mort, la maladie, la grossesse, la syphilis, la folie, la famine, le handicap, personne ne nous prend au sérieux". À l'occasion, Anita Berber se prostitue, sans gêne, voire par provocation. À Wiesbaden, en 1925, devant ses amis Martha et Otto Dix avec lesquels elle se promène au sortir d'une représentation, elle répond à tout admirateur qui l'aborde: "C'est deux cents marks". Elle justifie cette pratique par le peu que lui rapporte son métier et le prix élevéde ses costumes qu'elle doit payer elle-même. Physiquement épuisée, elle se réfugie à Berlin auprès de son ami, le docteur Magnus Hirschfeld. Elle est hébergée dans une pièce qui sert d'infirmerie. C'est au salon Eldorado, qu'elle s'adonne à la cocaïne. Elle y entend les chansons de rue de Claire Waldoff, qui tient salon avec sa compagne Olgavon Roeder, ainsi que le duo Margo Lion Marlène Dietrich interprétant la chansonnette explicite "Ma meilleure amie". L'ex-actrice essaie de se reconvertir dans le théâtre. Embauchée au Theâtre intime de la Bülowstrasse par Gustave Heppner, elle joue, entre autres rôles, un des multiples personnages dans "Un Jeu de rêve" d'August Strindberg, qui est un hommage à la "Traumdeutung" de Sigmund Freud. La tournée au Proche-Orient reprend à l'automne. Dans la nuit du dix juin 1928, Anita Berber s’effondre dans une boîte de nuit de Beyrouth. Le médecin lui diagnostique alors une "phtisie galopante". Elle doit renoncer à poursuivre la tournée jusqu'à Damas. Son rapatriement en compagnie d'Henri Hofman est un calvaire dispendieux, son état imposant de longues étapes. Arrivée désargentée à Prague au bout de quatre mois, il faut alors qu'une collecte soit organisée dans les coulisses des cabarets de Berlin pour lui permettre d'acheter les billets de train. Hébergée par sa mère, elle est admise à l'hôpital Béthanie, qui accueille les indigents, et reste optimiste, forme des projets, prend soin de ses jambes. Elle meurt moins de trois semaines après son hospitalisation, le dix novembre, à l'âge de trente neuf ans. L'enterrement a lieu sous la pluie, trois jours plus tard, au cimetière Saint-Thomas de NeuKölln de Berlin. Elle est alors enterrée très pauvrement, sans pierre tombale.
"Les mots peuvent blesser et briser les cœurs et les esprits". Madonna et Lady Gaga ignorent probablement tout de la vie d’Anita Berber, l’oiseau de nuit le plus excentrique de l’Allemagne de Weimar, dont le tableau d’Otto Dix, La danseuse Anita Berber, peint en 1925, a longtemps tenu lieu de seul fil mémoriel. Pourtant, elles lui sont redevables d’une même filiation: la scène comme lieu où s’effacent et se réinventent les frontières entre avant-garde, érotisme et provocation. Danseuse, actrice, cabarettiste et poète, Anita Berber fut sans doute la première performeuse de l’histoire de la scène. Une performeuse dont le destin aussi flambant que dramatique semble inséparable des crises de la société allemande d’après-guerre. Érotisme d’après-guerre, Salomé, la dernière perversité. C’est en ces termes que se construisait sa gloire. Cette génération qui a vingt ans en 1918 a été alors marquée au vitriol par la grande guerre et découvre le chaos d’une Allemagne destituée de son Empire, en pleine révolution politique et dans la tourmente économique. Elle doit construire sa liberté dans ce paysage ravagé. La révolte contre l’autorité des pères sera alors volcanique. Anita Berber met alors en scène cette révolte, sans l’assortir d’un discours politique, comme le font les dadaïstes, mais lui donnant la tournure d’un anarchisme subjectif. Lorsque cette femme danse ses danses du vice, de l’effroi et de la folie, elle se danse elle-même. Ce n’est pas de la fantaisie, mais son propre être intérieur qu’elle met à nu devant les spectateurs. Son parcours ressemble à une suite de fuites en avant, chaque provocation en entraînant une autre toujours plus osée, chaque prise de risque visant à lui assurer le maintien de sa notoriété."Je suis une artiste et non une perverse. Vous pensez que je suis folle parce que je poudre de blanc mon visage, que je danse nue et prends de la cocaïne. La raison à cela est que j’ai sans doute alors commencé très tôt à lire Baudelaire et les ouvrages d’Henri Barbusse sur la guerre. Mon partenaire Sebastian Droste a traduit pour moi des textes grecs qui disent que ce n’est pas un vice de montrer son corps nu, car le corps est un cadeau de Dieu". La stabilisation économique a mis fin à la vie nocturne et ses excès. Les nouvelles idoles de Weimar sont alors désormais des reines de jour aux silhouettes sportives et bronzées. Comme la cabarettiste Valeska Gert, sortie de l’oubli grâce au cinéaste Völker Schlöndorf, Anita Berber ne sera redécouverte que tardivement, au cours des années 1980, par ses biographes en quête des derniers témoins des tumultes de Weimar, époque trop aisément regardée comme un âge d’or. Elle incarne sans doute l’esprit d’une génération qui fut la première au XXème siècle à se révolter et à réclamer le droit d’inventer sa propre vie. Une aspiration dont l’écho traversera tout le siècle avecplus ou moins de bonheur et dont s’empareront à leur tour la génération de mai soixante-huit et les postmodernes.
Bibliographie et références:
- R. M. Pettis, "Anita Berber"
- Varo Andor, "Anita Berber"
- J. Jentchik, "Anita Berber"
- Klaus Thomas Mann, "Anita Berber"
- Mel Gordon, "Five professions of Anita Berber"
- L. Fischer, "Anita Berber, 1918-1928"
- U. Scheub, "Anita Berber, göttin der nacht"
- Ralf Georg Czapla, "Anita Berber"
- Merrill Cole, "Anita Berber, danseuse nue"
- L. Guilbert, "Anita Berber ou la danse par le scandale"
- Leo Lania, "Anita Berber, a Weimar performance artist"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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Dans "L'Emprise", Christine Arven dépeint avec une finesse remarquable le parcours de Laure, professeure dans un lycée d'Aubagne, dont la vie bascule suite à la réception d'un colis mystérieux. Arven, avec un doigté d'écriture féminine, nous plonge dans l'intimité bouleversée de Laure, une femme confrontée à des désirs inavoués et à une soumission librement acceptée.
Ce roman se distingue par sa capacité à traiter de thématiques BDSM sans jamais verser dans la vulgarité. L'auteure maîtrise l'art de la suggestion, utilisant la subtilité plutôt que l'explicite, un choix qui enrichit la narration et confère une élégance rare au genre. Les descriptions sensibles et détaillées de l'éveil de Laure à de nouvelles expériences sexuelles et émotionnelles sont traitées avec un respect et une profondeur qui captivent le lecteur.
La transformation de Laure, d'abord réticente puis progressivement envoûtée, est un voyage initiatique qui explore les limites entre désir, pouvoir et contrôle. Christine Arven réussit à tisser une histoire où la soumission devient un chemin vers la découverte de soi, loin des clichés souvent associés au BDSM. Elle démontre que la soumission peut être une expérience libératrice et consentie, un aspect souvent négligé dans les représentations littéraires de cette pratique.
Le style d'Arven est fluide et accessible, rendant le livre agréable à lire. Sa prose est à la fois riche et facile à suivre, ce qui est une prouesse pour un sujet aussi complexe. Elle sait captiver son lectorat, jonglant habilement entre les scènes intimes et les aspects plus psychologiques du récit.
"L'Emprise" est un roman qui se démarque dans le paysage littéraire du BDSM. Christine Arven offre une œuvre sensible et réfléchie, une lecture qui s'adresse autant aux amateurs du genre qu'à ceux qui cherchent à comprendre ses nuances. Ce livre est une invitation à explorer les zones d'ombre et de lumière de nos désirs, dans un cadre de respect et de consentement. Un incontournable pour ceux qui cherchent à appréhender le BDSM sous un angle nouveau et élégant.
Si vous avez lu ce livre, n'hésitez pas à laisser votre avis en commentaires ci dessous
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J’ai reçu beaucoup de messages, en direct ou en privé, m’informant que mon écriture plaisait alors, je me suis dit : continuons et voyons où ça nous mène.
Sachez d’abord que cette histoire se déroule avant les deux premiers épisodes « Elle s’appelait Géraldine » et « Elle s’appelait Géraldine, l’autre Caroline » que vous retrouverez, normalement facilement, sur ce site. Bref, ça se passe avant l’épisode 1 et 2, c’est mon côté « Star Wars ».
Je pense que nous sommes en 1999, je suis alors militant dans une association et deux jeunes femmes, elles aussi étudiantes et militantes, nous proposent, après une réunion de ladite association, d’aller boire un verre ensemble. Frédéric et moi, amis à l’époque, acceptons avec plaisir. J’ai 26 ans, je suis célibataire, une petite alarme se déclenche dans ma tête : « serions-nous en présence de deux femmes attirées par deux hommes ? ». A ce moment-là, rien ne permet de l’affirmer alors, prudence, allons dans un café, Lille est assez bien lotie à ce niveau.
Après avoir, facilement, choisi le bar, nous entamons la conversation par notre point commun : notre militantisme. Nous sommes dans une association très militante donc, comme d’habitude, le débat s’enflamme (dans le respect, bien sûr) et quelques divergences d’opinion entre nous apparaissent mais rien ne permettant d’entraver la bonne humeur et la bière belge.
La serveuse, que je connais, commence à discuter avec moi. Je l’aime bien, toujours souriante, charmante et bienveillante. Son regard et, j’imagine, son intérêt, glisse doucement vers Frédéric qui, lui, n’était jamais venu ici et ne la connaissait donc pas. Je me souviens du regard de Fabienne lors de cette tentative d’intrusion : le regard noir de celle à qui l’on veut piquer sa proie (alarme niveau 2). La serveuse comprend le message d’un œil un peu aigri et repart derrière son zinc ramasser ses verres en même temps que sa déception. Cette scène, à la fois pénible et heureuse, me laisse à penser que Fabienne a choisi son homme (pour la soirée ou plus) et que Sylvana m’a été « attribuée » lors d’une discussion secrète pendant un passage aux toilettes (voici donc pourquoi, Mesdames, vous y aller toujours à deux !). Il ne me manque plus qu’un détail pour confirmer mon intuition : une proposition d’un « dernier verre » au domicile de l’un ou de l’une d’entre nous. Ça n’a pas tardé.
Au bout d’un moment, les filles nous demandent si nous habitons loin et s’il serait possible de prolonger la soirée chez l’un ou l’autre (alarme niveau 3) : contextuellement, Frédéric et moi avons chacun un appartement relativement près du bar, un simple passage dans le métro lillois nous permettra d’y être en 10 minutes. Le mien étant plus grand et mieux adapté à la situation, on se dirige donc vers Fives (NDLA : un quartier de Lille).
Pour la petite histoire, c’est ce même appartement qui accueillera Géraldine quelques mois plus tard pour une soirée -dont le lecteur aguerri se souvient sûrement- mémorable (cf. Episode 1). Si votre mémoire est bonne, je possède un lit d’appoint, apte à accueillir les amours débutants en dehors de MON lit.
Pour décrire un peu le lieu, j’ai 50m² (à l’époque, c’était encore à peu près jouable de se loger à Lille) : Une grande salle à manger, une grande chambre, une cuisine et une salle de bain/WC, le tout en longueur, comme beaucoup d’habitations lilloises.
La grande chambre peut largement accueillir le groupe. Ici siège un lit 2 personnes, un canapé convertible 2 personnes, 2 fauteuils assortis au canapé, une table basse et une télévision, peu utilisée.
Je sors quelques boissons de mon frigo, les amène à mes hôtes et essaie de changer de conversation, le militantisme étant peu compatible avec la séduction. J’ai quelques affiches de films dans ma chambre et la discussion part donc dans le monde de Quentin TARENTINO et autres génies.
J’ai sorti de la bière et quelques alcools forts (vodka, whisky). Les filles m’indiquent que je veux les enivrer pour mieux profiter d’elles, je leur réponds qu’à priori, notre discussion dans le café et dans le métro aurait dû suffire à les saouler et que je ne leur apporte là qu’un moyen pacifique de clore le débat. Mon humour fait mouche : Sylvana me regarde avec, dans les yeux, une tendresse qui me laisse entrevoir un espoir ou, au pire, une espérance (alarme niveau 4).
A ce niveau de l’histoire, je sens poindre en vous, cher lecteur, une certaine impatience faite de martinet, de fesses qui claquent et de cris de douleurs. Patience, mon ami, patience.
C’est Frédéric qui a fait glisser la soirée dans un autre monde. Lui aussi pratiquait le BDSM, on avait même pratiqué ensemble plusieurs fois. Cela entretenait la pratique car trouver une femme BDSM, surtout à cette époque, était une aventure compliquée. Donc, comme je le disais, c’est Frédéric qui a tout déclenché.
« Tu sais où est mon briquet ? », me demanda-t-il comme si j’étais son intendant. Je lui répondis que non, je ne le savais pas, n’étant pas fumeur (et ne l’étant toujours pas). C’était un beau briquet, un Zippo, que son frère lui avait offert récemment pour son anniversaire. N’étant pas d’un naturel inquiet, Frédéric fouilla simplement sa veste et abandonna sa recherche, sachant pertinemment que, si je le retrouvais, je n’irais pas aussitôt le mettre en vente sur « le bon coin », ce site n’existant pas encore.
Mais, curieusement, la présence de cette veste le perturbait, il se dirigea donc vers mon armoire pour s’en débarrasser. Et c’est là que ce qui aurait pu devenir un drame arriva : l’armoire en question contenait mes fringues (normal), une couverture et une couette pour le lit d’appoint (normal) et un martinet, 4 paires de menottes, des cordes, des bougies et quelques sex-toys (normal ?).
Impossible de détourner le regard de mes hôtes, déjà intriguées par cette entrée en matière pour le moins indélicate.
Oui, j’aime le BDSM, et vous le savez si vous me lisez, mais j’ai aussi une vie hétérosexuelle des plus banales qui me pousse, parfois, à côtoyer le sexe opposé pour des raisons plus… biologiques. Et cette soirée devait en être une, ce ne fût pas le cas. Enfin, pas entièrement.
Etant à MON domicile, dans MA chambre, devant MON armoire, je ne pus nier que ce matériel était le mien. Je tentai maladroitement de chercher une raison mais mon bafouillage et, surtout, ma gêne (on est 1999) essayaient de fuir, au moins mentalement, la scène hallucinante qui se jouait chez moi, et ça ne pouvait pas m’aider à être clair dans mes propos.
Les deux femmes étaient amies, à priori de longue date, peut-être même amies d’enfance. Leurs regards complices depuis le début de la soirée ne laissaient planer aucun doute à ce sujet. Après m’être emberlificoté dans des explications dont le niveau de crédibilité approchait la température de mon frigo, j’essayai de me raccrocher à quelque chose, à un regard (celui de Frédéric était perdu dans l’armoire, cherchant sans doute à analyser son geste : il savait que le « matériel » était dans ce meuble), celui de Fabienne était dans celui de Sylvana et vice-versa.
Seul mon verre de whisky m’apportait un peu de soutien et de contenance, je le bus d’une traite pour essayer de contenir une irrésistible envie de faire mes bagages, de quitter l’Europe, de m’installer au Canada, au milieu des grizzlys et de chanter du Céline Dion un pancake à la main.
Le regard de Sylvana croisa le mien au moment où je rouvris les yeux (car c’était un très bon whisky). Curieusement, à l’heure où je m’attendis à entendre un « bon, on va rentrer, merci pour le verre » et autres charabias visant à cacher la gêne occasionnée, elle lança une phrase non dénuée d’intérêt pour la suite : « Tu pratiques depuis longtemps ? »
« Où est ma bouteille de whisky ? », pensais-je aussitôt. Je me rassis dans le fauteuil, près de l’armoire coupable, pris un temps pour remettre mes organes en place, Frédéric me servit un whisky. On était ami, à l’époque et il savait que j’en avais besoin.
Une nouvelle discussion démarra donc. Frédéric dit adieu à son armoire chérie et s’assit à côté de Fabienne sur le canapé. Il avait, lui aussi, compris que la soirée avait changer de thème.
Quelques explications plus tard, je retrouvai chez ma compagne nocturne le même regard qu’avant l’incident : de la tendresse en barre et j’étais prêt à y goûter.
Une demande émana de Fabienne : « on peut voir ton matériel ? ». Ok, je sens poindre un intérêt mais attendons, passons d’abord le niveau de l’alarme à 5 et voyons ce qui se passe. J’avais quelques sex-toys, achetés récemment (des soldes monstres dans mon sex-shop habituel) non pas pour mon plaisir personnel mais pour une éventuelle soumise future. D’ailleurs, ils étaient encore sous blister. Les jeunes femmes les regardèrent sans pour autant y voir un grand intérêt. Par contre, les menottes avaient l’air de les intéresser. Je sortis les clés d’un tiroir pour leur signifier que le jeu était permis et les voilà parties dans un essayage fait de rire et de complicité. Oui, elles se connaissent depuis longtemps, c’est certain.
La récréation passée, la discussion pris une tournure plus directe : quel rôle aimerions-nous jouer ? Pour être le plus simple possible, Fred et moi étions switch mais lui était encore en recherche. Il ne le savait pas encore. Cette nuit lui apportera peut-être quelques réponses.
De leur côté, nos gentes damoiselles laissaient planer le suspense. Sylvana me prit par la main, comme pour m’emmener quelque part mais, en fait, elle se rapprocha de moi, s’assit sur mes genoux et m’embrassa « comme au cinéma », un baiser long, délicat et fougueux. Va-t-on finalement finir la nuit en mode vanille ?
Point du tout. Un autre objet avait attiré l’attention de ma compagne : un jeu de cartes, 52 cartes et 2 jokers. « Et si on jouait à un jeu ? ». La saga Saw n’ayant pas encore commencé, je ne pris pas mes jambes à mon cou mais caressa délicatement celui de ma partenaire d’un soir.
Donc, pour les deux du fond qui n’ont pas suivi, cette phrase signifiait que les deux femmes en question étaient switch. Dans le jargon, on appelle ça un Bingo car on peut multiplier les scénarios et les possibilités.
Sylvana mélangea les cartes et les posa sur la table, faces cachées.
« Voici les règles, annonça-t-elle d’un ton autoritaire :
Nous allons tous tirer une carte en même temps et la retourner à mon « top ».
Chaque carte aura ses conséquences :
Le pique représente le martinet
Le trèfle représente la main (fessée)
Le cœur représente la bougie
Le carreau représente un « tripotage intime »
Quant aux valeurs, elle représente le nombre que vous subirez si vous perdez (2,3,4... le valet 11, la dame 12, le roi 13 et le terrible as représentant le 14). Pour le carreau, ce chiffre correspondra aux secondes.
J’étais stupéfait. Fabienne me rassura : « c’est un jeu auquel on joue souvent. Nous l’avons inventé il y a des années ».
Je comprenais mieux son assurance.
« La dernière règle à connaitre est la suivante : si vous piochez le joker, vous devrez subir tout ce que vous avez pioché avant »
La tension était palpable.
Frédéric et moi nous étions donnés rendez-vous le matin même pour aller en cours, qui n’avait lieu que le matin, l’après-midi étant consacré à la recherche de stage (et nous avions déjà nos entreprises). Nous avions donc passé l’après-midi en ville (oui, les mecs font aussi du shopping). Par la suite, chacun était rentré chez lui et nous nous étions retrouvé le soir même pour la fameuse réunion. Aucun d’entre nous ne se serait doutés, en se levant le matin, finir dans un suspense sauce BDSM.
Après avoir signalé que 104 gouttes de cire, ça pouvait faire beaucoup (maximum si l’on tire tous les cœurs), la maîtresse du jeu m’indiqua que cela n’était jamais arrivé et que le joker tombait relativement tôt.
Elle avait raison. Nous fîmes un essai « blanc » et, en effet, la 7ème carte fût un joker.
Une question me vint vite : « et si on pioche le joker en première carte ? »
« Ça te coûte une vie », lança-t-elle à la volée.
Elle venait, en fait, d’inventer cette règle pour pimenter la soirée. Explications : nous démarrons tous avec 5 vies : Un joker trouvé = mini-séance de torture comme indiqué plus haut + une vie en moins.
Celui, ou celle, qui n’a plus de vie est exclu du jeu et deviendra l’esclave de son partenaire de ce soir. J’étais donc en concurrence avec Sylvana. Joli challenge.
J’avais donc, c’est le cas de le dire, les cartes en main pour passer une bonne soirée. Je souhaitais, secrètement, jouer les deux rôles dans la soirée, je ne fus pas déçu.
Fabienne tira le premier joker : comme elle n’était pas novice dans ce jeu, elle se leva, retira ses vêtements, tous ses vêtements pendant que Sylvana retirait les cartes de la table basse. Et y installa la condamnée.
Une table, 4 pieds et une quadrupède : Le calcul était vite fait. Nous participons tous à la séance d’attache : les jambes sont encordées et les mains menottées : rapide, pratique, efficace et jubilatoire au plus haut point. Nous faisons les calculs, les 4 symboles sont présents mais le nombre est faible. Restons positifs, on a de quoi s’amuser.
Dernier détail, Sylvana retire son écharpe légère pour bander les yeux de Fabienne.
« Bon sang, mais bien sûr, me dis-je à l’intérieur de mon cerveau cerné par l’excitation et les effets des whisky précédents, nous sommes trois bourreaux potentiels et, par cette subtilité aveugle, Fabienne ne pourra pas savoir qui lui inflige les douleurs récoltées. Je dois de toute urgence ranger ce jeu dans mes favoris (alors que je n’avais pas encore d’ordi à l’époque). »
Je vis dans le sourire de Sylvana une certaine fierté d’avoir ajouté cet élément, celui de Fabienne, par contre, semblait lui dire « espèce de petite coquine ». Nous étions entre gens de bonne compagnie.
Les cartes qu’a tirées Fabienne sont sur le sol, dos tourné et nous allons chacun piocher une carte et lui faire subir la sanction liée. Je commence : 7 de trèfles, je dois fesser la prisonnière. Sylvana
annonce « 7 de trèfle ». Je fis mon office avec, dans l’idée, de ne pas frapper trop intensément pour ne pas, à mon tour, souffrir trop si par « malheur » je perdais aussi mais avec la certitude de l’anonymat qui, quoi qu’il arrive, me garantissait l’absolution.
Les petits sursauts de Fabienne, à chacun de mes coups, m’envoyer un message clair : vivement que je perde. Les deux autres, spectateurs de la scène, prenaient leur pied, eux aussi. Vint le tour de Frédéric qui tombait sur une bougie de « 12 » : une dame de cœur. La victime se débâtit, en vain, et je vis mon ami très attentionné lorsqu’il fallut, comme le veut la tradition, lui enlever les gouttes qui avaient séché. Un peu de tendresse, en somme. Sylvana, avec sa carte « martinet », ne fit pas dans la dentelle. Les coups étaient nets et clairs. Elle nous indiquait clairement son choix : je vais vous faire mal si vous vous retrouvez à sa place. Message reçu. On continue ? C’est Frédéric qui eût la dernière carte de ce premier round : martinet 11. Il fit de son mieux pour ne pas trop abimer ce cul qui, se disait-il, lui serait destiné à un moment ou un autre de la soirée. Une fois terminé, nous détachâmes la femme dont les seins, bien que plaqués sur la table depuis 10 minutes, pointaient clairement en direction de nos yeux et qui semblaient réclamer vengeance.
Fabienne demeura nue pour la deuxième partie. A chaque tirage, notre cœur battait la chamade. Impossible de résister à la tentation d'espérer soit de toucher un joker, soit de voir un autre le faire selon les circonstances et, il faut bien l’avouer, l’excitation.
Cette partie fut un peu plus longue et le joker se fit attendre. A la 9e carte, ce dernier tomba, mal, très mal pour moi : j'étais le second condamné de la soirée.
Alea Carta Est : les cartes en sont jetées. Je pris la même position que Fabienne quelques minutes auparavant, après m’être déshabillé. La sensation de se faire manipuler par 3 personnes qui vous attachent à une table est absolument grandiose. Je suis le centre d'intérêt du moment. Ça promet.
Mes 8 cartes sont étalées sur le sol. Je les vois encore, pas longtemps. Une écharpe vient me bander les yeux. Dès lors, mes oreilles sont attentives. Une carte est tirée : directement un as de pique, 14 coups de Martinet et je ne sais pas qui va officier.
Le premier coup me laisse entrevoir une partie de la réponse. Il est relativement violent. Aucun doute, c'est une des 2 filles, soit Sylvana qui a clairement planter le décor dans le round précédent, soit Fabienne qui se venge du même round.
Au bout des 14 coups, j'ai déjà bien mal et je sais qu'il me reste encore 7 cartes.
Parmi ces 7 cartes 2 seront des carreaux. Les mains correspondantes me semblent clairement féminines mais je peux me tromper tant il est vrai que les hommes peuvent être aussi délicats que les femmes dans ces circonstances.
A la fin, lorsque je lorsque l’on me détache, je ne pense qu’à une chose : me venger. Je comprends le regard précédent de Fabienne, nous sommes désormais compagnons de souffrance.
Je n’en aurais pas l'occasion : au bout de la 6e carte, je perds le 3e round. Il me reste 3 vies.
Comme Fabienne, je suis demeuré nu pendant le jeu, pour ne pas perdre de temps. Au début du 4e round, je sens qu'une main me caresse délicatement le dos. C'est Sylvana qui marque son territoire, m’imaginant sans doute bientôt sans vie. Elle me fait aussi comprendre que la suite de la nuit sera, elle aussi, agréable. Quelle belle soirée !
Sylvana perdra cette quatrième manche. Elle devra payer un lourd tribut : de plus de 50 gouttes de cire de bougie : atroce mais tellement jubilatoire que je ne puis m'empêcher d’être déjà excité au plus haut point.
La question se pose : Va-t-on finir ce jeu ?
Pas sûr, Fabienne se décide enfin à embrasser son prétendant, en pleine séance de torture de Sylvana, pendant que je lui caressais l’entre-jambe (un dix de carreau, de mémoire).
Frédéric, seul à être encore habillé, ne s’en laisse pas conter et entreprend désormais de rattraper son retard, tant sur le plan vestimentaire que sexuel.
Sylvana tend l’oreille. Elle comprend que quelque chose se passe. Je lui retire son écharpe. Ses yeux assistent, impuissants, à cette scène surréaliste. Nous n’existons plus. Nos deux partenaires de soirée sont partis dans un autre monde et je sais que la mienne espère la même chose.
Oui, mais elle est attachée. Je lui caresse, à mon tour, le dos, sorte de retour sur investissement précédent. Elle se débat, pensant que je vais abuser de la situation. Je lui tripote, tendrement, le sexe, pour lui envoyer un message de paix. Elle accepte de signer ce traité, fermant les yeux pour partir dans ces cieux où vous partez, parfois, mesdames, sans nous emmener, simple instrument du plaisir que nous sommes mais tellement heureux d’y participer.
J’embrasse goulument ma prisonnière, désormais volontaire. Je sens ses mains sur mes cuisses, car les menottes laissent une certaine liberté de mouvement. Elle tente d’atteindre mon sexe mais je le lui refuse pour le moment. Je vais d’abord lui procurer du plaisir. Je change de côté et attaque « le sanctuaire des sanctuaires », hommage au grand Tarantino, pile sous l’affiche de Pulp Fiction, conjecture parfaite.
Fabienne, retirant un morceau de mon ami de sa bouche, décide de s’enquérir de l’état de sa compagne. Elle se rend compte, comme dans certains contes qui se racontent, que le compte à rebours vers l’extase est déjà entamé pour ma partenaire et décide de retourner à son occupation première afin de garantir la rigidité de l’organe qui, si tout se passe bien, lui permettra dans un certain temps, d’atteindre, elle aussi, l’extase.
« A la fin de l’envoi, je touche », le génial Edmond n’aurait pas démenti, tant la scène était belle. Sylvana était l’extase personnifiée. Elle reprend désormais sa respiration. Je sais que je ne suis pas forcément un spécialiste de la jouissance linguale mais les circonstances ont joué en ma faveur : je dois absolument faire durer le plaisir.
Avant de détacher ma partenaire, je prends mon temps et une vodka. Je suis désormais debout devant ma prisonnière et elle se rend compte que, moi aussi, je suis prêt pour partager une extase avec elle, surtout avec la vision que nous avons sur Fabienne délicatement occupée à entretenir la flamme de mon ami sans pour autant lui surchauffer la mèche.
Je lui détache les jambes et me dirige vers les menottes. A peine la première main est-elle désentravée que cette dernière se précipite aussitôt vers ma partie intime afin de rattraper son retard préliminaire.
Surpris par cette sympathique initiative, je me retrouve en grande difficulté pour gérer l’autre menotte. Sylvana le comprend et me retire les clés de ma main tremblante de désir et se détache seule. Nous sommes désormais deux êtres libres et prêts à partir dans le train de l’extase. Ce sera un wagon couchette.
Mon lit est confortable, vieux mais très confortable, j’y invite ma princesse d’un soir.
Dans ces moments, nous, les hommes, bien que recherchant la jouissance, voulons absolument faire durer le plaisir, prendre notre temps. Ces moments sont rares, alors profitons-en. Nos voisins de pieux font une pause. Apparemment, Fabienne est très douée et Frédéric ne veut pas quitter le wagon trop
tôt. C’est leur phase tendresse à eux. On se colle l’un à l’autre mais on ne touche pas aux jouets, trop instables pour le moment.
Ça ne dure pas longtemps. Frédéric, lui, est un expert en langue. Il est temps pour lui de faire ronronner sa partenaire et cette dernière n’est pas déçue du voyage. Nous non plus, nos oreilles enchantées par ce doux chant rajoutent de la couleur à ce tableau déjà bien garni.
Sous ma couverture, une forme monte et descend. Sylvana, elle aussi, s’y connait en langue. Je me concentre : « surtout ne pas venir, pas maintenant ». Une grande affiche de la série FRIENDS trône au- dessus de mon bureau. J’essaie de penser à cette série que j’adore afin de me déconnecter de la scène mais rien n’y fait.
Une dernière pensée pour Chandler et sa bande et je décide d’arrêter là les préliminaires qui, jeu inclus, durent quand même depuis près d’une heure. Je retire ma partenaire de ma bite et décide d’entreprendre ce que nous cherchons tous dans cette pièce, la fin de l’acte 1. Préservatif ? Ok ! Excitation de ma partenaire ? Ok. Elle se met instinctivement à 4 pattes, mais sans la table cette fois. Riche idée. J’ai ainsi une vue sur l’autre scène. A priori connectée à sa comparse, Fabienne se met dans les mêmes dispositions, les deux amies se regardent et se préparent à jouir ensemble. Hors de question de rater le coche, d’un seul regard, Frédéric et moi-même décidons de synchroniser nos montres qui, pour le moment, affiche midi pétante.
L’acte de pénétration est sacré, le sexe féminin est un sanctuaire, c’est Samuel L. Jackson qui le dit. J’y entre donc avec respect. Un soufflement extatique m’indique que le seuil est franchi. Je peux donc visiter les lieux, agréables au plus haut point. Tout, dans cette scène respire l’extase, les fesses de ma partenaire, sa position, les respirations de ces demoiselles, entre douleur et plaisir, le regard de Fabienne plongeant dans les yeux de son amie et, parfois aussi, dans les miens. Frédéric, tout en contrôle, me regarde parfois avec, au fond des yeux, une question : « Alors, on y va ? ».
Pour être honnête, à ce moment, je ne sais pas si nos invitées comptent rester pour la nuit ou pas. Y aura-t-il un acte 2 ? En fait, peu importe. Sylvana a déjà commencé à faire des allers-retours avec ses hanches pour me signifier qu’il était temps. Oui, il était temps. Le départ est donné et notre concentration a laissé place à une envolée lyrique digne des plus grands opéras. Ce qui est certain, c’est que ce fût un grand moment. Inoubliable. La preuve : je vous le raconte plus 20 ans après. Des instants magiques, comme la vie vous en offre parfois, au détour d’une réunion militante.
Je regarde l’heure : il est un peu plus de minuit. C’est bientôt le dernier métro. Sylvana, collée à moi dans un moment de répit, remonte la couverture sur elle. Frédéric prend celle de l’armoire pour protéger sa belle. Elles n’ont pas eu besoin de demander si elles pouvaient rester. Nous étions bien.
Et maintenant, on dort ? Pas tout à fait, on boit un verre, on allume la télé car c’est l’heure de la diffusion de 3 épisodes de FRIENDS, sur Canal Jimmy, une chaîne du câble. Oui, nous sommes en plein dans le succès de cette série légendaire et j’ai la chance d’avoir un média qui la diffuse en VO.
A la fin des épisodes, tout le monde est fatigué (oui, le shopping, c’est épuisant)
Chaque couple rejoint sa bulle, parfois perturbée par des initiatives nocturnes salutaires car réveillant à la fois la libido du partenaire et celle de l’autre duo. Magique, je vous dis. Magique.
Vous comprendrez aisément qu’il n’était pas question de se dire « adieu » après cette soirée. Nous échangeâmes nos numéros et j’allais grandement le regretter mais ça, c’est une autre histoire. Si vous voulez la connaitre, j’attends vos commentaires.
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Episode 1 : Infâme mixture mais délicieux rāmen
Mon Maître plaisante à la vue de mon air dégoûté par l'aspect fort peu engageant de la mixture.
- « Assaisonné avec quelques gouttes de sperme, est-ce que serait plus facile à avaler, salope ? »
Maintenant mes « hallucinations » me reprennent. Le flacon se met à scintiller. Manquait plus que ça. Ces scintillements bleu-jaunâtres me donnent le mal de mer.
- « Allez, courage ! Dis-toi que c’est pour sauver le monde »
Au moins il sait me faire rire…
Bon ben, quand il faut y aller… J’avale d’une traite ce flacon d’eau boueuse, que le Professeur a apporté. Beurk ! C’est infect !
J’espère que le Professeur ne se trompe pas et que sa théorie n’est pas qu’un pur délire.
Je connais Streptomyce Avermitilis, ce surprenant micro-organisme qu'il découvrit autrefois dans le sol d'un terrain de Golf Japonais. Une découverte qui lui valut la gloire, le prix Nobel, puis récemment le dénigrement pour des prises de position qui ont été perçues comme une menace pour de puissants intérêts politico-financiers. Les médias et leurs meutes de fact-checkers ne font pas de cadeau à ceux qui sortent du rang.
Il m’assure que les eaux croupies prélevées lors de notre séjour à Fushimi Inari grouillent d’une version mutante, qu’il a baptisée Streptomyce Avermitilis Inari (*). Il est persuadé que dans les temps préhistoriques ces micro-organismes vivaient en symbiose avec les zébralyvox et jouaient un rôle essentiel dans leur métabolisme et peut-être dans leur reproduction. Le symbiote du symbiote…
Ils émettent des filaments, comme les zébralyvox, et sont le siège d'une forte activité électrique, nous explique-t-il, comme pour nous convaincre du bien fondé de son hypothèse.
Tout cela me paraît un peu tiré par les cheveux. D’un autre côté, ces scintillements qui m’ont guidée à Fushimi Inari, je les ai bien vus. Je n’ai pas rêvé. Je ne suis pas folle. C’est comme si mes symbiotes voulaient me faire comprendre quelque chose.
Après tout, que sait-on du métabolisme des zébralyvox, basé sur l’électricité? Quasiment rien. Alors, ce ne serait pas la première fois que la nature nous surprendrait par son inventivité.
Depuis la pandémie, je considère avec une grande méfiance la parole des médecins, auxquels je vouais pourtant autrefois une confiance aveugle. Quand la confiance est brisée elle est très difficile à reconstruire. Mais le Professeur est différent. En mon fort intérieur, je le sens honnête et compétent. Ce n’est qu’une intuition, mais je le ressens. Mon intuition m’a quelques fois trompée, mais bien plus souvent j’ai amèrement regretté de ne pas m’être fiée à elle.
Le Professeur semble pressé de rejoindre Tokyo, mais devant l’insistance de mon Maître il accepte néanmoins de dîner avec nous.
Les restaurants sont rares et il y en a peu qui sont ouverts le soir à Nikkō. Partout, nous trouvons porte close, ou une longue file d'attente, jusqu'à ce que nous trouvions enfin une place dans un restaurant de rāmen. Il s'agit d'un bouillon de nouilles, agrémenté de viande, d'oignons et d'œufs. Simple, mais très bon. Voilà qui va, je l’espère, faire passer le goût infect que j’ai encore en bouche.
Malheureusement, les tables basses de cet établissement modeste, pas du tout conçues pour les touristes, sont très inconfortables pour la morphologie Européenne. Je ne sais pas comment me mettre, aucune position ne m'étant agréable. J'ai mal aux jambes, mal au dos.
Je suis quelque peu déstabilisée par l’enthousiasme du Professeur. Il croît dur comme fer au succès du pangolin fou. Pour ma part, j'y crois de moins en moins. Où est donc passé mon optimisme d'antan? Suis-je devenue pessimiste ? Ou trop réaliste? Pour tout dire, je pense que cette histoire va mal finir et que le pangolin fou est une utopie qui n'a quasiment aucune chance face aux puissants intérêts qui ont corrompu notre société avec l’assentiment, ou tout au moins la passivité, d’une majorité de la population. Autant combattre une armée moderne avec des arcs et des flèches.
Pendant le repas, le Professeur se risque à poser quelques questions sur la manière dont nous vivons notre relation. Mon Maître lui répond avec une délectation non feinte. Cela me réjouit, car je sens à travers ses mots le plaisir qu'il prend dans notre relation. Il est rare qu'il me témoigne directement ses sentiments et ces quelques moments pendant lesquels il exprime sa satisfaction me comblent de bonheur.
Pour ma part, je reste silencieuse, les yeux baissés. A table, une esclave baisse les yeux et ne prend pas la parole sans y avoir été invitée. C'est la règle. Enfin, du moins, c’est Sa règle, celle qu'il m'impose - la seule qui compte finalement, tant il est vrai que les relations Maître/esclave recèlent une multitude de variantes.
Ce silence imposé a l'avantage de renforcer considérablement ma perception. Quand on n'a ni le droit de parler, ni de croiser les regards, on écoute, bien attentivement, on enregistre, on décèle l’information non verbale transportée par la moindre variation d’intonation.
Lorsque mon Maître m'ordonne de remonter légèrement ma jupe, pour montrer au Professeur qu'aujourd'hui, comme chaque jour, je sors sans culotte, je m'empresse d'obéir, en m'efforçant de rester discrète pour ne pas attirer l'attention des autres clients. La sensation instantanée de chaleur au niveau de mes joues ne me trompe pas: je rougis fortement et cela se voit certainement.
Episode 2 : Zébralyvox gémellaire, le cauchemar des sadiques
De retour à l'hôtel, mon Maître ne tarde pas à retirer sa lourde ceinture en cuir ce qui déclenche instantanément une montée de stress. Depuis que nous avons atterri au Japon, il m'a frappée à plusieurs reprises avec cette redoutable ceinture, et il cogne dur. Mais je n'ai pas le choix, je suis là pour son plaisir après tout, et puis de toute façon il ne me demande pas mon avis.
Je m'empresse de me mettre en position pour recevoir les coups, bien cambrée.
- "Non, pas comme ça, salope. Je vais te frapper la chatte ce soir. Allonge-toi sur le dos, jambes en l’air, bien ouverte".
Il me tend une serviette dans laquelle il me conseille de mordre, pour atténuer mes cris, car ça va faire très mal. Il ne tient pas à ce que j'affole tout l'étage...
Dès le premier coup je ne peux m'empêcher de resserrer les cuisses, dans un irrépressible réflexe de protection, ce qui me vaut une belle engueulade. Je dois engager toute ma volonté pour les maintenir ouvertes. Qui ose dire qu'une soumise n'a pas de volonté?
A partir du sixième coup, les sensations s'atténuent brutalement. Pas de doute: les zébralyvox ont déjà migré vers ma chatte et déployé leurs filaments pour détourner l'influx nerveux. Incroyable! Ils n'avaient encore jamais réagi de manière aussi rapide.
J'en informe immédiatement mon Maître, car mes cris et mes larmes lui sont indispensables pour mesurer l'impact des coups et éviter d'aller trop loin. Je ressens encore les coups, mais ils ne me font pas mal.
Bien que son tempérament sadique en soit certainement contrarié, la nouvelle le réjouit. Cela ouvre des perspectives encourageantes. Le Professeur avait donc raison, l'infâme mixture qu'il m'a faite avaler a un effet. Comment ais-je pu douter?
Je me prends à reprendre espoir. J'ai parfois l'impression d'être une girouette, oscillant entre pessimisme et optimisme. Mais peut-être est-ce le lot de beaucoup d'humains même si peu osent l'avouer.
Je doute fort que cette découverte vaille au Professeur un nouveau moment de gloire. Au contraire, je suis persuadée que si elle était révélée il serait arrêté et condamné pour mise en danger de la démocratie.
Je me prends à penser que si les zébralyvox naturels se reproduisaient comme nous l’espérons et entraient en symbiose avec l’humanité entière, ils représenteraient un vrai cauchemar pour les sadiques et les masos. Cela obligerait la communauté bdsm à s’adapter, à se réinventer… Mais pour l’instant ce n’est pas notre principale préoccupation.
Episode 3: Chienne au pied du lit
Je me réveille au milieu de la nuit, le clitoris en ébullition, comme s’il était parcouru par des dizaines de micro-courants électriques. Je ne sais pas ce qui se passe, mais je sens le plaisir monter sous pression comme dans une cocotte minute. Je n'avais jamais éprouvé une telle sensation. Et puis j'explose dans des hurlements de plaisir, réveillant mon Maître par la même occasion !
- "Tu t'es encore masturbée, salope ?"
Oui, je sais que la masturbation m'est à présent interdite, mais impossible de lui répondre. Ce tsunami de plaisir m'a complètement désorientée.
Alors qu'il détache la courte chaîne qui relie mon collier d'esclave au pied du lit, et m'ordonne de me redresser et de m'allonger sur le lit pour recevoir une bonne correction, je m'efforce de me concentrer pour arriver à sortir quelques mots, pour lui expliquer que je n'ai pas désobéi, que je ne me suis pas touchée.
Message bien reçu ! La punition redoutée se limitera cette fois à une succession de gifles magistrales. Pour m'aider à reprendre mes esprits, m'assure-t-il. En effet, c'est efficace !
Mon Maître prend beaucoup de plaisir à me gifler et cela déclenche souvent une puissante érection. Cette fois ne fait pas exception et dans la foulée je reçois l'ordre de présenter mon cul pour recevoir la bite. Après tout, je suis là pour lui servir de vide-couilles. Comme à chaque fois je suis traversée de sensations contradictoires, inconfort, humiliation et pourtant infini bonheur de donner du plaisir.
Dès que mon cul a reçu la précieuse semence, je remercie chaleureusement mon Maître. Une esclave bien éduquée remercie toujours: être enculée est un honneur et elle le sait. Mais pas de protocole creux chez nous, pas de remerciements prononcés sans conviction. Mes paroles sont sincères, elles viennent du fond du coeur. Toujours!
Je reçois l'ordre de retourner à ma place, allongée nue sur le sol, et mon collier est à nouveau relié au pied du lit. Cette fois mes poignets sont menottés dans le dos. Précaution supplémentaire pour s'assurer que je ne me masturberai pas. Est-ce qu’il doute de ma parole ?
Mon Maître me gifle à nouveau et éteint la lumière. Pas de préliminaires, pas non plus de câlins après le sexe. C'est bestial, c’est brutal, et pourtant cela m'excite d'être traitée ainsi, de sentir le plaisir qu’il y prend...
Episode 4: Retour à Tokyo
Au petit matin, mon Maître m'annonce que nous allons retourner immédiatement à Tokyo. Il y a encore tant de lieux à visiter dans les environs de Nikkō, mais il lui paraît prudent de retrouver le Professeur rapidement pour avoir un diagnostic du phénomène en cours et faire les analyses qui s'imposent. Un avis que je partage amplement, mais peu importe - il ne me demande pas mon avis.
Par chance, il reste encore quelques places dans le Spacia X. J'adore ce train! Au départ de Nikkō, les vastes vitres panoramiques m'offrent un spectacle inimaginable en Europe: les employés de la compagnie ferroviaire se sont alignés sur les quais et s'inclinent pour saluer respectueusement les voyageurs en partance.
Dans le train, je sens à nouveau mon clitoris s’électrifier. Même pas le temps de prévenir mon Maître, je sors à toute vitesse une serviette de ma valise et je mords dedans de toutes mes forces pour atténuer les hurlements de plaisir qui ne tardent pas à surgir. Je n’y parviens qu’imparfaitement. Mais les japonais savent rester discrets, ne pas montrer leur étonnement face à une salope qui hurle de plaisir dans le train…
Le Professeur est un peu surpris de nous voir de retour de sitôt. Comme mon Maître me l'a ordonné, je me déshabille immédiatement après les salutations et je reste bien entendu silencieuse pendant la dégustation du thé matcha. C'est mon Maître qui lui explique ce qui s'est passé et s'enquiert de son avis.
Episode 5 : Dans les profondeurs du chaos renaît l'espoir
Le Professeur déteste perdre de temps et parler pour ne rien dire. Nous rejoignons très vite l'université Kitasato, où nous retrouvons le jeune homme qui nous fait entrer discrètement par une porte dérobée. Il semble encore plus inquiet que l'autre fois. Il doit se dire que l’on va finir par se faire remarquer et que quelqu’un va nous dénoncer aux Brigades de Défense de la Démocratie.
Pas de temps à perdre. Je retire ma jupe et m'apprète à m'installer dans le dispositif d'imagerie quand je reçois une sacrée baffe.
- "Retire ton haut, connasse !"
Dans ma précipitation, je m'étais dit que, puisque les zébralyvox sont dans mon clitoris, pas dans mes mamelles, je pouvais gagner du temps. Grave erreur ! Penser au plaisir des hommes doit occuper à chaque instant l'esprit d'une esclave bien éduquée. J'ai encore beaucoup à apprendre.
Je préfère quand mon Maître m'appelle par mon prénom, Ysideulte, mais je dois me faire une raison... Maintenant je me prénomme salope, chienne, connasse...
Je m'installe toute nue dans la machine, cuisses bien ouvertes pour ne pas gêner les mouvements rapides des têtes Doppler à couplage quantique qui s'activent autour de ma chatte - le dernier cri de la technologie. La localisation des zébralyvox est difficile et nécessite de la fusion multicapteurs. Mais elle nettement plus rapide cette fois. Le Professeur sait exactement où chercher : dans mon clitoris !
Ils ont l’air tranquilles, fixés sur les fibres nerveuses. Ils vibrent de manière synchrone ce qui permet de les détecter au Doppler. Rien de nouveau. Bizarre…
Le Professeur s’adresse à mon Maître : « Si vous le permettez, on va la laisser en observation et enregistrer les images »
Il a bien compris que ce n’est pas moi qui décide…
« Oui, bien sûr. Il vaudrait mieux l’attacher pour qu’elle ne bouge pas ».
Quel pervers !
Ils s’éloignent et me laissent seule, attachée dans la machine d’imagerie. Je les entends discuter à voix basse dans le fond de la salle, mais je ne peux ni les voir, ni comprendre ce qu'ils disent. Je crois qu’ils prennent un café pendant que je me morfonds dans cette machine. Fidèle à son tempérament pervers mon Maître m'a écarté les jambes au maximum lorsqu'il m'a attachée. Ca tire fort sur les ligaments!
La position est inconfortable et, immobile, nue, j’ai de plus en plus froid. J’espère que ça ne va pas être trop long. Si je pouvais me masturber, peut-être que ça déclencherait quelque chose. J’aurais dû suggérer l’idée. Là, attachée, impossible de m’auto-stimuler.
Les heures passent, lentement, très lentement... Je suis frigorifiée et ankylosée quand des sensations commencent à me parcourir le clitoris. Les picotements causés par les décharges électriques finissent pas me faire hurler de plaisir. Les trois hommes accourent.
J'assiste à un spectacle incroyable sur l’écran de l’appareil d’imagerie, commenté en direct par le Professeur. Les deux paires de zébralyvox ont déployé un complexe réseau de filaments interconnectés au cœur duquel chaque individu a déposé une boule d’une sorte de liquide visqueux. De puissants éclairs éclatent entre nœuds opposés du réseau, là où se sont positionnés les zébralyvox. Je me demande s’ils fusionnent ainsi leurs esprits, comme dans Cocoon. Le summum du plaisir sexuel ! Le plaisir délivré directement dans les neurones, sans intermédiaire.
Les quatre boules fusionnent rapidement en une seule. Peu à peu, une multitude de Streptomyces Avermitilis Inari vient s’agglutiner à la surface de la boule et commence à la mettre en mouvement. C'est comme un complexe mouvement de convection, d'allure chaotique - un brassage des patrimoines génétiques qui semble aléatoire mais dont la structure cachée finit par se dessiner sous forme d'oscillations autour d’un attracteur double.
- "On dirait un attracteur étrange !"
- "Pardon?" me demande le Professeur, qui visiblement ne connaît pas le concept.
L'occasion pour moi de lui faire un mini-cours de théorie du chaos. L'attracteur étrange. L'ordre caché dans les profondeurs du chaos. Si on m'avait dit qu'un jour j’étalerais ma science devant un prix Nobel !
- "Attention, si vous la branchez sur certains sujets, vous ne pourrez plus l'arrêter" prévient mon Maître.
Dans certaines circonstances, la fille timide se transforme en une intarissable bavarde...
Un attracteur double, régi par les lois du chaos, qui engloutit tout sur son passage. Je viens d'assister en direct à la naissance d'une nouvelle paire de zébralyvox. Une structure gémellaire qui restera intriquée pour la vie. Ce n'est même pas encore un embryon, je ne sais pas exactement ce que c’est, mais il porte tant d'espoirs à mes yeux que je sens des larmes de bonheur couler sur mes joues.
à suivre
Contexte
(*) L’histoire se situe dans la seconde moitié de notre décennie, la France étant à présent membre de la Suprême Alliance Démocratique, une puissante fédération de démocraties modernes et progressistes. Pour en savoir plus sur le contexte social, humain, et technologique, la liste de mes articles précédents se trouve ici : https://www.bdsm.fr/sylvie35/blog/ (à lire de préférence dans l’ordre chronologique de leur publication).
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"Le monde se fait rêve et rêver devient monde. Nous rêvons de voyager à travers l’univers, l’univers n’est-il donc pas en nous ? Il est certain que la conviction se trouve infiniment renforcée dès l'instant où une autre âme accepte de la partager. La nature de la maladie est aussi obscure que la nature de la vie". Novalis (1772-1801), de son vrai nom Georg Philipp Friedrich von Hardenberg, représente une sainte image de la littérature allemande, l’icone de la pureté même. Et sa fleur bleue qu’il chercha partout de part le monde reste un idéal européen d’utopies merveilleuses. Mais derrière cette lumière projetée se trouvent les mystères de Novalis. Qui est ce songeur de rêves magiques qui amis en route tous les pèlerins de l’Orient, tous les assoiffés d’amour éternel. ? Lui, sorte de licorne enchantée passée dans la poésie européenne, il était l’élu, celui qui sait et marche vers la sainte lumière. Mort à vingt-huit ans, dégageant une grâce surréelle, il sera ainsi comparé à un Mozart des lettres, la joie en moins. Le romantisme n’a jamais produit d’écrivain et d’œuvres si pures, si apparemment simples et lisses, si mystérieuses aussi. Ses œuvres et ses amours étaient imbriqués, inaccomplis tous deux. De lui il ne reste que "Les Disciples à Saïs", son pseudo-roman "Henri d’Ofterdingen", restés inachevés tous deux, "Les Hymnes à la Nuit", "les Chants spirituels", des "Fragments", un bref "Journal" et quelques lettres. Mais ses œuvres, ses amours, sa présence et sa mort ont eu tout le rayonnement profond d’une opération magique sur le romantisme, dont il reste et demeure la rosée même, ce souffle de l’ailleurs, cet appel vers le haut. Il exerce une présence douce et fraîche comme la bonne ombre des arbres qui tremblent pour nous. Ce vent qui les remue doit être le souffle de pureté de Novalis. Novalis est aussi bien dans sa vie que dans ses écrits une aspiration vers le haut, le sublime, un élan pur tendu vers l’infini. Une harmonie fragile et parfaite émane de ses vers, leur simplicité de fleurs dressées. Orphée au doux sourire il est donc passé très vite. Novalis s’appelait en fait Georg Friedrich Philip von Hardenberg. Il était né le deux mai 1772 dans un très vieux château médiéval de sa famille à Oberwiederstett, bâtisse pleine de rumeurs depuis le XIIIème siècle, d’étangs noirs, d’arbres sous le vent. Enfant chétif, avec une frairie de neuf frères et sœurs, il semble après bien des maladies ne renaître que vers neuf ans. À onze ans il sait le grec et le latin. Plongé tout le temps dans la lecture de contes et de poèmes, il traversait son enfance en rêvant. Ses années d’apprentissage se font d’abord à Iéna en 1770, puis en 1791 à Leipzig. Mais il n’apprendra vraiment qu’à l’Université de Wittenberg. La suite est l’histoire de deux amours, Sophie von Kühn, "l’âme de ma vie et la clé de mon propre moi", rencontrée en 1974 et morte en 1797, et qu’il verra toujours en pensée. Et puis les années Julie, Julie von Charpentier.
"Le saint frisson de la mélancolie, le sortilège, en nous, du souvenir, ont opéré profondément à fraîchir notre ardeur". La mort de ses amis, de ses frères, l’accompagne tout au long de son court chemin. Lui, de plus en plus transparent, s’en va vers l’épuisement. Les rencontres avec Goethe, avec Schlegel, sa renommée grandissante, ne l’apaisent pas. Il mourra de "manière si douce et si sereine" que ses amis pensaient voir partir un saint. C’était le vingt-cinq mars 1801 à Weissenfels, dans l’après-midi. Il avait demandé des livres, à son frère de jouer du piano, et il s’endormit doucement pour toujours. "Je veux mourir joyeux comme un jeune poète", écrivait-il. Sa légende lumineuse pouvait commencer, ses écrits d’un Orphée tendre vont la renforcer. "Le poète le plus pur de tous, le poète absolu", allait vivre dans le monde occidental comme le plus beau de nos fantômes. Une de ses œuvres est particulièrement bouleversante, car elle marque le cheminement d’un être. Il s’agit de son journal intime écrit depuis le 31ème jour, (18 avril 1797), jusqu’au 110ème jour, (6 juillet), de la mort de Sophie. Dans cette montée vers le dépassement nous tenons une des œuvres les plus hautes du romantisme: "À mesure que la douleur sensible cède et s’atténue, le deuil spirituel grandit et l’affliction spirituelle s’accroît en moi, une sorte de désespoir paisible s’élève toujours plus haut. Le monde me devient toujours plus étranger. Les choses autour de moi, toujours plus indifférentes. Et à mesure, tout se fait alors maintenant plus clair en moi et dans ce qui m’entoure". D’où vient l’attrait de la poésie contemporaine pour Novalis ? Sans doute de cette pureté originelle que notre époque recherche avec nostalgie, et errance. Aussi de cette manière qu’à Novalis de dépasser le réel, de voir par-dessus l’avenir radieux avec sa vocation brûlante d’éternité qu’il irradie. L'arrière-plan, c'est le XVIIIème siècle expirant, le siècle du rationalisme de la bourgeoisie combattante, victorieuse et consciente de sa victoire. Alors qu'à Paris, les doctrinaires rêvaient avec une cruelle et sanglante rigueur les possibilités du rationalisme jusqu'à leurs dernières conséquences, dans les universités allemandes, un livre après l'autre minait et détruisait le fier espoir en la toute-puissance de l'entendement. Napoléon et la réaction intellectuelle étaient déjà dans une proximité angoissante, après une nouvelle anarchie déjà en décomposition, s'annonçait le retour à l'ordre ancien. Iéna à la fin du XVIIIème siècle. Juste un incident alors dans la vie de quelques hommes.
"Les blessures existent , d'un mal éternel. Nous avons tous au cœur une tristesse divinement profonde qui demeure, et qui fait de nous tous un même flot. Et de façon mystérieuse, nous, dans, ce flot, nous allons nous jeter dans l'océan immense de la vie au plus profond de Dieu". La terre entière résonne de batailles, d'effondrements de sociétés entières, mais dans une petite ville d'Allemagne, quelques jeunes gens se réunissent et se proposent de créer à partir de ce chaos une nouvelle culture harmonieuse et universelle. Ils s'attaquent intempestivement à cette tâche, avec cette naïveté incompréhensible et follement hardie qui n'est donnée qu'aux hommes maladivement conscients, et même à ceux-là, seulement pour une seule chose de leur vie, et même dans ce cas, seulement pour quelques instants. C'était une danse sur un volcan, un rêve brillant et improbable . De nombreuses années plus tard, le souvenir de cette époque devait vivre encore dans l'âme d'un spectateur comme quelque chose de confus et paradoxal. Car malgré la richesse de ce qu'ils avaient rêvé et semé, "il y avait néanmoins quelque chose de pourri dans l'ensemble". Il s'agissait de construire une tour de Babel spirituelle, mais il n'y avait que de l'air pour tout fondement. Elle devait s'écrouler, mais dans sa chute tout s'est effondré chez ses constructeurs. Friedrich Schlegel a écrit une fois que la Révolution française, la théorie fichtéenne de la science et le Wilhelm Meister de Gœthe étaient les trois grandes tendances de l'époque. Des hommes appelés à être des hommes d'action ont dû se taire, s'épuiser jusqu'à la mort ou bien sont devenus de simples utopistes qui passèrent leur vie dans les virtualités courageuses de la pensée. Des hommes qui de l'autre côté du Rhin seraient devenus des héros tragiques n'ont pu vivre ici leur destinée que dans la poésie. La constatation de Schlegel est donc, si l'on tient compte de l'époque et des circonstances, étonnamment juste et objective. Il est même étonnant qu'il accorde tant d'importance à la révolution, car pour la vie spirituelle de l'Allemagne, Fichte et Gœthe étaient réellement les grandes tendances de la vie authentique, alors que la révolution avait à peine une signification concrète. Puisqu'on ne pouvait penser à un progrès extérieur, l'énergie des meilleurs s'est orientée vers la vie intérieure, et bientôt "le pays des poètes et des penseurs" dépassa tous les autres en profondeur, en finesse et en intensité spirituelle. Mais par cela même, l'abîme qui séparait les sommets de la base devenait de plus en plus grand. C'était en vain que ceux qui arrivaient en haut étaient pris de vertige devant la profondeur des abîmes et qu'ils avaient le souffle coupé par la rareté de l'air des hauteurs. La descente était déjà devenue impossible, car tous ceux qui étaient restés en bas vivaient dans des siècles depuis longtemps dépassés, et il était tout aussi inconcevable de les élever pour y construire une base plus large et plus solide. il n'y avait plus alors que le chemin qui continuait vers la hauteur, jusqu'à la solitude mortelle.
"L’extérieur est un intérieur élevé à l’état de mystère. Le rêve est un bouclier contre la régularité, la monotonie de la vie, il est un libre divertissement de notre imagination enchaînée qui mélange alors toutes les images de la vie et interrompt le sérieux continuel de l’adulte par un joyeux amusement d’enfant". Tout semblait disloqué. Chaque sommet se dressait dans un espace vide. Déjà, l'effet du rationalisme était dangereux et dissolvant. Il détrônait, au moins sur le plan de la pensée, toutes les valeurs établies et la seule attitude courageuse de défense était une réaction affective, en dernière instance tout aussi atomisée et anarchique. Et lorsque les fières armures des deux combattants furent détruites par les mains de Kant, il semblait qu'il ne restait rien qui eût pu introduire un ordre dans la masse croissante de connaissances nouvelles et dans la profondeur obscure. Seul Gœthe y est parvenu. Dans cette mer d'individualismes arbitraires et déchaînés, son culte tyranniquement conscient du moi est une île merveilleusement florissante. Tout autour de lui l'individualisme dépérissait, se décomposait en anarchie des instincts, mesquinerie perdue dans les détails et les états d'âme, renoncement appauvrissant. Lui seul est parvenu à trouver un ordre en et pour lui-même. Il a ainsi eu la force d'attendre tranquillement l'instant où son bonheur lui apporterait la plénitude, mais aussi la force de refuser avec une froide indifférence tout ce qui était dangereux et menaçant. Il a su mener son combat sans jamais mettre en jeu l'essentiel ni jamais abandonner rien d'essentiel dans ses traités de paix et ses compromis. Ses conquêtes étaient telles que sous son regard les déserts se transformaient en jardins, et lorsqu'il abandonnait, ce qu'il perdait ne faisait que renforcer et rendre plus harmonieux ce qu'il continuait de posséder. Et néanmoins, en lui aussi s'agitaient toutes les forces déchaînées de l'époque, et ses propres foudres maîtrisaient en lui des titans plus dangereux peut-être que les démons qui luttaient en ceux qui étaient précipités dans Novalis et la philosophie romantique de la vie. Il a fait face à tous les dangers et les a tous vaincus. Il a vécu toutes les souffrances de la solitude mais a organisé sa vie de manière à être toujours seul. Toute résonance venant de l'extérieur était pour lui un gain surprenant, un hasard heureux, mais toute sa vie a été une nécessité à la fois grande, cruelle et glorieuse que toute renonciation devait enrichir autant que toute acquisition.
"Assurément, nous vieillirions plus vite sans les rêves, si nous ne considérons pas le rêve comme un don immédiat du ciel, du moins est-ce l'exquise tâche et un amical compagnon dans le pèlerinage vers la tombe". Il est certain que ce serait la manière la plus profonde de parler des préromantiques que de raconter en détail ce que Goethe a représenté pour chacun d'entre eux à chaque instant de leur vie. On entendrait alors des ivresses exaltées de victoire et des tragédies muettes, d'immenses épanouissements, des aventures risquées et des voyages à la dérive, et on entendrait surtout les deux cris de combat fondus en un seul: arriver jusqu'à lui et le dépasser. Il est vrai que l'ensemble, bien qu'éparpillé sur toute l'Allemagne, n'était au fond qu'un salon littéraire, la création d'un groupe d'écrivains fondée sur une pensée sociale. Les personnalités les plus indépendantes et les plus individualistes s'y trouvaient réunies. Chacun d'entre eux avait atteint, par des chemins longs et difficiles, le point où il pouvait enfin voir la lumière du soleil et où s'ouvrait devant lui un vaste horizon. Chacun avait souffert toutes les tortures d'un homme abandonné dans le désert, assoiffé de culture et de communauté, les tragiques et douloureuses extases d'un individualisme tendu à l'extrême. Ils sentaient que le chemin qu'ils avaient parcouru, et avant eux, toute jeune génération de l'Allemagne en train de s'éveiller, menait au néant. Et presque en même temps, ils voyaient tous la possibilité de dépasser le néant vers l'être,de se libérer de l'anarchie littéraire qui leur était imposée par les circonstances pour s'orienter vers des buts fertiles et créateurs. Peu de temps avant eux, Goethe avait atteint ce but. Et peut-être cette réussite a-t-elle été pour cette génération l'aide décisive qui les a sauvés de cet énervement permanent, désorienté, dissolvant, qui avait détruit depuis un demi-siècle les plus grands esprits de l'Allemagne. Aujourd'hui nous appellerions probablement culture ce qu'ils cherchaient, mais eux, lorsque cela s'est présenté pour la première fois comme fin possible et salvatrice, ont trouvé des milliers de formules poétiques pour le décrire et ont vu des milliers de chemins pour s'en rapprocher. Ils savaient que chacun de leurs chemins devait y mener. Ils sentaient qu'il fallait assimiler tout l'imaginable, vivre tout le vivable pour que "l'Église invisible" qu'ils avaient vocation de créer devienne pleine de richesses et embrasse le monde. Il semblait qu'une nouvelle religion allait naître, panthéiste, moniste, déifiant le devenir, née des nouvelles vérités et des découvertes des sciences naturelles.
"La poésie plutôt que la poudre. Un mot, une phrase contiennent des charges explosives, susceptibles de libérer leur énergie latente lorsque s'offre l'occasion, qui servira de détonateur". Mais Novalis voyait avec la même clarté ce que Gœthe avait dû sacrifier pour y parvenir, et toute sa nature se révoltait contre la prétention de reconnaître cette solution comme la seule possible. Lui aussi avait comme fin la dernière harmonie de Wilhelm Meister et il voyait avec la même clarté que Gœthe à quel point étaient dangereux les commencements et les chemins de cet itinéraire. Il croyait que Gœthe s'était appauvri en atteignant le but et que ses sacrifices avaient dépassé ce qui était indispensable pour y parvenir. C'est ici que la voie du romantisme se sépare de celle de Gœthe. Tous deux cherchent l'équilibre des mêmes forces opposées, mais le romantisme exige qu'aucune force ne perde en intensité pour obtenir l'harmonie. Son individualisme est plus dur, plus entêté, plus conscient et plus pur de tout compromis que celui de Gœthe. Mais les romantiques veulent atteindre l'harmonie dernière précisément en poussant cet individualisme jusqu'à ses limites extrêmes. La poésie est leur éthique, et la morale leur poésie. Novalis dit une fois que la morale est fondamentalement poésie et Friedrich Schlegel penseque toute originalité authentique et originelle constitue déjà comme telle une valeur morale. Et néanmoins leur individualisme ne doit pas conduire à l'isolement. Novalis a dit: "Notre pensée est dialogue, et notre sensibilité sympathie". C'est le rêve archaïque de l'âge d'or. Mais leur âge d'or n'est pas un trésor des époques anciennes définitivement perdu qu'on ne rencontre plus que dans les beaux contes, c'est au contraire la fin, le but, et c'est le devoir de chacun de l'atteindre. C'est cela la "fleur bleue" qui doit être recherchée partout et toujours par les chevaliers rêveurs, c'est cela le Moyen Age qu'ils adorent avec ferveur, c'est cela le christianisme qu'ils professent. Il n'y a rien que l'homme ne saurait atteindre, le temps doit arriver où rien ne sera impossible. "On accuse les poètes d'exagérer, a dit Novalis. Il me semble cependant que les poètes n'exagèrent pas assez. Ils ne connaissent pas les forces qu'ils maîtrisent ni les mondes qui doivent leur obéir". Novalis est le seul poète de l'école romantique. Ce n'est qu'en lui que toute l'âme du romantisme est devenue chant et seulement chez lui de manière exclusive. Les autres, si on peut dire qu'ils étaient poètes, n'étaient que des poètes romantiques. Le romantisme ne leur a donné que des thèmes nouveaux, a changé seulement leur orientation, ou les a enrichis.
"Nous avons à être non pas simplement des hommes, nous devons aussi être plus que des hommes. L’homme est en somme tout autant que l’univers. Ce n’est rien de défini mais il peut et doit en même temps être quelque chose de défini et d’indéfini". Mais ils étaient déjà poètes avant de découvrir en eux ces nouveaux sentiments et le sont restés même après s'être détournés de tout romantisme. La vie et l'œuvre de Novalis, il n'y a aucun moyen d'éviter ce lieu commun qui est la seule formule adéquate, constituent une unité inséparable et c'est précisément en tant que pareille unité qu'elles sont un symbole du romantisme dans son ensemble. On dirait que la poésie romantique, offerte et perdue dans la vie, a été sauvée par sa vie et serait devenue par cela même une poésie plus pure et plus authentique. Il n'y a pas de tentative romantique qui, sur ce point, ne soit restée pure tentative, mais leur volonté nécessairement fragmentaire d'unité n'est restée chez aucun des romantiques si fragmentaire que chez lui, qui dut mourir précisément lorsqu'il commença à créer. Et néanmoins il est le seul dont la vie n'ait pas laissé derrière elle seulement un bel amas de ruines duquel on peut déterrer quelque morceau merveilleux pour se demander, étonné, quelle a pu être la bâtisse dont il a peut-être jadis fait partie. Ses chemins l'ont tous conduit au but, et ses questions ont toutes trouvé une réponse. Tous les fantômes et tous les mirages du romantisme ont trouvé ici une incarnation. Il a été le seul que les feux follets du romantisme n'aient pas pu attirer dans des marais sans fond car ses yeux étaient capables de voir dans chaque feu follet une étoile et parce qu'il possédait des ailes pour la poursuivre. Il a été celui qui a rencontré la destinée la plus cruelle, et lui seul a été capable de croître dans cette lutte. De tous ces gens qui voulaient dominer la vie, il est le seul qui ait réussi à forger la sienne et à en faire une œuvre d'art. Mais lui non plus n'a pas trouvé une réponse entièrement adéquate à sa question, car il interrogeait la vie et c'est la mort qui lui a répondu. Peut- être est-ce encore plus grand de chanter ainsi la mort que la vie. Mais ils n'étaient pas partis en quête d'une telle chanson. C'est la tragédie du romantisme que seule la vie de Novalis ait pu alors devenir poésie. Sa victoire est une condamnation à mort de toute l'école. Car tout ce avec quoi les romantiques voulaient conquérir la vie ne suffisait que pour une belle mort. Leur philosophie de la vie n'était qu'une philosophie de la mort, leur art de vivre un art de mourir. Car leur désir d'embrasser l'univers tout entier faisait d'eux des esclaves de toute destinée, peut-être Novalis ne nous paraît-il si grand et si entier que parce qu'il est devenu l'esclave d'un maître invincible.
"Les fleurs, les arbres, tout poussait avec force, tout verdissait avec vigueur. Il semblait que tout avait reçu une âme. Tout parlait, tout chantait". Le treize mai 1797, cinquante-six jours après la mort de Sophie, car le journalintime du poète s’ordonne à partir de ce décès, Novalis fait bel et bien l’épreuve d’une "vision" sur la tombe deSophie. Dans son journal, il raconte cette journée. Levé à cinq heures du matin, le poète s’acquitte de tâches diverses avant de recevoir par la poste une lettre du cadet des Schlegel accompagnée de la traduction toute fraîche du "Songe d’une nuit d’été" et de "Roméo et Juliette" par August Wilhelm Schlegel. Il y connaît alors une angoisse et une détresse intenses auxquelles succèdent un sentiment de plénitude, de joie et d’éternité, ainsi que la "vision" de Sophie, l’amenant à célébrer la puissance de la nuit. Les termes par lesquels l’auteur décrit brièvement son expérience dans son journal sont ceux-là mêmes que l’on retrouve dans le troisième hymne. Il achève le récit de sa journée par ces mots: "Shakespeare m’a donné beaucoup à penser". Dans la mesure où l’enchaînement de la lecture de Shakespeare et de la visite au cimetière est sans intervalle, on peut supposer que cette lecture a constitué l’influence la plus décisive, ou à tout le moins la plus immédiate, sur l’expérience fameuse du mois de mai 1797. Le théâtre shakespearien, évidemment augmenté de nombreuses réminiscences littéraires et philosophiques, a alors probablement libéré en Novalis un "regard" mystique. L’étroitesse des liens qui se tissent entre la mort de Sophie, la lecture de "Roméo et Juliette", l’expérience personnelle et solitaire d’une "vision", et l’écriture des "Hymnes à la nuit" est évidente. Mais les trois années qui séparent cette journée de la publication dans l’"Athenäum" nous permettent de supposer que l’écriture a été laborieuse, maintes fois reprise. Novalis est réputé pour sa poésie "nocturne", que l’on associe, et à tort, à une dimension d’invisibilité. Des "Fichte-Studien" au "Brouillon général" en passant par les "Disciples à Saïs", Novalis ne cesse pourtant d’insister sur la dimension visible de l’expérience. Dans ses fragments, il espère ainsi la venue d’une "machine sensiblement perceptible", corps-organe de la connaissance. Ce monde lumineux, ce règne des métamorphoses et multiples variations, cette chatoyance infinies des couleurs que les "Disciples à Saïs" célèbrent, doivent être laissés là. Sans raison, il se laisse happer par l’obscurité.
"Mon amour s'est transformé en flamme, et cette flamme consume peu à peu ce qui est terrestre en moi". La nuit qui est de prime abord proclamée par Novalis, et appelée de ses vœux, c’est ce qui, contrairementà la lumière, est ineffable et rend possible l’oubli. Comme chez Shakespeare, la nuit est un manteau ("Mantel") protecteur, elle est la promesse de laisser là les souvenirs, de ne pas se rappeler, de n’être que l’enveloppe sur laquelle s’enlève la mémoire du monde. D’où le passage de la mélancolie à la joie. La nuit tient alors sa promesse, et sa bienveillance est due au fait qu’elle purifie la lassitude des images diurnes et historiques. Les rêves d’enfance, les joies trop brèves de la vie, tous ces fragments de l’histoire d’un moi ne sont sans doute pas annulés, mais ils s’inscrivent sur les contours d’un champ neutre, asubjectif, anhistorique. Le visage, qui n’est le visage de personne sinon de la totalité du sensible. Chez Novalis, le visage infiniment bouclé de la matrice nocturne voit le moi voyant. Seule l’image est dotée d’yeux. Espace sauvage et jamais entièrement habitable, la nuit est le lieu où doit s’établir l’existence en sa fuite du jour. Cette fuite du diurne est aussi bien un affrontement, car dans le jour c’est en fait la nuit qui se donne. La nuit doit être affirmée dans sa pleine positivité. La nuit est un monde nouveau qui doit se gagner. On ne se laisse pas voir facilement. C’est à un travail de conversion qu’il faut s’exercer, et les deux premiers hymnes ont habilement préparé le terrain au troisième hymne. On sait cependant que le troisième hymne est en réalité le premier. Cela signifie aussi que quelque chose échappe au travail et à la préparation. L’angoisse signale une venue, et quelque chose vient en effet. En l’occurrence, quelque chose de peu remarquable communément. La nuit tombe. Mais pour Novalis, dont l’esprit résonne encore de l’appel tragique des amants shakespeariens, cette nuit va brusquement réaliser et produire effectivement la transmutation complète des valeurs que Juliette exigeait, un monde nouveau va apparaître. La survenue du nocturne va ainsi perturber entièrement le sens du deuil, et c’est en cela que Novalis fait une expérience "mystique". On voit combien Novalis est hésitant par rapport à la lumière. Bien qu’il l’ait restaurée après la vision mystique, accordant que la nuit ne reçoit d’efficace que dans un jeu complexe avec la lumière à laquelle il prêtait ses bras, la lumière de l’ancien monde se voit à présent évacuée. Puisque ce fut l’unique rêve, toute nouveauté ne peut être que toute nouveauté diurne, alors insignifiante au regard de la nuit.
"Le rêve nous apprend d’une manière remarquable la subtilité de notre âme à s’insinuer entre les objets et à se transformer en même temps en chacun d’eux". L’activité des dernières années de Novalis est alors plus intense qu’elle ne l’a jamais été. Qui plus est, il se fiance à nouveau, avec Julie von Charpentier. Et deux semaines déjà après la vision, un enthousiasme subit pour la philosophie, non sans lien avec le caractère événementiel de ce qu’il a vécu, fait son apparition. De santé fragile depuis sa naissance, Novalis côtoie la maladie, la sienne ou celle de ses proches, depuis toujours. Il allait se marier avec Julie von Charpentier lorsque sa phtisie s'intensifie. Malgré une cure à Teplitz, il meurt alors l'année suivante à Weissenfels d'un épanchement de sang consécutif à sa phtisie. Il a alors vingt-huit ans et laisse derrière lui une œuvre extraordinaire par sa créativité, son élévation spirituelle et la beauté de son expression. L’œuvre, polyphonique, marque par sa profondeur, tant au regard de la théorie de la littérature qu'à celui de l'histoire des sciences ou au niveau de l'élaboration d'une philosophie transcendantale renouvelée après Kant, puisque Novalis marque de son empreinte chacun de ces domaines. Son ami Friedrich Schlegel et son frère Karl assisteront à ses dernières heures. L'œuvre de Novalis est aussi bien littéraire, poétique, que philosophique et scientifique. Ayant peu publié de son vivant, il est néanmoins l'auteur de milliers de notes théoriques, alliant science naturelle, poésie, économie, politique et philosophie. L'essentiel de ces notes, prises entre 1798 et 1799, font partie d'un ensemble intitulé "Das allgemeine Brouillon" ("Le Brouillon général"). L'œuvre de Novalis a fait l'objet d'études variées, essentiellement en allemand, mais aussi en français, en anglais ou encore en italien. Pour autant, il a fallu beaucoup de temps pour que l'on fasse droit à la complexité de la pensée novalissienne en France. Ainsi, Novalis a d'abord été perçu comme un poète essentiellement aérien, céleste, tourné vers un au-delà inaccessible et invisible, et dont toute l’œuvre tournerait autour de la mort de sa fiancée. On oblitère alors l'essentiel de son rapport à la terre, à la nature et au sensible, et l'on passe à côté de ses œuvres théoriques et philosophiques en même temps que l'on caricature sa poésie. Dès avant la mort de Sophie et après celle-ci, les écrits de Novalis montrent pourtant un visage beaucoup plus subtil. Son œuvre occupe une place centrale dans les travaux consacrés au romantisme allemand, mais aussi dans les œuvres de nombreux écrivains qui ont reconnu l'influence de Novalis: Roger Ayrault, Gaston Bachelard, Albert Béguin, Walter Benjamin, Geneviève Bianquis, Maurice Blanchot, Bebel, Brion, Marcel Camus, Carlyle, Wilhelm Dilthey, Ebler, Armel Guerne, Georges Gusdorf, Huch, Kluckhohn, Lichtenberger, Lion, Lukàcs, Maurice Maeterlinck. Novalis est l’image lisse de l’admirable, il nous fascine comme une statue parfaite. Il nous donne un avant-goût de l’immortalité vers laquelle nous aspirons tous. Novalis nous guide ainsi vers notre intérieur.
Bibliographie et références:
- Gaston Bachelard, "Psychanalyse, le complexe de Novalis"
- Maurice Besset, "Novalis et la pensée mystique"
- Frédéric Brun, "Novalis et l'âme poétique du monde"
- Laure Cahen-Maurel, "L'art de romantiser le monde"
- Maurice Colleville, "Étude sur l'œuvre et la pensée de Novalis"
- Augustin Dumont, "L'opacité du sensible chez Fichte et Novalis"
- Pierre Garnier, "La poésie nocturne de Novalis"
- Armel Guerne, "Novalis ou la vocation d'éternité"
- Georg Lukács, "Novalis et la philosophie romantique de la vie"
- Gil Pressnitzer, "Novalis, La fleur bleue et l’éternité"
- August Coelestin Just, "Novalis vu par ses contemporains"
- Jean-Édouard Spenlé, "Novalis, essai sur l’idéalisme romantique"
- Gérard Valin, "Novalis et Henri Bosco, deux poètes mystiques"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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Petit rappel même s'il est complètement évident que tout le monde, maintenant, connaît cette série :D
Cette série concerne à la fois le dressage de mon esclave et l'aménagement, en parallèle, d'une pièce spéciale (vous pourriez l'appeler un donjon, mais je n'aime pas trop ce terme).
Il faut imaginer une pièce complètement vide, et, chaque récit verra apparaître un nouvel objet.
NDM: je ne considère pas le collier et la laisse comme 2 objets. C'est discutable mais, pour moi, ils sont indissociables de mon esclave. J'aurais aimé ajouter un gag à mon esclave. Je ne l'ai pas fait, par contre.
Partie 1 (sofa) - Partie 2 (grande et belle table en bois)
Comme à chaque séance, tu réponds quand je t'appelle pour entrer dans notre pièce. A genoux, en lingerie noire. Maquillage soigné, rouge vif qui décore non seulement tes lèvres mais barre ton front d'une SALOPE. Tu es prête à être utilisée comme je voudrais. Tu as conscience que tu es ici pour ton éducation et mon plaisir.
Je ne rentrerai pas dans les détails mais tu sais très bien que tu m'as déçu ces derniers jours. J'imagine que tu sais que tout va se régler aujourd'hui.
Je prends la laisse et je traîne jusqu'à la table que je fais descendre.
- Regarde moi. Tu sais que tu vas être punie pour ton comportement récent ?
- Oui Maître, je le sais, je le sens et je le veux. Je le mérite. Je suis ta salope et je veux que tu m'utilises. Mais je comprends que je dois mériter ce droit et je suis heureuse de payer pour te servir ensuite. Si tu le souhaites, bien évidemment Maître.
- Monte sur la table ! Prends ton string et mets-le dans ta bouche. Je n'ai pas envie de t'entendre dire Merci ou plus fort quand je te fesserai. Je n'ai pas du tout envie de t'entendre, d'ailleurs.
Tu te mets en position. Tu as remarqué les liens sur la table. 4 liens dont la largeur est ajustable. 2 pour les mains, 2 pour les pieds. Tu vas naturellement positionner tes mains dans les menottes que je serre fort.
Pas encore de baillon dans cette pièce et c'est bien dommage mais ton string fait l'affaire pour l'instant. Ni de paddle ou de fouet. Mes mains devront suffire.
Et elles suffisent jusqu'à ce que ton cul soit rose foncé.
La marque des mes mains disparaît au fur et à mesure que tout ton cul se colore.
Je te traite de tous les noms. Je cite également tout ce que je veux ajouter à cette pièce. Un objet à chaque fois, c'est finalement trop peu. Je voudrais que ton dos, tes cuisses soient zébrés maintenant. Pas juste ton joli cul.
Mes mains chauffent, je me rapproche de ton cul pour le mordre et il dégage une belle chaleur également.
Sans même y réfléchir, je retire ma ceinture. Ce n'est pas tricher, de toute façon. Je l'avais sur moi et je fais les règles.
Quelques minutes intenses et ton corps est zébré, des épaules au bas des cuisses.
Quelques minutes de plus encore. Je n'arrive pas à m'arrêter.
Je pense, non, je suis certain que je n'ai jamais été aussi prêt de perdre le contrôle et je sais que tu sentiras la douleur pendant toute la séance. Sans doute même bien les soins post-séance.
Je détache tes mains. Tourne-toi salope ! Dos contre la table. Remets tes mains en place. Je les menotte et j'écarte tes jambes pour fixer tes chevilles également. Tu es écartelée au maximum supportable.
Ton corps est sur la table, ta tête dans le vide. Je me déshabille et m'approche de toi. Dès que je retire ton string de ta bouche, tu commences à lécher comme l'immense salope que tu es. J'en profite pour m'occuper de tes seins et de ton sexe. Pas question de les laisser jaloux de ton dos et de ton cul. Eux aussi ont le droit d'être maltraités, claqués. Je m'écarte de toi et je t'ordonne d'essayer de cracher sur ma queue. Pas facile mais je viendrai m'essuyer contre ton visage jusqu'à ce qu'il soit luisant, recouvert de salive. Encore. tant pis si ça commence à te couler dans les yeux et le long des cheveux. Je te crache dessus pour accélérer les choses.
- Voilà maintenant ouvre grand la bouche. Je sais que tu ne maîtrises rien. Je sais que la position est inconfortable et que tes abdominaux ne peuvent plus te permettre de te redresser. Tu vas juste subir.
Je presse mes mains autour de ton cou. Je serre jusqu'à ce que ton visage soit aussi coloré que ton cul. Tu sembles avoir du mal à récupérer et tu es obligée de déglutir et ton visage devient encore plus luisant. Ton mascara coule et ça m'excite. Je recommence. Encore et encore.
Tu sens enfin que mes doigts ouvrent ta bouche et que ma main commence à la baiser. Quel plaisir de la retirer et de la sécher sur ton corps ou ton visage. J'aime que tu sois recouverte.
Mais là il est temps de mettre ma queue et de te baiser encore et encore.
Parfois rapidement, parfois avec une lenteur calculée jusqu'à ce que tu puisses lécher mes couilles.
Parfois en agrippant tes cheveux pour forcer ta tête à aller et venir.
Ton visage est blanc. Blanc de salive. Avec des très jolies nuances de mascara.
Je te détache.
- À genoux salope.
Tu sais que tu n'auras pas l'honneur de me faire exploser. Mais tu as trop envie de recevoir mon sperme sur ton visage méconnaissable pour ne pas obéir prestement.
Tu ouvres la bouche, tu tires la langue. Je viens me branler à quelques centimètres de toi. Parfois contre ta langue.
Je jurerais t'entendre gémir comme la chienne que tu es.
Je regrette de ne pas avoir encore équipé la pièce d'un simple verre car c'est en te regardant boire mon sperme que je voudrais finir. Tant pis, je m'arrête. Une petite distorsion des règles et je reviens 30 secondes plus tard avec une flûte à champagne.
Je me tourne, je fourre ta langue dans mon cul et, en même temps que tu essayes de l'enfoncer le plus profondément possible, j'explose et je remplis le verre.
Je vais me mettre dans le sofa et tu accours. Enfin accours à 4 pattes.
- Maître je t'en supplie. Je veux vous boire.
Je lui tends la flûte. Tu as interdiction de boire.
Je reste interdit quand elle vide le verre mais je comprends quand elle la remplit en recrachant tout à nouveau.
Elle bascule la tête en arrière et vide, précautionneusement le contenu sur son visage.
Le dressage avance bien !
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Ingrid Berthon-Moine est une artiste française basée à Londres dont le travail se caractérise principalement par la sculpture, la peinture et les installations/expositions. Son œuvre utilise le corps humain comme un terrain de jeu pour explorer l'identité, la sexualité et la société de consommation. Elle explore la construction et la déconstruction de l'identité de genre et ses conséquences comportementales sur la société. Le corps est perçu comme un récepteur sensible portant les traces visuelles de nos tourments émotionnels, tout en étant une source d'information et de pouvoir. L'humour joue également un rôle important dans le travail d'Ingrid Berthon-Moine, il se fait fil rouge entre les différentes facettes de son œuvre.
Si les oeuvres de l'artiste ne sont pas BDSM, il y a dans certaines de ses oeuvres une exploration fétish et exhibs. Elle aborde ces thèmes de manière provocante et subversive, poussant l'observateur à remettre en question leurs propres préjugés et à repenser son rapport au corps et à la sexualité. Ses créations mettent en lumière les tabous et les normes sociales entourant la sexualité et la sensualité, tout en encourageant une réflexion critique sur ces sujets.
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Crédit photo : Charlie Gray
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[Club lecture] "Oui Monsieur : 130 questions sur les sexualités BDSM et Kinky" par Alexandre Contart
"Oui Monsieur" d'Alexandre Contart se présente comme une œuvre éducative et introspective dans le domaine du BDSM et des pratiques Kinky. Ce livre, structuré sous forme de questions-réponses, vise à démystifier un univers souvent entouré de stéréotypes et d'idées reçues. À travers mes lectures et analyses, je vais explorer les forces et les faiblesses de ce travail, en me basant sur les réactions et les attentes du public cible.
L’auteur utilise son expérience personnelle pour fournir des réponses claires et sincères. La structure en questions-réponses rend le contenu accessible et engageant. Cela permet aux lecteurs de naviguer facilement à travers les sujets et de trouver des réponses pertinentes à leurs interrogations spécifiques.
Alexande Contart aborde des notions essentielles telles que le consentement et les risques associés au BDSM. Cette approche responsable est cruciale pour un public à la fois novice et expérimenté, contribuant à une compréhension plus sûre et éthique de ces pratiques.
Le format papier du livre et la clarté de son écriture en font un outil pratique pour revenir sur des concepts spécifiques, permettant aux lecteurs de l'utiliser comme une référence dans leur parcours BDSM.
Points faibles
Bien que de faire reposer le livre sur l'expérience personnelle apporte authenticité et crédibilité, c'est parfois un handicap. L'expérience individuelle de l’auteur ne peut pas toujours refléter la diversité et la complexité des pratiques BDSM et des manières de les aborder.
Les plus exigeants resteront parfois sur leur faim : certaines réponses auraient peut-être méritée d'être approfondies. Parfois l'auteur ne s'attaque peut etre pas suffisamment à la complexité de certains sujets. Si la plupart des lecteurs y trouveront leur compte, l'ouvrage pourrait ne pas satisfaire ceux qui recherchent une exploration plus poussée de tels ou tels sujets. Il leur faudra se tourner vers des ouvrages encore un peu plus spécialisés par rapport à la problématique qui est la leur.
Parfois, on regrettera que l'auteur aille si loin dans l'auto-promotions de ses livres et soirées. C'est un jeu d'equilibriste entre le marketing et la formation de manière éducative et objective.
Malgré cela, "« Oui Monsieur » d'Alexandre Contart se présente comme un guide incontournable pour quiconque s'intéresse au BDSM et aux pratiques Kinky. Rédigé avec clarté et authenticité, cet ouvrage fournit des réponses concrètes et bien argumentées aux questions fréquemment posées sur ce sujet complexe et souvent mal compris. Grâce à sa mise en page accessible et son format papier pratique, il devient un outil de référence pour les débutants comme pour les pratiquants plus expérimentés. Ce livre s’impose non seulement comme un guide instructif, mais aussi comme une source d'inspiration et de réflexion, encourageant une approche saine et bienveillante du BDSM. Pour ceux qui cherchent à approfondir leur compréhension des dynamiques de pouvoir, de consentement et de plaisir dans les sexualités alternatives, "« Oui Monsieur » est indéniablement une lecture enrichissante et nécessaire.
Si vous avez lu ce livre, n'hésitez pas à laisser votre avis en commentaires ci dessous.
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Episode 1: Relaxant Onsen
Depuis les temps anciens, les Japonais profitent des bienfaits relaxants et thérapeutiques des sources thermales. D'après le Nihon shoki (日本書紀), l'une des rares sources écrites sur les origines du Japon, achevé en 720, le premier Onsen aurait été créé en 631. De nos jours, plus de 3000 stations thermales sont aménagées. Beaucoup d'hôtels possèdent leur propre Onsen, soit naturel, soit artificiel.
Depuis que le Japon s'est ouvert à l'Occident, la mixité qui était la règle à l'origine a quasiment disparu. C'est le cas dans notre hôtel, qui dispose d’espaces de baignade strictement séparés pour les hommes et les femmes.
Par pudeur probablement, les guides touristiques sont avares de détails, mettant l'accent sur les bienfaits des eaux chaudes fortement minéralisées, et oubliant les aspects pratiques. Car dans un Onsen on doit se baigner entièrement nu et respecter un certain rituel. Après s'être dévêtu dans l'espace vestiaire, on rejoint un espace dans lequel on doit se doucher assis sur un petit tabouret, puis éliminer soigneusement toute trace de savon car polluer l'eau du bain est un sacrilège. Les Onsens n’échappent pas à la fameuse politesse japonaise: ce sont des lieux de repos et de détente - adopter un comportement discret et silencieux dans l'espace de baignade est la règle, néanmoins parfois mise à mal dans les régions touristiques.
L'accès aux personnes tatouées est en principe interdit, les tatouages évoquant le crime organisé dans ce pays. Pas d'autre choix que d'enlever le symbole Kef, tatoué en haut de ma cuisse gauche. Quel dommage! Je venais juste de refaire ce tatouage temporaire. Solution de fortune, la lotion démaquillante en est venue à bout, mais non sans mal.
J'ai lu qu'ici un sexe épilé rappelle les films pornographiques ou la prostitution et c'est donc très mal vu. En effet, pour échapper aux lois de censure qui interdisaient de montrer toute pilosité pubienne, l'industrie du film pornographique a eu recours à l'épilation.
J'ignore si cette association est la vraie raison, mais force est de constater que je suis la seule à avoir la chatte intégralement épilée.
Les japonaises sont bien foutues – question d’alimentation probablement – et je pense que mon Maître apprécierait d’être à ma place. Je l’imagine du côté homme, entouré d’hommes nus. Lui qui est 100% hétéro, le pauvre… Et je m’efforce de réprimer le fou rire que je sens arriver, histoire de ne pas me faire remarquer.
Après un moment bien relaxant dans ces eaux très chaudes, je retrouve par hasard mon Maître dans l'ascenseur. Lui aussi vient juste de quitter l’Onsen. Quelle synchronisation ! Nous sommes vraiment faits pour être ensemble.
- "Vous avez pu mater de belles bites, Maître ?"
Je n'ai pas pu m'empêcher de le charrier... Et je suis prise d'un fou rire.
- "Pfff... Tu es bête", me répond-il, ne pouvant néanmoins réprimer un sourire.
Episode 2 : Le sens de l’accueil
A peine la porte de notre chambre ouverte, la télévision s'allume automatiquement, avec un niveau sonore particulièrement agressif, et bascule sur une chaîne française. L’ouverture de la porte déclenche la mise sous tension et le choix de la chaîne est préréglé en fonctions de nationalité des clients. Cela part certainement d’une bonne intention – faire en sorte que le client se sente comme chez lui – mais qu’est-ce que c’est agaçant !
La nudité intégrale en présence de mon Maître est la règle, hormis dans les espaces publics bien sûr. Pendant que je me déshabille, mon Maître se bat avec la télécommande dont toutes les touches sont gravées en japonais.
Un médecin de plateau vante les mérites de la zébralisation (*). La journaliste en rajoute une couche, en fustigeant les ignorants, fascistes, anti-science, qui sont encore réticents à se rendre dans leur centre de zébralysation.
- "Putain! Mais comment est-ce qu’on arrête ce bazar!"
Il est très rare que mon Maître, si philosophe habituellement, montre des signes d'agacement.
- "S'il vous plaît, Maître, laissez-moi faire"
C'est toujours utile d'avoir une soumise sous la main, prête à rendre service !
Voilà mon téléphone qui sonne maintenant. C'est mon médecin traitant.
- "Je vois que vous n'êtes pas encore zébralysée. J'ai pu vous obtenir un rendez-vous dans le centre de zébralysation pour mardi à 10h".
Technique commerciale bien connue: mettre l'interlocuteur devant le fait accompli et dans une situation dans laquelle il se sentira mal à l'aise, voire honteux, de refuser.
"Mais c'est du harcèlement!" me dis-je. Par chance, j'ai une bonne excuse cette fois: je suis à plus de 10 000 km du centre de zébralysation.
- "D'accord" répond-il, sur le ton agacé du vendeur qui a raté son affaire. "Mais il ne faudra pas tarder à vous mettre en règle - d'ailleurs ce sera bientôt obligatoire sous peine d'amende".
J'entends mon Maître ironiser à voix basse pendant que j'assure que j’y pense et que je ferai le nécessaire – histoire de mettre un terme à la conversation.
- "Menteuse..."
- "Une bonne fessée et la bite dans la cul, voilà ce que tu mérites"
Sacrée fessée en effet ! Visiblement, les eaux minérales de l'Onsen l'ont bien revigoré.
J'imagine la tête de mon médecin s'il apprenait que je suis déjà doublement zébralysée, qui plus est avec les derniers spécimens naturels. Malheureusement, l'espèce s'éteindra en moi. Je ne crois plus guère que la reproduction, dans laquelle nous avions mis tant d’espoirs, réussira, et je me sens responsable de cet échec.
Episode 3: Chienne esseulée devant l’Hôtel Riz-Carbone
Je ne fais pas la fière, assise seule sur ce banc, un peu en retrait de l'entrée du prestigieux Hôtel Riz-Carbone.
- "Je dois rencontrer un membre du personnel", m'a dit mon Maître pendant qu'il attachait ma laisse à l'accoudoir et me déboutonnait le chemisier jusqu'au nombril, prenant bien soin de l'ouvrir un peu au delà des limites de la décence, laissant apparaître une bonne moitié de chaque téton. Moi qui ai souvent regretté d'avoir les tétons trop clairs et qui aimerait les avoir bien sombres, je me rends compte que cela a aussi un avantage. C'est plus discret...
C'est dans cet hôtel de luxe, sur les hauteurs de Nikkō, qu'un échantillon des princes qui nous gouvernent se sont rencontrés en marge du sommet du G7, en juin 2023. "G7 ministerial meeting on gender equality and women's empowerment" : l'égalité des genres et le féminisme idéologique sont des thèmes porteurs et fort utiles pour masquer des objectifs bien moins avouables. Surplombant le lac Chūzenji, l'hôtel bénéficie d'un cadre idyllique. Les rives du lac étaient très populaires au siècle dernier comme en témoignent de nombreux bâtiments bien préservés, parmi lesquels l'ancienne ambassade de France et de somptueuses résidences secondaires de diplomates.
Yeux baissés par timidité, mais cuisses écartées par obligation, je tente néanmoins de me faire la plus discrète possible.
C'était sans compter ce gros touriste américain, qui, à peine sorti de l'hôtel, ne manque pas de me remarquer.
"Hi guys! Are you on a leash?" me dit-il bruyamment.
Je marmonne une réponse incompréhensible, tout en rougissant.
Franchement, est-ce que j'ai une tête (des têtes?) de "guys" ?
Il se plante devant moi et me raconte une histoire à la con qui se veut drôle. Pitié… Mais faites-le taire !
Un puissant instinct me pousse à resserrer les cuisses et à me reboutonner, mais je mets un point d'honneur à respecter les ordres du Maître, y compris, et peut-être encore plus, quand il n'est pas là pour me contrôler. Alors, je mets toute ma force de volonté pour résister à cette réaction instinctive.
Ouf ! Le vulgaire personnage n'insiste pas et s'éloigne, sans doute refroidi par mon peu d'enthousiasme à lui répondre et à rire de son histoire sans queue ni tête.
Mes cuisses doivent être maintenues ouvertes en toutes circonstances et le fait que les sous-vêtements me soient interdits n'y change rien. C'est la règle. C'est Sa Loi.
Le temps semble toujours s'écouler à une vitesse d'escargot dans certaines circonstances et comme par hasard surtout quand on voudrait qu’il accélère. Mais que fait mon Maître ? J'ai l'impression qu'il y passe des heures dans cet hôtel.
Eh ben ! Il en a mis du temps !
- "Mets-toi ça dans la chatte, c'est plus prudent. Sonia sera comblée par ce qu'il y a là dedans", me dit-il en me tendant une boule mémoire - version moderne des anciennes clés USB.
C'est vrai que l'on n'est jamais à l’abri d'une mauvaise rencontre avec une patrouille de défenseurs de la démocratie. Les miliciens peuvent être très zélés et sont habilités à contrôler nos effets personnels, mais il est peu probable qu'ils aillent jusqu'à une fouille intime - du moins tant que l'on n'attire pas trop l'attention.
- "Ca te dit de dormir ici la nuit prochaine ?"
700 à 6000 dollars la chambre, voilà qui n'est guère raisonnable... Eh oui ! On paye à présent en dollars au sein de la Suprême Alliance Démocratique. Les monnaies locales ont disparu. C’est le résultat d’un arrangement entre la Chine et les USA : pour l’une, en tant que berceau de la démocratie moderne, le privilège d’accueillir le siège du pouvoir fédéral, pour l’autre le contrôle de la monnaie.
J'ai parfois du mal à savoir si mon Maître est sérieux ou me fait marcher.
- "Malheureusement, nous n'avons pas la chance d'être logés aux frais du contribuable..." rajoute-t-il.
Dommage...
C'est tenue en laisse, jupe retroussée, qu’il me conduit sur le petit sentier, heureusement peu fréquenté, qui relie le luxueux hôtel aux chutes Kegon. Avec ses 97 mètres de haut, la grande cascade Kegon est l'une des plus hautes du Japon. Un petit plateau d'observation, équipé de bancs publics, permet d'avoir une belle vue sur les chutes. C'est sur l'un de ces bancs, assise aux côtés de mon Maître, toujours tenue en laisse, que j'observe la cascade, comme hypnotisée par le spectacle.
Une petite tape sur le sein gauche, puis sur le bas de ma jupe, me sort de ma contemplation. Oui, bien sûr, le banc est au bord de la plateforme, personne ne peut passer devant nous, alors... J'ai encore du mal à bien analyser chaque situation et à prendre de moi-même les bonnes initiatives. Je m'empresse d'ouvrir plus largement mon chemisier déboutonné, pour dégager entièrement mes mamelles et de remonter ma jupe pour exposer ma fente. Me voilà exhibée pour le plaisir de la déesse de la montagne... et pour celui de mon Maître !
Pas un mot n'est prononcé. Quoi de mieux que le silence pour apprécier les bruits de la nature, apprécier le bonheur de me trouver là, au bout de la laisse tenue par l'homme que j'aime. Est-ce qu'il a en ce moment des pensées similaires aux miennes? Est-il satisfait de sa chienne? Je l'espère. Mais il serait déplacé de lui demander.
On dirait que la cascade s’est mise en conformité avec les règles de politesse à la japonaise : pas de vacarme assourdissant mais un bruit agréable, presque relaxant. Comme si elle voulait rester discrète et respectueuse des visiteurs.
Malheureusement toutes les bonnes choses ont une fin et il est déjà temps de reprendre le bus pour Nikkō. Je garde mon collier d’esclave, mais, soulagement, la laisse m’est retirée. Je ne vais quand même pas prendre le bus tenue en laisse !
Episode 4: Retrouvailles inattendues sur le pont Shinkyo
Le bus descend à toute vitesse vers Nikkō, enchaînant les virages à 180 degrés. Je tente de filmer la spectaculaire descente sur cette vertigineuse route en lacets, mais j'ai très vite le tournis. Mon Maître prend le relais.
Pour me rassurer, il me dit que le chauffeur a certainement fait ce trajet des centaines de fois.
Certes ! - Mais...
- "Quand nous serons de retour à Tokyo, je te placerai pendant une journée dans un établissement spécialisé, pour y sucer des bites et donner du plaisir. Cela te fera du bien."
Est-ce qu'il me fait marcher? Je pose néanmoins des questions.
- "Ils ont un mur de bites, style glory hole. Tu y seras à l'œuvre toute la journée et si un client n'est pas satisfait, tu seras fouettée."
Je pense à 99% qu'il me fait marcher, mais il me reste 1% de doutes...
- "On va descendre au pont Shinkyo. Nous pourrons poursuivre jusqu'à l'hôtel à pied".
Le pont sacré Shinkyo marque l’entrée du sanctuaire shintoïste de Nikkō. Durant l’époque Edo (1603-1868), seuls le shogun et les messagers de la cour impériale étaient autorisés à l’emprunter. Le pont en lui-même est modeste, mais la vue, avec la brume et la montagne en arrière-plan est tout simplement magnifique.
Je suis affairée à prendre des photos de mon Maître sur le pont pour immortaliser notre passage en ce lieu historique, quand une voix dans mon dos me fait sursauter.
- "Streptomyces Avermitilis Inari !"
Je reconnais la voix du Professeur et le ton euphorique du scientifique qui vient de faire une immense découverte. Je me retourne instantanément et m’incline respectueusement.
- "Bonjour Monsieur le Professeur. Euh, pardon, bonjour Satoshi. Que faites-vous là?"
J'ai décidément du mal à l'appeler par son prénom, comme il me l'a demandé.
- "Je les ai baptisés Streptomyces Avermitilis Inari, en hommage à la déesse de la montagne. Il y en avait des quantités dans les prélèvements. C'est incroyable !"
à suivre
Contexte
(*) L’histoire se situe dans la seconde moitié de notre décennie, la France étant à présent membre de la Suprême Alliance Démocratique, une puissante fédération de démocraties modernes et progressistes. Pour en savoir plus sur le contexte social, humain, et technologique, la liste de mes articles précédents se trouve ici : https://www.bdsm.fr/sylvie35/blog/ (à lire de préférence dans l’ordre chronologique de leur publication).
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Voilà c'est mon histoire, quand la réalité dépasse les fantasmes.
Mon histoire ;
Je suis née avec le spina bifida, et je me déplace soit en fauteuil roulant soit avec des attelles.
De tous temps, j’avais l’impression de ne pas être vraiment ce que je suis, homme, mais pas au point de me sentir femme et j’ai toujours eu un sentiment de soumission.
Je vivais seul malgré mon handicap, j’ai erré pour chercher un maître et finalement je suis tombé sur un couple. Homme femme dominants
Le feeling est passé tout de suite et peu à peu je m’installais chez eux dans leur grande maison, jusqu’à finalement déménager. Nos jeux devenaient de plus en plus hard. Ils m’avaient fait des allusions à la castration, que ce serait mieux pour moi. J’étais de plus en plus féminisée, mais pas prêt à être castré.
Lors d’une séance, j’étais attaché, portant mon masque de cuir et les trous pour la vue fermés. Ils m’avaient fait prendre un tranquillisant, mais j’ai senti des piqures dans mes boules, ensuite ça m’a brûlé. J’ai cru à un nouveau jeu.Ils ont recommencé quelques jours plus tard.
Sur le moment ils ne m’ont rien dit, mais j’avais mal aux boules. Les semaines suivantes, ma libido à baissé, après deux mois j’étais devenu un eunuque avec des boules atrophiées. Ils m’ont avoué m’avoir castré avec du Neutersol, une substance qui s’injecte dans les boules pour castrer les animaux..
La suite une autre fois
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"Le livre de la vie est le livre suprême. Qu'on ne peut ni fermer, ni rouvrir à son choix. Le passage attachant ne s'y lit pas deux fois. Mais le feuillet fatal se tourne de lui-même. On voudrait revenir à la page où l'on aime. Et la page où l'on meurt est déjà bientôt sous vos doigts. Vivez, aimez, c'est la vraie sagesse: hors le plaisir et la tendresse, tout est mensonge et vanité". Romantique, bel et fier aristocrate amoureux de son Mâconnais natal, croyant désespéré, homme politique d’envergure, encensé par des admirateurs fervents mais voué aux gémonies par des détracteurs virulents, Alphonse de Lamartine naît à Mâcon le vingt-et-un octobre 1790 et il passe son enfance en Bourgogne, principalement à Milly, un petit village proche de Mâcon qui a pris le nom de Milly-Lamartine, en son hommage. Les bucoliques, verdoyants et doux paysages de ce que l’on nomme désormais "le val lamartinien" enchantent la vie et l’œuvre de ce séduisant aristocrate, tout au long de son enfance auprès de parents aimants qui élèvent dans la piété ce fils d’autant plus chéri qu’il est alors l’aîné d’une fratrie qui comptera cinq filles. Mais passées les belles années d’enfance, il faut qu’il se trouve une position car la famille Lamartine, quoique noble, n’est pas aisée. Or, un monarchiste ne saurait servir l’usurpateur qui est alors en place: Napoléon. Alors, au terme d’une enfance aussi rustique qu’heureuse, Alphonse, ne sachant quel destin choisir, sombre dans la mélancolie. Victime de langueur, Il sera envoyé à Aix-les-Bains, où une aventure sentimentale lui inspirera alors le poème: "Le Lac". Son père, Pierre de Lamartine, chevalier de Prat, capitaine de cavalerie au régiment Dauphin jusqu'en 1791, où il quitta volontairement l'armée, n'avait fortune et rang que de cadet. Sa mère, Alix des Roys, fille de la sous-gouvernante des enfants d'Orléans à Paris, épousée par amour, avait reçu une solide culture classique au chapitre noble de Saint-Martin en Beaujolais. Elle en avait rapporté un sincère sentiment de piété. Lamartine appartient donc à l'élite de la bourgeoisie et à la noblesse dite de robe. Son grand-père et son oncle Louis, possesseur du château et du domaine de Monceau, firent une assez fastueuse figure dans leur province, mais ses aïeux ne remontent pas plus loin que le XVIème siècle. Le chevalier de Lamartine, dès son retour en Bourgogne, décida de vivre sur sa modeste part d'héritage, le vignoble de Milly, proche de Mâcon. Royaliste fervent, qui avait combattu le dix août 1792 pour la défense des Tuileries, il considéra dès le début Bonaparte, consul et empereur, comme un "usurpateur", et se condamna, en pleine maturité, à une morose retraite. À Alphonse, entre 1790 et 1802, il donna cinq sœurs, et un frère mort en bas âge. La toute première éducation d'Alphonse de Lamartine eut lieu ainsi en pleine campagne parmi des fils de vignerons et de manœuvriers. Il fréquentait l'école rurale tenue par le jeune abbé Dumont, vicaire de la paroisse de Bussières, limitrophe de celle de Milly. il reçut de lui ses premières leçons de latin et de français. Aux veillées, sa mère contrôlait et complétait alors son instruction. Elle écrivait elle-même avec élégance: Fénelon et Racine étaient ses dieux, et Alphonse en récitait des pages entières.
"Rien n'est vrai, rien n'est faux, tout est songe et mensonge, illusion du cœur qu'un vain espoir prolonge. Tout change, ainsi tout passe, ainsi nous-mêmes nous passons, hélas sans laisser plus de trace que cette barque où nous glissons sur cette mer où tout s’efface". Au printemps de 1801, il fut placé comme interne à Lyon dans la pension Puppier. Il s'en évada. Repris, il s'y ennuya cruellement. À partir d'octobre 1803, il trouva un climat plus favorable au collège de Belley, tenu par les pères de la Foi. Il y parcourut, jusqu'au début de 1808, le cycle régulier des classes, de la troisième à la philosophie. Il y remporta des succès scolaires appréciables et y noua alors de solides liens d'amitié avec trois de ses camarades, Aymon de Virieu, Louis de Vignet, Prosper Guichard de Bienassis. Avec le premier qu'il appelait ainsi sa "conscience", bien que tous deux différassent d'idées et de convictions politiques, il entretint une correspondance faite de confidences et de discussions. Elle devait durer alors jusqu'à la mort d'Aymon en 1841. De 1808 à la première Restauration, Lamartine demeure à Milly. Un séjour à Mâcon, dans le commun hôtel familial, rompait pour lui en hiver la monotonie des jours. Les siens ne pouvant alors rien faire de lui, ni dans l'armée, ni dans la diplomatie, ni dans l'administration, puisqu'il eût ainsi servi Napoléon, se décidèrent à tolérer qu'il ne fit à peu près rien. Oisiveté tout apparente. C'est dans ces années, entre ses dix-sept et ses vingt-trois ans, que le jeune homme sent s'affirmer sa vocation poétique déjà éveillée à Belley. Un peu au hasard il fait d'amples lectures. Il se donne ainsi, sans que les siens s'en doutent, une formation personnelle qu'un voyage va compléter. Envoyé en Italie, de juillet 1811 jusqu'en avril 1812, il découvre à Florence, à Rome, surtout à Naples, l'éblouissement, la volupté de la lumière d'outre-monts. C'est à Naples qu'il séjourne le plus longtemps, près de cinq mois, reçu chez un cousin de sa mère qui y dirigeait la manufacture des tabacs. Il y entretient une intrigue ardente avec une jeune fille qui tenait dans la maison le rôle d'intendante. De cette Antoniella, il devait faire, quarante ans plus tard, la pudique Graziella. L'influence de ce voyage fut décisive. Aux premiers jours de la Restauration, Mr de Lamartine obtient alors pour son fils une place de garde du corps de Louis XVIII, acceptée avec entrain. À Beauvais d'abord, où il tient garnison, puis à Paris où il fait, six semaines, le "service du château" aux Tuileries, Lamartine s'y ennuie. Après s'être exilé en Suisse pendant les Cent-Jours pour échapper au service de Napoléon, il se fait alors rayer des contrôles. Sa vocation littéraire l'emporte décidément sur toutes les ambitions. Ses premiers essais montraient en lui un disciple de Voltaire, de Parny, mais aussi de Chateaubriand. Dès 1813, il a commencé à écrire un poème épique et national sur Clovis. Dans le même temps, il conçoit une tragédie biblique, "Saùl", écrit une tragédie antique, "Médée", commence une "Zoraïde". Voilà pour les grands genres. Des inspirations plus intimes: "quatre petits livres d'élégies", écrites pour célébrer le séjour à Naples d'Antoniella. Elle était morte, hélas, poitrinaire, en janvier 1815, il l'avait harmonieusement appelée "Elvire".
"Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. Toutes les grandes lectures sont une date dans l'existence. Il n'y a d'homme complet que celui qui a beaucoup voyagé, qui a changé vingt fois la forme de sa pensée et de sa vie". À l'automne 1816, il était venu à Aix-en-Savoie, près du lac du Bourget, pour soigner une crise de foie. C'est à l'âme surtout qu'il souffrait. Dans la pension de famille où il était descendu, il rencontra une jeune femme qui achevait sa cure: Mme Julie Charles, femme du physicien illustre, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, qui, en 1783, avait accompli avec succès la première ascension scientifique. Pâle et brune, Mme Charles était, à trente-deux ans, menacée par la phtisie. Un mutuel attrait, dès le premier échange de regards, réunit les deux isolés. Brève idylle. Dès le vingt-six octobre, Mme Charles regagnait Paris. Lamartine l'y rejoignait au début de janvier 1817. Reçu par elle en son salon de l'Institut, présenté aux amis royalistes qui fréquentaient alors ce cercle un peu fermé, entre autres au philosophe Bonald, il ne repartit pour la Bourgogne qu'au début de mai. Tous deux étaient ainsi convenus de se retrouver en août au bord du lac de Savoie. Mme Charles, dont le mal avait progressé, ne put alors faire le voyage. Lamartine l'attendit plusieurs semaines, en vain. Dès la fin août il commença d'esquisser l'ode qui, sous le simple titre "Le Lac", deviendra la plus célèbre des Méditations poétiques, poème où, après avoir évoqué une promenade faite sur ces flots l'année précédente, après avoir rythmé le chant de la jeune femme, il conjurait la nature, moins périssable que l'homme, de conserver le souvenir de l'ivresse passée. Mme Charles mourut en décembre suivant, réconfortée par un retour à la foi, après lui avoir légué le crucifix sur lequel s'était posée sa "bouche expirante". Pendant deux ans Lamartine se partage entre Mâcon et des séjours à Paris, où il est accueilli avec faveur dans les salons. il y subit, en 1819, la séduction d'une "passion ardente et involontaire" pour une radieuse Italienne, véritable"Circé", "magicienne", épuisante. Cette comtesse Lena de Larche le divertit de son regret, sans lui faire oublier Mme Charles. Il travaille aussi à "Saùl", qu'il lit sans succès à Talma, et, à des intervalles inégaux, il laisse couler de son cœur des élégies ou des méditations qu'il soumet à Virieu. Ce sont tantôt des strophes ou des quatrains,"L'Isolement", "Le Vallon", "L'Automne", tantôt des sortes de "discours en vers", plus harmonieux, plus nourris de sentiments que ceux de "Voltaire", "Dieu", "La Foi", "L'Homme, "L'amour et l'amitié" ou encore de "L'Immortalité".
"On est toujours, crois-moi, du pays que l'on aime. La liberté économique, c'est la liberté pour le commerçant de s'enrichir sans limitation, et c'est la liberté pour le pauvre de mourir de faim. Chers enfants, bénissez, si votre cœur comprend. Cet œil qui voit l'insecte et pour qui tout est grand". Élégies ou discours, il en donne des lectures dans plusieurs salons parisiens. Villemain, alors jeune professeur en Sorbonne, l'abbé-duc de Rohan, se joignent à ses admirateurs. Une rumeur de renommée monte alors autour de son front charmant. C'est pour y satisfaire, et pour l'éprouver qu'il accepte alors de laisser imprimer, à cinq cents exemplaires, le recueil des "Méditations poétiques". Il n'en attendait pas la gloire, tout au plus une estimable réputation. Or ce fut, dit plus tard Sainte-Beuve, une"révélation". Toute une génération, la première génération des romantiques, y découvrit en des images amples et simples, en des rythmes souples, la poésie du sentiment, de l'inquiétude religieuse, de la foi, toute la poésie pure qui enivre et qui plane. Pour cette génération, Lamartine fut ainsi en même temps un Racine moderne et un Chateaubriand en vers. Pendant dix ans, d'avril 1820 au lendemain de la Révolution de 1830, le poète suivit la carrière de la diplomatie. Carrière coupée par de longs congés. Il ne fut en poste qu'à Naples comme "attaché", jusqu'au début de 1821, et à Florence, comme secrétaire de légation, du printemps de 1825 à l'été de 1828. Un peu moins de cinq années au total. Marié dès le mois de juin 1820 à Chambéry, sur le chemin de l'Italie, avec une anglaise convertie au catholicisme, Mlle Marianne-Elisa Birch, qui fut pour lui une épouse pleine d'admiration et de dévouement, il vécut, pendant ses congés, en Bourgogne. Son père lui avait fait don du château de Saint-Point, à proximité de Mâcon, qu'il restaura dans un style gothique, mais où, à l'intérieur, il installa le "confort anglais". Paris ne le voyait que pour d'assez brefs séjours. Il noua de sûres amitiés avec ses confrères plus jeunes: VictorHugo, Alfred de Vigny, Émile Deschamps et ne fréquenta pas les cercles littéraires et cénacles. Les premiers romantiques, ceux de "La Muse française" ou ceux du "Globe", acceptaient que sa gloire indiscutée les dominât d'un peu haut, d'un peu loin. À l'automne de 1823, Lamartine, à peu de jours d'intervalle, publia, chez un nouvel éditeur, deux livres nouveaux. "Les Nouvelles Méditations" répondaient, en apparence, par leur titre et par leurs sujets, à l'attente du public. Cependant, la composition en était plus artificielle que celle du volume de 1820. Elles étaient formées surtout d'élégies, d'odes et de stances. Plus variées et diverses que les premières, les"Nouvelles Méditations" n'obtinrent qu'un demi-succès. "La Mort de Socrate" eut plus d'admirateurs. Les mêmes qualités d'élégance, mais non pas toujours de mesure, se retrouvent dans le poème qu'on pourrait appeler "La Mort de Byron" et qui parut en septembre 1825 sous le titre: "Le Dernier Chant du pèlerinage d'Harold".
"Mon ami avait vingt ans, j'en avais dix-huit. Nous étions donc tous deux à cet âge où il est permis de confondre les rêves et les réalités. Celui qui peut créer dédaigne de détruire. On n'a pas deux cœurs, l'un pour l'homme, l'autre pour l'animal. On a du cœur ou on n'en a pas". En cette année 1825, au moment où il va partir pour Florence comme secrétaire de légation, un vaste projet, connu seulement de quelques intimes, occupe l'imagination de Lamartine: celui d'un vaste poème conçu alors le vingt janvier 1821, au sortir de Naples, comme il remontait par Rome vers la France. Cette "épopée de l'âme", il l'a, plus tard, définie "l'histoire de l'âme humaine et de ses transfigurations à travers des existences et des épreuves successives, depuis le néant jusqu'à la réunion au centre universel: Dieu". Ce poème mystique autant qu'épique faisait ainsi une large place à l'histoire de l'humble humanité, incarnée en quelques-uns de ses fils de choix. Leur destin se fût déroulé en une suite d'épopées significatives, et le poète, "barde de Dieu", eût aperçu le développement de ces tableaux comme une série d'harmonieuses visions. Ainsi avait abouti la fermentation épique qui, depuis sa jeunesse, travaillait l'imagination de Lamartine. Dès 1823, il avait tenté de disposer sur le chantier une ou deux des visions prévues. Mais le loisir lui avait vite manqué. Quand pourrait-il se retourner vers le "grand œuvre" ? À Florence, de 1825 à 1828, ce sont d'inépuisables chants qui sortirent de son âme, des chants à la gloire de Dieu qu'il appelait des "psaumes modernes". Pour la première fois, peut-être, il se sent l'âme comblée. Si, ennovembre 1822, il a perdu après quelque vingt mois son premier enfant, Alphonse, sa fille Julia est née peu de mois auparavant. Âgée maintenant de quatre ans, elle est devenue, par sa gentillesse et sa précocité, l'objet de son adoration. Avec Marianne-Elisa, elle est, ici, le sourire de son foyer. Près d'elles, il est heureux et serein.L'enivrement du ciel et du paysage toscans ajoute à son bonheur. Par l'intermédiaire de la nature, en des êtres qu'il aime, son âme s'élance jusqu'à Dieu. Elle s'exprime en hymnes, en des cantiques d'un lyrisme abondant, en des effusions "sans transition apparente" dont l'ensemble formera une symphonie à la gloire de la divinité.
"C'est là que Dieu et l'homme, la nature et l'art ont placé ou créé de concert le point de vue le plus merveilleuxque le regard humain puisse contempler sur terre, je jetai un cri involontaire et j'oubliai le golfe de Naples et tous ses enchantements". Avec elle, l'homme et la nature, qui sont également son œuvre, constituent les notes fondamentales de l'harmonie universelle que le poète tâche de dégager. Du printemps de 1826, date des deux premiers morceaux, "L'Hymne du matin" et "L'Hymne du soir dans les temples", part le déroulement de ce large flot poétique. À peine si Lamartine se retourne une fois vers Milly ou la terre natale. En 1828, "L'Infini dans les cieux" reprend, en l'élargissant, "L'inspiration stellaire des Étoiles" de 1823. Et la suite dite des "Quatre Grandes Harmonies", "Jéhova", "Le Chêne", "L'Humanité", "L'Idée de Dieu", ramasse et condense la démonstration du recueil entier. Tout dans l'univers, mais aussi dans l'histoire, tout parle de Dieu, tout démontre sa présence. Retrouvée à l'automne de 1828, la France lui rendit son âme tourmentée. Il écrivit "L'Hymne de la mort" et le magnifique "Hymne au Christ", dernier acte public de sa croyance chrétienne. Dès l'automne de 1829, le poème intitulé "Novissima verba", après un regard jeté sur le passé de l'auteur, ne traduit plus que de l'inquiétude, du regret et du doute. Et bientôt, remontant jusqu'à l'Italie de 1812, le "Premier Regret" pleure sur la tombe de la Napolitaine, morte en 1815, que Lamartine appellera Graziella. Ces dernières Harmonies ne méritaient plus leur nom. Elles n'étaient alors que les plus douloureuses et amères des "Méditations". Mais, par la virtuosité débordante de la forme, elles étaient élégantes. Lorsqu'en juin 1830, parurent les "Harmonies poétiques et religieuses" réparties entre quatre livres, si quelques-uns en discutèrent l'inspiration qu'ils ne jugeaient pas assez variée, tous admirèrent la maîtrise poétique de l'inspiré. Deux événements, à cette date, avaient fait époque dans sa carrière. Élu à l'Académie au début de novembre 1829, il venait d'y prendre séance le deux avril. Au lendemain alors de la victoire d'"Hernani" sur le Théâtre Français, sa réception avait revêtu l'allure d'un triomphe de "l'école nouvelle". Mais un deuil cruel obscurcissait secrètement ce triomphe. Au milieu denovembre, comme il était encore à Paris, sa mère, à Mâcon, avait été alors victime d'un affreux accident. Ébouillantée dans un bain, elle était morte en trois jours: "Chaque jour, je sens plus que j'ai perdu la moitiéde ma propre existence", écrivait-il. Un troisième événement, la proche révolution de Juillet, renforçant l'action des autres, allait pratiquer comme une coupure dans sa destinée. C'est donc au lendemain des "Harmonies"que s'achèvent ses dix premières années de gloire. Mais ce premier Lamartine va se modifier. En octobre 1830, le poète eut quarante ans. Alors commença pour lui l'époque de ce qu'on peut nommer les "grands desseins". Il voulut tout logiquement ajouter alors à la gloire littéraire celle d'un député, d'un orateur, d'un homme d'État.
"La nature est là qui t'invite et qui t'aime. Plonge-toi dans son sein qu'elle t'ouvre toujours. Qu'est-ce qu'un bonheur qui se compte par jour et par semaine, et qui s'avance, à chaque minute, vers sa catastrophe finale, la mort ?" Après s'être démis de son emploi dans la diplomatie, pour demeurer fidèle à la branche aînée des Bourbons, il accepta de poser sa candidature à la députation dans la petite ville de Bergues, capitale électorale d'une circonscription dépendant de Dunkerque. L'un de ses beaux-frères résidait aux environs. Il lui manqua, le six juillet 1831, dix-sept voix pour être élu. Le poète satirique Barthélémy l'ayant violemment attaqué dans son journal "La Némésis", Lamartine, le jour même du vote, riposta par des strophes enflammées. Au milieu de1832, cependant, Lamartine quitte la France pour accomplir fastueusement, avec les siens et quelques amis, un long voyage en Orient. Il a nolisé pour lui seul un brick, l'"Alceste", qui, en deux mois de navigation, avec une brève escale à Athènes, le mène à Beyrouth où il installe sa femme et sa fille. De là, en des courses successives, il visitera le Liban, les lieux saints, Galilée et Judée, avec Jérusalem, les ruines de Balbek et Damas. Le retour aura lieu par Constantinople, les Balkans et la vallée du Danube. Lamartine ne sera qu'en octobre 1833 en Bourgogne, et il y transférera aussitôt, de Marseille où l'"Alceste" l'avait ramené par mer, le cercueil de sa fille, la petite Julia, déjà malade au départ et qu'une crise de phtisie avait emportée à Beyrouth en décembre. Deuil que, dans le récit même du voyage, d'admirables vers, "Gethsémani", allaient immortaliser.Quels sentiments, cependant, avaient décidé Lamartine à s'acquitter de ce pèlerinage ? Dans cette aventure, autant que le poète, c'est l'homme entier qu'il engageait. Quelques amis seulement, comme Virieu, en avaient reçu la confidence. Depuis les environs de 1830, la foi chrétienne, en lui, vacillait. Il espérait alors la raffermir, recevant une révélation qui ferait de lui comme un prophète, au-delà des dogmes et des liturgies, d'une forme plus rationnelle de la croyance. Des lieux Saints, il ne rapporte que sa fille morte et sa croyance agonisante. Les quatre volumes intitulés "Souvenirs, Impressions, Pensées et Paysages pendant un voyage en Orient", publiés en 1835, laissent saisir en plein travail de renouvellement les idées de Lamartine sur la poésie et surle monde. Ses réflexions inclinent vers le libéralisme et vers un libéralisme de plus en plus affranchi du dogme chrétien, sans rien renier nettement des croyances catholiques, il va se faire l'apôtre de ce qu'il appellera un"christianisme libéral et social". Pendant son voyage, les électeurs de Bergues avaient fait de lui leur député.
"On admire le monde à travers ce qu'on aime. La gloire ne peut être où la vertu n'est pas. Les poètes sont les voix de ceux qui n'ont pas de voix. L’Église n'a pas besoin de réformateurs, mais de saints". L'année suivante, il deviendra conseiller général de Mâcon. En 1838, obligé au choix, il abandonne ses commettants du Nord pour ses compatriotes dont il demeurera le représentant jusqu'à la fin de sa carrière politique. De 1833 à 1840, refusant de servir dans la Chambre aucun parti, on connaît son mot: "Je siégerai au plafond", il groupe autour de lui un nombre croissant de sympathies, créant ainsi le "Parti social", lequel ne doit s'occuper que "de ce qui peut être utile ou nuisible à la société". Et rapidement, par un effort discipliné, il s'assure l'aisance et la maîtrise oratoires. Ce poète a le secret des formules frappantes. Dès la fin de 1838, dans un discours où il rallie des voix autour du ministère Molé, il crie alors à tous les partis, au risque de les mécontenter tous: "Les générations qui grandissent derrière nous ne sont pas lasses, elles. Elles veulent agir et se fatiguer à leur tour. Quelle action leur avez-vous donnée ? La France est une nation qui s'ennuie !" Ainsi, dans ces années-là, sur le plan politique, menait-il son ambition vers les cimes. Mais il n'oubliait pas le grand dessein littéraire de son adolescence. De l'épopée humaine, humanitaire et mystique conçue en 1821, il écrivait deux chants ou plutôt deux "visions", dressait ainsi deux piliers qui devaient servir de soutien à cette construction monumentale: "Jocelyn", "La Chute d'un ange". Jocelyn ne fut d'abord, à l'automne de 1831, dans l'esprit de son auteur, qu'un récit élégiaque, un"poèmetto", ces mémoires eussent conté l'aventure survenue, pendant la Révolution, au futur abbé Dumont, premier maître du poète. Interrompue par les préparatifs du pèlerinage oriental, la rédaction fut reprise à l'automne 1834. "Jocelyn", "Épisode", "Journal trouvé chez un curé de campagne", parut en deux volumes en février 1836. Il comportait alors neuf "époques", dont la dernière était particulièrement longue et importante.Le succès de Lamartine avait, de nouveau, touché la France au cœur et retrouvait le prestige des "Méditations". L'œuvre, au total, est bien, comme le désirait son auteur, un poème épique, fondé sur l'idée du sacrifice, une apothéose de la vie simple et de la résignation. Il voulait en faire, aussi, comme un chef-d'œuvre de style familier. Défauts et qualités éclatèrent plus nettement dans "La Chute d'un ange", dont les deux volumes parurent au printemps 1838. Dans ce vaste tableau de "poésie antédiluvienne, primitive, orientale" et biblique, Lamartine affichait alors comme une volonté réelle de grandeur: il l'appelait aussi un "fragment dantesque".
"L'égoïsme et la haine ont seuls une patrie, la fraternité n'en a pas. Je suis de la couleur de ceux qu'on persécute. Je suis concitoyen de toute âme qui pense. La vérité, c'est mon pays". Au printemps 1839, Lamartine assembla dans les "Recueillements poétiques" les poèmes, alors inédits ou non, fruits incertains de trop rares loisirs. Les deux derniers étés, surtout, à Saint-Point, l'inspiration l'avait visité avec une largeur, parfois même une violence d'émotion qui l'avait laissé tout vibrant. La mort de Louis de Vignet avait rouvert pour lui la source des souvenirs. La réflexion politique et sociale avait, d'autre part, éveillé en lui plus d'un rêve et d'une suggestion. Il avait été amené, en outre, à composer plusieurs poèmes dits de circonstance. Et quelles strophes de circonstance que celles qui lui avaient été arrachées par la mort de sa fille. Deux ans encore, au printemps 1841, La Marseillaise de la paix distendra témérairement cet amour de l'humanité par-dessus les préjugés et les frontières des nations. À partir de 1840 environ, des deux grands desseins de Lamartine, le second, l'ambition politique, l'emporte décidément. Il devient puissant orateur, opposant redoutable à la monarchie de Louis-Philippe. Tous ses loisirs, jusqu'en 1847, il les consacre à dresser la monumentale "Histoire des Girondins", œuvre de poésie plus encore que d'histoire, écrite pour le peuple, et destinée à lui donner une "haute leçon de moralité révolutionnaire, propre à l'instruire et à le contenir à la veille d'une révolution", d'une nouvelle révolution de 1789 et de 1791, qu'il s'agira d'arrêter avant 1793. Lorsqu'elle éclate le vingt-quatre février 1848, l'auteur des "Girondins" est l'un des fondateurs de la seconde République et, depuis le soir du vingt-cinq février où, à l'Hôtel de Ville, debout sur une chaise de paille, il fait, à force de courageuse éloquence, écarter l'adoption du drapeau rouge, il exerce sur la France et l'Assemblée, comme membre du gouvernement et ministre des Affaires étrangères, ce qu'on a pu appeler "trois mois de dictature oratoire", ce qu'on pourrait nommer aussi "trois mois de poétique espérance". Les "journées de Juin" font alors écrouler son prestige et, en décembre suivant, à l'élection pour la présidence de la République, la France entière lui accorde moins de vingt mille suffrages. Son rôle politique est terminé. Un autre souci entre alors profondément dans sa vie et l'écrase. Les embarras financiers, qui s'étaient manifestés pour lui dès le lendemain de 1830, l'accaparent après 1849. Comment vivre en éteignant d'immenses dettes ? Ses vignobles, ses châteaux de Bourgogne lui coûtent, certaines années, plus qu'ils ne lui rapportent. Il ne peut compter que sur sa plume. Il se condamne lui-même, comme il dit, aux "travaux forcés littéraires". Point de répit. Il publie d'abord une série de textes autobiographiques en préparation alors depuis plusieurs années, où il cède à l'instinct d'idéaliser son passé: "Confidences" (1849), dont il détache l'épisode"Graziella", vite aussi célèbre que "Paul et Virginie", "Raphaël", les "Nouvelles Confidences" et "L'isolement".
"Les liaisons sont des serments tacites que la morale peut désapprouver, mais que l'usage excuse et que la fidélité justifie. L'amour seul est resté, comme une grande image survit seule au réveil dans un songe effacé. La plus belle attitude de l'homme c'est de se tenir debout devant ses semblables, à genoux devant Dieu". Raphaël est la transposition souvent romancée des amours avec Mme Charles. Séduisantes et souples, ces trois œuvres sont à mi-chemin souvent du poème et de la réalité. La même formule caractérise les deux romans de 1851: "Geneviève, histoire d'une servante", et "Le Tailleur de pierres de Saint-Point". Ici et là, les personnages sont des humbles qui, par un effort quotidien, s'élèvent jusqu'à l'héroïsme de la vertu. Lamartine semblait inaugurer ainsi une forme familière du roman social. Attiré par un dernier voyage en Asie Mineure, où le sultan lui a concédé un vaste domaine, le poète doit se contenter de publier le récit pittoresque de ce nouveau voyage en Orient. Il entasse ensuite des compilations historiques, de deuxième ou de troisièmemain: "l'Histoire de la Restauration", qui est la meilleure parce qu'il a connu de près certaines années dont il rend bien l'atmosphère, "L'Histoire des Constituants", "de la Turquie", "de la Russie". À partir de 1856 enfin, il fait paraître, par livraisons mensuelles, un cours familier de littérature, dont il est l'unique rédacteur, pour lequel, chaque année, il sollicite les réabonnements. Tant d'efforts ne le libèrent pas. En 1860, il est contraint de consentir à la vente de Milly. Sous cet amas de besognes et de soucis matériels, la poésie lamartinienne, cette "respiration de l'âme", n'était pas morte. À plusieurs reprises, dans cette vieillesse laborieuse, de hautes inspirations revinrent le solliciter. En 1856, les souscripteurs du cours de littérature eurent la surprise d'y lire une méditation poétique, "Le Désert", poème philosophique laissé inachevé en 1832, dialogue entre l'âme du poète et l'esprit de Dieu. Surtout, en 1857, le quinzième entretien leur présentait "La Vigne et la maison", sublime élégie composée un soir de vendanges, à l'ombre de la maison de Milly, sorte de symphonie à deux voix, où résonnent toutes les harmonies de la vieillesse, du souvenir, de la mort. Large composition en mineur couronnée par la voix d'une espérance douce et résignée. Le poète semble, ainsi, inaugurer une suprême"manière", plus musicale et dépouillée. Il prélude aux trouvailles de la génération symboliste. Alphonse de Lamartine s'éteignit à Paris le vingt-huit février 1869, réconforté par le sourire de sa nièce et fille adoptive Valentine, à côté du crucifix d'Elvire. Autour de lui, le Paris du second Empire littéraire ou politique l'avait oublié. Pendant tout le romantisme, et préludant à l'âge symboliste, il avait été le maître de la poésie pure.
Bibliographie et références:
- Anne-Marie de Brem, "Alphonse de Lamartine"
- Henri Guillemin, "Lamartine, l'homme et l'œuvre"
- Richard Alix, "L'univers aquatique de Lamartine"
- Louis Barthou, "Lamartine orateur"
- Ernest Zyromski, "Lamartine, poète lyrique"
- Maurice Levaillant, "Alphonse de Lamartine"
- Pierre-Maurice Masson, "Lamartine"
- Jean-Pierre Richard, "Études sur le romantisme"
- Maurice Toesca, "Lamartine ou l'amour de la vie"
- Gérard Unger, "Lamartine. Poète et homme d'État"
- Arnaud Vendryes, "Amaurandes, Pratz et Lamartine"
- Sylvie Yvert, "Au moins le souvenir, Lamartine"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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"Un visage émacié et cependant empourpré de fièvre, creusant à peine la soie des coussins, des cheveuxpoissés de sueur, une toux qui déchire, une respiration embarrassée. C'est là le spectacle navrant de l'agonie d'une princesse qui n'a pas vingt ans". La vie d'Agnès Sorel n'offre pas seulement au moraliste ou au littérateur le cadre d'une attrayante biographie et d'une curieuse étude de mœurs. Quelle que soit l'opinion que l'on ait pu se faire jusqu'à ce jour de cette femme célèbre, il est sûr qu'elle a dû exercer une influence très-puissante sur la conduite d'un roi, et par conséquent sur des événements d'une haute gravité, à l'une des époques les plus critiques et les plus intéressantes de l'Histoire du royaume de France, qui a connu le début d'un essor". Enclin à la mélancolie, le roi Charles VII, justement surnommé le "Bien Servi", a bénéficié dans sa jeunesse de l'aide de Jeanne d'Arc. Quinze ans plus tard, dans sa maturité, il a trouvé le réconfort dans les bras d'une autre jeune fille, de vingt ans plus jeune que lui, Agnès Sorel. Née près de Tours, à Fromenteau, vers 1422, Agnès devient à dix-sept ans fille d'honneur d'Isabelle de Lorraine, épouse de René d'Anjou. Belle et au demeurant peu farouche, comme l'attestent ses portraits par le célèbre peintre Jean Fouquet, elle passe au service de la reine Marie d'Anjou et cède aux avances de Charles VII alors âgé de quarante ans en 1444. Agnès Sorel est la première favorite officielle de l'Histoire de France, les liaisons royales étaient plutôt tenues secrètes jusqu'alors. Cette jeune femme va tenir un rôle extrêmement important. Ce serait elle qui aurait convaincu le Roi de reprendre la guerre de Cent ans et de chasser les derniers anglais de Normandie. Elle apporte à la cour vieillissante une joie et une énergie vivifiantes. Agnès Sorel donnera quatre filles à Charles VII. Enceinte à nouveau, elle rejoint le Roi sur les champs de bataille, elle mourra quelques jours plus tard dans des circonstances encore bien mystérieuses. Elle aurait été empoisonnée par le dauphin, le futur Louis XI.
"L'amour courtois fleurit alors, comme nulle part ailleurs, à la cour angevine. On l'y cultive avec un soin infini". Agnès Sorel ou Soreau est née vers 1422, au château de Fromenteau, près Villiers-en-Brenne, dans la Touraine, et est morte à Anneville, près de Jumièges, le 9 février 1450. Son père, Jean Sorel ou Seurelle, écuyer, seigneur du Coudun, était gentilhomme au service du comte Charles de Clermont. Sa mère, Catherine de Maignelais, châtelaine de Verneuil en Bourbonnais, appartenait à une famille de petite noblesse. Admise de bonne heure à la cour de Nancy, Agnès fut attachée à la duchesse héritière de Lorraine, Isabeau, femme de René d'Anjou. La sœur de René, Marie d'Anjou, avait épousé Charles VII. Par suite des relations que ce mariage établissait entre les deux maisons de France et de Lorraine, la demoiselle de Fromenteau, c'est ainsi qu'Agnès s'appela d'abord fut présentée au roi de France vers 1441. Ce prince la remarqua, la retint auprès de lui, et bientôt après eut avec elle une liaison, qui demeura très secrète dans les débuts, mais qui, à partir de 1444, était publique. "Cette admirable fille est alors certainement nourrie de ses enseignements, toute imprégnée de ses principes". Depuis cette époque jusqu'à sa mort, Agnès ne quitta plus le roi, qui pendant ces six ou huit années ne cessa de lui témoigner l'attachement le plus passionné. Simple demoiselle d'honneur de la reine Marie, elle eut, grâce aux libéralités de son amant, un train de princesse, une maison royalement montée, des terres, des châteaux, ce qui, au dire de certains chroniqueurs, scandalisa les contemporains. C'était en effet la première fois que la maîtresse d'un roi avait à la cour une sorte de situation officielle. Agnès a donc tenu une assez grande place dans la vie de Charles VII, Est-ce à dire cependant qu'elle ait exercé sur la politique de ce prince l'influence que la plupart des écrivains ont signalée ? L'histoire d'Agnès Sorel est longtemps restée une pure légende.
"Il en tiendra compte, ne brusquera rien, acceptera, lui, le roi, de se plier aux règles d'un jeu qu'il ne peux renier, étant le premier chevalier de son royaume. Le temps a alors laissé son manteau de vent, de froidure et de pluie". Presque tous les historiens, trompés par des données chronologiques inexactes qu'ils adoptaient sans examen, faisaient naître Agnès vers 1410 et fixaient les commencements de sa liaison avec Charles VII aux environs de1433. Dès lors, c'était elle qui avait tiré le roi de son indolence, qui lui avait mis l'épée à la main contre les Anglais, qui l'avait débarrassé de ses pires favoris. Le traité d'Arras et les autres succès de la politique française étaient également son œuvre. Bref, on la représentait comme le bon génie de Charles VII et, en quelque sorte, comme la continuatrice de Jeanne d'Arc. C'est là une opinion fort ancienne, qu'on trouve exprimée déjà dans un quatrain attribué à François Ier ainsi que dans un conte de Brantôme. Mais elle ne repose sur aucune réelle autorité." Et s'est vêtu de broderie de soleil luisant, clair et beau. Ni bête, ni oiseau qui en son jargon ne change ou crie". Les recherches de Beaucourt, à la fin du XIXème siècle, en ont fait aisément justice. En reportant à 1420 ou 1422 la date de la naissance d'Agnès, et à 1441 celle de ses premières relations avec Charles VII, Beaucourt a réduit de sept ou huit ans le règne de la favorite, il a montré qu'elle avait paru à la cour trop tard pour exercer la salutaire influence qu'on lui a prêtée. Enfin, tout en reconnaissant qu'elle eut toujours beaucoup d'empire sur l'esprit du roi, il établit, d'après le témoignage des contemporains, qu'elle n'a pas eu d'action sérieuse sur son gouvernement. Il ne faut pas oublier que Charles VIl avait alors autour de lui des auxiliaires et des conseillers de premier ordre, Arthur de Richemont, Pierre de Brézé, Jacques Cœur, les frères Bureau, Etienne Chevalier et bien d'autres. Pour l'heure, il s'agit de briller parmi les belles du pays et les dames de la cour afin de leur prouver qu'une fille du Nord en vaut bien une du Sud. "Pourquoi la beauté ne serait-elle pas picarde ?".
"Mais, dans un coin de sa mémoire, demeure l'obscur souvenir d'une prédiction faite, jadis, par un astrologue". C'est à ces hommes qu'il faut rapporter tout ce qui se fit d'heureux ou d'utile dans cette période. Le seul mérite d'Agnès Sorel consista, ce semble, à ne point contrarier leurs vues et à les aider au besoin de son crédit. Il est presque certain qu'elle les soutenait. Tous ou presque tous étaient ses amis. Brézé, qu'elle sauva d'une disgrâce en 1448, Jacques Coeur et Chevalier, qu'elle se choisit pour exécuteurs testamentaires, paraissent lui avoir été sincèrement attachés. Au reste, il est assez remarquable qu'après sa mort les meilleurs serviteurs de Charles VII furent disgraciés ou relégués au second plan. Agnès eut de Charles VII quatre filles. La première, Marie, née vers1443 , épousa en 1458 Olivier de Coëtivy, frère de l'amiral. La seconde, Charlotte, née probablement en 1444, fut mariée par Louis XI à Jacques de Brézé, comte de Maulevrier et de Brissac. Jeanne, la troisième, dite Jeanne de Valois, née en 1445, devint la femme d'Antoine du Bueil, favori de Louis XI. Enfin Agnès accoucha peu de jours avant sa mort d'une quatrième fille qui ne vécut que six mois. Leur union fut très féconde pour l'époque. "Il lui avait annoncé qu'un grand roi l'aimerait et qu'elle serait à lui. Quel roi ? René d'Anjou ? Certainement pas. La duchesse, sa jalouse et belle épouse, veille toujours sur lui de trop près. D'ailleurs, il n'est plus roi de Sicile". Charles VII combla de bienfaits sa maîtresse. Vers 1444, il lui donna le château de Beauté-sur-Marne, près de Vincennes, "afin, dit Monstrelet, qu'elle fut dame de Beauté de nom comme de fait." C'est effectivement le nom qu'elle prenait d'ordinaire et que ses contemporains emploient de préférence pour la désigner. En 1445, Agnès, insultée par le dauphin, devenu ensuite Louis XI, quitta la cour et alla vivre à Loches, où Charles VII lui avait fait bâtir un château. Plus tard, Charles VII lui fit présent d'une terre à Issoudun, puis du domaine de la Roquecesière,en Rouergue, et de la seigneurie de Bois-Trousseau, en Berry. Enfin, quand il se fut emparé de la Normandie, il lui réserva la terre de Vernon-sur-Seine. Peu après il lui donnait le château d'Anneville, près de Jumièges. Agnès était alors enceinte de son quatrième enfant. Elle se rendit dans son nouveau domaine pour y faire ses couches. Le roi vint l'y rejoindre. Là elle fut emportée en quelques jours par une affection qui avait l'apparence d'une dysenterie.
"Elle n'en connaît qu'un autre: Charles VII. Ce ne peut être lui non plus. Il a quarante ans passés, des liens sacrés l'attachent à la reine Marie. Qui donc alors ? Agnès Sorel, sire. C'est une jeune fille de petite noblesse picarde". Comme il est arrivé maintes fois en pareil cas, cette mort soudaine, inattendue, parut à beaucoup de gens peu naturelle. On crut à un empoisonnement. Et, de fait on pense encore aujourd'hui que c'est bien ce qui a causé samort, mais il aurait été accidentel, dû à l'absorption de sels de mercure, utilisés à l'époque comme un médicament. Les historiens français sont muets sur ce point. Seul Thomas Basin a enregistré les bruits qui coururent alors. En revanche, les écrivains de l'école de Bourgogne, Jacques du Clereq et Monstrelet, accusent ouvertement le fils de Charles VII d'avoir fait périr la maîtresse de son père. Le dauphin avait eu, en effet, avec Agnès, de violents démêlés. Mais sa culpabilité, en dépit des apparences, n'a jamais été établie d'une manière certaine. On accusa aussi Jacques Coeur, un peu plus tard, lors de son procès. Charles VII parut ajouter foi à cette imputation.Tout cependant porte à croire que ce fut là une calomnie imaginée après coup par les ennemis du malheureux ministre pour le mieux perdre dans l'esprit de son souverain. Il y a aussi la cousine germaine d'Agnès, Antoinette de Maignelais qui, trois mois après la mort d'Agnès Sorel, prenait sa place dans le lit du roi. le roi la marie rarapidement, en 1450, à André de Villequier, l'un de ses chambellans, et, peu après, Antoinette recevait la seigneurie d'Issoudun. Elle avait donc le double motif de jalousie et de cupidité. De supputations en soupçons. "Précipité du faîte des passions heureuses au fond d’un gouffre d’horreur, celui qu’on nomme partout "le Victorieux" sent vaciller son équilibre, voit revenir avec effroi les ombres mauvaises du désespoir et du malheur. Il a besoin de cette femme. Sans elle, il sent qu’il sera, de nouveau, perdu. Agnès est la fée d’un monde charmant où il n’a pu pénétrer qu’à sa suite. Elle détient les clefs de l’univers ardent et suave où il règne près d’elle dans l’allégresse de son âme enfin pacifiée".
"C’est le feu dévorant qui embrase l’homme de quarante ans quand il lui arrive de trouver, sur terre, l’image du paradis. Il a d’elle un besoin que rien ne peut entraver. Il n’y a pas, pour autant, intérêt à hâter la manœuvre.Les femmes aiment qu’on les sollicite, non qu’on les force. Elles ne sont ainsi point gibier, mais inspiratrices". Le cœur d'Agnès fut déposé à l'abbaye de Jumièges, où on lui éleva un mausolée qui a été détruit pendant lesguerres du XVIème siècle. Son corps, transporté à Loches, fut inhumé dans l'église collégiale Notre-Dame, devenue l'église Saint-Ours après 1792, que la favorite avait de son vivant richement dotée. Le tombeau qu'on lui dressa dans le chœur, déplacé au XVIIIème siècle, puis ruiné à la Révolution, a été maladroitement restauré. Conservé longtemps à la sous-préfecture, ce tombeau est de nouveau, depuis 2005, dans l'église Saint-Ours. Au témoignage des contemporains, Agnès était remarquablement belle. Nous n'en pouvons juger. Les prétendus portraits qui nous sont parvenus, un dessin exécuté vers 1515, la statue couchée du tombeau de Loches, une miniature, œuvre de J. Fouquet, conservée à Francfort-sur-le-Main, un dytique sur bois de l'église Notre-Dame de Melun, qui se trouve aujourd'hui à Anvers, sont d'une authenticité plus que douteuse. Notons que le vieux roi Charles VII trouva après sa mort bien du réconfort auprès de la propre cousine d'Agnès, Antoinette de Maignelais. "L'Amour Courtois fleurit, comme nulle part ailleurs, à la cour angevine. On l'y cultive avec un soin infini. Cette admirable fille est certainement nourrie de ses enseignements, imprégnée de ses principes. Il en tiendra compte, ne brusquera rien, acceptera, lui, le roi, de se plier aux règles d'un jeu qu'il ne peux renier, étant le premier chevalier de son royaume. Je vois, dans ce désir forcené de possessions immédiates, un des pires dangers qui puissent guetter l'humanité. En se ruant ainsi vers les séductions faciles qu'offre le monde, les habitants de ce pays vont, de toute évidence, se détourner de l'indispensable quête spirituelle. N'oubliez pas que la tentation des richesses et du plaisir reste le plus éprouvé des pièges démoniaques."
Bibliographie et références:
- Auguste Vallet de Viriville, "Recherches historiques sur Agnès Sorel"
- Jean-Nicolas Quatremère de Roissy, "Histoire d'Agnès Sorel"
- Tracy Adams, "Agnès Sorel, une martyre politique ?"
- Pierre Champion, "Agnès Sorel, la dame de Beauté"
- Philippe Contamine, "Charles VII, une vie, une politique"
- Gaston du Fresne de Beaucourt, "Charles VII et Agnès Sorel"
- Georges Minois, "Charles VII: un roi shakespearien"
- Paul Durrieu, "Les filles d'Agnès Sorel"
- Pascal Dubrisay, "Agnès Sorel, féminité et modernité"
- Françoise Kermina, "Agnès Sorel, la première favorite"
- Robert Philippe, "Agnès Sorel"
- Philippe Charlier, "Qui a tué la Dame de Beauté ?"
- Jeanne Bourin, "La Dame de beauté"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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[Texte lu à Monsieur le 13 septembre 2023]
Mon cher Maître, Monsieur Sitaël...
Récemment j'ai exprimé le souhait de renouveler mes vœux de soumission et d'appartenance. Le moment est venu pour moi aujourd'hui de m'exprimer à ce sujet. Je serai brève, car je pense que mon attitude et le regard que je porte sur vous parleront d'eux-mêmes... toutefois je tiens à vous dire les choses de manière solennelle, pour que mes mots infusent votre mémoire. Je crois aussi que j'en ai besoin... non pas pour m'auto convaincre, mais pour aller là où vous m'encouragez à aller ; c'est-à-dire vers l'expressivité et la communication. Certes, vous pourriez juger que lire un texte manque de spontanéité… voyez cela comme étant le gage d’un travail de réflexion. Comme nous nous le disons souvent, les choses changent et évoluent. Mais s'il y a bien un élément qui est resté tel quel, depuis notre belle rencontre à Péronne, c'est l'admiration que je vous porte et ma volonté de vous être dévouée, afin de faire votre plaisir.
Ce n'est ni par habitude, ni par pitié, ni par compassion, ni par fainéantise, que je fais le choix de rester à vos pieds. Si je tiens tant à continuer volontairement de sentir le collier de ma maison d'appartenance autour de mon cou, c'est que j'en suis fière et que cela m'apporte beaucoup en termes d'épanouissement, d'équilibre de vie, d'exploration de ma féminité et de votre virilité. Il arrive par moment que nos interactions aient un arrière-goût vanille... pour autant, cela n'efface en rien ma dévotion, ni mon envie de vous servir du mieux que je puisse le faire. Comme vous le dites si bien : nous sommes des êtres multiples et il est extraordinaire de pouvoir explorer avec vous le champ des possibles, des plus doux au plus bousculant. Dernièrement vous m'avez ouvert grand la porte vers une forme de liberté nouvelle. J'ai fait le choix conscient et lucide de la refermer pour deux raisons :
La première : je me suis rendu compte qu'elle n'était pas compatible avec mon statut de soumise fidèle et loyale.
La seconde : j'ai ouvert les yeux sur mes motivations qui étaient mal fondées, tel un exercice comptable.
Oui, c'est bien mon exclusivité que je souhaite vous offrir Monsieur. Ne rend-t-elle pas ma dévotion bien plus noble et cohérente ? Je suis une femme profondément littéraire, qui aime les mots...la lecture autant que l'écriture. Mes résultats en mathématiques n'ont jamais été au-dessus de la moyenne... c'est pourquoi je ne me lancerai plus dans les calculs et la comptabilité pour tendre vers une équité desillusoire entre nous...y compris si la balance continuait de pencher de votre côté !
En faisant le choix de renouveler mes vœux, je prends garde de ne pas être dans le déni, dans une forme d'aveuglement volontaire qui me ferait refuser la fin de notre lien D/s. Toute chose à un fin, comme vous me l'avez appris Monsieur... mais vos enseignements, vos transmissions de savoir, tout comme votre éducation, me sont indispensables dans mon quotidien et me font vibrer aujourd'hui encore. Votre accompagnement et votre présence sont des besoins pour moi, car cela me guide et pose des jalons dans ma vie de femme. L'heure n'est pas venue pour moi de vous demander ma liberté. Me voilà à genoux devant vous Monsieur. Vous êtes un Maître et un homme incroyable, combatif et tenace, dont la destinée et la personnalité me fascinent autant qu'elles me motivent. Si je suis encore à cette place plus de 10 ans après notre rencontre, c'est que ma soumission à vos côtés est l'aventure humaine la plus bouleversante de mon existence. Ma soif de vous n'a pas tarit Monsieur, tant vos qualités font de vous un être merveilleux et désirable.
Ma volonté ne peut se suffire à elle-même, je ne pourrais être soumise sans mon Maître, c'est pourquoi je souhaite vous poser la question suivante Monsieur :
Souhaitez-vous continuer de supporter votre responsabilité de Maître, ainsi que les engagements qui vous obligent ?
Votre dévouée, Swann
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Il fait chaud en cette fin de septembre. Seule dans mon nouveau kot d’étudiante, je m’ennuie et le soleil ne se décide pas à se coucher. Allongée sur mon lit, je n’ai conservé que mon petit top mais je languis, toute moite de transpiration. Je rêve… que faire pour me distraire ? Je vais tripoter dans mes armoires. Ah oui, il y a cette ceinture en cuir que m’ont rapportée mes parents quand ils sont revenus d’Espagne. Elle n’est pas mal, assez haute, avec des trous tout autour, elle sent bon le cuir sauvage, je vais l’essayer. Je la glisse autour de ma taille. Troublant ce contact sur la peau nue… Je la fixe fermement et vais me regarder dans la glace. Bien, mais on pourrait serrer un peu plus. Un trou de gagné et ma silhouette s’améliore. Allez, encore un trou et je deviens aguichante tandis qu’un délicieux trouble commence à m’envahir. Encore un trou ? ça devient dur mais des sensations nouvelles me pénètrent. Je me vois prisonnière, offerte à un Prince cruel qui me traîne ainsi derrière son char. Je serais nue, la taille entravée, les seins offerts, les bras et les poignets ligotés dans le dos. L’image me poursuit et maintenant, ce n’est plus de la sueur qui me coule entre les jambes. Encore un trou ? Non, plus moyen, j’ai beau tirer, m’escrimer sur la lanière, serrer les dents, rien à faire. La frustration me gagne, il faut que j’y arrive. Idée ! J’entrouvre ma fenêtre, je cale le bout de la ceinture dans le vantail et je referme : le bout de la lanière est fermement attaché. Allez, tant pis pour la douleur, je me lance en avant, je tire comme une forcenée, le cuir glisse légèrement le long de la boucle, je vais gagner le trou suivant… Ouiii, l’ardillon passe dans le trou, la ceinture se bloque, gagné ! Le souffle court, je savoure la victoire, mais aussi la contrainte. C’est dur, mais quelles sensations ! Je débloque la fenêtre et fais quelques pas dans ma chambre. Je suis belle et désirable. Mon esprit tourne à cent à l’heure. Que faire encore ?
Une autre ceinture, plus fine. Je me la passe autour des poignets, je la boucle avec mes dents, me voilà doublement prisonnière. Et si je me mettais les poignets dans le dos ? Pas facile, mais faisable. Je me courbe (aïe ma taille), je passe mes poignets attachés par dessus mes pieds et je me redresse. Dernier obstacle, mes fesses, qui se laissent finalement franchir dans un vigoureux effort. Ça y est, je suis la parfaite demoiselle en détresse attendant le sacrifice. Je jouis de me voir ainsi offerte dans la contrainte, mon sexe me brûle, je…
Tout à coup, une sonnerie retentit et un haut-parleur se met à hurler : alerte à la bombe, il faut évacuer d’urgence, quittez vite vos chambres. Affolée, j’essaie de me libérer les poignets. Impossible. Je veux les faire repasser par devant. Pas moyen, dans ce sens, mes fesses s’y refusent absolument. Je panique, je tombe sur mon lit en essayant désespérément de trouver une échappatoire, mon cœur bat comme un fou, je suis vraiment prisonnière et cruellement torturée par mes liens.
On frappe à ma porte. Ouvrez, ou nous forçons la serrure ! (à suivre ?)
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(Avertissement : certaines scènes, particulièrement émouvantes, peuvent heurter les personnes sensibles)
Il la veut.
Il la veut lovée contre lui.
Il la veut sous sa main.
Ce n’est pas une formule symbolique et rituelle pour dire le lien. Il ne la domine pas. Elle ne se soumet pas. Elle vient. Elle vient s’offrir. Elle vient pour souffrir. Pour avoir mal. Et en jouir…
Sous sa main. Quand il la prend de toute sa main dans son ventre.
Ils sont au corps à corps. Il la branle. Il la baise. Ils sont liés tous les deux par cette main dans son ventre ou dans son cul. Il la prend. Au cœur de son corps. Pour la faire jouir. La faire jouir encore…
Sous sa main. Elle est sous sa main quand il la caresse. Son cou. Sa nuque. Ses épaules. Son dos.
La toucher. La toucher. La caresser. Passer le dos de sa main sur ses seins.
Dans le désir de lui faire mal.
De planter ses griffes ou ses dents. Dans sa peau.
Et elle le sait. Elle en a peur. Elle l’attend. Cette douleur… Quand sa main se crispe sur son sein. Ecrase. Broie. Ils sont liés. Liés par cette douleur. Liés par leurs yeux. Elle se donne dans son regard. Elle l’implore. Elle supplie. Ils s’accrochent dans leurs yeux. Parce qu’il lui fait mal. Parce qu’elle en veut encore… Encore… Fort… Plus fort…
Et s’il lâche son sein, c’est pour frapper sa vulve. Et si instinctivement elle resserre ses cuisses, alors brutalement : « Ouvre »…. « Ecarte »…
Et elle s’ouvre et s’offre à la main qui tombe. Qui frappe sa vulve. Violemment. Sauvagement.
Elle n’est nullement dans l’obéissance. Elle est dans le désir. De sentir sa main qui tombe et frappe.
Ou la caresse. Simplement son clito. Très doucement. Très lentement. Il l’apaise. Il lui donne son plaisir. Il est le Maître de son désir.
Sous sa main. Elle est sous sa main. Dans ses bras quand il l’enlace. Sous sa main quand il la gifle. Quand il la tient par les cheveux, son visage si près du sien. Quand il laisse passer le temps. Elle comprend. Elle comprend que cela va tomber. Quand il se recule un peu pour assurer son geste. Elle attend la gifle. La, Les. Les gifles. Car il y en a plusieurs. Plusieurs fortes gifles. Sèches et nettes. Jusqu’à ce qu’il la voit trembler. Au bord des larmes. Alors vite sa bouche. Investir sa bouche. Envahir sa bouche. L’embrasser. Et elle l’enlace plus fort.
Sous sa main quand il la flagelle, la fouette, la corrige, la cingle. Au martinet sur sa croupe, sur sa vulve. A la cravache ou à la badine. La terrible badine. C’est une véritable correction. Il la frappe et la marque.
Ou quand il l’enchaine, nue, débout les bras levés, l’enchaîne aux crochets de la poutre. L’enchaine pour la fouetter. Nue. Terriblement nue. Plus que nue.
Il a murmuré à mon oreille : « Viens. Je vais t’attacher aux crochets… ». Comme une simple invitation. Une évidence sur le moment…
Tout commence par une douce et tendre préparation. Il place les larges bracelets en cuir noir autour de mes poignets. Les serre jusqu’au dernier cran, la petite barrette dans le dernier emplacement. Lentement, ils se resserrent autour de mes poignets… que je découvre alors si fins, et si fragiles. Sensation intime et troublante.
Le cliquetis des chaînes m’entoure et je ferme les yeux. Quelques maillons me frôlent, frais, doux, arrondis. Anneaux, mousquetons, crochets… l’installation se poursuit tranquillement. Concentration et silence. Comme pour une performance d’artiste qui se prépare à vivre un moment fort. Et unique. « Lève les bras. »
Il me faudra quelques secondes pour mettre à bas mes dernières réticences. Lever les bras, c’est se rendre. Ne plus pouvoir se cacher, se toucher, ni essuyer ses larmes ou sa morve. Et me voilà accrochée à la poutre. Non, je ne suis pas une femme condamnée, exposée en place publique, qui attend sa punition et se lamente. Non. Ni fière, ni honteuse. Ni courageuse ni apeurée. Juste… je me sens nue. Mes gestes sont empêchés. Mon cerveau ne pilote plus rien… Émotions et sensations sont aux commandes.
Désormais attachée, je veux jouir sans entraves. Instants magiques avant le saut dans le vide… Puis vinrent les premiers coups de fouet.
Et le fouet claque sur son dos, ses épaules, ses reins, ses fesses. Le fouet claque. Et il vient devant elle pour voir le visage qu’elle fait. Devant elle pour la toucher. Vérifier qu’elle mouille et s’ouvre sous le fouet. Devant elle pour la branler. Avant de revenir dans son dos. Et la fouetter encore…
Il la veut.
Il la veut dans la douleur.
Il la veut ouverte et trempée.
Il la veut dans son délabrement.
*
Elle est sous sa main quand il fourre violemment sa bouche. Il veut qu’elle tienne. Il lui impose sa bite. Il fourre sa bouche comme il fourre sa chatte ou son cul. Qu’elle subisse et qu’elle tienne. Et elle le veut. Qu’il en soit ainsi. Qu’elle en souffre. Qu’elle en bave. Qu’elle s’en asphyxie. Qu’il serre dans sa main son cou pour que ça lui soit encore plus pénible… Jusqu’à ce qu’il lui dise : « J’ai envie de pisser »….
Alors il se détend. Il prend son temps.
Qu’elle attende sa pisse chaude. Qu’elle le boive.
Il s’en émeut.
Ou bien, alors qu’ils sont en pleine conversation, debout, il lui dise soudain : « J’ai envie de pisser ». La saisisse par la nuque et la mène jusqu’à la salle de bain, contre la baignoire : « Tu me tiens la bite ? Ou je te pisse dans la bouche ? »
Il lui laisse le choix.
Le temps qu’elle réfléchisse son désir.
« Dans ma bouche » dit-elle.
Il s’en émeut.
Et encore une fois, elle le boit.
Ils sont dans cette intimité.
Dans cette intimité, quand, lovée sur ses cuisses, il dit : « Donne-moi à boire avec ta bouche ». Et elle remplit sa bouche de Prosecco. Lui donne à boire le liquide frais. Plusieurs fois. La douceur de ses lèvres. La fraîcheur du vin. Elle lui donne à boire.
Ils sont dans cette intimité quand il l’accompagne aux toilettes. S’accroupit entre ses cuisses. Glisse une main sous sa vulve. La touche à peine. Attend qu’elle pisse. Sur sa main. De longs jets chauds. Cela fait plusieurs heures qu’elle se retient.
L’a-t-il fait jouir ensuite ?... Assise sur la cuvette des toilettes, cuisses écartées…
Sous sa main ?
Et aussi sous ses couilles. Qu’elle lèche, lèche, lèche. De sa langue humide.
Sous sa main ?
Et aussi dans ses yeux. Quand elle devient féroce pour le faire jouir….
Cela dure.
Des heures. Des jours.
Et s’ils se quittent, c’est pour se retrouver.
Il la veut.
Il la veut en larmes après qu’elle a joui.
Il la veut.
Et qu’elle en jouisse encore…. Encore… Fort… Plus fort…
(les scènes plus intimes, baises et enculades, ont été volontairement censurées)
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Rituels BDSM, de quoi parle-t-on ?
Le BDSM est souvent mal compris par ceux qui n'en ont qu'une connaissance superficielle. Pourtant, au cœur de ces pratiques se trouvent des rituels qui servent de fondement au cadre même de la relation entre un(e) dominant(e) et un(e) soumis(e). Ces rituels ne sont pas de simples actes superflus; ils sont chargés de significations, forment une base sur laquelle la relation se construit et évolue.
Les rituels en BDSM varient énormément d'une partie à l'autre, allant de simples signes de respect, comme la pose d'un collier, à des cérémonies complexes qui marquent des événements importants comme la naissance d'une relation de domination et soumission. Chaque rituel, qu'il soit petit ou grand, est un moyen de renforcer les rôles et les règles convenus, et de rappeler à chacun son engagement dans la dynamique du couple.
Par exemple, la cérémonie du collier peut être considérée comme l'un des rites de passage pour un novice en soumission, marquant une distance symbolique des visites passées et une entrée dans un état de dévotion et d'éducation sous la tutelle d'un maître ou d'une maîtresse. Ces rituels ne sont pas statiques; ils peuvent évoluer avec le temps, subissant des modifications à mesure que les besoins et les désirs du couple se transforment. C'est la beauté du rituel BDSM: il est aussi unique que les personnes qui l'intègrent dans leur vie.
La soumise ou l'esclave qui reçoit un collier lors d'une cérémonie peut le voir comme un objet de fierté et d'appartenance, un point de contact constant avec son maître ou sa maîtresse, même en leur absence. De même, le dominant peut voir dans ces rituels une affirmation de son contrôle et de son influence sur la vie de la soumise, un moyen de maintenir l'ambiance et le sens de leur lien, peu importe la distance ou les circonstances.
Que vous soyez novice ou expérimenté, seul ou en couple, les rituels BDSM offrent une façon de matérialiser la nature profonde de la soumission et de la domination, créant des liens qui vont bien au-delà des séances et des cérémonies, s'inscrivant dans la vie de tous les jours.
Les fondements des rituels en BDSM
Le BDSM se base sur une série de rituels qui définissent les rôles et les règles d'engagement entre les partenaires. Ces pratiques ne sont pas de simples traditions; elles forment le cadre dans lequel les relations de domination et de soumission peuvent prospérer. Un rituel peut englober des actions aussi simples que le port de sous-vêtements spécifiques décidés par le dominant, ou aussi élaborées que des cérémonies de contrats où la durée et la nature de la soumission sont formalisées.
Dans le contexte du BDSM, un maître ou une maîtresse utilise des rituels pour établir et maintenir la dynamique de pouvoir avec son soumis ou sa soumise. La mise en place de règles précises et le suivi de protocoles spécifiques sont essentiels pour assurer que les besoins de chaque personne sont satisfaits. Par exemple, la cérémonie du collier de soumission peut être un rituel puissant qui symbolise l'entrée du soumis dans un état de dévotion et l'acceptation du dominant comme sa principale figure d'autorité.
Les rituels varient selon le type de relation BDSM et sont souvent adaptés pour répondre aux besoins spécifiques des personnes impliquées. Certains peuvent être quotidiens, comme un rituel de bonjour ou de bonne nuit, tandis que d'autres peuvent être réservés pour des occasions spéciales. Les cérémonies de collaring, où un collier en cuir est souvent utilisé comme symbole de soumission, sont un exemple de rituels qui marquent des étapes importantes dans la relation BDSM.
Chaque modification des rituels ou des règles au sein d'une relation BDSM doit être négociée avec soin. Les apports et questions des soumis sont cruciaux dans ce processus, car ils garantissent que la modification des rituels reste en ligne avec les limites et le contrat établi. L'éducation permanente et la communication ouverte entre les partenaires sont la base pour une relation BDSM saine.
Le Maître ou la Maîtresse, ainsi que le soumis ou la soumise, doivent tout deux comprendre la signification derrière chaque rituel. Ce n'est pas seulement une question de soumission; il s'agit aussi de construire une ambiance de confiance et de respect mutuel. Pour le novice, l'assimilation de ces rites peut sembler écrasante, mais avec le temps et l'expérience, ils deviennent une seconde nature, façonnant le travail quotidien et la vie de la relation.
Types de rituel BDSM
Dans l'univers du BDSM, les rituels sont une partie intégrante qui reflète la nature et la dynamique d'une relation entre un dominant et un soumis. Ces rituels sont ancrés dans des règles et des protocoles établis pour répondre aux besoins spécifiques des partenaires et renforcer leur lien. Il existe une multitude de rituels, chacun avec sa propre signification et fonction au sein de la relation.
Rituels de salutation
Les rituels de salutation sont souvent les premiers à être établis. Un exemple classique est le rituel où le soumis salue son maître ou sa maîtresse d'une manière particulière, que ce soit par une pose spécifique, un geste de révérence, ou le baiser des pieds ou de la main. Ces actions peuvent paraître simples, mais elles marquent le début et la fin de chaque séance, créant un cadre et rappelant à tous les rôles et la structure de leur relation.
Rituels de punition
Les rituels de punition sont mis en place pour traiter les transgressions des règles convenues. Ils peuvent varier de la récitation d'une lettre d'excuse, à des tâches physiques ou même l'imposition d'une position inconfortable pour une durée déterminée. Ces rituels ne sont pas seulement un moyen pour le dominant d'exercer son autorité, mais aussi une façon pour le soumis de montrer sa volonté de se corriger et de se réaligner avec les attentes de son partenaire.
Rituels de Récompense
À l'opposé des rituels de punition, ceux de récompense reconnaissent et célèbrent les actions positives et le comportement souhaité du soumis. Cela peut aller de mots d'encouragement à des récompenses physiques comme des caresses ou des cadeaux. Pour un novice, ces rituels peuvent constituer des moments de fierté et de renforcement de l'identité de soumise ou d'esclave.
La mise en place des rituels
La création de rituels BDSM requiert une approche minutieuse et collaborative pour s'assurer qu'ils sont en harmonie avec les désirs et les limites de tous les partenaires impliqués. Voici quelques conseils pour établir des rituels qui renforcent la relation et respectent les besoins individuels.
Débuter par une franche discussion
Avant d'intégrer des rituels dans votre pratique du BDSM, engagez une conversation franche avec votre partenaire. Discutez de ce que chaque personne espère accomplir à travers ces rituels et comment ils pourraient être intégrés dans vos séances. Les mots choisis et les idées partagées ici posent la base de ce qui sera construit ensemble.
Établissez des règles claires
Des règles bien définies sont cruciales pour le succès des rituels. Elles déterminent non seulement ce qui est attendu de chacun, mais aussi la façon dont les rituels seront exécutés et ce qui se passe en cas de non-respect. Toutes les parties doivent comprendre et consentir à ces règles avant de vous lancer.
Construisez sur la confiance et le consentement
La confiance est au cœur de tout rituel BDSM, et le consentement en est le gardien. Chaque action et chaque rituel doivent être consentis par le dominant(e) et le/la soumis(e). Établissez des mots de sécurité (safeword) et des gestes qui permettent de communiquer efficacement, surtout lorsqu'il s'agit de pratiques impliquant une soumission profonde.
Personnalisez selon les désirs et besoins
Les rituels ne doivent pas être tirés d'une liste générique mais adaptés aux besoins spécifiques de votre relation. Qu'il s'agisse de la cérémonie d'un collier ou de rituels de punition et de récompense, chaque élément doit être réfléchi pour refléter la dynamique unique entre le maître et le soumis.
Restez flexibles
La vie change, et avec elle, les besoins et les désirs peuvent évoluer. Les rituels doivent être flexibles et susceptibles d'être adaptés ou modifiés en fonction des circonstances changeantes de la relation. Permettez une révision périodique des rituels pour s'assurer qu'ils restent pertinents et bénéfiques.
(In)Formez-vous !
La formation et l'éducation sont une partie intégrante de la mise en place de rituels. Pour les novices, c'est essentiel pour comprendre la portée et l'importance des rituels dans la dynamique BDSM. Des articles sur les sites internet, des ateliers, des livres et surtout des échanges sur les forums peuvent être très instructifs.
Contractualisez les pratiques
Pour les cas plus formels, il peut être utile de documenter les rituels convenus. Cela peut prendre la forme d'un contrat ou d'une lettre d'intention, offrant une référence claire et un rappel des engagements pris.
En respectant ces étapes, vous pouvez créer des rituels qui renforcent le travail d'équipe et la connexion au sein de la relation BDSM, tout en honorant la nature et les rôles de chaque personne impliquée.
Les bénéfices du rituel BDSM
Les rituels en BDSM offrent de multiples avantages qui renforcent non seulement la connexion entre les partenaires, mais aussi enrichissent l'expérience globale du BDSM. En établissant des routines et des rites, les partenaires créent un espace sécurisé où la confiance peut s'épanouir et où les dynamiques de pouvoir peuvent être explorées de manière saine et contrôlée.
Renforcement de la confiance
La confiance est la pierre angulaire de toute dynamique BDSM. Les rituels, par leur nature répétitive et prévisible, créent un environnement de sécurité émotionnelle. Lorsqu'un soumis se soumet aux rituels établis, il démontre sa confiance envers son maître ou sa maîtresse. Inversement, lorsque le dominant respecte les règles et les limites établies dans ces rituels, il affirme son engagement envers le bien-être et le respect du soumis.
Raffermissement de la connexion
La pratique de rituels spécifiques permet aux partenaires de se reconnecter à un niveau profond à chaque session. Cela va au-delà de la simple action physique; il s'agit d'une communication non verbale qui, par le biais de gestes et de mots, confirme la nature de leurs engagements mutuels. Par exemple, une cérémonie de colliers peut servir de rappel tangible de la connexion qui existe entre un maître et son esclave.
Amélioration de l'expérience BDSM
Les rituels peuvent enrichir l'expérience BDSM en ajoutant une couche de profondeur et de signification. Ils ne sont pas simplement des actes; ils sont des symboles de dévotion, de pouvoir et de respect. Ils peuvent transformer des actions autrement ordinaires en moments chargés de signification, augmentant ainsi l'intensité émotionnelle et psychologique de la séance.
Développement personnel et éducation
L'adoption de rituels peut également jouer un rôle dans l'éducation et le développement personnel des soumis et soumises. À travers la répétition et la discipline, ils apprennent à mieux se connaître et à comprendre leur place dans la dynamique BDSM. De même, les dominant(e)s peuvent affiner leur capacité à guider et à protéger, affirmant leur rôle à travers les rituels qu'ils établissent.
Création d'une cadre
Les rituels instaurent une structure qui peut aider les partenaires à naviguer dans leurs dynamiques de pouvoir. Cette structure peut fournir une liste claire d'attentes et de comportements souhaités, aidant les partenaires à rester dans le cadre convenu et à éviter les incertitudes ou les malentendus.
Lancez-vous ! (ou pas !)
En explorant les différentes facettes des rituels dans la pratique du BDSM, nous avons souligné leur rôle essentiel dans la création et le maintien d'une dynamique saine et épanouissante entre les partenaires. Nous avons vu comment ces rituels, loin d'être de simples formalités, sont des piliers sur lesquels la confiance, le respect et la connexion entre un maître, une maitresse et sa soumise, son soumis ou un esclave peuvent être construits et renforcés.
La mise en place de rituels avec des règles claires et consensuelles est un processus qui requiert une communication ouverte, une formation continue, et un engagement réciproque. Chaque rituel, chaque geste et chaque parole contribuent à l'effet global des sessions de BDSM, les transformant de simples actions en cérémonies empreintes de signification.
La nécessité d'ajuster les rituels aux besoins spécifiques des partenaires, d'adopter une attitude flexible face aux changements, et de toujours maintenir le consentement et la sécurité au premier plan est une évidence.
Nous espérons que ces idées et informations inspireront des questions et des commentairesainsi qu'une réflexion de chacun plus profonde sur le sujet.
Gardez en tête que les rituels en BDSM sont une matière complexe et personnelle, et que ceux qui s'en passent ne sont pas dans l'erreur, mais vivent leur BDSM à leur façon. Le rituel est ce que les partenaires décident d'en faire et sont aussi uniques que les personnes qui les pratiquent. Ce qui importe, c'est que tout ce qui est fait, le soit dans le cadre de règles convenues, avec respect, et avec un désir partagé d'explorer les profondeurs de la domination et de la soumission d'une manière qui enrichit la vie de tous les participants.
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"Il s'agit d'une noce, sans doute, se dit Augustin. Mais ce sont les enfants qui font la loi, ici ?, bien étrange domaine ! Mais quelqu'un est venu qui m'a enlevé tous ces plaisirs d'enfant paisible. Quelqu'un a soufflé la bougie qui éclairait pour moi le doux visage maternel penché sur le repas du soir. Quelqu'un a éteint la lampe autour de laquelle nous étions une famille heureuse, à la nuit, lorsque mon père avait accroché les volets de bois aux portes vitrées. Et celui-là, ce fut Augustin Meaulnes, que les autres élèves appelèrent bientôt le grand Meaulnes". Aux confins de la Sologne et du Berry, dans une France rurale où, en cette fin du XIXème siècle, le temps semble suspendu. C'est là que naît Henri Alban Fournier, dit Alain-Fournier, écrivain méconnu d'un roman célèbre, compagnon de route effacé de son propre personnage: Meaulnes. La première fois que, à dix-neuf ans, il signe Alain-Fournier, l'écrivain mûrit déjà l'œuvre qui lui obtiendra la postérité, ce "Grand Meaulnes" qui le place parmi les écrivains français les plus lus du XXème siècle. Être lu presque comme un anonyme, telle semble devoir être la gloire posthume d'Alain-Fournier. Sa vie est assez mal connue. La faute, sans doute, à sa brièveté. Alain-Fournier tombe au champ d'honneur le vingt-deux septembre 1914 à Saint-Rémy-la-Calonne, âgé de vingt-sept ans. L'œuvre, quant à elle, continue de vivre, en même temps qu'elle semble effacer l'homme qui l'a écrite. À travers elle, il nous est pourtant donné de retrouver quelques traces d'un passé, celui de François Seurel et d'Augustin Meaulnes, qui fut aussi le passé d'Alain-Fournier. Enfance dans le Berry, promenades à la campagne, boulimie de lecture, cours de catéchisme, amitié indéfectible en la personne de Jacques Rivière. La vie de l'auteur résonne d'étranges échos avec les pages du "Grand Meaulnes", tout en nous racontant une autre histoire, celle d'Alain-Fournier, protagoniste attachant s'il en fut, jeune homme rêveur, amoureux mélancolique, victime de la grande guerre. "Quelque chose désespérément me réclame et toutes les routes m'en séparent". Alain-Fournier et Augustin Meaulnes, le héros du "Grand Meaulnes", se rejoignent dans cette phrase. Les analogies entre la vie de celui qui prit, en 1907, le pseudonyme d'Alain-Fournier et son roman sont manifestes: La Chapelle-d'Angillon et les paysages du Cher, les parents instituteurs, la rencontre avec Yvonne de Galais, une liaison avec Jeanne, modiste comme Valentine est couturière, la deuxième rencontre, huit ans plus tard, avec Yvonne. Ce sont les traces de ce que son ami, beau-frère et correspondant Jacques Rivière nomme une "conception littéraire". "Je sais bien", lui dit-il, évoquant Claudel qui, avec Gide et Laforgue, forma Alain-Fournier, "que tu penses toujours à: nous ne séparerons pas la vie d'avec l'art". C'est qu'Alain Fournier "n'est pas d'ici, il est de l'attente, attente-souvenir de l'amour, attente de lui-même".
"La plupart du temps, nous mourons de faiblesse, nous ne mourons de ne rien oser. Mais un homme qui a fait une fois un bond dans le paradis, comment pourrait-il s'accommoder alors ensuite de l'existence de tout le monde ? Voilà donc ce que nous réservait ce beau matin de rentrée, ce perfide soleil d’automne qui glisse sous les branches. Comment lutterais-je contre cette affreuse révolte, cette suffocante montée de larmes. Nous avions retrouvé la belle jeune fille. Nous l’avions conquise. Elle était la femme de mon compagnon et moi je l’aimais de cette amitié profonde et secrète qui ne se dit jamais". On a souvent destiné "Le Grand Meaulnes" aux écoliers, et bien sûr, on y retrouve avec bonheur, et toujours un peu d’étonnement, les sensations exactes de l’enfance, si bien attentives à "l’heure où l’on entend tirer de l’eau au puits et jouer les enfants rieurs dans les sentes fraîchies". À ce réalisme sobre, tout français parce que tout classique, Fournier a su mêler l’extraordinaire et l’étrangeté au point qu’un lecteur lui reprochera dans une lettre sa tendance "anglaise". Certains se plairont d’approuver l’exploitation du versant imaginatif de l’enfance, versant qui semble faire contrepoids à la dernière partie de l’ouvrage, aussi désenchantée que le veut l’immanquable passage à l’âge d’homme. Et pourtant la grâce du "Grand Meaulnes" réside alors toute dans ce fait que les valeurs de l’enfance y sont reconnues comme valeurs définitives. La fantaisie merveilleuse d’un "royal enfant en guenilles", où le rêve étreint la nostalgie des temps passés, ne se prolonge certes pas à l’âge adulte. Mais il en subsiste, intact, le principe, qui est ce "désir exaspéré d’aboutir à quelque chose et d’arriver quelque part". Meaulnes n’est pas victime de la déception mais du remords. Parce qu’il a "sincèrement et délibérément" cru nécessaire "un jour de faire comme les autres" alors qu’il était de la race "gauche et sauvage" de ceux qui sont bâtis pour l’absolu, il a connu "ce goût de terre et de mort" qui lui interdit désormais le "Pays perdu" où demeure Yvonne. Douloureusement tendu vers la pureté, ne renonçant à aucune des aspirations qui font le cœur de l’homme infini, Fournier nous laisse seulement une prière,"une supplication au bonheur de ne pas être trop cruel, un salut et comme un agenouillement devant le bonheur". Et de soupirer, comme à un frère: "De tous les hommes, je suis le seul à connaître notre mal, qui est l’attente du jour". On sait ce que fut l’éblouissement de ce jour de juin 1905 où Fournier croisa Yvonne de Quiévrecourt sur les marches du Grand Palais: "Vous êtes venue, tout mon rêve au soleil, n’aurait jamais osé vous espérer si belle". À peine maquillé sous les traits d’Yvonne de Galais dans "Le Grand Meaulnes", le souvenir de celle avec laquelle il n’échangea que de rares paroles domine désormais le récit comme sa vie amoureuse, marquée ensuite par deux liaisons tumultueuses.
"Sans bruit, tandis que la jeune fille continuait à jouer, il retourna s'asseoir dans la salle à manger, et, ouvrant un de ces gros livres rouges épars sur la table, il commença alors distraitement à lire". "Parfois, au bord de l’eau entourée de bois, nous rencontrions une maison dite de plaisance, isolée, perdue, qui ne voyait rien, du monde, que la rivière qui baignait ses pieds. Une jeune femme dont le visage pensif et les voiles élégants n'étaient pas de ce pays et qui sans doute était venue, selon l’expression populaire, "s'enterrer" là, goûter le plaisir amer de sentir que son nom, le nom surtout de celui dont elle n'avait pu garder le cœur, y était inconnu". En 1914, à l'heure de la mobilisation, Henri Fournier écrit à sa sœur: "Je pars content". Le dix-neuf septembre, il envoie la dernière lettre à ses parents. Il s'ennuie et croit en une victoire rapide. Le vingt-deux septembre, il est tué au contact de l'ennemi dans le bois de Saint-Rémy sur les Hauts de Meuse. Pendant soixante-dix-sept ans, son corps restera introuvable, avant qu'on ne le déterre alors d'une fosse commune où l'avait jeté les allemands. À sa mort, Paul Léautaud, Paul Fort, Guy-Charles Cros et les critiques littéraires rendent hommage à l'écrivain du "Grand Meaulnes". Dans Le Figaro, Julien Benda salue cet "être de choix qu'on voudrait soustraire au danger". Jacques Rivière, à la fin de la guerre, s'en va même refaire les derniers pas de son ami dans le bois de Saint Rémy: "Tout le monde ne sait peut-être pas qu'il est assez dur de s'avancer tout vivant, au comble de sa force, entre les bras de la mort". Alain-Fournier fait partie des écrivains fauché par la mitraille de 1914, comme Louis Pergaud, Jean de La Ville de Mirmont ou Charles Péguy quelques jours avant lui. Péguy qui écrivait en juin 1911 à Henri Fournier: "Vous irez loin Fournier, vous vous souviendrez que c'est moi qui vous l'ai dit". Plus de cent ans après sa mort, intimement lié à son unique roman, l'auteur a traversé le siècle sans vieillir. "L'aventure est finie. L'automne est mort comme la tombe". Henri Alban Fournier nait le trois octobre 1886 à La Chapelle d'Angillon (Cher) dans la maison de ses grands-parents maternels Barthe. Il porte en deuxième prénom, à la suite de sa mère, un nom qui rappelle l'origine de son grand-père, né à Alban en Albigeois. Dernier descendant de la famille des marquis de Pujol de Saint-André de la Tapie, Matthieu Barthe, ancien berger, ancien soldat, ancien gendarme, a conservé alors son accent du midi et sa bonhommie du sud. Veuf, et beaucoup plus âgé qu'elle, il a épousé Adeline Blondeau, "la plus jolie fille du pays", berrichonne née à Sury aux Bois à quelques kilomètres de La Chapelle d'Angillon d'une famille de paysans. Ils n'eurent qu'une fille, Albanie, la mère d'Henri.
"Presque aussitôt un des petits qui étaient par terre s'approcha, se pendit à son bras et grimpa alors sur son genou pour regarder en même temps que lui, puis un autre en fit autant de l'autre côté. Alors ce fut un rêve comme son rêve de jadis. Avec quel émoi Meaulnes se rappelait dans la suite cette minute où, sur le bord de l'étang, il avait eu très près du sien le visage désormais perdu de la jeune fille. Il avait regardé ce profil si pur, de tous ses yeux, jusqu'à ce qu'ils fussent près de s'emplir de larmes. Et il se rappelait avoir vu, comme un secret délicat qu'elle lui eût confié, un peu de poudre restée sur sa joue". Augustin Fournier, père d'Henri, est, quant à lui, né à Nançay, village de Sologne situé à une vingtaine de kilomètres de La Chapelle. Aîné de six enfants, Augustin, qu'on appelle Auguste, est instituteur et c'est au cours de son premier poste au Gué de la Pierre, hameau voisin de La Chapelle, qu'il rencontre sa future femme Albanie, elle aussi institutrice. La mère d'Augustin s'appelle Charpentier de son nom de jeune fille et c'est le nom que choisira Henri pour les grands-parents de François Seurel dans "Le Grand Meaulnes", même si le modèle en est ses grands-parents Barthe. Trois ans après la naissance d'Henri, naît sa sœur Isabelle. Souffrant d'une malformation de la hanche, elle restera très handicapée toute sa vie, et ce, malgré plusieurs opérations douloureuses subies alors qu'elle n'était pas encore adolescente. François Seurel, dans "Le Grand Meaulnes", est dit souffrir de coxalgie, une maladie des hanches, caractère très certainement inspiré par la situation physique de sa sœur. Les deux enfants sont très proches l'un de l'autre depuis leur plus tendre enfance: "Je puis bien dire que pendant mon enfance entière, et jusqu'au jour même où Jacques surgit à son côté, il fut le seul être présent pour moi au monde". Elle épousera même son meilleur ami, Jacques Rivière, en août 1910 et restera toute la vie d'Alain-Fournier sa plus grande confidente. Elle consacra le reste de sa propre vie à la mise en valeur de l'œuvre de son frère, malgré les nombreuses critiques et oppositions auxquelles elle dut faire face. Elle fut également romancière.
"Il put imaginer longuement qu'il était dans sa propre maison, marié, un beau soir, que cet être charmant et inconnu qui jouait du piano, près de lui, c'était sa femme. Lorsqu'elle me tendit la main, pour partir, il y avait entre nous, plus clairement que si nous avions dit beaucoup de paroles, une entente secrète que la mort seule devait briser et une amitié plus pathétique qu'un grand amour. Je suis comme cette folle de Sainte Agathe, qui sortait à chaque minute sur le pas de la porte, regardait, mains sur les yeux, du côté de la gare, pour voir si son fils qui était mort ne venait pas.Tandis que l’heure avance, que ce jour-là va bientôt finir et que je le voudrais fini, il y a des hommes qui lui ont confié tout leur espoir, tout leur amour, leurs dernières forces. Il y a des hommes mourants, d’autres qui attendent une échéance, et qui voudraient que ce ne soit jamais demain. Il y en a d’autres pour qui demain pointera comme un remords. D’autres qui sont fatigués, et cette nuit ne sera jamais assez longue pour leur donner tout le repos qu’il faudrait. Et moi, moi qui ai perdu ma journée, de quel droit est-ce que j’ose appeler demain ?" À la naissance d'Henri, les Fournier sont nommés à Marçais dans le sud du département puis deux ans plus tard à Épineuil le Fleuriel. Le village, ainsi que la maison d'Épineuil serviront de décor et de cadre à la majeure partie de l'histoire du "Grand Meaulnes". À l'entrée de l'école, "une longue maison rouge aux cinq portes vitrées", il est écrit aujourd'hui: "C'est dans cette école où Alain-Fournier fut élève de 1891 à 1898 que naquit le personnage d'Augustin Meaulnes". Monsieur Lullier, qui fut instituteur depuis les années soixante dans cette école, avait consacré tout son temps libre à repérer les lieux décrits dans le roman, à retrouver les habitants du village encore vivants. Le trois octobre 1898, Henri, qui a douze ans, entre au lycée Voltaire à Paris pour y faire sa classe de sixième. Durant ces deux premières années à Paris, Henri est pensionnaire chez Madame Bijard, une ancienne ajointe de Mr Fournier à Épineuil et qui dirige un pensionnat de jeunes filles. "Paris que j'ai commencé par haïr d'une haine de paysan", écrira-t-il plus tard avant de partir à la découverte des trésors de Paris. Il est tout de même choyé par Madame Bijard, il collectionne tous les premiers prix. En 1901, sa logeuse ayant quitté ses cours, Henri est pensionnaire à Voltaire où il restera jusqu'à la fin de la quatrième. Se sentant isolé, il rêve de devenir marin, influencé par les histoires d'aventures de son père. Au terme de cette quatrième, Henri quitte alors le lycée Voltaire. À son arrivée à Brest, son avance est telle qu'il tente de passer directement de la quatrième à la seconde marine. Il prépare l'École navale et son admission au Borda, navire école. Mais la vie y est bien plus dure qu'à Voltaire et à cause de l'éloignement, il ne peut rentrer chez ses parents que pour les vacances de Pâques. Brest le marquera néanmoins et "Le Grand Meaulnes" doit à cette période d'être rempli d'images et d'allusions marines, alors même que Frantz de Galais est supposé aspirant de marine. De son Cher à la mer.
"Lorsque j'ai découvert ce domaine sans nom, j'étais à une hauteur, à un degré de pureté que je n'atteindrai jamais plus. Parfois, au bord de l’eau entourée de bois, nous rencontrions une maison dite de plaisance, isolée, perdue, qui ne voyait rien, du monde, que la rivière qui baignait ses pieds". Au premier trimestre de la rentrée 1902, Henri obtient alors du lycée de passer un baccalauréat anticipé qu'il réussit. À Noël, il rentre chez ses parents à La Chapelle d'Angillon et leur annonce qu'il ne retournera plus à Brest. Il va terminer ses études à Paris. Il entre en janvier au lycée Henri IV comme pensionnaire pour y faire sa philosophie puis à la fin du mois, quitte Paris pour Bourges où il entre comme pensionnaire au lycée portant aujourd'hui son nom. C'est à Bourges qu'il situera le personnage de Valentine dans "Le Grand Meaulnes" et au jardin de l'archevêché, les rendez-vous de la petite couturière avec Frantz. Et la mairie-école de La Chapelle d'Angillon, logement de fonction de ses parents, est décrite comme la maison d'Augustin Meaulnes. En octobre 1903, Henri entre au lycée Lakanal pour y préparer l'entrée à l'École Normale Supérieure. Le Lycée Lakanal est le lycée parisien qui accueille beaucoup de jeunes hommes provinciaux dont le dossier scolaire leur permette de prétendre à passer ainsi le concours. Jacques Rivière qui vient de Bordeaux, est dans la classe d'Henri. Ils ne s'entendent pas du tout. Mais un jour à l'occasion de la lecture par leur professeur d'un poème d'Henri de Régnier, "Tel qu'en songe", "ils perçoivent cette voix comme à l'avance dirigée vers notre cœur que tout à coup Henri de Régnier nous fit entendre. Nous fûmes bouleversés d'un enthousiasme si pareil que notre amitié en fut brusquement portée à son comble". Jacques restera à Lakanal jusqu'à la fin de l'année scolaire 1905 et échouera au concours. Henri y demeurera un an de plus. Il ne se présente pas en 1905 ne se jugeant pas prêt. Il ne sera pas plus chanceux l'année suivante même s'il réussit l'écrit. Après leur rencontre si forte, plus que le programme de l'École, c'est l'art et la littérature qui les intéressent et qui les poussent chaque dimanche à courir dans Paris à tous les concerts, toutes les expositions et à fouiller les libraires, les revendeurs des quais pour y trouver des livres. Lorsqu'ils seront séparés après le retour de Jacques à Bordeaux en 1906, ils échangeront une immense correspondance qui est un monument pour la connaissance de leur temps, permettant de suivre pas à pas leur évolution en tant qu'écrivains. Une amitié très fertile.
"Pas dans la vie, mais dans la mort seulement, comme je te l'écrivais, je retrouverai peut-être la beauté de ce temps-là. Et je la regardais, revenant de quelque promenade sur un chemin où elle savait qu'il ne passerait pas, ôter de ses mains résignées de longs gants d'une grâce inutile. Une jeune femme dont le visage pensif et les voiles élégants n'étaient pas de ce pays et qui sans doute était venue, selon l’expression populaire, s'enterrer là, goûter le plaisir amer de sentir que son nom, le nom surtout de celui dont elle n'avait pu garder le cœur, y était inconnu, s'encadrait dans la fenêtre qui ne lui laissait pas regarder plus loin que la barque amarrée près de la porte". Le premier juin 1905, survient un évènement qui marque toute la vie ainsi que l'œuvre d'Alain-Fournier. Ce jour-là, Henri rencontre une jeune fille à la sortie du salon de la nationale au Grand Palais. Subjugué par sa beauté, il la suit d'abord à pied, puis sur un bateau mouche jusque devant sa maison, boulevard Saint-Germain. Il écrit ensuite fiévreusement sur un carnet les premières lignes qu'il transposera textuellement dans son récit de la rencontre avec Yvonne de Galais. Les jours suivants: "Je suis revenu alors guetter, attendre sous ses fenêtres", raconte-t-il à sa sœur. "Le samedi soir, veille de la Pentecôte, par une averse éclatante, habillée de noir, un livre à la main, elle a soulevé le rideau, et elle a souri de me retrouver-là. Le lendemain matin, dimanche de la Pentecôte, je me suis mis en uniforme. Je ne veux pas lui mentir; elle doit savoir que je ne suis encore qu'un collégien". Lorsque la jeune fille sort de chez elle pour aller à la messe de Pentecôte, Henri lui murmure: "Vous êtes belle", se promet en lui-même: "Vous êtes ma destinée, toute ma destinée". Il la suit dans l'église de Saint-Germain des Prés où elle assiste ainsi à la messe. Il la découvre dans une chapelle écartée: "Le chapeau de roses est incliné sur ses mains jointes". À la sortie, il l'aborde et lui demande de lui pardonner. Il lui demande son nom: "Yvonne de Quiévrecourt". "Le nom que je vous donnais était plus beau. "- Un nom? Quel nom?" "- C'est Mélisande que je voulais dire". Une conversation s'engage et tous deux descendent lentement le boulevard jusqu'à la Seine qu'ils longent jusqu'au pont des Invalides. C'est là qu'ils se séparent. Henri reste profondément bouleversé par cette rencontre, dont il transposera littéralement tous les détails, dans "Le Grand Meaulnes".
"À quoi bon en effet l'arracher à son désespoir pour l'y replonger ensuite plus profondément peut-être ? L'amour l'exige. La bouffée d'air frais venue de la cour déserte, les brindilles de paille qu'on voyait accrochées aux habits larges du grand Meaulnes, et surtout son air de voyageur fatigué, affamé, mais émerveillé, tout cela fit passer en nous un étrange sentiment de plaisir et de curiosité". Le deux juillet 1905, Henri part alors pour l'Angleterre où il a trouvé à s'engager pour la durée des vacances comme secrétaire de la manufacture de papiers peints "Sanderson and Son" à Chiswick, dans la banlieue ouest de Londres. Il loge chez le secrétaire de l'usine, Mr Nightingale. Il est embauché pour traduire des lettres commerciales. Mais pendant ses soirées et ses congés, il écrit des poèmes, "À travers les étés", "Chant de route", ainsi que des lettres très longues à Jacques et à ses parents. Il se promène dans les parcs et visite les musées de Londres où il découvre les préraphaélites totalement ignorés en France à l'époque, se prend de passion pour cette peinture. Un tableau le frappe particulièrement: "La Beata Beatrix" de Dante Gabriele Rossetti qu'il assimile au visage de la jeune fille du cours la Reine. Le seize juillet 1907, Henri est admissible à l'écrit du concours mais le vingt-quatre, il est refusé à l'oral. Déçu, il apprend le même jour le mariage d'Yvonne de Quiévrecourt. Quelques mois plus tard, il publie alors "Le Corps de la femme" dans "La Grande Revue". Il espère que "la Demoiselle" aura lu ces pages chastes et délicates qu'il lui dédie en secret. C'est son premier écrit publié, le premier signé de son demi-pseudonyme Alain-Fournier, écrit avec un trait d'union, pour ne pas être confondu avec le coureur automobile, vainqueur du Paris-Berlin qui porte le nom d'Henry Fournier. Le deux octobre, il avait cependant commencé son service militaire au vingt-troisième régiment de Dragons, cantonné à Vincennes. Très vite, il est inscrit comme élève-officier de réserve. En mars 1908, Isabelle, sa sœur et Jacques, son meilleur ami, se fiancent. Malgré l'échec de Jacques à l'agrégation de philosophie, malgré l'opposition du père de Jacques, les parents Fournier décident que "leurs enfants" se marieront. Le mariage a lieu ainsi à Paris, en l'église Saint-Germain des Prés, le vingt-quatre août.
"Il lui sembla alors que le vent lui portait le son d'une musique perdue. Aimer c'est donner raison à l'être aimé qui a tort. Un grand silence régnait sur les berges prochaines. Le bateau filait avec un bruit calme de machine et d'eau. On eût pu se croire au cœur de l’été. On allait aborder, semblait-il, dans le jardin de quelque maison de campagne. La jeune fille s'y promènerait sous une ombrelle blanche". En 1910, Henri rencontre une petite modiste qui habite alors avec sa sœur rue Chanoinesse, derrière le chevet de Notre-Dame. L'aventure qu'il débute avec elle sera transposée dans celle d'Augustin Meaulnes avec Valentine dans "Le Grand Meaulnes". En septembre, Henri écrit sa première lettre à Charles Péguy. Une grande amitié naît alors entre les deux écrivains qui se confient mutuellement leurs travaux. Péguy lui envoie un billet, alors qu'il vient de lire dans La NRF de septembre 1911, sa nouvelle intitulée Portrait: "Vous irez loin Fournier, vous vous souviendrez que c'est moi qui vous l'ai dit". Péguy s'entremet même auprès de Claude Casimir-Perier qui cherche un secrétaire pour l'aider à finir son livre, alors qu'Henri a perdu en même temps son travail à Paris-Journal à cause du changement de directeur. Henri sera marqué par cette influence, par cet esprit proche du sien. C'est Péguy qui l'aidera,comme dit Jacques Rivière, "à saisir son rêve par les ailes pour l'obliger à cette terre et le faire circuler parmi nous". Il rencontre alors plusieurs grands peintres et écrivains de son temps: Maurice Denis, André Gide, Paul Claudel, André Suarès et Jacques Copeau, et se lie d'une grande amitié avec Marguerite Audoux. La même année (1911), il fait la connaissance de Saint-John Perse et séjourne à Cuverville chez André Gide. En mai 1912, Péguy lui fait connaître Claude Casimir-Perier, qui l'engage comme secrétaire pour l'élaboration d'un livre. Il est présenté à la maîtresse de maison, l'actrice Simone, à la ville Pauline Benda. À cette date, il a rédigé la presque totalité du "Grand Meaulnes". Simone lit l'œuvre en manuscrit et, en juillet 1913, débute dans la Nouvelle Revue française la publication du roman.
"Allez-y si vous voulez, mais fermez la porte et prenez la clef. Moi, je vais me coucher. Je laisserai la lampe allumée. Une brise délicieuse comme une eau tiédie coulait par-dessus le mur. Une pluie délicieuse avait mouillé la nuit les feuilles des pivoines. La terre remuée du jardin avait un goût puissant, et j'entendais dans l'arbre voisin de la fenêtre, un oiseau qui essayait d'apprendre la musique. Brusquement je compris, heureux, que c'était la saison du printemps". L'atmosphère féerique de l'œuvre, le réalisme familier des descriptions paysannes, la peinture de l'adolescence inquiète valent un succès immédiat à son auteur, qui manque de peu le prix Goncourt. Encouragé, Alain-Fournier jette sur le papier l'ébauche d'une pièce en trois actes, "La Maison dans la forêt", et, conseillé par Simone, travaille à un nouveau roman, "Colombe Blanchet". Ce roman, dont très peu de chapitres ont été mis au net, ne verra jamais le jour. Simone révélera en 1957 la liaison passionnée, souvent orageuse, qu'elle a eue à partir de juin 1913 avec le jeune écrivain de neuf ans son cadet, dans son livre "Sous de nouveaux soleils" (Gallimard). Durant cette même année 1913, Fournier rencontre pour la seconde fois Yvonne de Quiévrecourt. Les chastes retrouvailles ont lieu au cours de l’été, sans doute du premier au quatre août, à Rochefort-sur-Mer, où la jeune femme, mère de deux enfants, est de passage chez ses parents. Le jeune homme est bouleversé, mais sa vie sentimentale a pris désormais irrévocablement une direction nouvelle. Il échangera encore quelques lettres avec Yvonne de Quiévrecourt, mais ne la reverra pas. Simone rend ainsi compte de la parfaite courtoisie du "secrétaire" et dès la première rencontre affirme: "j'ai tout de suite vu que j'avais affaire à un gentilhomme". L'actrice adulée joue les pièces à la mode et y invite Henri dans sa loge. Cela devient une habitude. Elle l'emmène également dans sa propriété de Trie la Ville où il lui apporte le manuscrit du "Grand Meaulnes"achevé et le lui fait lire. Simone souhaite connaître sa famille. En juin, le jeune homme se découvre enfin et adresse à celle qui occupe ses pensées une longue déclaration d'amour: "Sachez que je vous aime, belle jeune femme. La nuit du "Sacre", en rentrant, j'ai vu qu'une chose était finie dans ma vie et qu'une autre commençait, une chose admirable, plus belle que tout, mais terrible et peut-être mortelle". Le dix-huit juin, il devient l'amant de Simone. Il devait l'épouser.
"Une longue maison rouge avec cinq portes vitrées, sous des vignes vierges, à l'extrémité du bourg, cette demeure où s’écoulèrent les plus tourmentés et les plus chers de ma vie, d’où partirent et où revinrent se briser, comme des vagues sur un rocher désert, toutes nos aventures. Mais quelqu'un est venu qui m'a enlevé à tous ces plaisirs d'enfant paisible. Aussi s'efforça-t-il de penser à autre chose. Glacé jusqu'aux moelles, il se rappela un rêve, une vision plutôt, qu'il avait eue tout enfant, et dont il n'avait jamais parlé à personne: un matin, au lieu de s'éveiller dans sa chambre, où pendaient ses culottes et ses paletots, il s'était trouvé dans une longue pièce verte, aux tentures pareilles à des feuillages". "Le Grand Meaulnes" est achevé au début de l'année 1913. La publication du roman est alors l'occasion d'un grave différend entre Jacques et Henri. Depuis six mois, Henri Massis avait retenu le roman pour sa revue "L'Opinion" et l'ouvrage devait tout normalement être édité en volume aux éditions de "La Nouvelle Revue Française". Mais la maîtresse d'Alain-Fournier va bouleverser ce plan et s'entremettre auprès d'Émile-Paul. En avril, elle écrit à Henri: "Émile-Paul ne veut éditer qu'un très petit nombre d'auteurs et votre roman l'intéresserait dans la mesure où vous seriez candidat au Prix Goncourt. Cela vous va-t-il ? Si oui, laissez faire". Et Fournier laisse faire. En compensation, Fournier dont le manuscrit a finalement été refusé par "L'Opinion", le donnera à paraître en revue dans La NRF, de juillet à novembre 1913, mais le volume sera édité chez Émile-Paul. Rivière qui est secrétaire à La NRF et qui travaille beaucoup avec Gaston Gallimard à la promotion du comptoir d'édition de la revue, prend très mal ces manœuvres et il lui écrit une lettre si violente que Fournier la déchirera.Toutefois ce différend ne ternira pas longtemps l'amitié entre les deux beaux-frères. "Le Grand Meaulnes" est donné par la presse comme le prix Goncourt 1913. Le Président du Jury, Lucien Descaves, qui en est le grand défenseur, se heurte à une farouche opposition sans doute aggravée par la campagne menée par Simone. Après onze tours de scrutin qui n'arrivent pas à dégager une majorité, l'académie se rabat finalement sur Marc Elder pour "Le Peuple de la mer". Henri avait écrit à Jacques un peu plus tôt: "Je ne demande ni prix, ni argent, mais je voudrais que "Le Grand Meaulnes" fût lu"
"Moi qui ai trouvé ça chiant gamin , je comprends maintenant que l'âge est utile à l'appréciation de la véritable littérature. En ce lieu coulait une lumière si douce qu'on eut cru pouvoir la goûter. Près de la première fenêtre, une jeune fille cousait, le dos tourné, semblant attendre son réveil. Il n'avait pas eu la force de se glisser hors de son lit pour marcher dans cette demeure enchantée. Il s'était rendormi". La presse fut unanime à stigmatiser le choix du jury Goncourt et "la question des prix littéraires" fut un sujet de débat en cette fin d'année 1913. Lieutenant de réserve, mobilisé le deux août 1914, Fournier part de Cambo dans le Pays basque, où il était en congés avec Simone, pour rejoindre à Mirande son régiment, le 288ème régiment d'infanterie. Il est affecté à la 23ème compagnie. Partis d'Auch en train jusqu'au camp de Suippes, ses hommes et lui rejoignent le front après une semaine de marche jusqu'à Étain. Avec sa compagnie, il prend part à plusieurs combats meurtriers autour de Verdun. Le vingt-deux septembre, un détachement de deux compagnies, la 22ème, commandée par le lieutenant Paul Marien et la 23ème, commandée par le lieutenant Fournier, reçoit l'ordre d'effectuer une reconnaissance offensive sur les Hauts de Meuse, en direction de Dommartin-la-Montagne, à vingt-cinq kilomètres au sud-est de Verdun. Fournier et ses hommes parviennent jusqu'à la Tranchée de Calonne où ils sont alors rejoints par le capitaine de Savinien Boubée de Gramont qui prend la direction des opérations et décide d'attaquer l'ennemi. Entendant des coups de feu, ils veulent rejoindre la 22ème compagnie de Marien qui s'est trouvée face à un poste de secours allemand et a ouvert le feu. Après avoir fait des prisonniers, ils sont pris à revers par une compagnie prussienne à la lisière du bois de Saint-Rémy et décimés par la mitraille. Trois officiers, dont Alain-Fournier, et dix-huit de leurs hommes sont tués ou grièvement blessés. Son corps ne sera retrouvé que soixante-dix-sept ans plus tard dans la fosse commune où l'avaient enterré les allemands avec vingt de ses compagnons d'arme. Le dix novembre 1992, tous ont été ré-inhumés dans une tombe individuelle dans le cimetière militaire du secteur de Saint-Rémy la Calonne. Une poignée de terre d'Épineuil a été déposée sur sa tombe.
"Nous habitions les bâtiments de Sainte-Agathe. Mon père, que j'appelais M. Seurel, comme tous les élèves, y dirigeait à la fois le cours supérieur, où l'on préparait le brevet d'instituteur, et le cours moyen. Ma mère faisait la petite classe. Vacillant comme un homme ivre, le grand garçon, les mains dans ses poches, les épaules rentrées, s’en alla lentement sur le chemin de Sainte-Agathe. Tandis que, dernier vestige de la fête mystérieuse, la vieille berline quittait le gravier de la route, s’éloignait, cahotant en silence, sur l’herbe de la traverse". Comment rattraper sur la route terrible où elle nous a fuit, au-delà du spécieux tournant de la mort, cette âme qui ne fut jamais toute entière avec nous, qui nous a passé entre les mains comme une ombre rêveuse et téméraire ? Sa disparition, rapportée par la presse, impressionna fortement ses contemporains, bien qu'il ne fut officiellement déclaré mort pour la France qu’en juin 1920. Il fut ensuite décoré de la croix de guerre avec palme et nommé chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume. La légende d'un écrivain mort pour la France en pleine jeunesse après avoir écrit un seul roman a sans doute contribué à assurer la fortune littéraire d'Alain-Fournier. Son nom figure sur les murs du Panthéon, à Paris, dans la liste des écrivains morts au champ d'honneur pendant la première guerre mondiale. Plus on oublie "Le Grand Meaulnes", plus on s’en souvient. Les traces profondes laissées par le récit dépendent aussi de cet évanouissement du reste, comme si la brume des paysages de Sologne nimbait à ce point le texte dans la mémoire qu’elle éloignait la plupart de ses caractères pour mieux en faire réapparaître quelques-uns. L’image et le souvenir sont alors d’autant plus insistants qu’ils se détachent sur ce fond d’effacement qui les rend quasi fantastiques. De l’oubli à la mémoire, voilà peut-être un lien d’Alain-Fournier à Proust. On sait également que "Le Grand Meaulnes" s’est longtemps appelé "Le pays sans nom". "Nom de pays: le nom" est le titre de la troisième partie de "Swann". Surtout, l’intrigue du roman commence quand le narrateur peut écrire alors cette phrase au quatrième chapitre: "Je sais que Meaulnes est parti". Parallèle avec le début d’Albertine disparue: “Mademoiselle Albertine est partie". Meaulnes est parti et, comme la littérature va plus loin dans le rêve que le rêve, plus loin dans la réalité que la réalité." Nous n’appartenons à personne sinon à la lueur d’une lampe inconnue et inaccessible à nous, à la pointe du monde". L’écriture romanesque de toute appréhension secrète du réel ne saurait recréer un pays qui n’existe pas, pas plus que n’existe, dans une Illumination de Rimbaud, "le pavillon en viande saignante sur la soie des mers et des fleurs arctiques". Elle invente le royaume sacré de l’enfance pure comme un paradis perdu pour remplacer la vraie vie ou la terre promise. C’est cette découverte du "Grand Meaulnes" à laquelle il faut nous attacher, si l’on veut comprendre pourquoi, alors qu’on n’y croit plus, notre attachement reste profond à la vérité qu’il nous révèle. Cet appel à l’enfance, comme le témoignage d’une autre présence au monde, qui nie le temps présent pour attester d’une autre existence possible. Une jeunesse, confrontée à la triste réalité, qui, pour exprimer son refus de cette caricature dérisoire de la vie et du bonheur, eut juste le temps d’élever un chant féerique à la gloire de l’enfance, de l’idéal et du rêve avant de mourir au "champ d’honneur".
Bibliographie et références:
- Jean-Gabriel Albicocco, "Le Grand Meaulnes, (film 1967 avec Brigitte Fossey)"
- Frédéric Adam, "Le lieutenant Alain-Fournier et ses compagnons d'arme"
- André Agard, "Le chagrin d'amour, Alain-Fournier ou l'invention de l'adolescence"
- Michel Baranger, "Alain-Fournier et le Paris du Grand Meaulnes"
- Ariane Charton, Alain-Fournier, l'enfant de la Sologne"
- Gerd Krumeich, "Le lieutenant Alain Fournier disparaît"
- Emmanuel Le Bret, "Le grand Meaulnes ou l'impossible amour"
- Marie-Hélène Boblet, "Introduction au roman, Le grand Meaulnes"
- Jean-Christian Petitfils, Le frémissement de la grâce, le Grand Meaulnes"
- Jean Louis Denizot, "L'énigme du soldat Alain-Fournier"
- Michèle Maitron-Jodogne, "Alain-Fournier et Yvonne de Quiévrecourt"
- Patrick Antoniol, "Le sacré et le laïc chez Alain-Fournier"
- Jacques Rivière, "Mon ami et mon frère Alain-Fournier"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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J'avais été invité à une soirée officielle et, après le repas, la boisson aidant, la conversation a glissé sur certaines pratiques sexuelles bizarres. J'avais signalé cette curieuse coutume qu'ont certaines femmes de se serrer excessivement la taille pour aguicher les hommes, mais aussi pour se procurer des sensations inédites. Comme la réunion était fort guindée, chacun et chacune a pris des mines effarouchées pour parler de ces déviances inavouables mais en partant, un couple qui m'avait paru fort libre m'a demandé si cela m'intéresserait d'en savoir plus.
A quel propos ?, ai-je demandé.
Le masochisme féminin m'a répondu l'homme, tandis que sa compagne, silencieuse, prenait un air soumis. J'ai un bel exemple à te montrer, quand tu le voudras. Curieux et un peu excité, je leur donnai rendez-vous dès le lendemain soir, dans mon appartement de célibataire.
Quand on a sonné à la porte, ils étaient là tous les deux. Lui, très chaleureux, elle, un sourire un peu crispé sur les lèvres et bizarrement habillée d'une cape enveloppante. J'ai vite compris pourquoi en la débarrassant : elle avait les mains et les bras durement ligotés en arrière, ce qui faisait ressortir une poitrine qui ne m'avait pas paru aussi opulente lors de la soirée précédente. Surpris, je la détaillai d'un peu plus près et notai que sa blouse laissait deviner des tétons fortement dardés et, sous son torse, une taille mince soulignée par une large ceinture.
Sonia a voulu se faire belle en ton honneur, me dit Karl, après s'être présenté. Viens ici, lui dit-il et montre lui comme tu as aimé être parée pour cette rencontre amicale. Sonia s'avança avec une certaine difficulté tout en essayant de garder son sourire. Karl s'approcha et lui enleva sa ceinture puis, comme on montre fièrement un objet précieux, il lui ouvrit brusquement sa blouse et me dit : regarde, voilà le plaisir et la douleur de Sofia !
Je n'avais jamais vu ça…
Sa taille, qui m'avait déjà paru mince sous sa ceinture, était en réalité durement entravée par un haut corselet de cuir qui prenait appui sur ses hanches et montait jusqu'aux premières côtes. Il était serré à la limite du possible par trois fortes sangles disposées à l'arrière, hors de sa portée, et dont le bout était en outre solidement cadenassé.
Le corset a été fait sur mesure, me dit Karl et Sonia le porte jour et nuit depuis un mois. Bientôt, elle pourra encore perdre un centimètre ou deux, mais je dois garder les clés des cadenas sur moi, car elle tente parfois d'échapper à la torture.
Et pour terminer, regarde ce qu'elle porte plus bas. Soulevant sa jupe, il me montra deux godemichés, chacun inséré dans son logement naturel selon sa grosseur et solidement maintenus par une lanière fixée au corset. Ils sont radiocommandés me dit-il et je peux les activer quand je le souhaite ou quand elle me le demande gentiment. Et pour me convaincre, il se mit à pianoter sur son iphone, déclenchant des râles et des soubresauts frénétiques chez Sonia.
Celle-ci ne pouvait plus se tenir debout et demanda enfin grâce. Magnanimes, nous la lui accordâmes en la libérant des décharges électriques. Je ne tiens pas à perdre mon joyau, me dit Karl, en embrassant une Sonia chancelante, mais souriante au milieu de larmes de douleur et de plaisir.
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"C’est après une nuit orageuse, et pendant laquelle je n’ai pas fermé l’œil. C’est après avoir été sans cesse ou dans l’agitation d’une ardeur dévorante, ou dans l’entier anéantissement de toutes les facultés de mon âme, que je viens chercher auprès de vous, Madame, un calme dont j’ai besoin, et dont pourtant je n’espère pas pouvoir jouir encore". (Lettre 48 Du Vicomte de Valmont à la Présidente de Tourvel). "C'est en vous voyant que je me suis éclairé. Bientôt j'ai reconnu que le charme de l'amour tenait aux qualités de l'âme. Qu'elles seules pouvaient en causer l'excès et le justifier. Je sentis enfin qu'il m'était également impossible et de ne pas vous aimer, et d'en aimer une autre que vous." (Lettre 52 Le Vicomte de Valmont à La Présidente de Tourvel). "Ce livre, s'il brûle, ne peut brûler qu'à la manière de la glace" (Charles Baudelaire). Rien ne semblait destiner l'officier d'artillerie, Choderlos de Laclos (1741-1803) à la Littérature, ni son roman, "Les Liaisons dangereuses", paru en 1782, à un tel succès, dans lequel le public vit un outrage, à clef scandaleux. Pierre Ambroise Choderlos de Laclos naquit à Amiens en 1741, dans une famille de la petite noblesse. Sa formation lui assura une solide culture scientifique et technique. Il choisit l’armée, se retrouva affecté dans l’artillerie, son extraction ne pouvant lui permettre plus noble carrière. Il parvint toutefois à s’illustrer en participant à l’élaboration du "boulet creux", aux qualités balistiques reconnues. En 1789, il devint le secrétaire du Duc d'Orléans, Philippe-Egalité. La période révolutionnaire ne l'épargna pas. Incarcéré à deux reprises, il échappa de peu à la guillotine. Il participa à la victoire de Valmy, puis au coup d’État du 18 Brumaire. En 1800, il fut nommé général de brigade dans l’artillerie par Bonaparte, entendant ainsi le récompenser. Désigné commandant de l’artillerie de l’armée d’observation dans les Etats du royaume de Naples, le 21 janvier 1803, il mourut à Tarente, pendant la campagne d'Italie, le 3 septembre, de dysenterie et de malaria. Laclos entreprit l'écriture des "Liaisons dangereuses" durant un séjour à l'île d'Aix en 1779. Sa vie morne, de garnison en garnison, lui permit de côtoyer le libertinage aristocratique, plutôt que de le pratiquer lui même, préférant conserver un regard distant, afin d'offrir, de l'Ancien Régime finissant, le portrait glaçant d'une société corrompue, et à la tradition littéraire du roman libertin, un chef-d'œuvre intemporel. Le sous-titre complet du roman, "Lettres recueillies dans une société et publiées pour l'instruction de quelques autres", indique la forme adoptée: le roman épistolaire, dont le genre littéraire était très prisé au XVIIIème siècle. "En effet, la situation où je suis en vous écrivant me fait connaître, plus que jamais, la puissance irrésistible de l’amour; j’ai peine à conserver assez d’empire sur moi pour mettre quelque ordre dans mes idées; et déjà je prévois que je ne finirai pas cette Lettre, sans être obligé de l’interrompre". (Lettre 48 Du Vicomte de Valmont à la Présidente de Tourvel).
"Quoi ! ne puis-je donc espérer que vous partagerez quelque jour le trouble que j’éprouve en ce moment ? J’ose croire cependant que, si vous le connaissiez bien, vous n’y seriez pas entièrement insensible. Croyez-moi, Madame, la froide tranquillité, le sommeil de l’âme, image de la mort, ne mènent point au bonheur. Les passions actives peuvent seules y conduire et malgré les tourments que vous me faites éprouver, je crois pouvoir assurer sans crainte, que, dans ce moment même, je suis plus heureux que vous. En vain m’accablez-vous de vos rigueurs désolantes. Elles ne m’empêchent point de m’abandonner entièrement à l’amour, et d’oublier, dans le délire qu’il me cause, le désespoir auquel vous me livrez. C’est ainsi que je veux me venger de l’exil auquel vous me condamnez. Jamais je n’eus tant de plaisir en vous écrivant". Consacré par Montesquieu dans "Les Lettres Persanes", adopté par Goethe dans "Les Souffrances du jeune Werther" puis par Rousseau dans "La Lettre des deux amants." C'est en disciple de Jean-Jacques Rousseau, que Laclos peignit les mœurs dépravés de la noblesse de cour, le conformisme de la morale religieuse, et la frivolité cynique des libertins se jouant de l'amour et du mariage. Les "Liaisons dangereuses" dénonçaient les douteuses fréquentations de salon ou d’alcôve, de jeunes gens candides, prompts à des égarements, dont la correspondance, servaient d'armes redoutables, à des séducteurs sans scrupules. L'œuvre, construite en architecture diabolique, apparaît comme une peinture complaisante des conduites de séduction. Mais Laclos n’est pas Valmont, son roman de mœurs n'est pas davantage un "catéchisme de débauche." Œuvre unique sur bien des aspects, "Les Liaisons dangereuses" marque durablement celui qui en entreprend la lecture. Par l’intelligence de sa structure: le genre épistolaire permet une construction diffractée d’une intelligence confondante. Alternant les personnages, les réactions, différant certaines lettres quand il en perd d’autres, anticipant la réaction de certains destinataires, l’auteur tisse un écheveau à la mesure des forces agissantes. Action et psychologie s'interpénètrent réciproquement. L'action s'implique dans l'analyse psychologique, en la relançant, tandis que la psychologie, en nouant et dénouant l'intrigue soutient l'action. Le récit, tout au long du roman, pourtant riche de cent soixante quinze lettres, demeure unifié. Le talent de Laclos est d'avoir su admirablement unifier les éléments dans un ensemble harmonieux. Les lettres, ensuite, ont rarement été exploitées avec autant de malice: Confidence intime, l’épanchement adolescent de Cécile, perverti par la complicité vénéneuse du duo, oie blanche à peine sortie du couvent, "commune pupille", conduite à la dépravation et à la luxure. le désespoir moral de Madame de Tourvel face aux assauts de moins en moins vindicatifs de Valmont.
"Tout semble augmenter mes transports: l’air que je respire est brûlant de volupté; la table même sur laquelle je vous écris, consacrée pour la première fois à cet usage, devient pour moi l’autel sacré de l’amour. Combien elle va s’embellir à mes yeux ! J’aurai tracé sur elle le serment de vous aimer toujours ! Pardonnez, je vous en supplie, le délire que j’éprouve. Je devrais peut-être m’abandonner moins à des transports que vous ne partagez pas. Il faut vous quitter un moment pour dissiper une ivresse qui s’augmente à chaque instant, et qui devient plus forte que moi". Qualité romanesque remarquable, chaque lettre nous renseigne sur celui qui raconte autant que sur ce qui est raconté. Selon le principe qui sera plus tard porté par Proust à son sommet, chaque personnage apparaît comme être de langage: précision, ironie de la Marquise de Merteuil, vivacité et clarté intellectuelle de Valmont, peu à peu dégradées par la passion, exaltation sentimentale niaise de Danceny, naïveté brouillonne et spontanée de Cécile, lucidité amusée, sagesse bienveillante, politesse un peu désuète, chez Madame de Rosemonde, bien-pensance et modestie extrême chez la Présidente de Tourvel, puis émoi, égarement, jusqu’à sa fin tragique. Mais, au-delà, la véritable innovation littéraire de Laclos, consiste de faire de ces lettres, des forces agissantes. Interceptions, copies, pressions, indiscrétions, restitutions, détournements, changements de destinataire. Il n’est pratiquement pas un tournant de l’intrigue dont le jeu épistolaire ne soit l’agent. Les personnages ne cessent donc de se croiser, de se séduire, de se débattre, peu-à-peu pris au piège par l'auteur. Le flamboyant Vicomte de Valmont joue à séduire, sans aucune vergogne mais tout bascule lorsque les sentiments mêlés de larmes prennent le dessus. Le libertin devient amoureux et se noie dans les méandres de l'amour, il chutera. La Marquise de Merteuil, femme raffinée à la beauté diabolique, complice de Valmont, perdra tout. Les jeunes gens, d'une naïveté confondante, pris aux pièges des maîtres du jeu, ne s'en remettront pas non plus. Les règles semblent simples dans ce jeu amoureux, deux cartes maîtresses: la vanité et le désir sexuel, Capitaine d'artillerie, Choderlos de Laclos révèle alors toute la froideur de la stratégie militaire, dans cette élégante comédie échiquéenne de l'égotisme et de la sensualité, où "conquérir" pour "prendre poste", nécessite toujours "attaques" , "manœuvres, "déclaration de guerre" pour "prendre poste", "jusqu'à la capitulation." Le duel par lettres échangées entre la Marquise de Merteuil et Valmont brille à chaque page. "J'ajoute que le moindre obstacle mis de votre part sera pris de la mienne pour une véritable déclaration de guerre: vous voyez que la réponse que je vous demande n'exige ni longues ni belles phrases. Deux mots suffisent." Réponse de la Marquise de Merteuil écrite au bas de la même lettre: "Hé bien ! La guerre" La polyphonie permet dans un premier temps à Laclos une démonstration de force, celle de la maîtrise de tous les tons et des nuances les plus fines dans la psychologie et la caractérisation. C’est aussi une plongée dans les eaux troubles de la rhétorique libertine: le lecteur se voit confronté à une langue brillante mais manipulatrice, mensongère et ciselée comme le diamant.
"Je reviens à vous, Madame, et sans doute j’y reviens toujours avec le même empressement. Cependant le sentiment du bonheur a fui loin de moi. Il a fait place à celui des privations cruelles. Si je me retrace encore les plaisirs de l’amour, c’est pour sentir plus vivement le regret d’en être privé. Je ne me vois de ressource que dans votre indulgence, et je sens trop, dans ce moment, combien j’en ai besoin pour espérer de l’obtenir. Cependant jamais mon amour ne fut plus respectueux, jamais il ne dut moins vous offenser". La mécanique épistolaire étant consubstantielle au libertinage en tant que tel. Feindre, tromper, détourner les soupçons, flatter, toutes ces manœuvres de séduction sont en réalité des opérations de langage écrit. L’écriture est pour les libertins, une action, le verbe précédant la chair. L'immersion dans le récit plonge le lecteur attentif, dans un système d’une telle ampleur qu’il en devient libertin lui-même: on jubile dans un premier temps de toute cette intelligence déployée au service de l’immoralité. Dans le secret, on occupe cette place omnisciente qui nous fait rire du ridicule et de la fragilité des "roués", comprenant davantage qu’eux, leurs aveux inconscients sur la voie royale de la dépravation. Mais le génie de Laclos est de, progressivement et insidieusement, gripper la machine. Puisque nous sommes devenus experts dans l’analyse des victimes, pourquoi ne pas faire celle des bourreaux ? La relation entre La Marquise de Merteuil et Valmont, l’amour pris dans les rets de l’orgueil, du pouvoir et de la réputation mènent la fin du roman vers des sommets. Le brillant libertin agonise en amoureux inconsolable, la marquise perd son honneur et sa beauté. Conformant ainsi le roman, au romantisme du XIXéme siècle, qui n'hésita pourtant pas, à le condamner pour outrage aux bonnes mœurs, et qu'une bonne part du cinéma du siècle suivant, contrairement au théâtre, préféra le tirer vers le drame sentimental. Sensuel et brillant, le roman est à l’image des libertins: il sait nous séduire par ses éclats pour nous éduquer à notre insu, et nous faire prendre le parti inverse de ceux qu’on avait idolâtrés, soudain bouleversés par une émotion authentique, sincère et sans calcul. Peut-on trouver meilleur moyen pour véhiculer une morale que l’excitant discours de l’immoralité ? "Voyez-vous, l’humanité n’est parfaite dans aucun genre, pas plus dans le mal que dans le bien". (Lettre 134)
"N'avez-vous donc pas encore remarqué que le plaisir, qui est bien en effet l'unique mobile de la réunion des deux sexes, ne suffit pourtant pas pour former une liaison entre eux ? et que s'il est précédé du désir, qui rapproche, il n'est pas moins suivi du dégoût, qui repousse ? C'est une loi de la nature, que l'amour seul peut changer. Et de l'amour, en a-t-on quand on veut ?". Vénéneux, sensuel et brillant, le roman est à l’image des libertins. Il sait nous séduire par ses éclats pour nous éduquer à notre insu, et nous faire prendre le parti inverse de ceux qu’on avait idolâtrés, soudain bouleversés par une émotion sincère et sans calcul. Ainsi, quelle que soit la modalité adoptée par un personnage, la corporéalité s'en venge. On assiste à une revanche des corps sur les modalités du désir qui cherchaient alors à les subordonner au langage à l'état pur. Mais le physique ne se laisse pas faire, et se révolte contre une telle abstraction. Or, le dénouement marque une autre victoire, il désigne le triomphe de l'auteur, sa victoire sur ses personnages. En tant qu'auteur, Laclos ordonne, orchestre avec brillance les modalités qu'il a su donner à ses protagonistes, jusqu'à ce que le présent subjectif de chaque lettre concoure au présent pseudo-objectif de l'auteur, et du lecteur, et affirme, dans la destruction finale de ce monde romanesque, la création même de son récit. Par là Laclos est complètement un homme de son temps, du siècle des Lumières finissant, qui se caractérise précisément par ce désir de se voir agir, de réfléchir alors sur son propre moment historique en même temps qu'on le vit, une volonté d' héroïser le présent. Il faut voir dans "Les Liaisons dangereuses" une redéfinition du savoir triomphant des Lumières. Ce n'est plus le fruit des sciences désintéressées, mais des intelligences fort intéressées, où savoir serait vraiment pouvoir, et où Laclos décèle une volonté et une puissance qui sous-tendent les projets dits philosophiques tout comme vouloir et pouvoir animent les projets libertins de Merteuil et Valmont. Mais, à la différence de l'abondante littérature philosophique de l'époque, la spécificité des Liaisons serait son optique libertine qui ne voit chacune de ces modalités qu'à travers le prisme du désir subjectif. Si les Lumières fondent l'ère moderne, "Les Liaisons dangereuses", témoin de leur siècle, sont par leurs caractères, les modes désirants qui dépassent magistralement les personnes qu'elles font s'aboucher.
Bibliographie et sources:
- Jean-Paul Bertaud, "Pierre Choderlos de Laclos"
- Betty Becker-Theye, "The seducer as mythic figure in Laclos"
- Jean Goldzink, "Le vice en bas de soie"
- Georges Poisson, "Choderlos de Laclos ou l’obstination"
- Jacqueline Spaccini, "Choderlos de Laclos"
- Roger Vailland, "Laclos par lui-même"
- Colette Verger Michael, "Choderlos de Laclos"
- Charlotte Simonin, "Marivaux, de l’autre côté du miroir"
- Franck Salaün, "Le romantisme chez Marivaux"
- Jacques Guilhembet, "L’œuvre romanesque de Marivaux"
- Frédéric Deloffre, "Marivaux et le marivaudage"
- Juliette de Bosmelet, "Le libertinage de Marivaux à Laclos"
- Aliette de Pracomtal, "Les clés des Liaisons dangereuses"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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"Je n’ai eu de bonheur qu’en peinture car je n'ai jamais voulu devoir qu'à ma palette ma réputation et ma fortune, et je suis riche des biens dont je sais me passer", une citation que l'ont doit à Élisabeth Louise Vigée le Brun. De toutes les femmes artistes qui s’illustrèrent dans la France du XVIIIème siècle, seule Vigée Le Brun est aujourd’hui encore peu connue du grand public. Non seulement, on associe son nom aux portraits de Marie Antoinette, et peut-être aussi au célèbre tableau du Louvre figurant "La tendresse maternelle", mais l’artiste est également restée dans les esprits comme une femme d’une grande beauté, dont l’art élégant sut s’adapter à une vie longue et particulièrement mouvementée relatée dans ses "Souvenirs" publiés à la fin de sa vie. Née en 1755, décédée en 1842, Vigée Le Brun a connu les fastes de la vie d’Ancien Régime, les heures sombres de la Révolution, l’essor d’une société nouvelle sous l’Empire et le développement de nouveaux codes artistiques. Placée entre deux époques, elle incarne le portrait français dont elle sut diffuser les beautés tout au long de ses voyages européens. Ambitieuse et talentueuse, Elisabeth Vigée Le Brun ouvre une voie nouvelle aux femmes qui souhaitent devenir peintres professionnelles. Elle tient le rôle de modèle, d’enseignante, car elle initie le mouvement d’émancipation et contribue à donner une image valorisante de la femme peintre et, au sens large du terme, l’image de la femme au XVIIIème siècle. Son talent l’a amenée à être appréciée par une reine exigeante: Marie-Antoinette. Ses parents, Louis Vigée, pastelliste et membre influent de l’Académie de Saint-Luc et Jeanne Maissin, d’origine paysanne, se marient en 1750. Élisabeth-Louise voit le jour en 1755. Un frère cadet, Étienne Vigée, qui deviendra un auteur dramatique à succès, naît alors deux ans plus tard. Élisabeth est baptisée à l’église Saint-Eustache de Paris, puis mise en nourrice. Dans la bourgeoisie et l'aristocratie, il n'est pas encore dans les habitudes d'élever ses enfants soi-même, aussi l’enfant est-elle confiée à des paysans des environs d’Épernon. Son père vient la rechercher six ans plus tard, la ramène à Paris dans l'appartement familial rue de Cléry. Elle entre comme pensionnaire à l’école du couvent de la Trinité, rue de Charonne dans le faubourg Saint-Antoine, afin de recevoir ainsi la meilleure éducation possible. Dès cet âge, son talent précoce pour le dessin s’exprime: dans ses cahiers, sur les murs de son école. C'est à cette époque que Louis Vigée s’extasie un jour devant un dessin de sa petite fille prodige, dessin représentant un homme barbu. Il prophétise dès lors qu’elle sera peintre. Son père meurt accidentellement en 1767. Élisabeth-Louise, qui n'a que douze ans, mettra longtemps à faire son deuil puis décide de s'adonner à ses passions, la peinture, le dessin et le pastel. Sa mère se remarie avec un joaillier fortuné mais avare, Jacques-François Le Sèvre. Les relations d'Élisabeth-Louise avec son beau-père sont difficiles.
"Je vous fais ce récit pour vous prouver à quel point la passion de la peinture était innée en moi. Cette passion ne s’est jamais affaiblie. Je crois même qu’elle n’a fait que s’accroître avec le temps. Car, encore aujourd’hui, j’en éprouve tout le charme, qui ne finira, j’espère, qu’avec ma vie". Le premier professeur d’Élisabeth fut son père, Louis Vigée. Après le décès de ce dernier, c’est un autre peintre, Gabriel-François Doyen, meilleur ami de la famille et célèbre en son temps comme peintre d'histoire, qui l’encourage à persévérer dans le pastel et dans l’huile, conseil qu’elle suit. C’est certainement conseillée par Doyen, qu’en 1769 Élisabeth Vigée se rend chez le peintre Gabriel Briard, une connaissance de ce dernier, pour avoir eu le même maître, Carl van Loo. Briard, membre de l’Académie royale de peinture, donne volontiers des leçons, bien qu'il ne soit pas encore professeur. Peintre médiocre, il a surtout la réputation d’être un bon dessinateur et possède en plus un atelier au palais du Louvre. Élisabeth fait de rapides progrès et, déjà, commence à faire parler d’elle. C’est au Louvre qu’elle fait la connaissance de Joseph Vernet, artiste célèbre dans toute l’Europe. Il est alors l'un des peintres les plus courus de Paris, ses conseils font autorité, il ne manquera pas de lui en prodiguer. En 1770, le dauphin Louis-Auguste, futur Louis XVI, petit-fils du roi Louis XV, épouse Marie-Antoinette d'Autriche à Versailles. À la même époque, la famille Le Sèvre-Vigée s’installe alors rue Saint-Honoré, face au Palais-Royal, dans l'hôtel de Lubert. Elle commence à réaliser des portraits de commande, mais son beau-père accapare ses revenus. Elle prend l'habitude de dresser la liste des portraits qu'elle a peints dans l'année. Ainsi, il est possible de savoir qu'en 1773, elle en a peint vingt sept. Elle commence à peindre de nombreux autoportraits. Lorsque son beau-père se retire des affaires en 1775, la famille s'installe rue de Cléry, dans l'hôtel Lubert, dont le principal locataire est Jean-Baptiste-Pierre Lebrun qui exerce les professions de marchand et restaurateur de tableaux, d'antiquaire et de peintre. Elle visite avec le plus vif intérêt la galerie de tableaux de Lebrun et y parfait ses connaissances picturales. Ce dernier devient son agent, s'occupe de ses affaires. Déjà marié une première fois en Hollande, il la demande en mariage. Libertin et joueur, il a mauvaise réputation, et le mariage est formellement déconseillé à la jeune artiste. Cependant, désireuse alors d'échapper à sa famille, elle l'épouse dans l'intimité, en l'église Saint-Eustache. Élisabeth Vigée devient ainsi Élisabeth Vigée Le Brun.
"Elle a des taches de rousseur partout, comme si quelqu'un avait trempé une brosse dans le pot de peinture et l'avait éclaboussée. Si l’on doit peindre une gorge, éclairez-là de façon qu’elle reçoive bien la lumière". Elle reçoit cette même année sa première commande de la cour du comte de Provence, le frère du roi puis, le trente novembre 1776, Élisabeth Vigée Le Brun est admise à travailler pour la Cour de Louis XVI. En 1778, elle devient peintre officielle de la reine et est donc appelée pour réaliser le premier portrait de la reine Marie-Antoinette d'après nature. C'est également à cette époque qu'elle peint le portrait de Antoine-Jean Gros enfant à sept ans et qu'elle ouvre une académie et enseigne. Son hôtel particulier devient alors un lieu à la mode, Élisabeth Vigée Le Brun traverse une période de succès et son mari y ouvre une salle des ventes dans laquelle il vend des antiquités et des tableaux de Greuze, Fragonard. Elle vend ses portraits pour douze mille francs sur lesquels elle ne touche que six francs, son mari empochant le reste, comme elle le dit dans ses "Souvenirs": "J'avais sur l'argent une telle insouciance,que je n'en connaissais presque pas la valeur". En 1781, elle voyage à Bruxelles avec son mari pour assister à la vente de la collection du défunt gouverneur Charles-Alexandre de Lorraine. Inspirée par Rubens qu'elle admire, elle peint son "Autoportrait au chapeau de paille" (Londres, National Gallery). Ses portraits de femmes lui attirent la sympathie de la duchesse de Chartres, princesse du sang, qui la présente à la reine, sa contemporaine exacte, cette dernière faisant d’elle sa peintre officielle et favorite en 1778. Elle multiplie les originaux et les copies. Certaines toiles restent la propriété du roi, d'autres sont offertes aux familiers et aux cours étrangères. Alors qu'elle n'arrivait pas à y être admise, elle est reçue à l’Académie royale de peinture et de sculpture, le trente-et-un mai 1783 en même temps que sa concurrente Adélaïde Labille-Guiard et contre la volonté de Jean-Baptiste Marie Pierre, premier peintre du roi. Son sexe et la profession de son mari marchand de tableaux sont pourtant de très fortes oppositions à son entrée, mais l'intervention protectrice de Marie-Antoinette lui permet d'obtenir ce privilège de Louis XVI. En juin de la même année, elle participe au Salon pour la première fois et y présente Marie-Antoinette dit "à la Rose". Elle peint le portrait du ministre des Finances Charles Alexandre de Calonne. Faisant partie des intimes de la Cour, elle est l'objet comme le roi et la reine de critiques et médisances. Des rumeurs plus ou moins fondées accusent notamment ÉlisabethVigée Le Brun d'entretenir une liaison avec le ministre Calonne, mais également aussi avec le comte de Vaudreuil.
"Dans la peinture, il s'établit comme un pont mystérieux entre l'âme des personnages et celle du spectateur. Celui qui veut ou cherche ce qu’il désire dans la peinture, ne trouvera jamais ce qui dépasse ses préférences". Deux tableaux ont assuré la célébrité d’Élisabeth Louise Vigée Le Brun et sa postérité artistique: Marie Antoinette et ses enfants intitulé pompeusement "portrait de la Reine tenant Monseigneur le duc de Normandie sur ses genoux accompagné de Monseigneur le Dauphin et de Madame, fille du roi", et "Portrait de l’artiste avec sa fille", dit "La tendresse maternelle". Lorsqu’elle reçoit sur ordre du roi la commande d’un grand portrait de la reine à l’automne 1785, les consignes sont très précises. La reine doit figurer dans un intérieur avec la descendance qui assurera la continuité dynastique dans une composition qui exaltera son rôle de mère. C’est une œuvre politique dont l’esquisse recevra l’approbation du comte d’Angiviller, directeur des Bâtiments du roi, puis du modèle avant que soit placé un nouveau mobilier dans le cabinet de la reine qui lui servira de décor. Le tableau emprunte sa composition à la tradition des Madones à l’Enfant. C’est un mélange de solennité et d’intimité, de grandeur royale pourvue de ses insignes divers et de vie familiale, exécuté avec une certaine raideur comme il sied aux tableaux d’apparat. Élisabeth Vigée Le Brun y déploie toute son habileté dans la tension entre les parties rapides et les parties détaillées, par exemple le drapé des robes de la reine et de safille par rapport à la précision des dentelles ou à celle des traits des visages. Elle y montre aussi sa connaissance de la peinture baroque et classique, celle de Rubens en particulier et de ses portraits de femmes. Le Portrait de l’artiste avec sa fille semble le pendant personnel du portrait de la famille royale. Les drapés sont tout aussi spectaculaires avec leurs oppositions de teintes et de lignes au premier plan. Élisabeth tient sa fille Julie, serrée dans ses bras. La posture, l’inclinaison des têtes et les mains croisées rappellent celles de "La Vierge à la chaise de Raphaël", à une différence notable et sans doute volontaire près. Chez Raphaël, Marie regarde vers le peintre ou vers le spectateuralors que le regard de l’Enfant paraît distrait par un événement qui se produirait à sa gauche. Chez Vigée Le Brun, c'est l’enfant qui regarde vers le spectateur. La mère a les yeux plein de tendresse, d'où le second titre du tableau.
"La peinture me harcèle et me tourmente de mille manières, comme le maître le plus exigeant. Elle n'est autre chose que l'imitation des actions humaines, de celles qui sont naturellement inimitables". En 1782, à l’occasion d’un voyage dans les Pays-Bas méridionaux, Élisabeth Vigée Lebrun fit à Anvers une découverte décisive: "Le Chapeau de paille", portrait peint par Rubens, qui représenterait alors la belle-sœur du maître anversois, Suzanne Lunden, née Fourment. L’immense chapeau, de feutre et non de paille comme on le croyait alors, que porte cette dernière offre prétexte à des modulations tonales d’une incroyable fraîcheur. Cette révélation du pouvoir de la lumière, des demi-teintes et desombres sur le traitement du visage exerça une influence considérable sur la jeune artiste autodidacte, qui fit alors de Rubens son maître à part entière. "Ce tableau me ravit, écrira-t-elle dans ses "Souvenirs", et "m’inspira au point que je fis mon portrait à Bruxelles en cherchant le même effet". Exécuté à Bruxelles en 1782, "l’Autoportrait au chapeau de paille" mit en effet immédiatement à profit cette manière d’accrocher la lumière par la dégradation subtile des tons. Élisabeth Vigée Lebrun reprendra ensuite cette coiffe champêtre pour la reine et plusieurs modèles aristocratiques, dont madame de Polignac. Favorite de Marie-Antoinette et gouvernante des enfants de France, la duchesse de Polignac appartenait à la haute noblesse, milieu constituant, avant la révolution, la clientèle privilégiée de l’artiste. La simplicité de cette robe légère de mousseline rehaussée par le drapé souple d’une écharpe noire évoque les déguisements champêtres du Hameau de la reine. Chez cette dame de qualité qui joue à la jardinière, nulle action, signe dégradant d’utilitarisme social, ne vient détourner l’attention du spectateur. La duchesse nous regarde avecun naturel désarmant comme si la beauté du modèle féminin tendait alors à exprimer sa condition aristocratique.
"Les théories en peinture ne comptent pas. Elles sont, d'ailleurs, presque toujours imaginées par des gens à qui manque le pouvoir créateur, et auxquels elles servent d'échappatoire. Les plus belles gorges sont celles dont la lumière n’est point interceptée, jusqu’au bouton qui se colore peu à peu à l’extrémité". En 1788, elle peint ce qu'elle considère comme son chef-d'œuvre: "Le Portrait du peintre Hubert Robert". L’attachement d’Élisabeth Vigée Le Brun à la"douceur de vivre" des années qui ont précédé la révolution s’incarne à la perfection dans ce portrait d’Hubert Robert. Aux côtés de l’architecte Brongniart et du peintre Ménageot, les deux artistes appartenaient à la joyeuse troupe qui se réunissait au Moulin-Joli, cette propriété aux jardins enchanteurs que possédait l’homme de lettres Claude Henri Watelet en bord de Seine. Probablement exécuté sur place, le portrait "du peintre des ruines" traduit l’empathie de son auteur pour le "bon Robert". Réputé pour son caractère enjoué, Hubert Robert était également un artiste d’un naturel impétueux, à l’affût de la moindre source d’émerveillement visuel. Si le parapet évoque les toiles des maîtres nordiques, la pose inspirée choisie à dessein par Élisabeth Vigée Le Brun traduit la curiosité toujours en éveil de son modèle. La palette à portée de main, Robert s’apprête à saisir instantanément le motif qui attire son regard hors de la toile. La vivacité devient ici le symbole de la légèreté, chère au XVIIIème siècle. Le mouchoir blanc noué autour du coup, la veste en drap et le gilet jaune composent une superbe symphoniede couleurs et de textures qui érige le négligé d’artiste en attitude débonnaire face à la vie. Au fil des années, ce tableau de 1787 prit des allures de paradis perdu. À l’été 1789, Élisabeth Vigée Le Brun se trouve alors à Louveciennes chez la comtesse du Barry, la dernière maîtresse de Louis XV, dont elle a commencé le portrait, lorsque les deux femmes entendent le canon tonner dans Paris. Son hôtel particulier est entièrement saccagé, des sans-culottes déversent du soufre dans ses caves et tentent d'y mettre le feu. Elle se réfugie chez l'architecte Alexandre-Théodore Brongniart. Dans la nuit du cinq au six octobre 1789, alors que la famille royale est ramenée de force à Paris, Élisabeth quitte la capitale avec sa fille, Julie, sa gouvernante et cent louis, laissant derrière elle son époux qui l'encourage à fuir, ses peintures et le million de francs qu'elle a gagné à son mari, "n'emportant que vingt francs", écrit-elle dans ses "Souvenirs". Elle arrive à Rome en novembre 1789. L’artiste effectue son "GrandTour" et vit entre Florence, Rome où elle retrouve Ménageot, et Naples avec Talleyrand et Lady Hamilton, puis Vivant Denon, le premier directeur du Louvre, à Venise. Elle veut rentrer en France, mais elle est inscrite, en 1792, sur la liste des émigrés et perd ainsi ses droits civiques. En février 1792, elle décide de quitter Rome pour Padoue.
"Un artiste ne doit pas chercher la perfection mais son art s’exprime par son humilité. La peinture est une poésie silencieuse et la poésie une peinture qui parle". À l'invitation de l'ambassadeur de Russie, Élisabeth Vigée Le Brun se rend en Russie, pays qu'elle considèrera comme sa seconde patrie. En 1795, elle est à Saint-Pétersbourg où elle fait un séjour de plusieurs années favorisé par des commandes de la haute société russe et des appuis de Gabriel-François Doyen, proche de l'impératrice et de son fils. "Souvenirs" est le récit autobiographique d’Elisabeth Vigée Le Brun, qui raconte son voyage d’une douzaine d’années en Italie, en Autriche, en Russie, en Prusse et en Saxe. Elle séjourne par la suite en Angleterre et même en Suisse. Le contexte mouvementé de l’Ancien Régime, la Révolution, l’Empire et la Restauration l’inspirent pour rédiger ses souvenirs, sans oublier ses expériences artistiques qui y sont citées. Elisabeth Vigée Le Brun enrichit au fil des années ses peintures et ses œuvres. En 1799, une pétition de deux cent cinquante-cinq artistes, littérateurs et scientifiques demandent au Directoire le retrait de son nom de la liste des émigrés. En 1800, son retour est précipité par le décès de sa mère à Neuilly et le mariage, qu'elle n'approuve pas, de sa fille Julie avec Gaëtan Bertrand Nigris, alors directeur central des Théâtres impériaux à Saint-Pétersbourg. C'est pour elle un déchirement. Déçue par son mari, elle avait fondé tout son univers affectif sur sa fille. Les deux femmes ne se réconcilieront jamais totalement. Si le retour d’Élisabeth est salué par la presse, elle a du mal à retrouver sa place dans la nouvelle société née de la Révolution et de l'Empire. Quelques mois plus tard, elle quitte la France pour l'Angleterre, où elle s'installe à Londres pour trois ans. Là, elle rencontre Lord Byron, le peintre Benjamin West, retrouve Lady Hamilton, la maîtresse de l'amiral Nelson qu'elle avait connue à Naples, et admire la peinture de Joshua Reynolds. Après un passage par la Hollande, elle retrouve Paris en juillet 1805, et sa fille Julie qui a quitté la Russie en 1804. En 1805, elle reçoit la commande du portrait de Caroline Murat,épouse du général Murat, une des sœurs de Napoléon devenue reine de Naples. Mais en butte au pouvoir impérial, Vigée Le Brun quitte la France pour la Suisse, où elle rencontre Madame de Staël en 1807, elle-même en exil.
"Je n'essaierai point de peindre ce qui se passa en moi lorsque je touchai cette terre de France que j'avais quittée depuis douze ans: la douleur, l'effroi, la joie qui m'agitaient tour à tour. Je pleurais les amis que j'avais perdus sur l'échafaud. Mais j'allais revoir ceux qui me restaient encore. Mais ce qui me déplaisait bien davantage, c'était de voir encore écrit sur les murs: liberté, fraternité ou la mort". En 1809, Élisabeth Vigée Le Brun revient en France et s'installe à Louveciennes, dans une maison de campagne voisine du château ayant appartenu auparavant à la comtesse du Barry, guillotinée en 1793, dont elle avait peint trois portraits avant la Révolution. Elle vit alors entre Louveciennes et Paris, où elle tient salon et croise les artistes en renom. Son mari, dont elle avait divorcé, meurt en 1813. En 1814, elle se réjouit du retour de Louis XVIII, "Le monarque qui convenait à l'époque", écrit-elle dans ses mémoires. Après1815 et la Restauration, ses tableaux, en particulier les portraits de Marie-Antoinette, sont restaurés et ré-accrochésau Louvre, à Fontainebleau et à Versailles. Sa fille finit sa vie dans la misère en 1819, et son frère, Étienne Vigée, meurt en 1820. Elle effectue un dernier voyage à Bordeaux au cours duquel elle effectue de nombreux dessins de ruines. Elle peint encore quelques couchers de soleils, des études de ciel ou la montagne, dont la vallée de Chamonix au pastel. À Louveciennes, où elle vit huit mois de l'année, le reste en hiver à Paris, elle reçoit le dimanche des amis et des artistes dont son ami le peintre Antoine-Jean Gros, qu'elle connaît depuis 1778, et elle est très affectée par son suicide en 1835. À la fin de sa vie, l'artiste en proie à des attaques cérébrales, perd la vue. Elle meurt à Paris à son domicile de la rue Saint-Lazare le trente mars 1842, alors âgée de quatre-vingt-six ans, et est enterrée au cimetière paroissial de Louveciennes. Sur la pierre tombale, privée de sa grille d'entourage, se dresse la stèle de marbre blanc portant l'épitaphe: "Ici, enfin, je repose", ornée d'un médaillon représentant une palette sur un socle et surmontée d'une croix. Sa tombe a été transférée au cimetière des Arches de Louveciennes, lorsque l'ancien cimetière a été désaffecté.
"Si l’on doit peindre une gorge, éclairez-là de façon qu’elle reçoive bien la lumière. Les plus belles gorges sont celles dont la lumière n’est point interceptée, jusqu’au bouton qui se colore peu à peu à l’extrémité. Les demi-teintes qui font tourner le sein doivent être du ton le plus fin et le plus frais, l’ombre qui dérive de la saillie de la gorge doit être chaude et transparente". À partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle, un certain nombre de femmes peintres cessent de se considérer comme des peintres de seconde catégorie. Symptôme de ce changement: l’autoportrait, qui devient le grand topos artistique des femmes, jusqu’à l’arrivée au pouvoir de Napoléon Ier et la mise en place d’une idéologie familialiste à laquelle elles pourront difficilement échapper. Ce phénomène propre à la France va devenir un véritable fait de société. Entre 1770 et 1804, plus de soixante autoportraits ou portraits de femmes peintres à leur travail sont exposés dans les différents salons. Au Salon de la Correspondance d’abord, créé en 1779 par Pahin de la Blancherie, rue de Tournon, puis rue Saint-André des Arts, dans le but d’être "un objet d’émulation entre les artistes nationaux et étrangers qui ne sont pas de l’Académie". C’est là qu’en 1782, Elisabeth Vigée Le Brun et Adélaïde Labille-Guiard exposent le même jour, et pour la première fois en France, leur autoportrait palette et pinceaux à la main, créant un choc psychologique et politique sans précédent. Au Salon du Louvre, ensuite. Organisé par le pouvoir monarchique, il a lieu tous les deux ans dans le salon carré du Louvre, en août, et il est réservé aux membres de l’Académie royale jusqu’en 1791, date à laquelle il est ouvert à tous les artistes par le décret révolutionnaire du vingt août 1791. Au Salon de la Jeunesse, enfin, réservé aux élèves, qui dure une journée et se tient en plein air le jour de la Fête-Dieu, place Dauphine à Paris. Encouragées par Adélaide Labille-Guiard, qui a ouvert un atelier pour les filles, les "demoiselles du sexe" exposent leur autoportrait à plusieurs reprises, entre 1783 et 1788, apparaissant sur la scène artistique comme une réalité qu’on ne peut plus ignorer. L’apparition des autoportraits de femmes peintres à leur travail dans la Francedes Lumières constitue de ce fait un événement sans précédent, qui prend alors l’allure d’un véritable mouvement d’émancipation des femmes dans l’art. Faut-il alors parler d’un âge d’or de la peinture des femmes ? Assurément. Cet âge d’or est le fruit d’une double mutation: mutation du centre d’intérêt artistique des femmes, passant du terrain traditionnellement féminin de la nature morte, des miniatures à l’art du portrait, art par excellence d’une réflexion sur l’identité, sociale, religieuse, sexuelle, et mutation du regard des femmes sur elles-mêmes, qui se situe de surcroît à une période déterminante de l’histoire de France. Exposé au même Salon de la Correspondance, en pendant au portrait d’Adélaïde Labille-Guiard, l’"Autoportrait au chapeau de paille" d’Élisabeth Vigée Le Brun semble appartenir à une autre époque, tant sa grâce, sa séduction, son apparente facilité reflètent une certaine esthétique des Lumières."Je plains tous ceux à qui cet abandon si naturel, cette simplicité si touchante, ne laisse rien à penser, rien à désirer", écrit "La Correspondance Littéraire" au Salon de 1783 où il est exposé à nouveau. C’est en effet la grande réussite d’Élisabeth Vigée Le Brun que d’avoir su toucher ses contemporains en se situant non pas dans son époque, mais entre ciel et terre, ombre et lumière, dans cet espace particulier et presque sacré où elle peut être peintre en se revendiquant de l’héritage de Rubens, Van Dyck, et des grands maîtres italiens. Au XVIIIème siècle, le style rococo est une réaction contre le baroque classique imposé par la cour de Louis XIV. La délicatesse, l’élégance, sont des caractéristiques du style rococo en peinture. Le style néo-classique apparaît lui, vers la fin du XVIIIème siècle et jusqu’aux années 1830. La sensualité et le retour aux formes gréco-romaines sont des symboles le caractérisant. Lorsque Élisabeth Louise Vigée Le Brun se peint, on ressent ce soupçon de modernité. "Je n'ai jamais voulu devoir qu'à ma palette ma réputation et ma fortune. Ne vous rebutez pas si quelques personnes ne trouvent parfois aucune ressemblance à vos portraits. Il y a grand nombre de gens qui ne savent point voir. Ignorez-les, en toute grâce".
Bibliographie et références:
- Inès de Kertanguy, "Madame Vigée Le Brun"
- Élisabeth Vigée Le Brun, "Mémoires d’une portraitiste"
- Françoise Pitt-Rivers, "Madame Vigée Le Brun"
- Geneviève Chauvel, "Le Peintre de la Reine. Élisabeth Vigée Le Brun"
- Geneviève Haroche-Bouzinac, "Louise Élisabeth Vigée Le Brun"
- Marie-Josèphe Bonnet, "Égalité, Exclusion, Femmes peintres en révolution"
- Jacopo Ranzani, "Élisabeth Louise Vigée Le Brun"
- Cécile Berly, "Louise Élisabeth Vigée Le Brun"
- Augustin Pajou, "Portrait de madame Élisabeth Vigée Le Brun"
- Alexis Pérignon, La reine ramassant les pinceaux d'Élisabeth Vigée Le Brun"
- Alexis Merle du Bourg, "Mettre ses pas dans ceux des maîtres"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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"But words are things, and a small drop of ink, falling like dew, upon a thought, produces that which makes thousands". Borné dans sa nature, infini dans ses vœux, l’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux. Il y a de la musique dans le soupir du roseau. Il y a de la musique dans le bouillonnement du ruisseau. Il y a de la musique en toutes choses, si les hommes pouvaient l'entendre. Nous pouvons éprouver ou imaginer le regret avec lequel on contemple les ruines de cités, jadis capitales d'empires. Les réflexions suggérées par de tels objets sont trop banales pour être répétées ici. Mais jamais la petitesse de l'homme et la vanité de ses meilleures vertus n'apparaissent plus frappantes qu'au souvenir de ce que fut Athènes et qu'au constat de ce qu'elle est. Il était réservé à un minable antiquaire, et à ses vils agents, de rendre cette ville aussi méprisable qu'eux-mêmes et leurs carrières". George Gordon Byron était le sixième baron Byron. Il est né le vingt-deux janvier 1788 à Londres et il est décédé le dix-neuf avril 1824 à Missolonghi en Grèce à seulement trente-six ans. Il figure parmi les plus célèbres poètes de la littérature anglaise du début du XIXème siècle. Aujourd’hui encore, son nom est réputé. L’auteur est connu pour son style assez classique et figure parmi les principaux acteurs du romantisme aux côtés de Wordsworth, Robert Southey ou encore Coleridge. De par une sensibilité étonnante et un génie irrévocable à maîtriser la rime tel Don Juan qui maniait avec grâce l’épée de la séduction. Le nom de George Gordon Byron brille plus que jamais comme celui de l’une des figures emblématiques du romantisme anglais du XIXème siècle. Or, "qu’est-ce un nom ? Ce n’est ni une main, ni un bras, ni un visage", au-delà du nom de Lord Byron s’illustre un talent jamais égalé et une poésie qui reflète son âme d’une sensibilité singulière. Sa rime reflète ses angoisses, les tragédies qui jonchaient son parcours, ses amours passionnées et toute la fragilité d’un être hors du commun. Il glissa de lui-même dans chacune de compositions et tout au long de sa courte vie, fascine par sa beauté et son air majestueux. Si bien quel a presse conservatrice de l’époque avait peur que les écrits de Byron et sa figure magnétique, tel un buste de marbre n’écarte les femmes britanniques du chemin de la vertu. Mais, le côté sombre et orageux de la lune de Lord Byron est bien ses mœurs légères. Sa vie est marquée par les scandales de ses prouesses amoureuses jugées outrageuses et lui valant les critiques et la satire de la société, assez réactionnaires, de l’époque. Un génie sans pareil, fait écho à une sexualité débridée et à des envies non-réprimées. L’inceste, les maîtresses, l’abandon de ses enfants et sa bisexualité qu’il consommait dans l’ombre, puisque un comportement pareil était puni de mort à l’époque, contribuent à dessiner les traits d’un artiste qui faisait du danger son quotidien. Le voyage en Orient est une étape primordiale pour tous les poètes de veines romantiques. Aussi, Lord Byron ne fit pas exception à cette perspective très répandue dans ce siècle et visita la Grèce et la Turquie. Son mythe fut scellé par les secrets à jamais perdus d’une vie marquée par l’amour du danger, l’interdit bravé, le culte du moi. Byron est le génie tourmenté qui s’est éteint trop tôt, de cette malédiction que subissent les esprits supérieurs et novateurs. C’est la légende d’un homme qui a consommé l’amour et la poésie à doses égales.
"Perhaps millions, think. It is strange, the shortest letter which man uses instead of speech, may form a lasting link. Arrière les fictions de vos romans imbéciles, ces trames de mensonges tissues par la folie. Donnez-moi le doux rayon d’un regard qui vient du cœur, ou le transport que l’on éprouve au premier baiser de l’amour". Fils de John Byron, capitaine aux gardes, et de sa seconde femme Catherine Gordon de Gight, d’une famille d’Aberdeenshire descendant des Stuarts. Le capitaine ayant dissipé la fortune de sa femme, celle-ci se retira avec son fils à Aberdeen et y vécut avec un mince revenu de cent trente livres. C’est donc dans les montagnes de l’Écosse que Byron passa sa première enfance qui fut triste et maladive. Le caractère aigri, capricieux et emporté de sa mère, qui l’accablait tour à tour de caresses et de mauvais traitements, développa cette irritabilité et cette susceptibilité excessives qui furent alors les principaux défauts de son caractère. D’une beauté remarquable, il avait eu un pied tordu à la suite d’un accident survenu à sa naissance et cette difformité, quoique légère, fut pour lui une source constante d’amertumes. Il n’avait pas neuf ans qu’il tombait alors amoureux d’une jeune écossaise, Marie Duff, lorsqu’il apprit son mariage quelques années après, il fut, il le raconte lui-même, comme frappé de la foudre. Une de ses cousines, Margaret Parker, fillette de treize ans, fut sa seconde passion. C’était, dit-il, une des créatures les plus belles et les plus éphémères qui aient vécu. Toute paix et beauté, elle semblait sortir d’un arc-en-ciel. Elle mourut à quatorze ans, à la suite d’un accident, alors que Byron d’un an plus jeune était au collège de Harrow, et cette mort lui inspira ses premiers vers. En 1798, il hérita alors de la fortune et de la pairie de son grand-oncle William lord Byron, ainsi que du domaine de Newstead-Abbey donné à un de ses ancêtre par Henri VIII. Sa mère l’envoya au collège de Harrow où il se fit remarquer par son indiscipline et sa haine de toute tâche imposée. À Newstead-Abbey, en 1803, il s’éprit d’une jeune fille du voisinage, Mary Chaworth. Il n’avait que quinze ans et Mary, de deux ans plus âgée, dédaignait cet enfant boiteux qui devait pourtant, comme Dante à Béatrice, lui donner une poétique immortalité. Son père, tué en duel par l’oncle William, rendait d’ailleurs tout mariage impossible. Elle se fiança à un autre et l’adolescent envoyé à Trinity College, Cambridge, se consola par de nombreuse amours et scandalisa bientôt l’Université par son indiscipline coutumière et des excentricités que sa fortune lui rendait faciles. C’est à Cambridge qu’il publia son premier recueil de poésies, imprimé à Newark (1807), sous le titre de "Hours of Idleness", où s’étalent ses passions précoces et où percent déjà son humeur fantasque, son scepticisme et sa misanthropie. Lord Brougham, dans La Revue d’Edimbourg, en fit une violente critique à laquelle le jeune poète répliqua par une satire, "English Bards and Scotch Reviewers" (1809), où il s’attaque, avec une verve féroce, à toutes les personnalités marquantes d’alors. Il regretta alors plus tard cette boutade, car il essaya, vainement, de retirer ce pamphlet de la circulation.
"Of ages. To what straits old time reduces frail man, when paper, even a rag like this, urvives himself, his tomb. Rimeurs, qui ne brûlez que du feu de l’imagination, dont les passions pastorales sont faites pour le bocage, de quelle heureuse source d’inspiration couleraient vos sonnets, si vous aviez savouré le premier baiser de l’amour". Au sortir de l’Université, où malgré l’irrégularité de sa conduite il fit de bonnes études, il se lança dans toutes les extravagances de la jeunesse dorée et devint le héros de maintes aventures scandaleuses, puis en 1809 prit sa place à la Chambre des lords sur les bancs de l’opposition, et bientôt, las des débats parlementaires, partit pour le continent. En deux années, il visita successivement le Portugal, l’Espagne, les rivages classiques de la Méditerranée, résida quelque temps en Grèce et en Turquie. Les deux premiers chants de "Childe Harold’s Pilgrimage", parus en 1812, sont le récit de ses impressions de voyage et de ses propres aventures. Le succès en fut immense: "Je me réveillais un matin, dit-il, et j’appris que j’étais fameux". Sa popularité s’accrut encore du retentissement d’un discours qu’il prononça à la Chambre Haute contre les mesures de rigueur nouvellement prises pour étouffer les émeutes d’ouvriers. De 1812 à 1814, la publication du "Giaour", de "Bride of Abydos", du"Corsair" et de "Lara", augmentent l’enthousiasme. Byron devint l’idole des cercles de la jeunesse aristocratique et viveuse de Londres. Enfin, fatigué de cette vie de dissipation, rassasié de plaisirs, il voulut se ranger et épousa la fille de sir Ralph Milbanke, baronnet du comté de Durham, qui s’était éprise de lui. Le mariage fut célébré le deux janvier 1815 à Seaham, la résidence de son père. Ce fut un grand étonnement pour ceux qui connaissaient le caractère de Lord Byron, qui déclara d’ailleurs dans "The Dream" que le jour de ses noces toutes ses pensées étaient pour la demoiselle d’honneur de sa femme, qu’il trouva placée entre elle et lui dans la voiture. Cependant, de son propre aveu aussi, il fut quelque temps heureux, quoique "fort ennuyé par son pieux beau-père" qui avait offert au jeune couple une de ses résidences, dans le comté de Durham, pour y passer leur lune de miel. Mais dès le mois de mars les époux allaient s’installer à Londres, et c’est là qu’éclata leur incompatibilité d’humeur. Lady Byron, jolie, intelligente, distinguée, mais imbue de tous les préjugés du clan britannique, dévote et d’une vertu hautaine, ne pouvait faire les agréments du foyer d’un homme qui professait le mépris le plus profond pour toutes les conventions sociales, la haine féroce du dogme religieux aussi bien que du credo politique de la "respectabilité". Aussi dès sa grossesse se vit-elle délaissée par son mari, qui cherchait des distractions illicites du dehors, bien qu’il eût écrit d’elle avant son mariage: "Elle est si bonne que je voudrais alors devenir meilleur". Correcte, sèche, sans tempérament, incapable de faillir et de pardonner, elle était de ces femmes qui rendent la vertu insupportable. Il faut ajouter les embarras financiers sans cesse croissants et qui sans doute aigrissaient son caractère. Les dettes de Byron ne diminuaient en rien le chiffre de ses dépenses. En novembre 1815 il avait été obligé de vendre sa bibliothèque, en moins d’un an les huissiers avaient fait neuf fois irruption dans la maison.
"And now I'm in the world alone, upon the wide, wide sea. But why then publish ? There are no rewards of fame. Si Apollon vous refuse son aide, si les neuf sœurs paraissent vouloir s’éloigner de vous, ne les invoquez plus, dites adieu à la muse, et essayez de l’effet que produira le premier baiser de l’amour". Le dix décembre 1815, la jeune femme accoucha d’une fille, Augusta-Ada, et le six janvier son mari, qui ne communiquait plus avec elle que par lettres, lui écrivit qu’elle eût à quitter Londres aussitôt que possible pour vivre avec son père en attendant qu’il ait pris des arrangements avec ses créanciers. Elle partit huit jours après rejoindre ses parents à Kirkby Mallory et, bien qu’elle lui écrivit à son départ une lettre affectueuse, elle s’occupa alors de faire déclarer son mari "insane", affirmant qu’elle ne le reverrait jamais plus. Cette séparation fit scandale. Quelques propos répétés excitèrent une explosion d’indignation publique. Byron fut accusé de toutes sortes de vices monstrueux, et la presse anglaise, toujours hypocritement vertueuse et champion de la morale le compara à Néron, Héliogabale, Caligula, Henri VIII. Il n’osa plus se montrer en public de crainte des outrages de la foule et des brutalités de la populace. La cause de cette fureur, tenue secrète par la génération suivante, ne fut révélée que cinquante-cinqans plus tard par Harriett Beecher Stowe: Byron aurait eu des relations incestueuses avec sa demi-sœur Augusta, fille d’un premier mariage de son père, devenue Mistress Leigh. Cependant celle-ci continua jusqu’en 1830 d’être en bons termes avec lady Byron, servant d’intermédiaire entre elle et son mari tant qu’il vécut. Elle mourut en 1851, et ce ne fut qu’en 1856 que lady Byron aurait confié ce secret à la romancière américaine, et cela par charité évangélique. Elle pensait qu’en ternissant la mémoire du poète, elle diminuerait l’influence néfaste de ses écrits et par suite son expiation dans l’autre monde. Mistress Stowe ne publia ces confidences qu’en 1869 dans le "Macmillan’s Magazine" et dans "The Atlantic Monthly". Dans son livre "The Real Lord Byron", J. C. Jeaffreson revint sur cette question de l’inceste, qui ne devrait pourtant laisser aucun doute, à en juger par des stances écrites à sa sœur Augusta pendant le séjour du poète à la villa Diodati (1816), et des vers adressés à "My Sweet Sister" ("Ma douce sœur"), détruits à sa mort sur son expresse volonté. Byron implora son pardon, qui lui fut implacablement refusé, et la séparation à l’amiable eut lieu le deux février 1816, à la suite de quoi il quitta l’Angleterre pour n’y plus revenir, après avoir publié "The Siege of Corinth" et "Parisina". Le premier ouvrage fut composé pendant son année de cohabitation conjugale, car le manuscrit tout entier est copié de la main de Lady Byron. L’éditeur Murray envoya un chèque de mille guinées que Byron lui retourna.
"I ask in turn why do you play at cards with them ? But why drink ? Why read ? To make some hour less dreary. Je vous hais, froides compositions de l’art. Dussent les prudes me condamner et les bigots me désapprouver, je recherche les inspirations d’un cœur qui bat de volupté au premier baiser de l’amour". Il visite la France et la Belgique, se rend en Suisse où il se lie avec le poète Shelley, dont la vie agitée et courte eut tant de similitudes avec la sienne. À Genève, il compose le troisième chant de "Childe Harold" et "The Prisoner of Chillon", et, en face des glaciers de l’Oberland, s’inspire pour son sombre drame de "Manfred", écrit en 1817 ainsi que "Lamentof Tasso". De 1818 à 1821, il habita Venise et Ravennes, complétant "Childe Harold", écrivant "Mazeppa", "MarinoFaliero", "Werner", "Caïn", "Difformed Transformed". Mais de toutes ces œuvres, la plus extraordinaire est bien l’épopée de "Don Juan", qu’il acheva à Pise en 1822. Don Juan, héros railleur, cynique, passionné, enthousiaste, aventureux et mobile comme lui. La vie de plaisirs excessifs avait sans doute fatigué son cerveau, car il ne travaillait plus que sous l’influence de copieuses libations. Après un amour scandaleux avec la comtesse Guiccioli, sentant sa verve poétique lui échapper, il essaya de la politique. Whig en Angleterre, il ne pouvait être alors que carbonaro chez ce peuple qui aspirait à son émancipation. Le mouvement ayant avorté, il fonda, avec les poètes Leigh Hunt et Shelley, "Le Libéral", qui n’eut que quelques numéros. Dépité et mécontent, voyant ses forces s’user, son génie s’appauvrir et sa fortune se fondre, il résolut de mettre au service de l’insurrection des grecs pour leur indépendance tout ce qui lui restait. Il partit sur un brick frété à ses frais et débarqua à Missolonghi le quatre janvier 1824, ne trouvant partout que confusion, discorde, anarchie, rapacité et fraude. Un peuple brave mais sans discipline, une populace armée, cruelle, criarde, imbécile et turbulente, des chefs jaloux, antagonistes et mal obéis. Pendant trois mois, avec son âme de poète et son argent de grand seigneur, il essaya des remèdes. Désespéré et déjà malade, il fut saisi le neuf avril dans une de ses courses quotidiennes à cheval d’une fièvre qui l’emporta en dix jours. Les grecs prirent le deuil et son corps fut rapporté en Angleterre, dans le caveau de sa famille, en la petite église de Hucknoll, près de Newstead. Lord Byron est l’un des plus grands poètes de l’Angleterre et, à un moment donné, il éclipsa la gloire de tous, même celle de Walter Scott, Wordsworth, Southey, Moore et Campbell. On l’a quelquefois comparé à Burns. Tous deux, le pair et le paysan, écrivirent d’après leurs impressions et leurs sentiments personnels, se montrant tout entiers dans leurs œuvres, esclaves de passions impérieuses, livrés également au doute et à la mélancolie, ils moururent tous deux prématurément, après une vie d’extraordinaire activité physique et intellectuelle. Ils furent l’un et l’autre des apôtres de cette école négative et stérile de misanthropie, de doute et de désespérance, qui fit tant de ridicules adeptes et de niaises victimes. Les écrits de Byron c’est lui-même, et de lui l’on peut dire. Le poète et l’homme ne font qu’un. Malgré son titre, son rang et sa naissance, il a beaucoup haï les anglais, c’est peut-être pourquoi il fut si populaire en France.
"It occupies me to turn back regards on what I've seen or pondered, and what I write I cast upon the stream. Vos bergers, vos moutons, tous ces sujets fantastiques peuvent amuser parfois, mais ne pourront jamais émouvoir. L’Arcadie n’est qu’un pays de fictions. Que sont ces visions-là, comparées au long premier baiser de l’amour ?". Les deux premiers chants du "Pèlerinage de Childe Harold" ont été publiés à Londres en 1812. Ces deux chants poétiques, sous couvert d’une fiction, constituent le récit masqué des pérégrinations de Lord Byron en Orient. Ne pouvant se rendre ni en France, ni en Italie sous domination napoléonienne, Byron et so nami Hobhouse, tous deux âgés d’une vingtaine d’années, inventent une sorte de nouveau grand tour. Partis d’Angleterre le deux juillet 1809, ils débarquèrent à Lisbonne, puis gagnèrent peu à peu l’Espagne alors en pleine lutte contre la présence des troupes françaises sur son sol. De Gibraltar, ils entreprirent ensuite une longue traversée de la Méditerranée pour gagner l’actuelle Albanie, à cette époque largement méconnue des voyageurs européens. De là, ils pénétrèrent en Grèce continentale qu’ils visitèrent avec entrain avant de gagner les rivages de l’Asie mineure, Constantinople et de se replier à nouveau en Grèce, le pays préféré de Byron. Ce voyage, long de deux ans, dont on connaît les moindres détails grâce au poème et surtout à l’abondante correspondance de Byron, a été pour le poète anglais un moment charnière dans sa trajectoire personnelle, une sorte d’hapax existentiel délimitant un avant et un après dans son cheminement identitaire. Bien sûr, une chose est le voyage lui-même, une autre sa transfiguration poétique. Au regard de la riche correspondance de Byron, la tonalité du poème est infiniment plus sombre, avant tout dominée par les thèmes de la conscience malheureuse, du désenchantement et de la révolte. Il constitue le récit de voyage d’un pèlerin qui hante les glorieux vestiges de l’Europe et qui ne trouve en toute chose que le reflet de sa propre mélancolie. Avec cette publication, Byron connaît une célébrité immédiate et phénoménale en Angleterre tout d’abord, mais bientôt étendue à toute l’Europe et alimentée par sa réputation de poète maudit, ses postures de dandy et ses aventures de libertin si commentées dans les cercles intellectuels et les salons mondains. Dans son journal intime, peu de temps après la publication de l’œuvre, il prend acte de cette gloire soudaine en y inscrivant cette courte phrase: "Un matin, je me suis réveillé célèbre".
"The sails were fill'd, and fair the light winds blew, as glad to waft him from his native home, his house. Oh ! ne dites pas que l’homme, depuis sa naissance, depuis Adam jusqu’à nos jours, a été soumis à la loi du malheur. Il y a encore sur la terre quelque chose du paradis, et l’Eden revit dans le premier baiser de l’amour". Le succès de librairie est en effet prodigieux et les rééditions en Angleterre n’en finissent pas. Pas moins d’une douzaine entre 1812 et 1821. Au final, Byron devient avec Walter Scott l’un des deux premiers écrivains européens à vivre réellement de sa plume. Son succès se répercute alors ensuite, avec quelques années de décalage, sur tout le continent depuis l’Espagne jusqu’à la Russie. L’extension géographique de la publication du poème et le rythme des traductions témoignent d’un succès dont, en réalité, il y a peu de précédents dans l’histoire européenne. Pour Tomasi Di Lampedusa, l’un de ses biographes, "Childe Harold"ne fut rien de moins que "la bombe atomique de la littérature européenne". En France, où ses œuvres complètes furent rééditées pas moins de sept fois entre 1819 et 1827, l’influence de Byron et de son poème fut particulièrement prégnante. Pourtant les traductions françaises réalisées dans l’urgence furent plus qu’approximatives tant elles firent subir au poème de fortes distorsions. Byron s’en plaindra ouvertement, regrettant qu’elles abandonnent alors largement la versification qui était la sienne pour une forme hybride s’apparentant davantage à des poèmes en prose. À son départ, Byron n’avait pas de projet de relation de voyage. Il disait alors vouloir voyager pour voyager, sans autre dessein. Son projet d’écriture est né tardivement, une fois le jeune poète plongé dans l’atmosphère hautement exotique de l’Albanie, dont la profonde étrangeté semble avoir rendu l’écriture impérative. Reste qu’à son retour en Angleterre, Byron considérait son œuvre comme étant indigne d’être éditée. Sans l’insistance et la ténacité de son ami Dallas, il ne l’aurait probablement pas publiée. Sans doute n’aurait-il pas connu alors pareille célébrité. Initialement, le poème devait porter le nom médiéval des Byron: Childe Burun. Or, Byron remplaça l’un par l’autre sans se soucier pour autant de changer les nombreux détails qui révélaient clairement son identité au lecteur. Au final, le lectorat ne se laissa pas abuser et, malgré les préfaces successives du poète, le voile de fiction ne cacha pas longtemps la part largement autobiographique du poème. Toute la réception de son texte fut ainsi largement ordonnée par cette confusion entre Byron et Harold, ce qui contribua à faire de Byron un véritable mythe vivant et à faire de sa légende un acteur historique à part entière. À plusieurs reprises par le passé, les historiens de la Méditerranée ou du paysage ont montré combien la peinture des paysages méditerranéens dans "Childe Harold" joua un grand rôle dans le renouvellement des représentations collectives de la Méditerranée et de ses rivages. Alors que les prémices du romantisme avaient tourné les regards vers les rivages septentrionaux de la Calédonie, ce livre contribua à associer de nouveau le pourtour méditerranéen à des chaînes d’images positives, quitte à rapprocher comme le fait Byron les Highlanders des montagnes écossaises de son enfance et les albanais qu’il a sous les yeux, dont les mœurs fières et violentes et le port de jupes courtes appellent inévitablement l’analogie.
"And so fast the big white rocks faded from his poor view, And soon were lost in circumambient foam. Quand l’âge aura glacé notre sang, quand nos plaisirs auront disparu, car les années pour s’enfuir ont les ailes de la colombe, le souvenir le plus cher et qui survivra à tous les autres, celui que notre mémoire aimera le plus à se rappeler, c’est le premier baiser de l’amour". Mais face au Nord de la poésie ossianique, tissé de brumes, de tempêtes et d’orages, Byron opposa une Méditerranée lumineuse et exotique qui constitua un second pôle d’attraction de l’imaginaire de l’espace romantique, autorisant des aventures perçues comme plus authentiques dans un monde qu’on imaginait plus sauvage et plus archaïque. Toutefois, c’est certainement quant à l’épanouissement de l’orientalisme que son poème fut le plus efficient. Si les récits des voyageurs et les traductions des orientalistes avaient déjà inauguré un vif mouvement d’intérêt pour l’Orient à la fin du XVIIIème siècle, Byron de par l’immense succès de son poème et de ses contes orientaux renforça considérablement ce tropisme oriental et fut l’un des foyers majeurs de la vogue orientaliste qui se déploya tout au long du XIXème siècle. "Childe Harold" participe d’une érotisation de l’espace oriental. En ce premier XIXème siècle, il constitue l’une des étapes majeures de la construction du mythe de la femme orientale, incarnée ici par la figure de l’andalouse associée à l’Orient de par le passé maure de l’Espagne du Sud. Au fil du poème se dessine alors ensuite une sorte d’Orient hédoniste, où l’itinéraire d’Harold est ponctué de multiples rencontres féminines, celles de femmes voilées et lascives dont le pouvoir de séduction est avivé par le mystère des harems, par les parfums, la pourpre et la douce torpeur qui imprègnent les modes de vie. En laissant place aux amitiés masculines, cet Orient semble aussi permettre toutes les licences et incarner l’évasion loin du carcan des mœurs occidentales d’alors. Ainsi, Byron, à la suite de Chateaubriand et avant Hugo, contribua fortement à l’émergence d’un Orient rêvé, d’un espace fantasmé à la fois fascinant et inquiétant qui n’allait plus cesser d’attiser le désir du voyage en Orient et d’ordonner ses pratiques et ses itinéraires. Après la Méditerranée et l’Orient, "Childe Harold" a également participé de certaines métamorphoses des représentations de la Grèce. Voyager en Grèce, c’est bien sûr avant toute chose voyager dans le temps, retourner vers la terre originelle, recouvrer la matrice culturelle de l’Occident. Arrivé en Grèce durant l’hiver 1809, le premier geste de Byron fut ainsi de s’agenouiller devant le Mont Parnasse. Comme tant d’autres avant lui, il ne put s’empêcher au début de regarder alors la Grèce au prisme de son riche passé mythique et historique.
"Cold is the heart, fair Greece, that looks on thee, nor feels as lovers o'er the dust they loved. Dull is theeye that will not weep to see thy walls defaced, thy mouldering shrines removed by hard british hands. Une petite goutte d’encre, tombant comme la rosée sur une pensée, crée ce qui fait penser des milliers,voir des millions d’êtres. Le cœur d’une femme est une partie des cieux, mais aussi, comme le firmament, il change nuit et jour. Dès ma jeunesse, mon âme se tenait à l'écart des autres âmes. Je ne voyais pas la terre avec les yeux des hommes". Du point de vue de la sensibilité, "Childe Harold" traduit admirablement l’émergence de l’esthétique romantique du voyage. Ce que Byron délaisse en partie, à travers le récitdes aventures d’Harold, c’est le modèle du voyage classique qui fut dominant à l’époque moderne et ordonné par la pratique du parcours érudit dans les sites riches en souvenirs antiques. Pareilles manières de parcourir l’espace visaient avant toute chose à la réactivation de la culture classique, à la réminiscence des souvenirs scolaires ayant trait à l’Antiquité. Plus qu’une ouverture à l’Autre, qu’une quête de l’inconnu, ce modèle célébrait avant tout le plaisir de la reconnaissance et des inlassables retrouvailles avec le même. Autant d’états d’âme, de poses, d’attitudes proprement romantiques qui dessinent ensemble l’une des expressions les plus abouties du mal du siècle. Reste à savoir jusqu’où ces modèles littéraires affecteront les pratiques. En tout cas, ce personnage de héros maudit que Byron étoffera texte après texte n’a pas manqué d’exercer en France un réel pouvoir de fascination sur la jeunesse des écoles. Mais l’adéquation entre Byron et ses personnages, entre sa vie et son œuvre, contribua plus encore à faire de lui l’icône de la jeunesse romantique. Byron sera pour tous un exemple, le premier dans l’époque qui incarne scandaleusement l’unité des extrêmes, aristocrate rebelle et satanique, héros fatal s’en allant mourir à Missolonghi pour la défense de la Grèce. Mieux vaut encore mourir, selon le poète, rejoindre les spartiates défunts encore libres, dans leur fier charnier des Thermopyles, plutôt "que de stagner dans notre marécage". Inclusive, l’expression "notre marécage" se veut générationnelle autant que personnelle. L’image traduit comme nulle autre le profond malaise qui fut celui des poètes de la deuxième génération des romantiques anglais. À eux qui n’ont pas connu la Révolution française et ont assisté impuissants à la trahison de ses idéaux, il n’aurait donc été offert d’autre perspective que celle consistant à subir le destin qui vous accable, à entrer vivant dans une forme de lente agonie ? Face à la contagion de l’endeuillement généralisé, Byron voulut remonter en selle au plus vite. Donnons le dernier mot à Byron qui, au retour de son périple à Douvres, nous laissa cette pensée si révélatrice des arcanes du désir de voyage à l’âge romantique: "Le grand objet de la vie est la sensation. Sentir que nous existons, fut-ce dans la douleur. C’est ce grand vide mortifère qui nous pousse au jeu, à la guerre, au voyage, à des actions quelconques mais fortement senties, et dont le charme principal est l’agitation qui en est inséparable car sourire et soupir sont un même abîme".
Bibliographie et références:
- Bernard Blackstone, "Byron and greek love"
- Martin Garrett, "Lord Byron"
- Phyllis Grosskurth, "Lord Byron"
- Teresa Guiccioli, "Lord Byron's life in Italy"
- André Maurois, "Lord Byron, une vie romantique"
- Robert Escarpit, "Lord Byron, un tempérament littéraire"
- Leslie Marchand, "Lord Byron, portrait d'un homme libre"
- Daniel Salvatore Schiffer, "Lord Byron"
- Jerome McGann, "Byron and romanticism"
- Donald Prell, "Lord Byron coincidence or destiny"
- William St Clair, "Byron and greek love"
- Jean-Pierre Thiollet, " Lord Byron"
- Marc Vaugham, " Lord Byron"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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Nous sortions, ce soir-là, John et moi, de l’immense salle du Palais des congrès, où son éditeur avait organisé une réception pour la sortie de son dernier roman, La Cité perdue des Femmes-éléphants. La journée avait été harassante, toutes ces mondanités m’avaient épuisée, et j’avais hâte de rentrer me mettre à l’aise pour que John s’occupe enfin un peu de moi.
Nous nous dirigions vers les ascenseurs où les derniers invités étaient agglutinés. Lorsque le portes s'ouvrirent nous fûmes emportés par la cohue, qui nous sépara. John fut emporté dans le fond, coincé derrière une jolie jeune fille, tandis qu’une armoire à glace me tenait à distance.
Tout le monde regardait dans la direction de la sortie, sauf moi… qui savais le loustic capable de tout, quand il sortait de ces séances de dédicaces, un peu pompette et gonflé d'orgueil...
Je n’eus pas à attendre longtemps pour que mes craintes se confirment ! À peine les portes s’étaient refermées, que la donzelle devant lui sursauta en écarquillant brièvement les yeux… avant de se ressaisir… et se laisser peloter les miches, l’air de rien. John avait beau regarder en l’air, sa mine réjouie le trahissait.
Je voyais mon rêve de soirée en tête-à-tête s’envoler. John s'enhardissant même, alors que nous abordions le huitième étage, à lui picorer le cou et les épaules, qu'elle avait eu, en cette journée de canicule, le bon goût laisser dénuder. La nymphette reçut ses baisers les lèvres entrouvertes et les yeux révulsés, comme si elle s’en enivrait ! Pour sûr, John savait choisir ses proies… la minette était plus que réceptive !
Arrivés à destination, alors que tout le monde se dispersait dans le hall, elle se retourna brusquement sur lui. « Monsieur Kardashian !… Il me semblait bien que c’était vous !… Je suis étudiante en littérature et j’ai lu tous vos livres… Quel bonheur de vous rencontrer… je suis une fan absolue ! »
Je parvenais enfin à les rejoindre et à agripper le bras de John sans que ma présence ne perturbe leur conversation.
« Vraiment ? On pourrait en parler tranquillement chez moi, allongés sur une peau de bête… dit John avec son plus beau sourire. Je le pinçais furtivement en signe de désaccord... Pendant que mon épouse nous servira un thé à la menthe… » poursuivit-il suavement, tout en me défiant du regard de le contredire.
« C’est elle, votre femme ? » demanda alors la fausse ingénue qui ne m’avait même pas saluée. « Oui ! Depuis vingt-cinq ans ! » « Vous lui interdisez encore, comme à toutes vos héroïnes, de porter une culotte ? » « Oui, bien sûr, il n’y a pas d’âge !… D’ailleurs, j’ai pu constater avec bonheur que tu avais déjà intégré ce précepte… Mais je lui interdis aussi de parler sans ma permission ! » « Ho, la pauvre… » se contenta de répondre la pouffiasse, terrifiée à l’idée de devoir se taire. « Mais rentrons ! Je sens venir l’inspiration ! »
Heureusement, nous n’habitions pas très loin, car la gamine, qui s’était emparé du bras resté libre de John, nous saoula tout le long du chemin pour savoir ce qu’il allait lui faire.
« Vous allez m’attacher ? Comme Esmeralda, dans La Captive du terrain vague ! Ou bien me tondre, comme la Cantatrice nymphomane ? »
« Tu es trop curieuse… tu verras bien !… Peut-être les deux si tu ne t’arrêtes pas de parler ! »
« Vous savez, vous pouvez être très sévère avec moi, comme dans La Mère supérieure était un homme, où le pervers tourmente les tétons de ses novices jusqu’à leur faire avouer des choses horribles… qu’elles n’avaient même pas commises, en plus ! »
« Ça ne sera pas nécessaire avec toi ! Mais je te couperais volontiers la langue ! »
« Cousez-moi plutôt les lèvres, si vous voulez que je sois sage, comme dans Le Mystère de la femme sans tête ! »
Mi-agacé, mi-amusé par la connaissance exhaustive qu’elle avait de son travail, John lui répondait cependant avec bienveillance. Je gardais, pour ma part, un silence de bon aloi, comme il l’exigeait quand il était en chasse.
Lorsque nous parvenions à notre immeuble, elle avait passé en revue toute l'œuvre de John et se trouva à cours de citations. Mais, ne sachant se taire, demanda : « Mais, quel sera le sujet de votre prochain opus, Monsieur Kardashian ? »
« Ce sera l’histoire d’une princesse qui parlait trop… répondit John en pénétrant dans le hall, qu’une vilaine sorcière, pour la punir, aura transformée en urinoir... La pauvre princesse prisonnière de son état, essayera bien d’alerter ses visiteurs de sa métamorphose, mais seuls des borborygmes et des glouglous incompréhensibles parviendront à sortir de sa bouche en céramique !… Je l’intitulerai La Cassandre des pissotières ! »
« Mon Dieu, Maître !… Où allez-vous chercher tout cela ?… » fit la greluche, les yeux pleins d’étoiles. Avant d’ajouter, en montant dans l'ascenseur : « Je fais aussi très bien le ménage… ».
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Dès l’aube je suis partie, gravissant le petit chemin forestier, souriant au vent léger qui m’emporte. Le clair de lune jouait encore à la lueur des étoiles. Le soleil étirait mollement de timides rayons aurifères.
Tu marchais à mes côtés, nos pas écorchés de ce que nous sommes laissant des empreintes légères sur la terre poudrée. La brume se dissipait, caressant le lac et posant sur nos visages des gouttes glissantes, en cadences venant de l’univers. Chaque jour apportant sa perle de rosée
Dans le ciel bleu pale, un albatros déploie ses ailes gracieuses, et son ombre dessine un duvet au dormeur ensommeillé dans l’herbe sauvage. Je te montre du doigt le champ jaune de tournesols souriants, un muret plein de fentes d’où poussent les liserons.
Tel un bateau ivre, nous tanguons sur un pont admirant l’onde lasse du temps volage, émerveillés des clapotis créant des cercles gazouilleurs.
Nous arrivons devant la grange, la porte s’ouvre et nous sommes aspirés par la chaleur ambiante. Une odeur de feu de cheminée, de pommes de pain nous embaument. La pièce est chargée d’étagères croulant de vaisselle ébréchée, de brocs et marmites émaillées. Au coin un chat séraphique dans un panier en osier tressé.
Ils sont là, demeurant dans la beauté des choses, autour d’une vieille table en bois parfois cajolée, souvent lessivée par des mains usées. Une cafetière fume, quelques verres d’absinthe, un pot de lait et du miel. Dans des tasses à thé en porcelaine se reposent des cuillères.
Dans l’atmosphère volent des textes à poser, des mots à inventer, des partages à venir, des pleurs-joies dans nos cœurs, le parfum du langage des vers.
Je m’installe au pupitre, fébrile et tremblante. Je prends la plume, la trempe dans l’encrier. Tendue devant la page beige, j’hésite, mes doigts tressaillent sur la feuille.
« Et si ». Tout le beau monde lève la tête attendant la suite. Alors je leur dis « et si la poésie pouvait nous sauver». Les sourires se forment, des sourires moqueurs et amicaux, chaleureux , des sourires qui comprennent et pardonner ma folle naïveté, ma douce espérance.
Tu viens vers moi et me fais me lever. Main dans la main, tachées d’encre, la plume blanche au creux de nos paumes, tu m’amènes sur le palier, ils nous suivent silencieux pour regarder
Regarder ce décor, cette réalité aliénée et égarée à nos pieds
Un tableau d’une beauté presque insoutenable, d’une perfection indescriptible :
La douceur de l’instant
La fragilité du vivant
Dans le cœur de l’humanité
D’après une photo de Mailis, texte de Gitane, Invités : Baudelaire, Hugo, Verlaine, Apollinaire, Rimbaud, Aragon, Prévert, Chedid, Kaur
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Vous étes la comme prévue, vous m attendez au bord du trottoir , vétus d une courte jupe noire qui moule vos jolies fesses, ce n est pas vulgaire juste sexy . Une chemise blanche laissant deviner la pointe de vos seins l accompagne .Vos chaussure sont rouge à talons haut comme demandé. Je m arréte a votre auteur et vous fait signe de monter.
Nous roulons depuis quelque minutes je pose ma main sur votre genoux et vous ecarte les cuisses votre jupe remonte presque a votre vulve,je ne regarde pas je veux la decouvrir lorsque nous serons arrivé au hangar.
Ma main vous caresse lentement ,doucement , vous mouillez et vous commencez a gemir vos hanche ondulent je stop ma caresse nous voila arrivé. A l interieur du hangar vous decouvrez un peut inquiete un fauteuil,la table sur laquelle ce trouve un rouleau de corde, la cravache, un bandeau. A coté du fauteuil il y a un peitit coussin pour vous. Je vous met à genoux sur le coussin et m installe confortablement dans le fauteuil A suivre
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15/10/2022
Je met ce rapport qui date un peu pour V/vous faire attendre l'arrivée de mes prochains rapports. J'espere que cela V/vous plaira.
J'ai fait ma demande vendredi 14/10/2022 après une journée ou c'était compliqué, beaucoup de remises en questions, beaucoup de pleurs mais j'ai arrêté de réfléchir et j'ai fini par me laisser porter, donc je l'ai fait. Il m'a donné un baiser puis il m'a embrassé avec la langue longuement plusieurs fois. A ce moment là mon cerveau vrille, je n'arrivais plus à penser, je me sent juste bien, légère, heureuse. L reviens de son pipi et moi j'essayais de reprendre mes esprits, essayer de penser à ce qui venais de se passer avec Maitre. Peu après il part faire pipi, et moi je souhaitais aller au lit. Il sort des toilettes et la chambre où j'allais dormir étant juste devant les toilettes, il me vois et viens discuter avec moi, l'on discute de cette journée qui fut remplie en émotions et elle n'était pas finie encore. Nous avons joué ensemble, il commence d'abord par me masturber tout en me posant des questions afin que je puisse comprendre que mon sexe lui appartiens et que pour faire quoi que ce soit avec, c'est a Maître qu'il faut demander et que Maître c'est lui qui contrôle. Il m'a faite basculer sur le dos et continue de jouer avec mon sexe, malaxant mes testicules et mon sexe dans sa globalité. Je me sent comme paralysée entre ses mains, le regardant dans les yeux et prenant du plaisir à être sienne. Nous avons joué ainsi une trentaine de minutes, puis comme nous étions extrêmement fatigués, nous sommes partis dormir chacuns de notre côté.
Le lendemain nous nous préparons toutes a l'arrivée d'une personne qui n'étais pas calculé, on pars vers 14h et dans la voiture c'était un peu compliqué, de rester 5h sur la banquette arrière, au millieu, comme je suis la plus fine de nous 4, au millieu j'ai retiré mes chaussures comme mes pieds s'engourdissaient a la fin. Sur la route on a discuté un peu de tout et de n'importe quoi, on a pas trop discuté avec F, l'arrivante car elle était fatiguée, elle avais fait plusieurs heures de train avant. Sur la route je pense a plein de choses, je calcule énormément tout ce qu'il peux se passer et je pense même au fait que je puisse me faire kidnapper ou séquestrer mais c'est rapidement écarté, c'est juste que je pense trop. Au fur et à mesure des kilomètres, les pensées s'apaisent, et a chaque fois que je ferme les yeux, j'ai une décharge de dopamine et je me souviens de ma demande, des baisers que Maître m'a offert, et de la séance de jeu juste après.
Nous arrivons vers 19h-19h30 dans un village dans les montagnes a proximité de Lyon. C'est une vieille bâtisse devant laquelle nous nous garons. On sort et on se met près de Maître qui parle avec un Monsieur, le propriétaire de cette bâtisse. Je prends les glacières pour les poser la ou le Monsieur le souhaites et je fais très attention, je reste patiente, sage et a l'écoute, je n'ai pas envie de faire une bêtise et que l'on pense que Maître éduque mal ses soumises, même si c'est mon premier jour d'appartenance et la première fois que je vais en donjon. Je pose les glacières puis je rejoinds Maître et les filles sur la terrasse. On commence à discuter de notre côté et un peu a "critiquer" les tenues des gens mais sans volonté de blesser, mais A, parle très fort et a ce moment là, elle critiquait a voix haute, L l'a grondée directement, car cela doit rester entre nous, que ça n'aille pas blesser les gens. On viens a rentrer dans une salle qui fais office de salon a ce moment là, Maître s'asseois sur les vieux canapés en cuir et nous le suivons. On patiente ainsi sagement durant une dizaine de minutes jusqu'à ce que le Monsieur arrive et demande si il y a des gens, des petites soumises ou petits soumis qui veulent faire le service et faire rentrer les gens pour le repas. Je regarde Maître, n'ayant pas vraiment envie et n'ayant pas les connaissances pour bien servir et bien faire, mais ça va, Maître n'a rien dit. Je surveille beaucoup autour de moi, ce qu'il se passe, et je fais aussi très attention aux sacs qui sont toujours sur la terrasse. Il y a vraiment tout type de personnes, A qui est en little, des punks, une kitten, une personne qui est habillé en paysan avec une tétine en guise de pendentif. Le Monsieur reviens pour nous dire que l'on peux monter à l'étage avec Maître, alors nous le suivons. Nous ressortons sur la terrasse, prenons les sacs et l'on rentre par l'entrée principale pour directement prendre les escaliers. Les marches grincent et sont assez petites, marcher en talon dessus ce n'est pas la joie. On monte au premier étage et l'on nous montre une pièce presque vide, un trône et quelques matelas sont placés dedans et on nous dit que c'est là où l'on vas se changer. La porte grande ouverte nous laissais a la vue de tous et toutes, c'était intimidant mais Maître sauras s'occuper des choses si cela déborde. Je change la robe noire avec les petits boutons dorés que je portais pour un corset bien serré et une petite jupette en tissu avec mes talons hauts. Comme ce n'est pas encore l'heure et que nous sommes en tenues, nous faisons des tours dans la maison, et Maître sort fumer. Nous rencontrons a ce moment là Maîtresse M, une Dame toute souriante et sympathique d'une cinquantaine d'années qui discute avec nous et qui nous raconte les histoires de son doudou qui a 10 ans je crois. Nous continuons à faire des visites avec Maître qui a son fouet en main puis viens l'heure du repas. C'est une grande salle qui est juste en face des escaliers pour aller au premier étage et plusieurs tables ainsi que des bancs sont placés là pour former une sorte de banquet. Avec Maître et mes soeurs nous nous installons vers le centre, ainsi nous sommes bien placés pour tout voir et être bien servis. Sur la table il y a déjà des entrées, des toasts au thons et salade de tomates avec du poulet ainsi qu'un liquide jaunâtre qui d'après Maître, serais du jus de pommes. Je regarde, j'observe les personnes qui passent et qui s'installent et face a moi, un couple, une Dame Dominante et son soumis, ils étaient venus s'habiller avec nous également, je les avais déjà remarqués. Maître commence par se servir dans les entrées puis se sert du "jus de pommes", j'attends qu'il finisse pour se servir puis je propose a la Dame si elle en veux, elle dit oui alors je vais pour lui donner la bouteille puis L, qui est assise à côté de moi me dit a l'oreille :"C'est une Dominante, tu dois la servir", alors je m'exécute et je la sert ainsi que son soumis tout en ayant un peu honte et un peu peur d'avoir fait honte à Maître. Je repose la bouteille entre Maître et nous 4, ses soumises puis je prends une gorgée de "jus de pomme" qui n'avais pas du tout le goût de jus de pommes comme c'était du vin blanc ! Maître et L rigole et afin de pouvoir me servir autre chose je bois mon verre assez rapidement, ce qui les choques. Le fait de ne pas avoir su qu'il fallait que je serve la personne Dominante ma poursuivie le reste de la soirée, je me sentais assez bête de ne pas avoir su cela, même si je n'avais aucune chance de le savoir avant que ça n'arrive mais bon... La soirée continue, je reste assez calme, sage et a l'écoute. Après le repas les filles et Maître sortent pour fumer, moi je pars seule avec Maître afin de lui parler seule a seule, lui posant des questions sur ma manière de faire, et lui parler du fait que je ne savais pas que je devais servir la Dame, et il m'a dit que ce n'était pas grave. On remonte assez rapidement et les gens partent assez rapidement aussi pour partir jouer au grenier et dans la cave. Nous on reste et on discute entre nous 5, parfois avec le couple qui est a côté de nous, nous discutons pendant bien 30-40 minutes avant de partir à notre tour pour faire un tour et trouver un bon endroit afin que l'on joue avec Maître. L'on descend dans la cave en repassant dans le salon et on se retrouve dans une sorte d'écuries avec un haut plafond de 5 mètres de haut, et des petits box en pierre, de la terre battue au sol. Quelques croix de saint André sont placés dans les box ou même au millieu du passage principal. Les personnes avaient déjà commencé à jouer, les fouets sifflaient dans l'air accompagné de cris. Maîtresse M avais attaché une personne travestie a une toile d'araignée en chaînes et qui la fouettais en l'insultant de salope et de connasse. On observe plus ou moins et F elle stressais beaucoup, alors je l'ai prise par la main un petit moment en passant mes doigts entre les siens pour essayer de la rassurer. Après un petit moment, on remonte puis l'on vas dans le grenier, avec de la chance, une personne était avec nous sur la croix de saint André et se prépare à partir, alors nous on se prépare, on enlève nos corsets, on se dénude pour Maître. La première a passer c'est A, elle se fait fouetter un peu au dessus de ses vêtements, ne pouvant pas enlever son body blanc car elle a ses règles et elle n'a pas écouté L, se retrouvant avec l'entrejambe taché de sang. S'en suit de F, qui avais peur des martinets. Avec L on regarde, et on ressent ce qui se dégage du moment entre F et Maître, avec L qui fait des petits commentaires sur ce qui se passe, que F se sent en confiance et bien, c'était un beau moment. Je pensais que ça allais être au tour de L mais elle en a décidé autrement... Je defais lentement mon corset avec le stress qui monte. Pendant la soirée, Maître jouais avec son fouet et ça faisais quand même assez peur, le son que ça provoquait et la vitesse c'était flippant, et les marques sur F également. je garde ma jupette mais je me retrouve la poitrine a l'air. Il m'ordonne de me pencher sur le chevalet ce que je fais puis le stress continue de monter. Je tourne ma tête doucement puis je vois qu'il prends le paddle. Il commence les coups sur le dos, puis sur les fesses. Ma peau commence à se réchauffer, la douleur a augmenter et je commence à vraiment avoir très mal. Maître me dit de me détendre pour que je puisse avoir moins mal, plus simple a dire qu'à faire, mais j'essaie tout simplement de me concentrer sur ma respiration et a ma position, venant même fermer les yeux, cela fonctionne et ça m'apaise légèrement. Il continue de me faire chauffer le dos avec la paddle et cela viens même a me brûler. Après une bonne cinquantaine de coups de paddle, il passe a son martinet spécial pour continuer de faire chauffer mon dos, il est plus simple a encaisser que la paddle, mais aussi je suis bien plus apaisée et détendue qu'avec le martinet. Il me donne une bonne vingtaine de coups de martinets puis il passe au clou du spectacle. Je l'entends marcher et fouiller dans le sac de jeu, je reste en position, je reste concentrée. J'entends ses pas revenirs vers moi, puis le fouet claque a ma droite, puis a ma gauche, puis au dessus de moi, et finallement, dernière moi. Il prends ses marques et continue ses coups de repérage jusqu'à me toucher les premières fois. Les premiers coups sont assez simples a encaisser comme ils me frôlent a peine, mais dès que ça touche bien, c'est plus compliqué... Des gros coups de jus, c'est la sensation que chaque coups me fait. Une grosse douleur me prends a chaque coups et la concentration et la détente deviens impossible et donc je me contracte, ce qui fait que la douleurs augmente. Les coups deviennent plus forts, ma peau brûle, la douleurs deviens insoutenable et je me met à pleurer a la fin de la séance. Maître viens caresser mon dos, et il me regarde, me disant que c'est fini. Je me retourne doucement, je vais voir F et je tombe a genoux face a elle puis elle me fait un câlin. La douleur s'estompe rapidement, les larmes arrêtent de couler, je me calme doucement et puis j'écoute L qui viens vers F et moi. Elle dit qu'elle est fière, car j'ai réussi à tenir jusqu'à ce que Maître a décidé que ce soit fini pour ma première fois, que j'ai réussi à encaisser tout cela pour ma première fois. On prends du temps, pour discuter et on regarde une autre personne qui se prends des coups de fouets, j'en profite pour discuter et me relaxer. Maître n'a pas pu jouer avec L car son poignet avait trop travaillé alors on se met a ranger les affaires dans le sac de jeu puis on se prépare au départ. On continue de discuter, on discute de nos marques que l'on auras demain, l'on parle de ce qui s'est passé, on partage ce que l'on a ressenti en rangeant tout. Pour la suite il ne s'est pas passé grand chose.
Le lendemain, les marques étaient bien plus visibles, et surtout une grosse sur la fesse gauche qui vas durer, et finallement j'ai adoré cette soirée, ces moments avec mes soeurs et Maître.
Lorsque je suis rentrée dimanche soir, j'étais vraiment euphorique pendant une petite heure, a me remémorer de tout, je souriais un peu bêtement, je rigolais sans raison, j'étais très heureuse, heureuse d'être la soumise de Maître, heureuse d'avoir passé du temps dans ce donjon.
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Léa était une jeune cadre dynamique d’une entreprise de conseil de La Défense. Elle était sortie de la fac de droit il y a deux ans maintenant et travaillait désormais dans le service juridique d’une firme possédant une des plus hautes tours du quartier. Son bureau était au 45e étage, bien loin des préoccupations de ceux qui marchaient au sol. Elle ne les côtoyait d’ailleurs pas. Chaque matin, elle garait sa voiture au parking situé au sous sol et montait directement par l’ascenseur jusqu’à l’open space qui lui servait de bureau. Elle avait beau avoir ce qu’on appelait “une place en or”, elle regrettait l’époque où elle pouvait sortir avec ses amies après la fac. À cette époque elle couchait avec de nombreux garçons, bien qu’aucun ne lui avait vraiment apporté de réelle satisfaction. Elle avait même essayé quelques filles, même certaines de ses amies proches, mais le constat restait le même. Mais enfin à l’époque au moins elle expérimentait.
Ce soir, comme chaque soir, elle sortit à 20h, prit sa voiture et rentra dans son appartement de Nanterre, spacieux certes mais “loin de tout”, comme lui avait dit son amie Nathalie avant de l’acheter. Comme à son habitude, elle sortit des lasagnes Picard de leur carton et les plaça dans le micro-onde. Elle s’alluma alors Netflix et se lança un episode d’une série qu’on lui avait recommandé. Elle mangea son plat devant le premier episode qui ne la séduisit que moyennement. Le second épisode n’était pas plus entrainant mais une scène légèrement érotique apparaissait à la 20e minute. Elle profita de ce rare moment pour passer sa main dans son pantalon et en ouvrir le bouton. Avant que la série ne passe à une autre scène, elle fit pause sur une magnifique image de cheveux tirés. Ses doigts s’activaient de plus en plus vite, de plus en plus sensuellement. Elle descendit son pantalon jusqu’a chevilles et alla chercher le vibro dans la commode de sa chambre, elle s’alluma et continua ce doux moment dans son lit. Après 20 minutes d’intense plaisir elle jouit une première fois, explosive. Elle chercha le deuxième mais la fatigue de la journée la contraint à arrêter et à aller se coucher.
Se toucher était devenu une habitude quotidienne pour Léa. Cependant l’aspect répétitif l’avait poussé à innover et depuis quelques semaines elle se filmait régulièrement en le faisant. Elle imaginait qu’on la regardait et cela l’excitait. Elle ne regardait que très rarement les vidéos mais elles étaient toutes archivées dans un fichier de son iPhone protégé par un mot de passe. Elle se disait souvent qu’elle aimerait que quelqu’un d’autre ne la filme mais elle avait trop peur pour son image et ses rares plans tinder ne lui avait pas donné le courage de demander.
Le lendemain, sur le chemin de son bureau, elle s’arrêta chez Starbucks. Ce n’était pas dans son habitude mais le café de la machine était vraiment imbuvable et tenir la matinée sans café lui semblait insurmontable. Habillée d’un grand manteau beige et d’un pantalon taille haute elle s’approcha du comptoir et commanda son café
-Un Venti sans sucre et sans crème s’il vous plait, dit elle, sans savoir si elle devait tutoyer ou vouvoyer ce vendeur qui lui semblait bien avoir son age.
Quelques instants d’attente plus tard, un “Léa” se fit entendre, son café était prêt.
Elle alla le chercher, le saisit et, en se retournant, bouscula un jeune homme en manteau noir, lui renversant du café dessus.
-Oh je suis désolé monsieur, dit elle désolée, sortant un mouchoir de son sac
-Ah bah bravo jeune fille, répondit-il sèchement alors qu’une fois encore
Léa comprenait l’agacement de l’homme mais lorsqu’elle releva les yeux, elle vit l’homme, qui devait également avoir le même âge qu’elle à quelque chose prêt, sourire en coin. Elle compris alors que l’homme avait utilisé un ton humoristique.
Toujours avec un large sourire, il dit:
-Soit tu me paies la teinturerie, ou un verre ce soir.
Puis il accompagna cela d’un clin d’oeil.
Léa tenta de s’échapper malgré le charme évident du garçon aux cheveux mi-longs:
-C’est que euh, je termine tard le soir, bredouilla-t-elle.
-Quand on veut on peut, répondit-il, rendez vous au bar du plaza athénée à 18h, je compte sur toi, et mon manteau aussi…
Sur ces mots, il lui embrassa la main et tourna les talons avec un grand sourire.
Toute la journée, cette interaction la perturbait, devait-elle y aller? Certes elle lui devait quelque chose et le boulot était plus une excuse qu’autre chose mais tout de même, elle ne le connaissait pas. A 17h, elle décida que le fait que ce soit en bar ne la faisait pas courir beaucoup de risque et qu’elle irait simplement pour lui payer le teinturier puis repartirait. Elle quitta donc son bureau en douce prétextant une fatigue et monta dans sa voiture. Waze lui prévoyait une heure pour aller dans le centre de Paris, évidemment, à 17h30… Elle abandonna l’idée de la voiture et pris le métro.
A 18h10, elle arriva enfin devant l’hotel et se dirige vers le bar. Du haut de ses talons, on l’entendait arriver. Elle ne se sentait pas dépayser dans un hotel de ce style mais le fait d’aller à un rendez vous dans un endroit comme celui ci lui faisait un sentiment étrange. Elle vit l’homme, le salua et lui proposa de payer le teinturier.
-Voila 15 minutes que je t’attends, non seulement tu me dois un verre mais maintenant tu m’en dois au moins deux en lui prenant son manteau et en la poussant doucement vers le fauteuil.
Le charme et la galanterie du jeune homme eurent raison de son plan initial. Elle s’assit et tenta d’apprécier la musique jazz provenant du piano.
-Gaspard Du Daguet, enchanté, dit-il
-Euh Léa Malroit, répondit comme en hésitant Léa.
Gaspard lance alors la conversation sur la beauté des moulures et deux cocktails plus tard, la conversation était maintenant equitable. Souvenirs d’enfance, études, rêves, la conversation variait sans cesse mais elle n’en était pas moins passionnante. Léa s’aperçut vers 23h qu’elle se confiait un peu trop à un inconnu et savait de dates précédents que c’était rarement bon signe. Elle proposa alors dans l’objectif de changer de sujet et d’arrêter ce déroulé de sa vie:
-Tu veux venir chez moi prendre un verre Gaspard ?
Gaspard hésita et répondit:
-Non cela ne va pas être possible, j’en suis désolé, j’ai à faire ce soir.
Il se leva alors et la raccompagna vers la sortie, lui refit un baise main, lui dit un “à très bientôt” et parti
Alors qu’il s’éloignait, Léa réalisa qu’il n’avait aucun moyen de la contacter, encore un qu’elle avait fait fuir… Elle rentra alors en RER chez elle, se toucha comme à son habitude et s’endormit frustré d’un énième échec sentimental.
La nuit passa avec son lot de rêve et le réveil sonna à 7h comme à son habitude. La tête endolorie, elle se leva, se maquilla, et elle s’approcha de son dressing. Elle ouvrit le tiroir des sous-vêtements mais impossible de trouver une culotte, elles devaient toutes être au sales. Elle se dirigea alors vers le panier, rien. Dans la machine, rien. Elle ne comprenait décidément pas. Elle se dit qu’elle allait s’en passer pour aujourd’hui et se dirigea vers la pile de pantalon qui avait également disparu. Elle ne se souvenait pas avoir fait de rangement et se dit que sa femme de ménage avait du les ranger autre part. Elle n’avait pas le temps de trouver où cette incapable les avait mit. Elle saisit un tailleur jupe et enfila le bas, puis le haut, un petit manteau noir, un coup de rouge à lèvre et sortit. Une fois dehors, elle se rappela que sa voiture était toujours à La Défense… Elle s’apprêtait à appeler un taxi quand un passa juste devant. Elle monta dedans:
-Tour Ivoire, La Défense s’il vous plait.
Le chauffeur verrouilla les portes et démarra. Fatiguée, Léa terminait les dernières retouches de maquillage sur ses yeux. Au bout de 10 minutes de route, le taxi s’arrêta, ils n’étaient pas devant son travail. Elle s’apprêtait à engeuler le chauffeur pour son incompétence quand sa porte s’ouvrit, dernière se trouvait Gaspard dans un costume noire obsidienne qui lui tendait la main.
-Qu’est ce que tu fais là, c’est toi qui a demandé au taxi de m’amener ici, dit elle visiblement énervée, qu’est ce que tu crois, j’ai un boulot, je peux pas le rater, je vais me faire virer
-J’ai appelé, répondit Gaspard d’un calme absolu, tu seras en retard, c’est cohérent avec ta fatigue d’hier
-Non mai…, commença Léa
-Silence, suit moi, tu ne le regretteras pas.
Il la prit par la main et la tira assez énergiquement vers le resto juste devant. Il la fit s’assoir sur une banquette, prit une chaise et s’assit dessus à l’envers, le dossier vers Léa. Il sortit son téléphone, le pencha à l’oreille de Léa et appuya sur play.
Soudain, des gémissements furent emit sur le haut parleur, c’était la voix de Léa. Horrifiée, elle regarda le téléphone, c’était elle. C’était une vidéo d’une de ses jouissances.
-Quoi mais comment as tu pu av…, commença t-elle
-Je les ai toutes, l’interrompit-il, écoute moi bien attentivement, je ne veux pas te nuire donc je te propose un marché. Tu peux aller travailler aujourd’hui, ce soir, tu rentreras, tu mettras le contenu de ce paquet -lui tendant un paquet blanc- tu te mettras à genoux face à la porte tu laissera la porte entre-ouverte. Tu m’accordes une soirée et j’efface tout, une simple soirée tous les deux contre le fait que tout tes collègues et amis voient ces vidéos, c’est équitable
Elle hésita quelques instants et dit:
-Une seule soirée et tu effaces?
-Exactement, dit-il
-D’accord…, répondit-elle à contre-coeur
-Tu vois que tu ne pouvais pas refuser, dit-il avec un sourire
Ils sortirent du restaurant, il lui ouvrit la porte du taxi.
-A ce soir dans ce cas, dit-il, attention aux courants d’air…, rajouta t-il avec un sourire
Se pouvait-il qu’il sache pour son entrejambe dénudé, comment était-ce possible… Pouvait-il être la cause de tout ca… Et ces pensées la poursuivirent durant tout le chemin du taxi et durant l’entièreté de la journée de travail. Même son habituelle pause série du midi ne lui permit pas de se changer les idées.
17h, il lui fallait partir avec le paquet pour ne pas etre en retard. Elle monta dans sa voiture, et avant de démarrer, elle ouvrir le paquet et regarda rapidement, de la lingerie fine, “pas étonnant”, se dit-elle. Il y avait aussi des lanières de cuire rembourrées. Elle se dit qu’elle trouverait la fonction chez elle. Elle démarra pensive.
Arrivée chez elle elle étala le contenu du paquet, un justaucorps en dentelle noir, des jarretelles, un grand morceau de cuire avec un anneau et deux plus petits avec des demi-anneaux. Il y avait également un plug anal. Elle en avait utilisé un une fois donc elle le reconnaissait. Une petite etiquette y pendait “tout doit etre mit ;)” y était inscrit en écriture noire. Elle mit les jarretelles et le porte jarretelle, elle eu quelques difficultés mais réussit, puis elle mit le justaucorps, une fois ajusté, elle s’aperçut qu’elle avait oublié le plug, elle enleva tout et remit le plug avec un peu de lubrifiant et remit le justaucorps. Désormais elle ne pouvait plus l’enlever rapidement et le justaucorps, assez serré malgré la dentelle, poussait dessus. Après quelques minutes elle plaça la longue lanière de cuir autour de son cou, bien que ca ne tienne pas bien et les deux lanières plus petites autour de ses poignets.
Elle entrouvra la porte et se plaça à genoux, il ne lui avait pas donné d’heure… Elle entendit comme cela une heure avant que la porte s’ouvre. Elle sauta, ca pouvait etre n’importe qui! Mais non ouf, c’était lui. “Ouf?” pensa t-elle, “non pas ouf, tu ne le connais pas enfin, qu’est ce que tu fais”, continua la voix dans sa tête.
Un “bravo” vint interrompre ses pensées. Il enleva son manteau, passa à coté d’elle, lui caressa les cheveux. Il émit un léger rire, se baissa derrière elle et alors qu’elle sentit un souffle chaud sur sa nuque, il enleva la lanière de cuire sur son cou;
-C’est pas un collier ça ma belle, dit il en plaçant l’anneau devant sa bouche, c’est pour que je n’entende pas ta voix ce soir, continua t-il en fermant fermement le baillon autour de sa tête.
Léa fut surprise mais extrêmement excitée… L’idée qu’elle n’aurait pas du accepté était au premier plan de ses pensées, mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’être excitée d’être aussi impuissante…
Il saisit les deux anneaux des poignées et leva les deux mains de Léa en l’air. Il passa un mousqueton entre les deux et y attacha une chaine.
-Debout, dit-il fermement
Il se plaça alors face à elle et dit:
-Maintenant après une journée de travail, tu vas me laver, et il prit la chaine et emmena Léa enchainée jusqu’à la salle de bain de cette dernière.
La marche était compliquée par le plug mais elle parvenait à suivre cette homme qui avait désormais tout contrôle sur elle, y compris son droit à la parole. Comment savait-il où était la salle de bain? Se demanda t-elle? Mais il semblait savoir, il ouvrir une porte, fit entrer la jeune fille, s’y engouffra également, et dit d’un ton ferme:
-Déshabille moi
Ce qu’elle redoutait allait arriver, elle allait être abusée… Effrayée mais excitée, elle enleva la chemise du jeune homme, tache qui fut compliqué par les mains attachées. Elle enleva ensuite la ceinture, ce pour quoi elle eu besoin de l’aide de son ravisseur, puis son pantalon. Il n’y avait plus que son caleçon. Elle passa les mains, puis descendit tout doucement. Son penis sortit du caleçon, il était dur comme un roc. Elle se demandait s’il elle devait être flattée ou effrayée.
Sur ces pensées qui ralentirent son action, elle senti Baptiste la saisir par les cheveux et lui dire:
-Ou tu te dépêches, ou je remplace le plug par autre chose, et ca risque de ne pas être confortable.
Prise de panique, elle s’activa. Il était maintenant nu et elle habillée comme une prostitué, ou une esclave…, se dit-elle
Malgré la situation, son ravisseur était très bel homme. Et lorsqu’elle du le laver à l’éponge, elle sentait ses muscles sous le savon. L’anneau qui maintenait sa bouche ouverte lui rappelait à chaque instant son trou du cul également ouvert de force et pensait que le seul trou qu’elle lui aurait offert la veille semblait être le seul auquel il ne s’intéressait pas.
Mais elle se trompait. Aussitôt la douche terminé, encore mouillé, il sorti de la cabine à l’italienne et attacha la chaine et donc les mains de Léa en hauteur. Il descendit alors doucement et passa sa langue dans sa fente, à travers le justaucorps. Lentement il tourna en rond avec de petits cercles, passant entre les grandes et petites lèvres. Soudain, il mordit le justaucorps et en arracha un bout qui lui permettait d’avoir un accès total. Il continua et s’arrêta sur le bouton. Il le titilla, il sentait la mouille couler. Il accéléra, elle gémissait et soudain il s’arrêta. Il reproduisit le scénarios de nombreuses fois, s’arrêtant à la limite de la jouissance une dizaine de fois. Mais à la onzième, il s’arrêta pour de bon. Frustrée, Léa ne comprenait pas. Il sorti de la salle de bain quelques instants et revint avec une ceinture de chasteté petit format. Il dégagea les restes du justaucorps et fixa la ceinture. Il y attacha un cadenas qu’il verrouilla.
-Ce cadenas s’ouvrira dans un mois, c’est comme cela que je l’ai programmé, dit-il, sauf si j’utilise cette clé, rajouta t-il avec un sourire en montrant la clé pendant à son cou.
Avant de libérer Léa, il la regarda droit dans les yeux et dit:
-Je dois y aller, demain tu laisseras à nouveau la porte d’entrée ouverte, si elle est fermée je n’insisterai pas et je considérerai que ta nouvelle chasteté te convient bien, si elle est ouverte, il n’y aura plus de demi-tour, je ferai de toi ce que j’ai envie…
Puis il prit son téléphone et supprima devant elle toutes les vidéos
-Le choix est le tien, ajouta il en enlevant la chaine et le mousqueton des menottes.
Léa s’effondrât sur le sol de la salle de bain en silence, toujours bâillonnée, pleine de sueur, de mouille, et de bave coulant de son anneau buccal. Mais elle était surtout frustrée comme elle ne l’avait jamais été. La dernière vision qu’elle eu de la journée était celle du corps à peine rhabillé de Baptiste sortir de son appartement.
Voici le premier chapitre de l'histoire de Léa, si vous voulez une suite, faites le moi savoir en commentaire
Un récit par Monsieur N.
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"J'ai toujours cherché à réduire au minimum mes décisions subjectives et mon intervention artisanale pour laisser agir librement mes systèmes simples, évidents et de préférence absurdes. On a beaucoup ergoté à propos de mon changement de cap. Mais je m'en moque. Anne retourne à la peinture. C'est faux. J'y arrive a peine. On a une page blanche devant soi, on se trouve exactement devant la même situation qu'au Moyen Âge. Rien n'a changé". Anne Slacik est une artiste peintre, née à Narbonne en 1959. Après des études en arts plastiques à l'université de Provence, puis à l'université de Paris I, elle obtient alors un diplôme de troisième cycle et une agrégation d'arts plastiques en 1984 et enseigne les arts plastiques de 1982 à 1990. La couleur est au cœur de son cheminement, utilisée dans sa fluidité sur de grands formats, peinte sur les livres et les manuscrits, comme un va-et-vient possible entre la peinture et le livre, entre la peinture et la poésie. Son œuvre se présente souvent à travers des séries de toiles dont les titres font référence à des lieux (L'Agdal, Assise, À Saint-Denis), à des poètes ("À PaulCelan", référence à André du Bouchet) ou à des peintres. Son travail trouve très souvent des racines dans la peinture contemporaine (Rothko) mais aussi de la Renaissance (Piero della Francesca). En plus de son œuvre de peintre, elle réalise de nombreux livres d'artistes, livres illustrés et livres peints. Elle travaille avec des auteurs comme Michel Butor, Kenneth White, Bernard Noël, Alain Freixe, Joseph Guglielmi, Jean-Pierre Faye, Tita Reut, Pierre Sansot, ou Bernard Chambaz. Anne Slacik s’exprime dans le glissement poétique de ses tableaux, mais aussi en lithographie et également en illustrant les livres de poèmes d’auteurs. Dans sa peinture coule une certaine lumière diaphane, des témoignages végétaux qui s’estompent au plus profond de nous, des reflets dont les racines remontent au fond du temps, des empreintes du jadis et du présent. La belle insomnie des arbres est là. La buée des jours aussi. Il monte une tendresse de brume de ses tableaux. La pente douce et nostalgique des sentiments sourd doucement. Il monte de ces images des signaux conjurant le vide, l’oubli se perd dans l’origine notre mémoire n’a plus peur de mourir. Le temps est en points de suspension, tout ne fait qu’affleurer en passant par les interstices des choses. Au creux intime des frémissements, dans l’haleine du fugace. De la rosée semble tomber goutte à goutte de ces tableaux. Liquides sont les arbres. Et ces bleus qui marquent les nocturnes au sceau des océans, ces pourpres traînées de couchants d’autres étoiles. On fait silence en les regardant. On sait que l’on est sur l’autre rive.
"Les yeux sont faits pour effacer ce qui est laid. Le rôle social du peintre ? Montrer la beauté du monde pour inciter les hommes à le protéger et éviter qu'il ne se défasse". La peinture d’Anne Slacik est une peinture du fragile. Le flux des mots s’arrête. La volonté, par cette suspension, cherche à provoquer la langue pour en tirer la précipitation d’une formule juste, celle qui, plus rapide que le travail de la conscience, établira soudain l’unité entre regard et bouche. Si la suspension se prolonge, elle creuse au contraire la différence avec le regard, quant à lui au même instant comblé par ce qui l’occupe, et qui est un tableau. Derrière la contemplation, d’abord plus que suffisante, quelque chose s’active qui va donc la troubler en désirant la parfaire avec du langage. La contemplation est ainsi empêchée de s’établir dans la durée par un appétit qu’elle semble générer, mais qui rivalise aussitôt avec elle en portant du côté de la langue ce qu’elle satisfaisait jusque-là. Chacun a éprouvé cette tension capable d’aller au déchirement, et qui vous jette dans le mouvement d’une nomination impossible, alors que le face à face était complet. Ce basculement est paradoxal. Il rompt l’unité liée au plaisir visuel afin de l’intensifier par son redoublement verbal, et il ne réussit, au mieux, qu’à nous faire glisser de la contemplation vers la connaissance. Ce passage pourrait correspondre à un besoin quand l’objet du regard présente un obstacle ou bien quelque partie exigeant un déchiffrement, mais pourquoi céder à sa tentation devant un tableau d’Anne Slacik dont le caractère immédiat est d’entraîner nos yeux dans une traversée qui peut durer ? Il est rare que l’espace nous soit communiqué dans un état aussi pur, c’est-à-dire aussi proche que possible de sa fluidité. Le tableau d’Anne Slacik l’accueille telle qu’en elle-même ou presque, dans la mesure où il ne lui impose qu’une seule forme, la sienne, et qui intervient dès lors comme une simple découpe, en vérité le contenant indispensable au prélèvement révélateur. Voir est si facile ! On en oublie qu’il s’agit d’un acte, à moins qu’une chose ou une autre n’en réveille l’action dans nos yeux. Ces tableaux, qui sont des dépôts et non pas des compositions, naissent d’un bizarre combat où la matière, la surface et le temps s’affrontent, puis s’équilibrent et s’harmonisent. Le regard aperçoit des traces de mouvements plutôt que des formes, et il se laisse tout naturellement emporter dans leur sens, qui n’est pas de la signification, mais du courant.
"Faire la bonne chose, au bon endroit, au bon moment, tout l'art est là. Le tableau qu'il soit à l'huile, à l'eau, qu'il soit fait d'étoffes, de ciment ou de la boue des chemins, n'a qu'une seule signification: la qualité de celui qui l'a crée et la poésie qu'il porte en lui". C’est alors, et dans le plaisir même de ce mouvement, que la perception de la fluidité ambiante vient, qui ravit, puis étonne, puis met en tête un dérangeant: qu’est-ce que c’est ? Pour une fois la question, ici, ne se fatigue pas parmi les ressemblances. Elle tourne sur elle-même et capote en constatant qu’il n’y a rien à quoi se raccrocher, et que c’est littéralement vrai pour la raison qu’à scruter la toile l’œil n’y découvre que de l’élément. Certes, cet élément est bien de la couleur, mais dont il est tentant de dire qu’elle fait surface, et tentant de penser qu’elle a par conséquent un fond qui s’offre et se dérobe par le jeu de sa limpidité. Ensuite, la contemplation peut reprendre dès que le regard s’en va au milieu des nuances et se laisse couler dans l’espace qu’elles paraissent moduler : traverse-t-il ce qui est pourtant sans épaisseur ou bien y développe-t-il sa propre dimension ? La peinture, celle-ci du moins, est une matière si sensible au contact du regard qu’elle se déstabilise, ou paraît le faire, afin de répandre son énergie à travers ce qui le touche, et qu’en retour elle pénètre. L’absence d’image passe pour le signal d’une œuvre abstraite. Ce n’est plus vrai, mais comment qualifier des tableaux qui ne sont ni imagés ni abstraits ? On sent que ces tableaux-là, ceux d’Anne Slacik, n’affichent une visibilité aussi peu formelle que pour en tourner la transparence en direction d’un en-deçà ou d’un en-dessous dont leur surface est la concrétion. Les yeux raniment-ils cette concrétion ou bien est-il dans sa nature d’être toujours en train d’advenir ? La contemplation l’épouse si étroitement qu’elle n’en est pas distincte jusqu’à ce qu’elle soit traversée par lecourant vif qui s’interroge en elle. La toile est du lin brut, sans apprêt. Les couleurs sont des pigments mêlés à un liant acrylique. Ainsi la terre redevient-elle une pâte primitive, qui doit sa consistance à un matériau du présent. La toile est toujours étendue sur le parquet. Cette position confirme qu’au commencement elle n’est qu’une surface, telle est sa nature et aussi sa fonction. La couleur est répandue, puis lavée à grande eau. Répandue encore et relavée. Les gestes les plus visibles sont le dépôt, la secousse. Le premier crée le territoire. Le second fait couler l’élément qu’on dit indispensable à la vie. Le troisième déclenche des mouvements sismiques dans ce qui n’est déjà plus une toile parce que la territorialité y domine. Quant à la peintre, qui surveille les tremblements qu’elle déclenche tout en pataugeant dans l’après-déluge, la voici devenue l’incarnation de la vieille verticale humaine debout au milieu des tourmentes. Puis tout s’apaise. Le premier matin succède à la séparation de la terre et des eaux tant et si bien qu’on n’en voit plus alors que la fraîche lumière.
"Tout est permis, tout est possible, pourvu que derrière le tableau un homme apparaisse, tel qu'il est, nu, comme la vie". Puis, c’est du sol qui est là, et qui présente aux yeux une peau très crue, déjà ridée par l’action de l’eau. On comprend que le temps a fait son entrée. Désormais, un avenir est en travail sur la toile, mais il faut d’abord qu’elle sèche. Ensuite, elle sera mise debout pour la raison que le regard n’envisage bien les choses qu’en les redressant pour leur faire face. Et d’ailleurs, n’est-ce pas le destin final des toiles que d’être mises au mur ? Il vaut donc mieux les voir dans la position qui est leur futur pour juger de leur présent. Ce passage de l’horizontal au vertical est l’épreuve décisive. Elle révèle parfois que rien n’a eu lieu. Elle peut également indiquer que c’est fini ou bien qu’il reste à faire. Mais ce reste-là exige un retour au parquet et la violence recommencée des éléments. Un peu comme si le premier jour demeurait parfois dans l’attente d’une partie de lui-même, à moins que la nuit ne l’ait déjà obscurci et qu’il faille le laver de ses ténèbres. Un peu de rouge tremble là-bas. Une lueur. On le fixe pour goûter sa nuance et le voisinage aussitôt bouge, s’approfondit. Il n’y a pas la moindre perspective, la moindre ouverture, le moindre creusement, cependant il y a. On aperçoit des stries, des strates. Elles sont là comme étaient autrefois les touches, sauf qu’elles en sont le contraire, tout le contraire d’une élaboration laborieuse prenant le soin d’effacer son labeur. Ici, l’élément coloré a travaillé puis son travail a pris la forme de ces dépôts que signalent des sillons, des nappes plus sombres ou plus claires. Quelque chose rougeoie là-dessous commes’il y avait sous le sol un contre-ciel. Cela n’est pas homogène, pas même dans les parties qui paraissent monochromes, pas du tout homogène, mais tendu. Où peut bien se tenir le foyer de cette tension dans une étendue qui ne cache rien ? Le regard parcourt des trouées, des coulures, des masses, des cicatrices. Il s’arrête sur de minuscules granulations. Des grains de sable ont été mêlés aux pigments. Un sable fin qui provoque d’infimes réverbérations et, par elles, de presque imperceptibles mouvements à l’intérieur des couleurs. L’attention s’accroche un instant à ce phénomène, qui la fatigue, et s’aperçoit qu’il favorise une sorte de dilution lumineuse ayant pour conséquence une fine interprétation des couleurs.
"Je peins des choses. Je serais incapable de peindre des idées. Il faut alors voir la peinture abstraite comme on écoute la musique, sentir l'intériorité émotionnelle de l'œuvre sans lui chercher une identification avec une représentation figurative quelconque". Ici, par exemple, où était indéniablement du vert, voici que domine soudain du rouge. Un doute fait cligner les paupières, et le vert remonte, puis, en quelques secondes, change encore de peau sous l’effet d’une fine sueur rouge. Peut-être la peinture doit-elle un peu de son pouvoir à cette capacité d’échange ou de réciprocité qui lui permet de changer le regard en le peignant des couleurs qu’il croit contempler. Et inconsciemment peint, le regard deviendrait le réceptacle d’une énergie, dont il ne sait jamais ce qu’elle lui transmet. Verre ou plastique, une grande partie du matériel peut se dénommer “pots”. C’est donc dans un pot que sont versés du cadmium rouge, de l’eau et du liant (une crème blanche tirée d’un seau en plastique blanc). Versés puis touillés longuement. Le résultat, surface couverte de bulles, est une crème à la framboise. Du noir de vigne et du rouge indien sont préparés de la même façon."– Je vais mettre du jaune pour le rendre un peu plus orangé". La chose est faite et touillée comme il faut. Cinq ou six pots sont à présent alignés, prêts à l’emploi, chacun avec sa couleur devenue crémeuse. "Je n’ai jamais voulu, dit Anne, peindre des monochromes, je cherche à faire une surface qui soit à la fois une profondeur". La main reste en suspens un instant, comme si elle attendait que la bouche descende en elle, puis saisissant un pinceau qui trempait à l’écart dans un pot de verre, elle s’en arme, en soulève la touffe dégoulinante. "- Pour commencer, j’utilise plutôt des jus, et d’ordinaire le liquide dans lequel mes pinceaux restent à tremper". Le dit pinceau est roulé à la surface, et il laisse là une grande flaque rosâtre, qui demeure aqueuse et lumineuse. De près, cela est plein de particules en suspension. De loin, c’est brillant bien que piqueté de points ternes. Une nouvelle flaque vient flanquer la première. Le geste n’est pas un geste de peintre, avec bras tendu et pinceau tenu dans le prolongement. C’est un élan qui se casse en touchant la surface et, vite, y dépose un chargement de matière, comme si le mouvement était, non pas soucieux d’exactitude, mais de préservation de la fluidité. L'artiste plasticienne est une vraie virtuose de l'équilibre.
"Ce qui est important, ce n'est donc pas de voir l'abstrait, c'est de le sentir. Si une musique me touche, m'émeut, alors j'ai compris quelque chose, j'ai reçu quelque chose. Dans ce que je considère comme l'évolution naturelle j'ai surtout apprécié la théorie surréaliste de la libération du subconscient. L'abstrait c'est la libération de tout conditionnement extérieur, c'est l'aboutissement d'un processus de création individuelle, de développement personnel dont les formes n'appartiennent qu'à moi-même". "– Qu’as-tu en tête en commençant à peindre ? – C’est à chaque fois une histoire différente: une fois la lumière du matin et son allégresse, une autre fois la couleur d’une fleur, une autre encore le souvenir d’un détail coloré que l’évocation amplifie, mais derrière chacune de ces histoires, il y a toujours le plaisir de peindre, il prend rapidement toute la place. Souvent, quand je me mets au travail, j’ai seulement des désirs de couleurs, et ce sont eux qui me suggèrent des choses, des mouvements. Écouter est rassurant: on croirait que le comment et le pourquoi se diluent dans la surface, et qu’en conséquence le regard est doté d’une plus grande liberté". Jour de papier. Beaucoup de pots. Trois tables. Des journaux ouverts dessus pour servir d’éponge. D’autres étalés sur le vieux dallage pour y remplir la même fonction. Cadmium pourpre et liant touillés ensemble. Versement d’eau dans bassine rouge. Une feuille d’Arches est alors tirée du paquet de ses semblables et bien à plat posée sur l’une des tables. Aussitôt la voici enduite d’eau avec un pinceau si large qu’on dirait une raclette, et presque dans le même mouvement splashée d’un jus rouge. Ensuite, vite, une brosse à long manche dépose là-dessus un pourpre dont les deux grosses taches se répandent. Un peu de noir, un peu de jaune en bloquent l’expansion, puis adviennent des mélanges sur les lisières, et des coulures. En fait, ça vit dans l’épaisseur liquide, avec des allongements par-ci, des contractions par-là, des éclaircies un peu partout, des plis et des replis. Une nouvelle feuille est mise en route avec enduit d’eau, jus rouge encore, et cette fois une grande flaque jaune environnée de trois noires auxquelles, après hésitation, s’ajoutent une rose, un violet foncé. Un débordement est épongé cependant que le jaune coule, devient un fleuve charriant des particules noires. Deux coups de pinceau apportent du bleu et du brun, mais le jaune continue à progresser, envahit les couleurs voisines, accentue l’informe, l’amibien, le vivant. Sur la première feuille, le rouge est en train de s’ourler de mauve; sur la seconde, le jaune se stabilise et communique au brun et au bleu un velouté très sensuel. Mais une troisième a reçu eau et jus, et la voilà balafrée d’une bande jaune horizontale, frappée de brun au-dessus et au-dessous. Anne contemple un instant ce chantier, tête inclinée vers lui.
"J'assimilerai cette démarche a l'improvisation musicale: quand je fais du piano pendant plusieurs heures, il m'arrive d'improviser en fonction d'un état psychologique précis. En peinture quand je prends une brosse ou un pinceau, une mécanique de création se déclenche et ma main vient porter un signe, préciser une forme, qui dépend de mon état intérieur. C'est une improvisation, une création spontanée". Un plastique à bulles craque sous ses pieds. La bande jaune ondule comme la peau du sable dans le désert. Les bords de la feuille sont saisis à deux mains, et toute la surface penchée lentement pour que les forces au travail sur elle y soient traitées comme les traite la nature quand elle tremble et secoue. La feuille reposée découvre alors maintenant des granulations lumineuses par l’effet de la transparence qui éclaire les pores du papier. Un geste brusque jette du violet à côté du brun, et l’on dirait qu’un fleurissement subit s’empare de l’ensemble. C’est un élan qui vient du fond de la couleur, un élan qui la fait paraître profonde alors même qu’elle étale sa minceur évidente. Le regard s’avance dans cette contradiction, et il la résout dans le plaisir de voir. Comment alors dire l’informe ? Il est la trace de son existence en même temps que sa propre existence. Constat qui semble une profération absconse. La raison en est simple: l’informe n’existe pas dans la langue autrement que sous son nom. Il est en quelque sorte emprisonné dans ce nom, lui qui vit, qui bouge, qui engendre, qui se répand, se contorsionne. On le voit de plus en plus à l’œuvre dans la peinture, non pas celle, déjà classée qui, sous l’étiquette de “informelle”, combinait la tache, l’automatisme, qui se caractérise par l’importance du geste, mais celle en train de se faire et dont l’œuvre d’Anne Slacik est devenue représentative depuis 1995. Cette peinture emploie le tableau et la couleur, mais elle n’en passe alors ni par la composition ni par les postures traditionnelles. On pourrait dire qu’elle est faite avec tout le corps. Le bras fut le médium le long duquel circulaient aussi bien la pensée que le savoir faire. Il n’est plus cet intermédiaire dont le rôle s’épanouissait dans la main. Il ne dessine plus, ne peint plus, ne drippe plus, il transporte, touille, dépose, soulève, secoue, redresse, mais il ne le fait pas seul, ou très rarement, car son activité reste inséparable de l’épaule, du buste, bref du corps en son entier. La conséquence de cette implication de la plasticienne va beaucoup plus loin que l’apparence décrite jusqu’ici.
"Je n'oppose pas la peinture abstraite a la peinture figurative. Une peinture devrait être a la fois abstraite et figurative. Abstraite en tant que mur, figurative en tant que représentation d'un espace". On s’approchera de sa signification en réécoutant cette phrase d’Anne Slacik: "Et puis, il y a ce rapport avec la surface, une surface relativement grande par rapport à ma propre taille, qui me donne l’impression d’être entourée par elle". Le corps au travail n’est pas devant la toile, il se tient dans l’espace de la peinture et, s’y tenant, il s’insère dans sa continuité. D’où, parfois, devant ces toiles, le sentiment que leur fluidité remarquable contient pourtant le fantôme d’une chose interne, d’une chose organique qui précise sa présence à partir d’une petite opacité dont le regard s’éprend. La quatrième feuille a pris place. Elle est d’un format double mais reçoit d’abord le même traitement: couche d’eau sur toute la surface, jus rouge. La réaction est différente: une brillance générale puis, très vite, des zones sèches. Nouveau jus, cette fois brun-rouge, puis giclures noires et pourpres. Le papier absorbe tout cela comme un buvard. Ajout d’eau, secousses, rien n’y fait, c’est finalement sans importance car le rouge et le noir forment un large signe horizontal, qui se suffit. La cinquième feuille est tout de suite rose, violet, jaune, ces trois couleurs en flaques qui gonflent et débordent. Un filet sort du jaune, frôle le rose, emporte le bord du violet, d’où une couleur nouvelle, vaguement orange, sur l’une des rives, et parcourue de filaments sombres dans l’avancée de sa coulure. Un apport de brun fait un lac ténébreux vers le haut: un lac qui sort bientôt de son bassin par trois coulées. La quatrième feuille, entre-temps, s’est verticalisée, vertébralisée avec, autour de cet empilement central, des taches qui s’équilibrent. Les mains sont à présent gantées de couleur. Les gestes restent brefs, mesurés, utiles: ils posent, ils étendent. Un doigt se détache de la main pour gratter une flaque, y ouvrir une brèche à travers qui la couleur se répand. On sent une vigilance, une attention, et on leur prêterait volontiers une influence. La posture la plus courante est debout devant la base du dessin avec autour du corps un halo de silence. La tête, souvent, s’incline, pensive. Les mains dans ce cas se tiennent sur les hanches. Mais du rouge éclabousse tout cela d’autant qu’une giclée d’eau provoque des expansions, des coulures et même une ébullition vite calmée par un nouvel apport de rouge. Le coin droit de la feuille est pincé entre deux doigts, soulevé, agité doucement par petites secousses, puis reposé. Un doigt va de l’avant à travers le rouge, atteint le violet, revient en tirant derrière lui une traînée bleue, mais oui,bleue ! Là-dessus, un brusque coup de noir modifie l’ensemble. On dirait que tout fait soudain corolle à ce noir, étrange cœur plein de lumière sombre. Un peu plus tard, une tourmente violet-noir installe un tourbillon. La fluidité grandit à mesure que la surface sèche et donc se fixe. On voit progressivement monter un débordement immobile.
Bibliographies et expositions:
- Vincent Gille, "Anne Slacik, la bohème est au bord de la mer"
- Jean Paul, "Sur les bords du canal: entretien avec Anne Slacik"
- Serge Bonnery, "Écriture de l’image, images de l’écriture"
- Brigitte Aubonnet, "Anne Slacik, la magicienne"
- Sylvie Fabre, "Anne Slacik, la sourcière"
- Bernard Noël, "Anne Slacik ou la fluidité"
- Virginie Dorofeyeva, "Anne Slacik ou la liberté"
- Jacques Ancet, "Un léger retard"
- Joseph Guglielmi, "Carnets de nul retour"
- Christian Skimao, "Impressions soleil couchant"
- Claude Royet-Journoud, "Deux de chute"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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Un texte reçu par une femme que j'ai rencontrée, les précédents échanges écrits m'avait montré sa qualité d'écriture, je lui est donc demandé de me raconter notre rencontre, en première partie son premier essai, en deuxième partie le complément suite à mes réactions à son écrit.
Elle se reconnaitra peut être ici!
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Je ne sais pas si tu préfères que je te vouvoie ou tutoie, j’emploierais donc la formule qui me vient le plus naturellement. Tu rectifieras ou non.
Voici comme promis le récit de notre rendez-vous d’hier.
En premier lieu, je voudrais te/vous dire que j’ai apprécié ton respect et ta gentillesse : le fait que tu n’aies pas oublié mon heure d’arrivée exacte à la gare, que tu me préviennes par sms de ta présence sur place, que tu m’attendes dans la gare et non pas à ton véhicule, que tu me mettes toi-même le casque, que tu m’ouvres la porte, que tu m’embrasses dehors…Toutes ces petites attentions auxquelles je suis très sensible et qui ont contribué à rendre cette après-midi très agréable à vivre en ta compagnie.
Lorsque je rentre chez toi, je suis un peu inquiète mais quelque chose dans la décoration de la maison me rassure. Un petit côté vieillot peut-être…:)
Je te sentais pas loin derrière moi et je me demandais à quel moment tu allais me toucher. Tu as enfin posé tes mains sur moi et dès le début j’ai adoré ce contact. Ta corpulence me rassure. En même temps que le plaisir de sentir tes mains sur mon corps, me masser, me caresser, m’écraser, la douleur sur mes seins que j’ai supporté je me demande encore comment.
Puis lorsque tu nous a tourné vers la glace afin de vérifier notre harmonie, je n’ai pas eu peur de mon reflet, je n’ai pas été dégoûtée non plus comme la plupart du temps lorsque je me regarde. Je nous ais trouvé « raccort » tous les deux. J’ai aimé la façon dont tu m’as déshabillée, peu à peu, tout en continuant de me malmener et de me toucher.
Le fait que je n’ai le droit de rien faire, sinon te laisser faire est quelque chose de vraiment très agréable, de très sensuel et en même temps cela m’a fait ressentir totalement ta domination.
Tu m’as posé un bandeau, tu m’as demandé de finir de me déshabiller, tu m’as mis des pinces sur les tétons, puis tu m’as fait poser les deux mains sur la table, en position la « croupe » offerte.
Tu m’as laissé ainsi pendant que tu allais fermer les volets et nous préparer un café que tu m’as fait boire les yeux bandés.
Ensuite tu m’as assené quelques claques bien senties sur les fesses, m’a pincé les seins de plus en plus fortement, cherchant à explorer mes limites de douleur.
J’ai passé le premier test…
Alors tu es passé aux cordes, tu as créé un soutien gorge autour de mes seins, puis tu as contraint légèrement mes bras. Tout en continuant à manier les douceurs et les douleurs, tu m’as fait allonger, tu as lié mes pieds en tailleurs, m’as bloquée pliée en deux dans cette position, puis tu as usé tant et plus de mon clitoris, de mon vagin avec douceur et force, pendant ce qu’il m’a semblé être des heures.
Même si je n’ai pas réussi à trouver le chemin de la jouissance (je t’avais dis que j’étais assez longue), j’ai pris beaucoup de plaisir à ces manipulations (même si ce matin, c’est un peu douloureux) et je regrette de ne pas avoir pu t’offrir cette jouissance que tu as tant cherché à me donner.
Puis le moment est venu de décompresser et nus tous les deux sur le tapis, nous nous sommes touchés, caressés.
J’ai adoré ce moment de détente, de câlins, de caresses, de baisers. J’aurais aimé jouer un peu plus avec ta queue, il me semble que tu avais l’air d’aimer le peu de contact que j’ai eu avec elle…
Puis l’alarme a sonné la fin de notre jeu.
Pour autant, il a continué pour mon plus grand plaisir sous la douche et j’ai vu que tu maniais le jet avec dextérité…
Je n’ai pas résisté, j’ai joui sous la pression de l’eau sur mon clitoris, merci ! Ce fut vraiment très très agréable.
J’ai apprécié le fait que nous nous lavions mutuellement, que nous passions tout ce temps sous la douche… Cela fait vraiment parti des plaisirs des « post-liminaires » qui font
toute la différence entre une relation basique de cul et une relation de respect et d’attention.
Tu es resté le même avant et après. C’est un truc que j’ai adoré.
Tu as gardé ce respect de ma personne, ces attentions touchantes et pour cela, je te remercie mille fois.
Tu n’as pas eu peur de m’embrasser en public, d’être tendre même une fois nos ébats terminés…
tu est quelqu’un de bien et j’espère que tu nous allons continuer à cheminer ensemble quelques temps.
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Lui : « Je m’attendais à un mail plus personnel, il partait bien ensuite cela devient un comte rendu. »
Elle :
« IL est vrai que le passage avec les cordes est assez neutre.
Mais je pense que mes sensations à ce moment précis sont mélangées : la peur de me laisser aller, de te laisser le contrôle, sans compter le fait que je n’ai pas joui et que j’avais peur que tu
le prennes mal.
Je me souviens des gouttes de sueur qui perlaient de ton front sur mon visage, de ton corps trempé par l’effort, de ta volonté de me faire du bien, de tes yeux centrés sur mon regard, attentif à mes signes corporels…
C’est rare que l’on s’occupe de moi avec autant d’attention et de vouloir que cela m’a mis la pression.
J’avais très envie de te faire honneur en t’offrant ce plaisir que tu voulais me faire atteindre de toutes tes forces. Et je n’ai pas réussi.
En fait j’avais peur que tu prennes cela pour un échec alors que pour moi, le plaisir de ces instants valent mille jouissances.
Le passage où tu poses le plateau sur mon dos comme si j’étais un meuble est aussi passé à la trappe.
En fait, je ne m’en suis souvenue que bien plus tard.
Je pense que c’est parce que c’est la chose la plus humiliante que tu m’ais fait faire cet après-midi là.
J’aime que tu attendes le meilleurs de moi-même. Cela m’oblige à rester vigilante ».
—————————-
Lui : « J’avais remarqué le passage du café, alors que je l’avais trouvé assez fort. Peux tu essayer de le détailler un peu plus?
La sueur est toujours assez présente et j’essaie de gérer les gouttes, mais pas toujours.
Il n’y a pas de sentiment d’échec de ma part, car j’aime aussi beaucoup le plaisir, mais je ne voulais pas que tu regrettes de na pas avoir joui.
J’essaie de sentir, de chercher à aller au bout de toi. J’aime aussi surprendre, dérouter. Peux tu me faire un récit ou ses divers sentiment sont exprimés s’ils existent et ce qu’ils ont entrainé comme ressenti.
Pour moi la domination est bien s’occuper à 100% de la soumise, ce n’est pas le cas pour tout le monde? »
Elle :
« Le passage du café….
J’ai été très surprise lorsque tu as posé le plateau sur mon dos. D’ailleurs je n’ai pas compris tout de suite ce qu’il en était.
Ce n’est que lorsque tu as pris ta tasse et que je t’ai entendu boire que j’ai su que j’étais en train de te servir de meuble. Je me suis vraiment sentie ridicule mais en même temps je savais que je ne bougerais pas d’un poil de la position humiliante dans laquelle tu m’avais mise, c’était un défi que je devais relever si je voulais te garder.
Heureusement, cela n’a pas duré longtemps…:)
Lorsqu’enfin tu as posé l’ensemble devant moi afin que je me serve avec les yeux bandés, j’ai trouvé que l’enjeu devenait plus sensuel. Cela m’a fait penser (je ne sais pas pourquoi) aux geishas et à l’art du thé… En fait, les actes les plus communs deviennent vite compliqués avec un bandeau et cela révèle encore le côté soumission car on devient vulnérable, dépendant de celui qui veille.
Tes attouchements pendant que je buvais le café avaient plus de saveur encore et je me demandais à chaque instant si j’allais renverser et ce que tu me ferais si je renversais…C’était excitant.
Ta sueur ne m’a pas dérangé. Elle m’a culpabilisé…Tu suais pour me faire plaisir et je n’étais pas capable de te donner ce que tu souhaitais.
La première surprise fut lorsque tu m’as posé toi-même le casque de moto et me l’a attaché. je me suis sentie démunie et étrangement heureuse. Je me suis alors demandé si dès l’entrée de ta maison, tu allais me priver de toute liberté de mouvement afin de me faire ressentir au plus profond de moi ton absolue domination.
Ce qui fut plus ou moins le cas puisque tu as guidé chacun de mes
gestes par la suite.
La seconde surprise fut lorsque tu t’es mis à me pincer les seins si fort dès le début. Je ne m’attendais pas à ce que tu me fasses aussi mal d’entrée de jeu et je suis la première surprise à avoir résisté à l’envie de t’arrêter. Mais je savais, j’étais persuadée que si je tentais quoi que ce soit, la douleur suivante serait encore plus forte. Pour cette raison, j’ai apprécié que tu me félicites (je suis plutôt douillette).
Le passage du café fut pour la première partie, une vraie humiliation à laquelle je ne m’attendais pas non plus et pour la seconde partie, une découverte dans la sensualité. Ce fut quelque chose de déroutant, oui…mais diablement bon !
La façon de m’attacher en tailleur était en soi humiliante (j’ai adoré !) Tu as d’ailleurs pu constater mon manque de souplesse (seconde humiliation)…
Et je n’ai pas oublié la phrase que tu m’as dite au moment où tu me frappais sur les grandes lèvres : -« plus tu as mal, plus tu dois t’offrir (ou t’ouvrir, je ne sais plus) ». Cette phrase m’a marqué car je me suis rendue compte de tout le chemin que j’avais encore à parcourir….
Je suis surprise que mon anus n’ait pas fait les frais de tes recherches approfondies voire même légèrement frustrée car à plusieurs reprises tu as fait mine de t’en approcher sans aller plus loin. Mais peut-être était-ce voulu ?
A vrai dire, nous n’avons pas abordé le sujet de la sodomie et des ses effets secondaires quelquefois pas agréables du tout…hum…
Surprise aussi par ton obstination à vouloir me faire jouir (mais je te l’ai déjà dis). Là où d’autres hommes auraient laissé tomber en moins de dix minutes, tu a passé un temps incroyable à essayer de me faire jouir et jusqu’au bout ! Jusque sous la douche !
Tu ne te rends pas compte que c’est extrêmement rare chez un amant « vanille » et peut-être même chez un dom (je n’ai pas assez d’expérience en la matière).
Surprise par ton regard qui guettait le mien. Que cherchais-tu ? Que voyais-tu ? Que voulais-tu voir ?
C’était à la fois gênant et…romantique ? J’aurais aimé que tu m’empêche de fermer les yeux, que même tu m’empêches de jouir. Peut-être alors la pression serait-elle descendu
et l’instinct de contradiction, m’aurait poussé à te désobéir et à prendre mon pied tout en te regardant dans les yeux…comme une vilaine fille que je suis…:)
J’ai été étonnée aussi que tu me laisses te toucher le pénis car tu avais sous-entendu que tu ne m’en laisserais pas l’usage. Du coup, je ne savais pas vraiment si je devais le toucher ou non.
Mais tu avais l’air d’apprécier et je regrette maintenant de ne t’avoir pas excité sous la douche avec ma bouche…
Mais là encore, le temps ne nous permettait plus guère de continuer.
Le coup du jet m’a tout simplement épaté !
Sais-tu que tu es le premier homme qui m’ait fait jouir de cette façon ? J’ai trouvé ça tout simplement fabuleux ! Par contre, je ne pensais pas que ce serait aussi douloureux sur la pointe des seins…
Je suis aussi très très surprise de constater à quel point la douleur me fait mouiller.
Je ne me trompe pas n’est-ce pas ? tu l’as bien remarqué toi-même ? Il me semble que dès que j’étais un peu sèche, tu me pinçais les seins pour me faire mouiller.
Il y a quelque fois aussi où tu provoquais la douleur en appuyant d’une certaine façon à l’intérieur de mon vagin, mais je crois que là aussi, j’aimais cela.
Surprise aussi lorsque tu appuyais sur ma vessie tout en m’investissant le vagin. Ces deux attouchements réunis augmentaient le plaisir, c’était plutôt
fort comme sensation. En même temps très agréable et flippant (la peur de me lâcher car j’avais une petite envie de faire pipi).
Voilà, je pense que c’est assez complet ? Qu’en penses-tu ?
Manque-t-il quelque chose dont tu aurais aimé que je te parle ?
C’est fort possible, je pense qu’au bout d’un certain temps, mon
cerveau a pu mélanger des choses, ou en oublier…
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Peut être une suite
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Quand je m'assieds, je vois que Sarah et Ruppert ont leur téléphone en main. Ils m'ont sûrement photographiée ou même filmée. Summer me dit :
— Tu peux te servir un verre.
Il ne reste plus qu'une bouteille de whisky. Ils ont bien picolé pour fêter le trésor. C'est vrai qu'on a trouvé un trésor... Plus exactement, mes amants ont trouvé un trésor. Je bois un peu de whisky. Boy 1 et Boy 2 viennent se coucher près de moi.
On rentre tous, moi portant le sac, toujours aussi lourd, et le frigo devenu beaucoup plus léger... Les chiens me servent de gardes du corps, Boy 1 à gauche, Boy 2 à droite. Je me sens en sécurité, c'est rare.
Je suis sûre qu'ils m'aideraient à porter, s'ils le pouvaient. Quand on arrive devant la maison, Monsieur Sam dit à Ruppert :
— Je vais demander qu'on vienne me chercher chez vous, je passerai la nuit dans un hôtel.
— Vous pouvez passer la nuit, ici. Quand les patrons viennent, ils me préviennent une semaine à l'avance.
— D'accord, avec plaisir.
Ruppert se tourne vers nous en disant :
— Vous aussi, bien sûr.
Cool... Il prend un boîtier pour désamorcer l'alarme. On entre... L'intérieur de la maison me fait penser à ma maison de LA. Ruppert nous dit :
— Les chambres sont au premier, vous pouvez choisir celle qui vous plaît.
Summer lui demande :
— On peut se doucher ?
— Bien sûr...
Elle me regarde en disant :
— Tu laveras aussi ta robe, elle sent le chien.
— Mais je n'ai rien d'autre à me mettre.
— Tant pis, tu resteras comme une esclave.
Monsieur Sam, qui a entendu, lui dit :
— Toi aussi Summer, tu es une esclave pendant deux mois et demi.
— Oui, Monsieur.
C'est vrai... sauf qu'on ne sera pas traitées de la même façon !
On va voir les chambres, Monsieur Sam et Sarah choisissent la plus belle. Je suis sûre qu'ils couchent ensemble. Bah, il n'a jamais que 40 ans de plus qu'elle. On se douche puis Summer me dit :
— Lave mes vêtements aussi. Demande à Ruppert où est la machine à laver.
Je descends, nue... Ruppert est assis dans un fauteuil et regarde la télé une bière à la main. Ils picolent pas mal, ici. Il est surpris de me voir aussi nue que le serpent dans le jardin d'Eden. Il faut bien varier les comparaisons. Je lui dis :
— Pardon de vous déranger, Monsieur, mais Mademoiselle Summer m'a demandé de laver nos vêtements. Est-ce qu'il y a une machine, ici ?
Il tend la main vers moi... En clair, ça veut dire : sois gentille, si tu ne veux pas faire la lessive à la main.
Je m'approche jusqu'à ce qu'il ait ma chatte toute lisse à 3 centimètres de son nez. Il me caresse les fesses... Voilà, il est content. Ouf, il ne veut pas plus ! Il me montre la buanderie et la machine à laver et m'aide pour le programme. Quand je reviens dans la pièce de séjour, ils y sont tous. J'aime me montrer nue, sauf à mes ennemis... Sarah est à moitié couchée sur un divan, ses pieds sur les cuisses de Monsieur Sam. Elle me dit :
— Ta maîtresse a oublié de remettre ton collier d'esclave, Ashley.
— Je ne suis plus une esclave, Mademoiselle.
— Sérieux ?
Elle lève son pied et caresse la joue de Monsieur Sam en disant :
— Tu l'as affranchie, chéri ?
— Non.
Elle me regarde et dit :
— Tu as menti, alors...
Oh non ! Toute honte bue, jolie expression, je vais me mettre à genoux devant elle et je lui dis :
— Pardon... je n'ai pas lu le contrat que j'ai signé, Mademoiselle.
— Voilà comment je te veux : humble et repentante... mais tu as menti.
— Oui Mademoiselle.
Heureusement, Ruppert m'appelle depuis la cuisine. Sarah me dit :
— Vas-y.
Je vais vite rejoindre Ruppert. Il me dit :
— Penche-toi, tu m'excites trop.
Oh non, ma chatte qui est toute propre ! Il s'enfonce en moi. Aïe !! Je ne suis pas prête du tout... Comme on disait aux WAC (Women's Army Corps) pendant la guerre de 40 « Si vous ne pouvez pas échapper au viol, relax and enjoy it ». Il a vraiment une grosse envie et jouit rapidement... Pfff... Je n'ai même pas eu le temps "d'enjoy it". Dès qu'il s'est retiré, je lui dis :
— Je vais faire pipi et je reviens.
Quand c'est fait, je retourne près de lui et il me dit ce que je dois faire, comme mettre la table pendant qu'il cherche dans les provisions. Il n'est que sept heures du soir, mais on mange tous avec appétit après cette grosse journée. Je suis même acceptée à table. Sarah me laisse tranquille depuis que j'ai fait acte de soumission. On mange du caviar sur des biscottes, j'adore... Puis des pâtés délicieux et on termine avec des glaces. À la fin du repas, Monsieur Sam nous dit :
— Demain, on se lève à 5 h et on commence à déterrer les trésors. Nous serons rejoints par le fils et la fille de Monsieur Ruppert, ainsi que par Martha, Dean, Jo et Thomas. Le soir, je partirai avec une première cargaison. Bonne nuit.
On répond tous :
— Bonne nuit Monsieur Sam.
On regarde un vieux film et on va se coucher assez tôt. Summer me laisse me coller à elle dans le lit... J'adore avoir sa peau contre la mienne. Ayant eu une dure journée, je m'endors rapidement.
***
Le lendemain, debout à 5 h... C'est tôt. On se lave les dents. D'accord, c'est sommaire comme toilette. Nos vêtements sont secs. On est les premières en bas. Summer m'aide à faire le café. La femme de Ruppert arrive avec sa fille et le reste de l'équipe, Mathilda et les hommes. Ils apportent de grands cartons de pâtisseries.
Monsieur Sam et Sarah nous rejoignent en bas, Ruppert aussi. On mange, on boit du café. Bien sûr, la fille de Ruppert et Sarah me traitent comme si j'étais la bonne.
À 6 h 15, on part vers les marais. Je n'ai pas trop parlé des moustiques, mais à tour de rôle, on se donne des claques pour en écraser. Tout le monde porte quelque chose, sauf Monsieur Sam. Je n'ai pas un truc trop lourd. On a des détecteurs, des pelles, des sacs de jute, du papier, de l'eau, des biscuits.
Et puis, il y a mes soupirants Boy 1 et Boy 2. Sarah raconte ce qui s'est passé hier... Martha lui dit :
— J'adorerais voir ça.
Les autres sont d'accord, moi pas, mais est ce que mon avis compte ? D'un autre côté, les chiens sont très gentils avec moi, je suis sûre qu'ils me protégeraient.
Arrivés sur place, les hommes de notre équipe délimitent un périmètre dans lequel les détecteurs sonnent... Ensuite, on décape le sol jusqu'à arriver aux débris des coffres. Bientôt, on plonge nos mains dans les monnaies, les bijoux, les sculptures en or... On met les monnaies dans les sacs, en vrac, on emballe les bijoux et les objets précolombiens en or dans du papier. Je ne vais pas me plaindre que la mariée est trop belle, mais ce ne sont pas vraiment des fouilles : il n'y a qu'à se servir... et puis, je ne pourrai pas en profiter. Ou alors indirectement, grâce à Summer. Les chiens sont excités de voir plein de gens creuser des trous. Ils essayent de jouer avec moi... jouer et même plus, car entre nous trois, il y a des affinités...
Ce qui prend le plus de temps, c'est emballer les objets. Au milieu de l'après-midi, Monsieur Sam nous dit :
— On va faire un break, boire et manger un peu.
On s'assied en rond comme des scouts, il ne manque que le feu et la guimauve à faire griller sur les flammes. C'est évidemment moi qui fais le service. Les chiens me tournent autour, je les soupçonne même d'essayer de me faire tomber. Là, j'entends ce que j'appréhende depuis le début : Sarah qui me dit :
— Montre comme tu joues bien avec les chiens, Ashley.
— Mais ils ne veulent pas jouer, ils veulent me monter, Mademoiselle !
— Tu n'as pas arrêté de les allumer.
C'est faux ! Sale garce ! Elle ajoute :
— C'est pas vrai ?
— Si, Mademoiselle.
Pfff... après avoir retroussé ma jupe, je me mets à quatre pattes et... voir plus haut pour ce qui m'arrive.
Quatre orgasmes plus tard, deux pour moi et un pour chaque chien, je me retrouve les jambes tremblantes et la chatte plus mouillée qu'un orage tropical. On m'applaudit. Mouais... Je vais me mettre près de Summer pour manger et boire, moi aussi. On a à peine fini qu'il faut continuer à emballer des objets et remplir des sacs d'or... Ah, si c'était pour Summer et moi !
À suivre.
Un grand merci à Bruce Morgan pour le super dessin.
Nos 8 livres illustrés par Bruce Morgan sont ici.
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Son récit (mardi 31 juillet 2018 14:43) : Récit de ma S..... cadeau de vacances aout 18
RECIT De Ma S...... cadeau de Vacances ..............
Nous nous retrouvons pour un moment de plaisir avant les vacances. Mon maître nous trouve un endroit tranquille entre une forêt et un champ. Il ouvre le coffre de son breack. Je le suce pendant qu'il malaxe mes seins et pince mes tėtons. Il descend sa main et glisse ses doigts entre mes petites lèvres, je suis déjà bien trempée. Je continue de le sucer et lui fait quelque gorge profonde.
..
Je m'allonge dans le coffre de sa voiture. Le maître se place au dessus de moi puis il me pénètre. Il fait des vas et viens et s'enfonce au plus profond de moi pour que je puisse jouir. Il continue les coups de reins puis se renfonce au fond de mon vagin, je jouis 8 fois. Je plante mes ongles dans son dos à chaque jouissance tellement le plaisir est intense.
..
Il se retire de moi puis sors un flacon d'huile de massage, je comprends de suite ce qu'il m'attend. Mon maître pense vraiment à tout. Il met de l'huile sur sa main puis il enfonce tous ses doigts en moi. Il me pilonne le vagin. Sa main tout entière s'enfonce en moi. Ce que je ressens à ce moment-là est indescriptible. Mon maître me possède. Il tourne légèrement sa main vers la droite et vers la gauche. Il se retire avec douceur et y replonge sa main. Il fait des vas et viens, les sensations sont extrêmes. Il retire sa main. Je n'ai même pas le temps de reprendre mes esprits que sa queue a déjà remplacé sa main. Il me fait jouir à nouveau plusieurs fois. Certaines jouissances sont procurées par sa queue au fond de moi et de ses doigts qui pince mon téton droit.
..
Le maître se retire de mon vagin pour s'enfoncer dans mon petit trou. Il fait des vas et viens puis donne des coups de reins bien plus fort, il s'enfonce au plus profond, je jouis deux fois puis il jouit à son tour en déversant son nectar chaud dans mon petit cul.
Merci maître pour ce moment de plaisir. Passe de très belles vacances
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L'autre ne se fit pas prier, et la projeta dans le rectangle d'un mètre sur trois tête la première. Il n'y avait que soixante centimètres d'eau, mais totalement surprise, Laura commença par boire la tasse avant de tenter de sortir sa tête de l'eau. Menottée dans le dos, ce n'était pas si facile ! Elle pédala dans l'eau jusqu'à appuyer sa tête au muret, et par des mouvements de frottement arriva à sortir son menton pour respirer. Alors de ses mains calleuses, Alfonso lui frotta le visage avec de l'eau, arrangea grossièrement ses cheveux, et la tira hors de la flotte. Tout le monde riait aux éclats devant le spectacle de la fille dans ses habits trempés, et Robeco le premier :
- C'est-y pas mieux comme ça ? C'est dégeulasse une fille qui pue...
Et les rires de repartir de plus belle. Mais dans l'aventure, Laura n'avait pas eu le temps de se désaltérer. Comme elle se souvenait de la leçon, c'est humblement qu'elle se tourna vers lui :
- Señor Robeco, s'il vous plaît, j'ai encore soif...
- Encore soif ! Vous entendez ça, les gars ? (risées...) Eh bien vas-y, ne te gêne pas.
Elle fléchit les jambes pour appuyer son torse sur la margelle, et pencha la tête jusqu'à ce que ses lèvres effleurent la surface de l'eau qu'elle commença à aspirer avec délices.
- Pompe bien, ma grande, parce qu'il n'y aura pas d'arrêt-buffet, dit Robeco. Surtout que pomper... il paraît que tu es experte ! (esclaffements redoublés...)
Laura se releva et se tint debout au milieu d'une flaque d'eau qui commençait à s'élargir. Elle n'avait jamais été aussi humiliée de sa vie, et elle commençait à avoir froid dans ses vêtements trempés : s'ils mettaient la clim' dans la voiture, ce serait la pneumonie assurée...
- Assez perdu de temps, on y va, ordonna Robeco en défaisant une menotte pour ramener ses mains devant elle et la réentraver immédiatement.
- S'il vous plaît, ôtez-moi les menottes, implora Laura d'une voix plaintive. Je n'ai aucune intention de m'enfuir : je dormirai sagement à l'arrière de la voiture. Je ne demande qu'à m'entretenir au plus vite avec Juan Ortiz pour m'expliquer.
- Mais tu en auras bientôt tout le loisir, répondit Robeco en allant chercher la pelle sur le toit de la 4x4.
Il la prit à deux mains près de son extrémité, la leva haut dans les airs et l'abattit de toutes ses forces sur le bord de l'abreuvoir en béton : le manche cassa net près du fer. Il restait un bon mètre de manche de bois, que Robeco enfila à la saignée du coude droit de Laura, puis horizontalement derrière son dos, et enfin dans la saignée du coude gauche. Ainsi la chaîne des menottes était presque plaquée à son ventre.
- Mais qu'est-ce que vous faites ? Je ne tiendrai jamais dans la voiture avec ce truc-là... Ôtez-moi ça !
- Je crois que tu n'as pas très bien compris, dit Alfonso en lui nouant le bout d'une corde d'une dizaine de mètres autour de la taille. On rentre à Ciudad Real, bien sûr, mais toi... tu rentres à pied !
- Ce n'est pas possible ! s'exclama Laura abasourdie.
- Tu crois ça ? C'est bien dommage pour toi, mais les instructions du colonel
Ortiz ont été très précises...
- Mais il y a presque cent kilomètres !
- On s'en fout, on n'est pas pressé... Ortiz est parti pour deux jours à Cuba
avec el presidente, histoire de renforcer les liens. Tu crois qu'il n'a qu'une salope comme toi à s'occuper ? D'ailleurs nous, on t'emmène juste à Mariposa, une petite trentaine de kilomètres... Là, une autre équipe s'occupera de toi.
Tout en parlant, il attachait le bout libre de la corde à la boule d'amarrage du pare-choc arrière. Robeco avait déjà mis le moteur en marche. Alfonso monta côté passager et la voiture commença à avancer. Laura n'attendit pas que la corde se tende pour faire ses premiers pas : elle avait compris qu'entravée comme elle l'était, une chute serait douloureuse.
- Buen viaje... hasta la vista, lancèrent les paysans.
La longue randonnée de Laura commença. Ses vêtements trempés alourdissaient sa marche, sans parler des baskets alourdies par l'eau qui faisaient un bruit de tomate écrasée à chaque pas. Mais le pire était son périnée mal remis des sévices de la nuit. Si elle voulait garder l'allure, elle ne pouvait plus écarter les jambes pour soulager la douleur : elle dut adopter rapidement une démarche quasi normale, mais qui soumettaient les chairs tuméfiées à des frottements insupportables. Parfois ils croisaient de petits groupes de paysans allant aux champs, étonnés par le spectacle, auquel Alfonso lançait :
- Ne vous en faites pas, c'est une salope de contre-révolutionnaire qu'on emmène en promenade...
Et les paysans rigolaient. C'était des âmes simples...
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"Quel bel au-delà
est peint dans ta poussière. À travers le noyau de flammes de la terre,
à travers son écorce de pierre tu fus offert, tissage d’adieu à la mesure de l’éphémère. Papillon,
bonne nuit de tous les êtres. Les poids de la vie et de la mort s’abîment avec tes ailes sur la rose
qui se fane avec la lumière mûrie en ultime retour. Quel bel au-delà est peint dans ta poussière.
Quel signe royal dans le secret des airs". Étrange, étrange destin que celui qui fit de cette fille de famille bourgeoise juive allemande assimilée, le seul prix Nobel de littérature jamais attribué à un poète juif encore à ce jour. NellySachs (1891-1970), prix Nobel de littérature le dix décembre 1966, conjointement avec Samuel Joseph Agnon, sera allée tout près des mystères de la mort, mais comme son ami Paul Celan, elle aura osé ne pas se taire. Elle est morte le jour de l’enterrement de Paul Celan, de fatigue de vivre et de survivre. Tous deux étaient les deux grands poètes juifs de langue allemande, ceux qui témoignèrent dans la langue des bourreaux. Comme lui, elle aura alors connu une existence d’après le déluge et comme lui, elle ne pourra jamais combler la béance du désastre. Si on peut survivre à l’horreur, on ne peut survivre à sa mémoire. La petite fille rangée bien au chaud dans sa famille juive berlinoise savait-elle qu’elle serait la mère douloureuse du peuple juif parti en fumée ? Savait-on que sans Sema Lagerlöf, une des grandes œuvres poétiques de notre temps n’aurait pas été transmise ? Rien ne la prédisposait à ce cela, elle insouciante et heureuse dans une vie soyeuse et douce. Née à Berlin le dix décembre 1891, elle devra à son père grand amateur de littérature et de musique le fait d’être baigné dans les livres. De santé fragile, elle fréquentera surtout des écoles privées, ainsi à l’écart des autres. Elle écrivait aimablement, ne savait du judaïsme que ce que son milieu bourgeois et assimilé voulait bien en savoir. De toute façon on n’était alors pas comme ces juifs pauvres et incultes de l’Europe Centrale, rien ne pouvait nous arriver tant les valeurs européennes étaient les nôtres. Cela ne pouvait être. Le ciel ne pouvait alors pas tomber sur la tête d’aussi bons citoyens allemands. Mais l’histoire déroulait ses anneaux de serpent. Dès seize ans en 1907, elle écrivait donc et s’était liée d’amitié épistolaire avec Selma Lagerlöf, après la révélation du roman "La saga de Gösta Berling", l’année précédente. L’écrivain suédoise rendue mondialement célèbre par "les merveilleux voyages de Niels Olgerson" va alors se lier avec cette jeune fille romantique et exaltée. Dans la vie de Nelly Sachs se trouve aussi une zone obscure qui sera celle de son amour pour le "fiancé défunt" qui la marquera à jamais. Son premier véritable livre fut en mars 1921, à l'âge de trente ans, un recueil "Récits et douces légendes", mais ses très nombreux poèmes circulent alors dans tous les milieux littéraires allemands.
"Droit au fond de l'extrême sans jouer à cache-cache devant la douleur, je ne peux que vous chercher quand je prends le sable dans ma bouche pour goûter alors la résurrection car vous avez quitté mon deuil. Vous avez pris congé de mon amour, vous mes bien-aimés". Imprégnée de courant idéaliste, de Novalis, de mysticisme latent, sa poésie était en attente d’une véritable cause, d’un objet digne de ses élans. La mort de son père en juin 1930 la laisse enclose dans l’amour de sa mère. Puis vint la nuit nazie, ses lois antisémites, la persécution. De 1933 à 1939 elle se plonge par force et solidarité dans le monde juif. Ses écrits ne pouvant paraître que dans les revues juives, elle découvre le monde de ses coreligionnaires.Puis dès 1939 l’étau de la mort se resserre. Elle doit se terrer à Berlin, dans sa propre ville natale. Pendant trois ans cette jeune fille choyée va connaître la peur, la nuit aux aguets. Cette mort qui rôde quotidiennement, elle apprend à la connaître, à la reconnaître. Comme une grande partie des juifs allemands, elle n’avait pas vu venir, depuis 1933, la montée des périls. Prise dans la certitude de son assimilation réussie, elle ne se considérait sans doute pas comme une représentante de ce peuple dont elle ignorait la culture. Les humiliations quotidiennes, les douleurs, la souffrance, la haine aussi qui monte devant l’indifférence "des spectateurs", ses amis chrétiens, ses voisins, vont transformer son être et sa vie. Elle ne doit sa vie qu’à l’amitié de Selma Lagerlöf et peut s’enfuir en Suède de justesse le seize mai 1940 par avion, alors que les lourdes portes de fer de l’Allemagne se referment sur les juifs. Son exil durera toute sa vie, car elle demeurera toujours à Stockholm refusant de vivre en Allemagne. "Je n’ai pas de pays, écrivait-elle, et, au fond, pas non plus de langue. Rien que cette ardeur du cœur qui veut franchir toutes les frontières". Dans ce chemin de l’exil dès 1940 avec sa mère, elle retrouve l’histoire de son peuple. D’abord enfermée dans le silence, elle commence alors à reconquérir quelques paroles par l’étude de la Bible.
"Nous les rescapés dans les ossements desquels la mort tailla ses flûtes sur les tendons desquels la mort déjà frotta son archet, la musique mutilée de nos corps poursuit sa complainte". La Bible hébraïque traduite par Martin Buber en allemand, l’a totalement saisie. Alors elle s’imprègne des livres saints, Torah, Zohar, écrits des Hassidim (les sages). La langue de feu des prophètes et des patriarches l’a saisie et elle refait sa route vers le peuple d’Israël. Elle quitte les influences chrétiennes présentes dans ses premiers écrits. Son écriture change totalement, elle décide de donner une voix aux malheurs des juifs. Par solidarité, par redécouverte d’une culture enfouie, banalisée dans l’assimilation, elle devient celle qui crie vengeance et souvenir face à la haine et l’anéantissement. "Exode et métamorphose", comme le dit le titre de ses poèmes parus chez Verdier. Métamorphosée, elle peut alors à nouveau écrire, la nuit exclusivement, et témoigner dès 1943. Autant que l’histoire tragique d’un peuple, passe en filigrane l’ombre d’un homme, son fiancé, mort en camp de concentration, et dont jamais nous ne connaîtrons le nom. Elle va vivre de traductions de poésie suédoise en allemand. Mais elle écrit fiévreusement de1943 à 1945 ses premiers témoignages sur les mystères et les douleurs du peuple d’Israël. Elle est une autre, elle a une nouvelle langue poétique, elle a une voix en elle, une voix à suivre: parler pour les morts et les survivants. Parler pour son être cher. Parler pour son peuple. Ce n’est plus l’exil qui est dit, mais les drames de la Shoah. Et la nuit elle écrira. "Éclipse d’étoile", son autre grand recueil est de 1949. Elle approfondit alors sa connaissance du judaïsme et des philosophes juifs.
"Nous les rescapés, devant nous dans l'air bleu continuent de prendre les cordes nouées pour nous. Les horloges continuent de se remplir des gouttes de notre sang". Elle ne quittera plus la Suède où elle mourra le douze mai 1970, grabataire, au bout d’elle-même. Sa poésie commence à se répandre dès 1950, ses drames religieux aussi. Son recueil "Dans les demeures de la mort" est rassemblé en 1946. C’est le véritable début de son œuvre et les bluettes de sa jeunesse sont reniées. Dès 1954 mais surtout à partir de 1957, elle se lie par correspondance avec son frère d’âme, Paul Celan: "Vous lisez mes choses, ainsiai-je une terre". Pourtant ils n’ont voulu se voir que deux fois en 1960, dans une auberge et sur un quai de gare. La mort de sa mère en 1949, ses nombreux troubles dépressifs la conduisent à un nouvel exode intérieur dont elle ne peut sortir qu’en s’enfonçant encore plus profondément dans le mysticisme juif. Sa seule patrie reconnue sera celle-là. Elle se considérera "lapidée par la nuit", et voudra chercher en convoquant toute la mémoire d’un peuple à comprendre le sens de la destinée, sur le devoir absolu de fidélité aux morts, sur le droit même de pouvoir parler en leur nom, rompant le silence de la mort comme on brise du pain à partager. "Les lèvres contre la pierre de la prière, toute ma vie j’embrasserai la mort, jusqu’à ce que le chant sacré brise le dur roc de la séparation". Son écriture est fragile comme une aile de papillon, car transparente, si légère que ses mots semblent fumée, sans véritable incarnation dans le langage. Ses poèmes sont des vols d’oiseaux qui passent. Tout est intérieur, parfois obscur à notre entendement car cela vient de l’au-delà des âges. Pure, si pure sa poésie, elle coule à la surface du monde, elle passe au travers de nos doigts et va se réfugier dans nos consciences. La poésie de Nelly Sachs est désincarnée et pourtant elle implose en nous. Comme l’air et la lumière si souvent présents avec la poussière dans ses poèmes, ses paroles viennent à nous. Ces textes les plus immédiatement émotionnels sont ceux qui sont faits en mémoire des victimes du nazisme. Certes elle n’atteint pas à la grandeur sacrée de Paul Celan, son ami, mais qui peut y prétendre ? Elle fait une très grande place à la Kabbale. Le livre fondateur, le Zohar, livre des splendeurs l’accompagne à toutes les phases cruciales de sa vie. Elle revient alors au judaïsme dans les années suivant la montée du nazisme sous cette influence. Son œuvre est exemplaire. L'Académie suédoise lui décerne un très juste hommage.
"Nous les rescapés, les vers de la peur continuent de se repaître de nous. Notre astre est enterré dans la poussière". Née en Allemagne, poétesse de valeur reconnue, elle subit le sort de tous les intellectuels juifs lorsque la peste nazie eut commencé à exercer ses ravages. Elle ne dut son salut et d’être en vie aujourd’hui qu’au fait que la grande romancière suédoise Selma Lagerlöf, quoique agonisante alors, intervint auprès du Prince Eugène de Suède, lequel réussit à faire quitter l’Allemagne à Nelly Sachs et à lui permettre de se réfugier en Suède. Elle y menait une vie des plus modestes, mais elle poursuivait sans relâche son œuvre, laquelle avait acquis une nouvelle dimension et un nouveau style par suite des horreurs dont elle avait été le témoin. De l’expressionnisme, elle était passée à une poésie avant tout large,simple et humaine, dans laquelle les écrits bibliques et la Cabbale étaient sous-jacents. L’écrivain allemand Werner Weber a peut-être le mieux défini les composantes du très grand talent de Nelly Sachs: "L’art de Nelly Sachs est plein de symbole de l’époque de l’Apocalypse, mais il se place au-dessus de cette époque. Son art est plein de signes de son sort personnel, mais il dépasse ce sort de très loin". Dans une lettre à Walter D. Berendsohn, elle disait que la musique l’avait très tôt impressionnée, puis elle ajoutait: "La danse constituait ma forme d’expression, avant même la parole, mon élément le plus intérieur. Par suite de la dureté du destin qui m’a frappée, je suis passée de ce mode d’expression à un autre, à la parole". La jeune fille rencontra la parole créatrice dans les contes et les légendes, mais surtout dans les poèmes des Romantiques. À cela vinrent s’ajouter les livres des Sages juifs et des Sages de l’Orient. Elle trouva à Stockholm l’asile et une nouvelle patrie. L’expérience de la mort la mena jusqu’aux limites de la vie, et de là elle remonta au jour, avec des paroles qui servirent de maison, et pas à elle seule mais à tous ses proches. L’essentiel de l’œuvre de Nelly Sachs se trouve dans deux volumes parus chez Suhrkamp: un livre de poésies, intitulé "Fahrt ins Staublose"et un volume de poèmes scénographiques, intitulé "Zeichen im Sand". Ce dernier volume rappelle des Plaies, des plaies anciennes et modernes. Les lieux de supplice de l’antique Égypte nous sont aussi proches que les chambres de tortures et les chambres à gaz de l’Allemagne nazie. Mais le salut et la rédemption n’en sont jamais absents. La Vérité du Dieu qui s’était montré alors à son peuple, disant "Je suis Jahveh" l’éclaire. La poétesse transforma sa douleur en inspiration.
"Nous les rescapés, vous supplions: Montrez-nous lentement votre soleil. À votre pas conduisez-nous d'étoile en étoile". La langue de Nelly Sachs surgit de la version allemande des Livres de Moïse, du livre de Job, des Psaumes, des livres de lamystique juive. Il en vient le net comme le clair-obscur. Mais d’où vient le rayon lumineux ? Il vient du monde des Justes.La légende juive parle des trente-six tzadikkim: "Le monde n’est jamais sans trente-six tzadikkim qui aperçoivent tous les jours l’image divine". Ainsi, la poésie de Nelly Sachs, qui ne tait aucune destruction, aucune douleur contient, puissamment, l’image de la Reconstruction, non pas en dehors de ce monde, non pas dans un autre monde, mais, de manière aussi énergique que sensible, dans ce monde. Quand elle sombre dans ses profonds états dépressifs, surtout en 1949 après la mort de sa mère toujours alors à ses côtés, la Kabbale la console encore. Elle séjournera à plusieurs reprises en hôpital psychiatrique, en 1962 et surtout vers la fin de sa vie et à chaque fois c’est la lecture de la Bible et plus encore du Zoharet des récits hassidiques qui peut l’aider à continuer à lutter et à vivre. Les clés essentielles de son œuvre sont à trouver au travers de la tradition juive. "Tout est salut dans le secret et vit de souvenir et la mort frémit d’oubli". La poésie de Nelly Sachs a deux niveaux: celui immédiat du lecteur pris par l’émotion, celui alors plus profond qui au fait de la tradition juive, comprend comment dans le travail des mots de Nelly Sachs a prolongé dans le présent tout l’exil d’un peuple. Les mystères de sa poésie sont déduits des interprétations des commentaires hassidiques. Sable, poussière, lumière, langage, pouvoir des mots et des lettres, résurrection, constellations, irriguent ses vers. Son approche de la tradition juive se fait, comme pour beaucoup de juifs de langue allemande , au travers des récits hassidiques de Martin Buber et de sa traduction de la Bible, des écrits de Rozenzweig (traduction d’Isaïe), et enfin de la présentation de la gnose juive par Gershom Sholem.
"Laissez-nous tout bas réapprendre la vie. Sinon le chant d'un oiseau, l'eau dans le seau à la fontaine, pourraient faire se rouvrir notre douleur mal scellée et nous emporter avec l'écume". C’est ainsi par ce mélange de légendes édifiantes et de révélations des mystères que porte chaque mot, chaque voyelle, que Nelly Sachs bâtie sa conscience juive, fort éloignée des textes plus arides comme le Talmud ou autres. C’est par ce mélange de légendes édifiantes et de révélations des mystères que porte chaque mot, chaque voyelle, que Nelly Sachs bâtie sa conscience juive, fort éloignée des textes plus arides comme le Talmud ou autres. En plus de cette culture retrouvée Nelly Sachs découvrit une nouvelle façon d’écrire en allemand, une nouvelle oralité de la langue par la structure hébraïque plaquée sur l’allemand. Ce buisson ardent d’une langue si proche des origines va la brûler à jamais. Elle écrit des psaumes de la nuit qui ont une illumination prophétique. La parole est dite, clamée, prophétique, allant vers l’autre. La poésie de Nelly Sachs est un questionnement. La poésie de Nelly Sachs est un souffle. "Là où le silence parle, naissance et mort surviennent et les éléments se mêlent d’un autre mélange". Sa double démarche de quête mystique et d’amitié épistolaire très longue avec Paul Celan jalonnent alors son parcours. Paul Celan l’admirait mais ne pouvait alors souscrire à sa religiosité, car pour lui Dieu était mort à Auschwitz. Qu’importe leur chemin parallèle fut beau. En 1962 sa poésie s’infléchit profondément dans la mystique et le mystère avec son travail sur son recueil de toute la fin de sa vie "Ardentes énigmes" ou "Énigmes de feu". Elle se tend dans sa poésie vers une poésie cosmique, une religiosité cosmique également. "Je t’écris. Tu es revenu au monde grâce au pouvoir magique des lettres qui à tâtons à toucher ton être, la lumière paraît et le bout de tes doigts irradie dans la nuit".
"Image d’étoile à la naissance des ténèbres comme ces lignes. Nous vous supplions: ne nous montrez pas encore un chien qui mord. Il se pourrait, il se pourrait que nous tombions en poussière, sous vos yeux tombions en poussière". Contre la poussière, matière blême, Nelly Sachs oppose le divin de la lumière et donc l’univers des mots qu’il ne faut pas détruire avec la haine. Ses derniers textes sont empreints d’ésotérisme, ils deviennent fermés sur eux-mêmes, ramassés et obscurs. Au bout de sa route Nelly Sachs s’approchait de l’autre côté de la porte, et ne pouvait en dire les mystères que sous forme cryptée. Sa foi en l’avenir lui vient alors de ses méditations qui se déplient progressivement dans sa vie. Ardentes énigmes et déjà ce précepte: "Mystère à la frontière de la mort. Mets le doigt sur ta bouche, plus un mot, plus un mot". Les lettres de feu devenaient un pouvoir magique comme l’enseigne la Kabbale et Nelly Sachs allait vers cette obscure lumière. La mort n’était pas la mort mais la métamorphose. "Je te l’écris, tu es revenu en ce monde grâce à laforce des lettres magiques". Cela ne pouvait être la disparition dans le néant, mais une autre vie pour elle. Elle attend l’avenir, l’au-delà. Elle vit dans la résurrection, cette résurrection est sa poésie. "Et bientôt on te retrouvera dans le sable et tu seras l’hôte attendu qui vole vers les astres et tu seras consumé dans le feu des retrouvailles, silencieusement". Elle croit aussi en l’État d’Israël qu’elle veut terre de justice. "Terre d’Israël, maintenant que ton peuple, s’en revient des quatre coins du monde, pour écrire à nouveau les Psaumes de David dans ton sable, et au soir de sa moisson chanter, la parole d’accomplissement des veillées célébrantes, peut-être une nouvelle Ruth est-elle déjà là, en pauvreté tenant sacueillette, au partage des chemins de sa migration". On a dit justement que pour Nelly Sachs, "Israël n’est pas qu’un pays, l’histoire juive se fait à toute heure et les prophètes sont aussi présents que la pluie ou le vent". La mort, obstinément présente dans son œuvre, n’arrête pas la vie qui doit être "ce voyage dans la contrée sans poussière". "Dans la mort encore est célébrée la vie" est le titre d’un de ses recueils, ce titre dit sa pensée. La première strophe du poème par lequel débute la lettre que Nelly Sachs envoie le onze septembre 1958 à la famille Celan entre en résonnance avec l’eau-forte "Présence Gegenwart" que Gisèle Lestrange lui avait fait parvenir par l’intermédiaire de Lenke Rothmann.
"Qu'est-ce donc alors qui tient ensemble notre trame ? Pauvres de souffle désormais, nous dont l'âme du fond de minuit s'enfuyait vers lui bien avant qu'on ne sauve notre corps dans l'arche de l'instant". Cette "merveilleuse feuille" à laquelle la poétesse fait référence, constitue à ses yeux "un havre précieux", et peut-être lit-elle alors dans cet enchevêtrement de lignes luttant contre les ténèbres dans une sorte de course "vers", "en direction de", une illustration de la condition du survivant et du poète après Auschwitz qu’elle partage avec celui qu’elle qualifie "d’ami". À cette ligne tracée "de toi, à moi" fera écho dans la lettre du 28 octobre 1959 le méridien de la souffrance et de la consolation reliant Paris à Stockholm,mot qui sera repris une année plus tard, à Darmstadt, par Celan dans le discours qu’il prononce lors de la remise du Prix Büchner qui lui fut décerné en octobre 1960, même s’il confère au "méridien" une dimension poétologique absente chez Nelly Sachs qui désigne par ce qui est pour elle sans doute une simple métaphore le lien entre deux êtres orphelins confrontés, de par leur origine commune, à un même destin et à une résurgence de l’antisémitisme. Celan date d’ailleurs sa rencontre avec Nelly Sachs de sa lecture de deux poèmes extraits du cycle des "Chœurs après minuit" paru dans le recueil "Dans les demeures de la mort", et il cite l’intégralité du "Chœur des orphelins", faisant résonner à la fin de sa lettre l’accusation contre le monde proférée par Nelly Sachs . Stéphane Mosès évoque l’admiration profonde et sincère de Nelly Sachs pour son jeune collègue, dont elle reconnaît, dès sa première lettre datée de 1954, la qualité de poète. "Votre Livre de la Splendeur, votre "Sohar" est près de moi. Je vis dedans. Anges en lettres de cristal, transparence de l’esprit, en action maintenant dans la création, en cet instant. Certes, je demeure dehors, agenouillée sur le seuil, pleine de poussière et de larmes, mais à travers les fentes il vient à moi par la grande porte qui me conduit à la création même, voilée d’un mystère impénétrable, début de la création précédant tout début. Lorsque Dieu se retira en exil afin de créer un espace pour le monde à partir de ce retrait de lui-même en lui-même. Que chacun de vos souffles créateurs à venir soit béni qui contient la face spirituelle du monde". Si Celan remercie cordialement Nelly Sachs pour ses témoignages d’admiration, sans doute juge-t-il que le refuge que la poétesse cherche dans la mystique, et qu’elle souhaiterait lui fairepartager, la rend aveugle au monde. "Il est des pierres qui sont comme des âmes, quand toi, tu dresseras tes murs".
"Nous les rescapés, nous serrons votre main, nous reconnaissons votre œil. Mais seul l'adieu nous maintient encore ensemble, l'adieu dans la poussière nous maintient ensemble avec vous". Puis Celan prend le relais durant les mois où Nelly Sachs traverse l’enfer. Lui aussi a besoin de ses poèmes à elle, de leur présence quasi palpable: "Je t’en prie, alors recommence à écrire. Et laisse cela s’acheminer vers nos doigts", il veut la préserver de l’asphyxie, l’extraire de la nasse qui entrave sa respiration, réitérant, sur le mode du profane et de l’humain, le geste du scribe du Zohar ou celui de Beryll, l’un des trente-six serviteurs de Dieu, artisan du sauvetage de l’alphabet englouti dans les eaux du déluge. Au lendemain de la non-rencontre à Stockholm, les lettres de Celan s’espacent. Nelly Sachs ne lui en tient pas rigueur: "Ai attendu si longtemps de tes nouvelles, mais peut-être vous ai-je fait mal, à l’époque dans mon désespoir au milieu de la traversée des enfers". Cette clarté qu’il avait convoquée dans sa lettre d'août 1960, pour tenter d’arracher son amie aux mailles du filet, dans ce qui demeure sans doute le plus bel hommage jamais rendu à Nelly Sachs: "Je pense à toi Nelly, toujours,nous pensons, toujours, à toi et à ce qui est vivant à travers toi. Te rappelles-tu, lorsque nous parlions une deuxième fois de Dieu, dans notre maison qui est la tienne, celle qui t’attend, te rappelles-tu encore ce reflet d’or qui était sur le mur ? C’est toi, c’est ta proximité qui rendent de telles choses visibles. Elles ont besoin de toi au nom également de ceux dont tu te sais et te sens si proche, elles ont besoin de ton être-ici-et-parmi des êtres d’humanité. Elles auront besoin de toi encore longtemps, elles cherchent ton regard. Ce regard, envoie-le de nouveau dans ce qui est ouverture, donne-lui tes paroles vraies, tes paroles libératrices, confie-nous à ce regard, nous tes compagnons de vie, tes accompagnateurs de vie, donne-nous d’être, nous les êtres libres, les êtres les plus libres de tous, d’être les debout-avec-toi-dans-la-lumière". Nelly Sachs meurt le douze mai 1970, le jour même de l’enterrement de Paul Celan qui venait de se suicider et dont on venait enfin de retrouver le corps. Elle aura finalement capitulé devant le poids de la mémoire et de la douleur. "J’attends dans un état de grâce le jour nouveau". Nelly Sachs allume des brasiers d’énigmes, la raison ayant failli et par tout un réseau de symboles elle crée une nouvelle cosmogonie de son peuple. Ses prophéties, ses berceuses, ses messages d’ailleurs, sont sa poésie. Elle vole au-dessus du chaos du monde, une part dans la nuit, une part en pleine lumière.
Bibliographie et références:
- Martine Broda, "Nelly Sachs"
- Robert Dinesen, "Nelly Sachs"
- Mireille Gansel, "Nelly Sachs et Paul Celan"
- Claude Mouchard, "Nelly Sachs"
- Gabriele Fritsch-Vivié, "Nelly Sachs"
- Dorothee Ostmeier, "Nelly Sachs"
- Carola Opitz-Wiemers, "Nelly Sachs"
- Georges Ueberschlag, "Nelly Sachs"
- Bernard Pautrat, "Lettres de la nuit"
- Hans Hartje, "Nelly Sachs"
- Stéphane Mosès, "Paul Celan"
- Lionel Richard, "Brasier d'énigmes"
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir.
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Exposition Privée N°6 Seins.
Je ne connais rien de plus excitant que de pouvoir commencer une séance BDSM par le travail de mes deux seins !
Bien sur après la pose préalable d'un bandeau ou d'une cagoule !
Bien sur avant le travail de mes deux seins, il sera plus facile de poser une cage de chasteté, tant l'excitation du travail de mes seins me procure une réelle excitation bien facile à vérifier un peu plus bas !
En réalité, ce ne sont pas les pinces ou les baguettes chinoises, ou mêmes de grosses pompes d'aspiration qui font mal, qui sont douloureuses, mais plutôt lorsque Mon Maître les enlèvent : alors la circulation sanguine revient avec un forte augmentation de la sensibilité et donc de la douleur !
On peut garder assez longtemps les pinces ou les baguettes, il suffit juste de bien vérifier que les pointes ainsi serrées ne deviennent pas bleues !
Pour les pompes, un préalable évident est de fortement lubrifier toute la partie autour des seins qui vont être aspirés, voir même l'intérieur des pompes: cela facilitera et augmentera réellement l'aspiration qui peut devenir impressionnante !
Il m'est arrivé de devoir garder une bonne demi-heure de grosses pompes, ensuite il sera bien délicat de pouvoir dormir sur le ventre et cela pour plusieurs nuits consécutives !
Il est vrai qu'un bon massage après un travail des seins, un massage très sensuel peut soulager la douleur, voir même une belle aspiration buccale!
Dans tous les cas, il sera important de bien les laisser au repos après un intense travail.
Je ne connaissais pas cette sensualité jusqu'à ce qu'un Maître Varois m'initie bien agréablement à s'occuper de mes deux seins !
Je Vous souhaite bien sur si tel n'était pas le cas de pouvoir trouver un Maître qui saurait Vous initier à la pratique du travail des seins! En attendant, Vous pouvez toujours Vous entrainer en célibataire avec l'avantage de bien mesurer Votre capacité de résistance à cette douleur bien particulière !
Mes pinces préférées sont bien sur celles à serrage réglable qui peuvent être utilisées simultanément avec les baguettes chinoises pour en augmenter encore un plus leur efficacité !
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C'est le chant du coq qui la tira d'un sommeil profond comme les abysses, malgré sa position incommode. Un rectangle de soleil découpé par le soupirail diffusait un peu de lumière. Tout son corps était endolori comme si elle
avait été tabassée méthodiquement. Sa pommette gauche – croûtée de sperme sèché comme tout son visage - avait un peu dégonflé, mais ses poignets montraient deux traits de derme à vif. Elle glissa sa main libre entre ses cuisses pour évaluer les dégâts : les chairs avaient doublé de volume comme pour compenser leur interminable compression, et certaines zones semblaient privées de sensibilité. Sans doute certains nerfs avaient-ils été trop longtemps privés de sang. Elle aurait aimé pouvoir écarter aussi sa jambe droite, mais les menottes l'en empêchaient. Plus pour longtemps probablement, puisque bientôt elle serait ramenée à Ciudad Real, une ville civilisée, et loin de ces paysans puants : son calvaire allait prendre fin. Bien sûr, elle serait sans doute interrogée, le journal fermé ou nationalisé, et elle-même probablement assignée à résidence en attendant que les choses se tassent. A trente ans et avec son bagage, elle avait tout l'avenir devant elle. Les U.S.A. peut-être... Elle y avait des amis dans le métier, et ils avaient toujours besoin de professionnels bons connaisseurs de l'Amérique latine. Et les frontières seraient sûrement rouvertes dans peu de temps.
Le bruit de la serrure la tira des ses rêveries : Robeco et Alfonso firent leur entrée, rigolards.
- Alors, la pute capitaliste, on a bien dormi ? Mais que vois-je : le jambon est décroché... Ah oui, Pablo m'a raconté qu'il n'avait pas supporté de te voir sur cette petite chaise de mon invention : c'est un sensible ! T'as de la chance : moi je t'aurais laissée là jusqu'à ce que ta chatte et ton trou du cul ne fasse plus qu'un, et qu'on puisse y rentrer les deux poings...
- Vous n'avez aucun droit de me traiter comme ça. Vous avez ordre ne me ramener à la capitale, et pas de me torturer. Juan Ortiz sera informé de tout cela, et croyez-moi, vous le regretterez !
La baffe de Robeco réveilla la douleur de sa joue.
- Qu'est-ce tu connais des ordres, marrana ? Où tu te crois ? Dans un épisode de "Dallas" ? Je vais faire comprendre ta place, moi...
Un objet brilla dans sa main, produisant un claquement sec : un couteau à cran d'arrêt !
"Ca y est : il va me tuer" s'affola Laura en reculant autant elle pouvait avec une main et un pied, vers l'angle du cellier où elle se roula en boule. Mais Robeco s'empara simplement de l'extrémité d'un tuyau d'arrosage qu'il coupa d'environ un mètre. Se ruant sur elle, il se mis à abattre des coups de tuyau partout où il pouvait. Laura criait comme une folle tandis qu'Alfonso souriait les bras croisés. Au bout d'une minute qui parut interminable à Laura, les coups cessèrent.
- Alors t'as compris, puta, qui commande ici...? dit-il en lui tirant les cheveux pour voir son visage. Alors tu vas t'excuser poliment, et me demander pardon, tout de suite !
Laura ne bougea pas.
- Tu ne dis rien ? Alfonso, tiens là, elle n'a encore rien pris par devant... L'homme de main s'accroupi derrière Laura, pris sa main libre pour la
ramener dans son dos par un clé au bras, et cravata son cou de l'autre main. Une poussée du genou dans le dos suffit à faire saillir la poitine de Laura.
- C'est bon, tu peux y aller.
Robeco prit un peu de recul, calcula bien sa trajectoire, et balança horizontalement le tuyau sur les sommets des dômes. Le hurlement de Laura s'entendit jusqu'au bout du village.
- Celui-là, c'était pour la mise au point. Le prochain, c'est juste pour le plaisir...
Le caoutchouc flexible s'abattit presque au même endroit, provoquant un autre cri d'agonie.
- Alors ? On dirait que tu aimes vraiment ça, perra...
- Stop, arrêtez, je vous en supplie...
- Alors tu sais ce que tu as à dire... ne me fais pas attendre trop longtemps, ou
je t'éclate les mamelles, vaca !
Laura était matée. Lentement, elle prononça les mots exigés :
- Pardonnez mes paroles. C'est vous qui commandez.
- Vous "qui" ? insista-t-il en lui soulevant le menton pour la regarder droit les
yeux.
- C'est vous qui commandez, señor Robeco ...
- A la bonne heure, comme ça les choses sont claires, pas vrai ? Allez, assez
perdu de temps, faut y aller. Alfonso, détache son pied.
L'autre s'exécuta, puis aida non sans peine la chiffe molle étendue à ses pieds à se relever. Enfin il lui referma la menotte sur le poignet droit, dans le dos. Le petit groupe remonta à la lumière et sortit sur l'esplanade, mais dès ses premiers pas, Laura avait compris qu'elle aurait du mal à marcher : les chairs tuméfiées de son entrejambe ne supportaient pas le moindre frottement, ce qu'elle tentait d'éviter en adoptant une démarche curieusement balancée, les pieds écartés de soixante centimètres. Quelques peones attirés par la rumeur, et qui faisaient le pied de grue sur la plazza déserte, s'esclaffèrent devant son allure de robot mal réglé. Détournant le regard de ces imbéciles, elle reconnut la 4x4 qu'elle avait soustraite à l'organisation humanitaire garée seule à une cinquantaine de mètres, juste après l'abreuvoir communal, probablement réparée par son dénonciateur. Le véhicule était surmonté d'une galerie avec une deuxième roue de secours, des plaques à sable et une pelle : en été, on s'ensablait facilement au San Teodoros, mais en hiver, on s'embourbait ! Ses gardiens avaient sans doute reçu l'ordre de ramener aussi la voiture. En voyant le rectangle de béton plein d'eau destinée à
abreuver les animaux, Laura réalisa qu'elle était morte de soif. C'est qu'elle avait bien dû transpirer deux litres dans cette cave infâme ! Comme par une transmission de pensée, le petit édifice donna aussi une idée à Robeco:
- Tu sais que tu pues le foutre, la pisse et la sueur, ma garce ? Une petite toilette te fera du bien... Et si tu veux boire, aussi, c'est le moment, parce qu'ensuite on y va.
Il était vrai qu'après ces heures d'exercices forcés, Laura n'était plus de première fraîcheur, d'autant que pendant la nuit, elle n'avait eu d'autre choix – chevauchant sa niche - que d'uriner dans son pantalon. C'était sans doute pour cela aussi qu'une sensation de cuisson intense irradiait son périnée au moindre pas. Le soleil n'était qu'à mi-hauteur, mais sous ces latitudes, il la chauffait déjà fort sous le blouson en synthétique au sigle des World Doctors et son tee-shirt de coton. Même si la 4x4 était climatisée, quelques ablutions lui feraient du bien.
- Vas-y Alfonso, balance-là, dit Robeco.
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Bien qu'elle ne sente plus ses mains, et que ses cuisses lui semblaient gainées de plomb en fusion, son cerveau arrivait quand même à produire de brèves phases de sommeil agités de souvenirs. Son esprit divagua jusqu'au campus califormien où elle avait fait ses études de journalisme, irradiées par son premier "vrai" amant, un Français qui y était professeur de littérature comptemporaine. Dans son rêve, elle sentait ses mains sur sa poitrine, son corps, puis descendant
vers le renflement de son pubis où elles se firent plus insistantes, pesantes, pinçantes, de plus en plus vulnérantes... jusqu'à ce que sortant de sa torpeur, elle réalise que son rêve venait de fusionner avec le supplice qu'elle était en train d'endurer... Et de nouveau l'épouvantable douleur de la traction pour soulager le feu irradiant de son périnée, les dents serrées, une sueur froide inondant son visage, jusqu'à la plongée suivante dans le demi sommeil. Maintenant elle est dans la salle de rédaction de la Prensa, le journal de son père, après les heures de travail dans l'immeuble désert. C'est le moment qu'elle préfère, celui où enfin seule, juste éclairée par une faible lampe d'architecte, elle trouve les mots qui feront mouche pour alerter l'opinion sur le danger imminent de totalitarisme qui menace le pays. La pénombre aide à sa concentration : au moment précis où l'expression forte qu'elle cherchait lui vient à l'esprit, une lumière intense jaillit dans la salle de rédaction. Non, ce n'est pas la salle de rédaction : c'est la cave infâme dans laquelle elle endure son calvaire depuis trop longtemps, et où elle vient d'être tirée de son assoupissement par la lumière allumée par Pablo l'homme de main.
- Alors Princesse, on est bien installée ? Robeco m'a demandé de veiller un peu sur toi...
- Arrêtez, pitié, sortez-moi de là, je ne vous ai rien fait, hoqueta Laura.
- Pas encore, c'est vrai, répondit Pablo en pelotant sans retenue le corps offert à travers les vêtements, mais ça va venir. Je ne suis pas comme ce maricon de Robeco : j'aime les femmes, moi. Lui, sa femme, c'est Alfonso... tu te rends compte... les puercos ! Mais moi, quand j'ai un jambon comme ça pendu dans la cave, dit-il en pinçant méchamment le téton gauche de Laura, je m'en taille une tranche...
- Pitié, arrêtez ça, laissez-moi me reposer...
- C'est à voir. Mais ce serait assez risqué pour moi. Il me faudrait... comment dirais-je... une petite compensation. C'est normal, non ?
Laura restait silencieuse et haletante.
- Pas d'idée ? C'est bête, parce que vais devoir te laisser... Tu sais qu'il n'est que minuit ? A peine trois heures que tu es là... Moi, ce que j'en disais...
Et il se dirigea vers la porte. Trois heures ! Seulement ? Non, ce n'était pas possible : il semblait à Laura que son périnée était en lambeaux depuis la moitié de sa vie...
- Attendez, attendez, non, restez, ne me laissez pas !
- Ah ! j'aime mieux ça. Je suis sûr qu'on va pouvoir s'entendre... Pour commencer je vais te présenter un vieil ami, dit-il en défaisant sa braguette. Je suis certain que vous allez vous apprécier mutuellement.
Il fit quelques pas vers un tas de vieux parpaings qui traînaient, en empila deux devant l'entrée de la niche et monta dessus : son entrejambe était juste au niveau du front de Laura dont la tête pendait en avant. Il extirpa une verge à demi érigée.
- Allez, embrassez-vous, on est en famille !
Laura avait encore un peu de résistance :
- Non, pas comme ça, descendez-moi d'abord de là, et je ferai ce que vous
voudrez.
- Ta ta ta... pas question... je connais les pouffiasses de la haute dans ton
genre : elles prétendent faire une pipe, et elles font les trois quarts du boulot avec les mains ! Mais je veux voir ce que tu es capable de faire avec ta bouche seule... avec tes lèvres, ta langue, ta gorge... Je veux que tu me pompes à en avoir la sensation que tu me vides comme un poulet, c'est clair ?
Laura ne bougeait pas. Lever la tête de quelques centimètres suffisait à lui envoyer des langues de feu par tout le corps.
La baffe de Pablo la prit au dépourvu, et l'onde de choc fit exploser un paroxysme de douleur aux endroits les plus sensibles.
- Alors salope, tu te décides ?
Vaincue, Laura leva lentement la tête, et la verge de son tourmenteur balaya successivement son front, son nez, avant de s'immobiliser devant ses lèvres, qu'elle entrouvrit pour happer le prépuce fétide. Assurément, l'hygiène n'était pas une préocupation pour Pablo. Du fait de l'érection débutante, ses lèvres eurent du mal à décalotter le gland, jusqu'à découvrir le sillon cerné de smegma. Elle se retint difficilement de vomir... Puis, décidée à en finir le plus vite possible, elle prit une cadence accélérée en essayant d'oublier la douleur que chaque coup de piston réveillait dans son cou.
- Oh là, pas si vite, ma grande, on a tout notre temps, dit-il en la prenant aux oreilles pour lui inculquer le lent tempo qu'il souhaitait.
Laura obtempéra et commença à pomper régulièrement. Le temps passait mais Pablo semblait inusable... Il reprit.
- Tu sais, j'étais tellement excité à l'idée de venir te voir... j'avais peur que ça aille trop vite. Alors je me suis masturbé avant de descendre... comme ça, on reste plus longtemps ensemble ! Tiens, regarde, c'est pas des blagues...
Il sortit de sa poche un petit sac en plastic grossièrement noué, qu'il ouvrit pour en montrer le contenu gluant à Laura.
- Tu vois l'effet que tu me fait : il ne m'a pas fallu deux minutes ! Tiens, c'est pour toi, dit-il en étalant la matière visqueuse sur le visage de Laura. Allez, continue...
Cela n'en finissait plus. Laura était dans un état second, glacée par endroits, brûlante à d'autres, tout les muscles noués comme des cordes, la sueur dégoulinant de son visage et se mêlant au sperme de son bourreau.
A un moment, le sadisme de Pablo lui inspira l'idée de reculer un peu son marchepied improvisé, pour forcer Laura à avancer la tête, et lui parler comme à un chien.
- Venga, venga perrita !
Bien sûr, il savait qu'en obligeant la fille à se pencher en avant pour engouffrer son pénis, il la forçait aussi à écraser une région clitoridienne qu'elle
avait jusqu'à présent réussi à épargner relativement. Mais oedématiée et gorgée de sang à cause de la compression voisine, la zone était ultra-sensible... Enfin au bout d'un temps qui sembla interminable à Laura, il gicla faiblement au fond de sa gorge. C'était fini... enfin ! Pablo descendit de ses parpaings et se rajusta.
- Alors, comment tu as trouvé ? C'était bon, non ?
Elle n'avait plus la force de répondre. Bon prince, l'homme défit la menotte gauche, Laura s'effondrant comme une marionnette dont on aurait coupé les fils. Il la rattrappa juste à temps pour ne pas qu'elle se blesse, et la posa au sol. Puis il referma la menotte libre sur son pied droit, et sortit de la pièce. Malgré cette position croisée peu confortable, Laura s'endormit presque instantanément.
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Me présenter avec humilité, nu, à genoux, lesté de ma cage de chasteté, devant ma Maîtresse, en me prosternant à ses pieds avec des accents de soumission.
Subir humblement et en silence ses insultes et termes de mépris sur ma personne, mon physique, ma race, et m'humilier en abondant dans son sens.
Puis attendre ses ordres et les exécuter docilement, en esclave soumis à tous ses désirs.
Vénérer son corps avec déférence et en satisfaire de toutes les façons, les parties qu'il lui plaira de me faire honorer.
Lui abandonner servilement le mien, qu'elle utilisera à sa guise pour tout désir ou fantaisie de son choix.
Me soumettre de plein gré aux punitions qu'il lui plaira de m'infliger, puis l'en remercier de corriger mes fautes et de parfaire ainsi mon éducation.
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